17/10/2018 tlaxcala-int.org  4 min #147106

Un an après son meurtre, où est la justice pour Daphne Caruana Galizia ?

 Margaret Atwood

La journaliste maltaise dénonçait la corruption du gouvernement, mais aucun homme politique n'a été interrogé au sujet de son assassinat, écrit Margaret Atwood, romancière et écrivaine, au nom de PEN International.

Aujourd'hui, un an s'est écoulé depuis l'assassinat brutal de Daphne Caruana Galizia, la principale journaliste d'investigation et militante anticorruption de Malte. Le 16 octobre 2017, à 15 heures, alors qu'elle s'éloignait de sa maison familiale, une bombe placée sous sa voiture a explosé. Elle avait 53 ans. Les derniers mots qu'elle a écrits étaient : "Il y a des escrocs partout, la situation est désespérée."

Douze mois plus tard, la justice pour son meurtre reste insaisissable. L'affaire est au point mort et l'indépendance, l'impartialité et l'efficacité de l'enquête des autorités maltaises suscitent de vives inquiétudes. Malgré ses reportages sur la corruption aux plus hauts niveaux du gouvernement, aucun politicien n'a été interrogé. Sa famille craint que ceux qui ont ordonné sa mort ne soient jamais traduits en justice, qu'ils s'en tirent littéralement.

L'impunité des assassinats de journalistes entraîne un cycle de violence. Tout au long de ses 30 années de journalisme, Caruana Galizia a fait l'objet d'innombrables menaces et de harcèlements en ligne et hors ligne. Sa maison a été incendiée ; les chiens de compagnie de sa famille ont été tués. Au moment de sa mort, 43 affaires de diffamation étaient en instance contre elle, dont beaucoup concernaient des politiciens de haut niveau.

Elle est morte sans avoir accès à son compte bancaire, qui avait été gelé à la suite d'une de ces plaintes, déposée par le ministre maltais de l'Économie. Les auteurs des menaces de mort reçues par Caruana Galizia et des incendies criminels perpétrés contre son domicile n'ont jamais été identifiés et restent donc impunis. Certaines des poursuites contre elle sont toujours en cours (bien qu'elles n'aient pas été intentées par le ministre de l'Économie), et sont maintenant en cours contre son mari et ses fils.

Depuis son assassinat, un mémorial érigé en signe de protestation pour la justice dans son cas a été démoli à plusieurs reprises par des fonctionnaires. Il y a des attaques sans fin contre sa réputation, car ceux qui l'ont harcelée de son vivant cherchent à effacer sa mémoire après sa mort. La liberté d'expression à Malte se détériore rapidement : la situation est en effet désespérée.

Quand un journaliste est assassiné, c'est toute la société qui en souffre. Nous perdons notre droit de savoir, de parler, d'apprendre.

Daphne Caruana Galizia a eu le courage et la résilience d'écrire malgré les menaces qu'elle a reçues. Aujourd'hui, jour anniversaire de son assassinat, les membres de PEN International dans le monde entier appellent à nouveau à la justice dans son cas. Pour y parvenir, il est essentiel qu'il y ait une enquête publique pour déterminer qui a commandité son assassinat - et, surtout, s'il aurait pu être évité.

Courtesy of  Tlaxcala
Source:  theguardian.com
Publication date of original article: 16/10/2018

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