03/11/2018 reseauinternational.net  8 min #147794

Colombie : la vague de fausses chaînes Whatsapp sur les enlèvements d'enfants a conduit au lynchage et à la mort d'une personne

par Boris Miranda

En Colombie, il y a une augmentation inquiétante du nombre de faux messages d’information circulant par le biais de WhatsApp et des réseaux sociaux.

En effet, vendredi dernier, une nouvelle concernant l’enlèvement présumé d’un enfant a poussé des dizaines de personnes à attaquer trois hommes dans un quartier populaire de Bogotá.

Le lynchage, qui a eu lieu à Ciudad Bolívar, une ville du district sud de la capitale colombienne, a causé la mort de l’une des victimes et blessé les deux autres qui ont dû être hospitalisés.

La police affirme qu’une chaîne dénonçant l’enlèvement présumé d’un mineur s’est répandue par l’application populaire de messagerie instantanée et a provoqué la colère des voisins lorsqu’ils ont cru trouver les ravisseurs présumés.

La police ajoute que c’est la sixième fois en moins d’un mois que des chaînes de ce genre sont détectées à Ciudad Bolivar, alertant des enlèvements d’enfants qui n’ont jamais eu lieu.

Dans un communiqué envoyé à BBC World, le Commandant de la police de Bogota Hoover Penilla a déclaré :

« Au cours des deux ou trois dernières semaines, dans cette localité, il y a eu des dénonciations dans les réseaux sociaux au sujet de l’enlèvement et de la disparition présumés de six mineurs. Tous ces cas ont été complètement déformés« .

Le commandant de la police de Bogotá s’est dit préoccupé par les récentes fausses chaînes

Les autorités policières ont ajouté que l’on soupçonne que ces fausses chaînes cherchent à « diffamer, créer le chaos et générer de l’anxiété« .

Le lynchage

Selon les médias locaux, le citoyen décédé a la nationalité colombienne, tout comme l’un des blessés.

L’autre personne hospitalisée est originaire du Venezuela, selon la presse locale. Toutefois, la police n’a pas encore confirmé l’identité ou le pays d’origine des victimes du lynchage.

Le Commandant Penilla a expliqué que l’incident a eu lieu après que des rumeurs aient commencé à circuler parmi les habitants de Ciudad Bolivar que les auteurs des enlèvements présumés d’enfants avaient été identifiés.

« C’est ainsi qu’a commencé l’agression. A un moment donné (les agresseurs) étaient plus de 150 et ont refusé que la police assure la protection (des agressés) et les agents ont également été exposés à l’agression« .

Les vidéos qui ont été diffusées sur les réseaux sociaux montrent comment une foule de personnes entourent les victimes du lynchage et sont plus nombreuses que les policiers qui tentent d’arrêter l’action violente.

La population vénézuélienne de Ciudad Bolívar a considérablement augmenté au cours des deux dernières années

Pour sa part, le Secrétaire à la Sécurité de Bogotá, Jairo García, a déclaré qu’il considère qu’il est très grave que les citoyens « prennent eux-même la justice en main« .

« Il n’y a aucune information sur les enlèvements d’enfants à Bogota. De toute évidence, il y a des gens qui s’intéressent à susciter la panique et l’agitation« , a dit M. García.

Alerte pour la vague de messages

Le Secrétaire à la Sécurité a déclaré que face à la recrudescence des fausses chaînes, les autorités vont redoubler d’efforts pour vérifier tout type d’information qui commence à faire des vagues.

La police de Bogotá a commencé ce week-end à diffuser des messages avec l’étiquette #RompeLaCadena (brise la chaîne), demandant à la population de ne pas donner crédit à toutes les plaintes circulant sur WhatsApp et autres plateformes.

La campagne insiste également pour que tout signalement tel que l’enlèvement éventuel d’un enfant soit fait par des voies régulières et non par des réseaux sociaux.

« Briser la désinformation. Ne suivons pas le jeu des fausses chaînes, confirmons leur véracité et leur origine« , lit-on dans les messages que la police diffuse.

#FAKENEWS la línea de emergencia 088 NO existe,🚫 no coadyuve en la desinformación✋, NUESTRA LÍNEA DE EMERGENCIA ES… https://t.co/JiD7lBL8AV

#FAKENEWS La ligne d’urgence 088 n’existe pas, 🚫 ne contribuez pas à la désinformation✋, NOTRE LIGNE D’URGENCE EST 123.👮 #RompaLaCadena

Les autorités ont détecté que ce type d’informations fictives s’est multiplié ces dernières semaines, et pas seulement à Bogotá.

Des cas ont également été signalés à Barranquilla, Cali et Medellín. Des cas similaires de fausses chaînes ont été découverts dans d’autres pays d’Amérique Latine comme l’Argentine et le Mexique.

La dénonciation de l’enlèvement présumé d’un enfant a également entraîné des lynchages en Inde.

WhatsApp est l’une des entreprises qui a annoncé des mesures pour lutter contre la diffusion de fausses nouvelles sur sa plateforme.

Xénophobie ?

Une autre hypothèse de la police au sujet de l’attaque de vendredi est la possibilité qu’il s’agisse d’une agression xénophobe.

Les médias locaux indiquent que certaines des personnes qui ont procédé au lynchage ont crié « Vénézuéliens » à l’agression.

El Tiempo a rapporté que la victime mortelle de l’incident était un Colombien de 23 ans qui, il y a seulement trois mois, était revenu du Venezuela en raison de la crise économique et sociale que traverse le pays.

Ciudad Bolívar est une ville avec une forte présence de migrants vénézuéliens qui y sont arrivés en masse ces deux dernières années.

Source :  La ola de cadenas falsas de WhatsApp sobre secuestros de niños que provocaron el linchamiento de una persona en Bogotá

traduit par Pascal, revu par Martha pour  Réseau International

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