06/11/2018 arretsurinfo.ch  9 min #147935

Le maître-chanteur et sa victime

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31.10.2018

Des organisations économiques ainsi que des officines fédérales véhiculent l'opinion que la Suisse, sous peine de « mettre en danger les bilatérales », devrait absolument se soumettre aux exigences de Bruxelles fixées dans l'accord-cadre.Les accords bilatéraux entre la Suisse et l'Union Européenne - il y en a plus d'une centaine - sont des accords de droit publics indépendants l'un de l'autre portant sur des questions et problèmes auxquels les deux partenaires aux discussions, aussi bien l'UE que la Suisse, ont voulu apporter une réponse en fixant des règles communes qu'ils ont ensuite officialisées dans des accords.

Les accords et leurs clauses

Si des accords sont passés entre Etats de droit, la règle est que ceux-ci contiennent des clauses de dénonciation. Les clauses de dénonciation protègent les deux signataires, chacun étant susceptible d'être privé de tout moyen de défense au cas où des points de l'accord n'étaient pas respectés par l'un des deux partenaires. En tel cas, le partenaire qui se sentirait défavorisé pourrait faire appel à la clause de dénonciation et donc se retirer de l'accord non respecté par la partie adverse.

Si, par exemple, certains accords étaient déclarés « en danger » par Bruxelles, cela signifierait que la Suisse serait soupçonnée de ne pas respecter ou de contourner des points d'accords antécédents.

Des accords n'ont-ils pas été respectés ?

Des reproches d'un tel caractère ont-ils déjà été formulés à l'égard de la Suisse ? La Suisse officielle doit-elle avouer avoir contourné ou non respecté, dans le cadre de l'Accord de coopération scientifique, l'un ou l'autre des points d'entente ? La Suisse n'a-t-elle pas respecté ou voulu contourner les règles en matière boursière et ne pourrait dès lors plus être traitée comme les autres et bénéficier de « l'équivalence boursière » ? Personne, ni à Bruxelles, ni ailleurs, n'a fait un tel reproche qui, s'il était justifié, pourrait remettre en question ou « en danger » les accords conclus.

Une invention de la Berne fédérale

Cette constatation rend d'autant plus intéressant un autre phénomène : la soi-disant mise en danger par la Suisse des accords bilatéraux existants est un refrain souvent repris par les employés de groupements d'intérêts scotchés en permanence à Bruxelles, par les fonctionnaires de la Berne fédérale souffrant de la même addiction ou par d'autres politiciens suisses europhiles. Bruxelles a certainement pris conscience de l'intérêt des accords bilatéraux pour les pays de l'UE et n'a donc aucunement l'intention de leur porter préjudice. Elle prend dès lors garde de ne pas faire à la Suisse tel ou tel reproche infondé sur le respect ou non de tel ou tel point d'un accord passé et donc susceptible d'être dénoncé. La « mise en danger » des accords bilatéraux, si souvent claironnée en Suisse, repose sur un tout autre fondement.

Manœuvres de chantage

L'UE a de facto écarté la Suisse de certains projets de recherche scientifique, et tenté de le faire pour d'autres car la Suisse n'est pas vraiment prête à avaler toutes sortes de formes d'assujettissement liées à l' «accord-cadre» que Bruxelles veut lui imposer. Le fait est que Bruxelles a également refusé de continuer à accorder à la Suisse l' «équivalence boursière » sans limitation dans le temps. Ceci sans que l'on puisse reprocher à la Suisse un quelconque comportement inadéquat en la matière. Les démarches de Bruxelles relevaient essentiellement d'une forme de chantage ayant pour objectif d'obliger la Suisse, au prix de l'abandon de son état de droit, d'accepter cet Accord-cadre.

Propre disqualification

Le chantage est un instrument de pression qu'un Etat de droit n'a pas à utiliser face à un partenaire contractuel. Une communauté étatique qui se permet de pratiquer de telles formes de chantage se disqualifie en tant qu'Etat de droit vis-à-vis de son partenaire. Elle met sa propre crédibilité en jeu. C'est exactement ce à quoi s'emploient les responsables de l'Union Européenne dans leurs tractations avec la Suisse au sujet du Contrat-cadre qu'ils cherchent à imposer par le chantage.

Celui qui n'ose se défendre ne sera bientôt plus qu'une cible

De telles atteintes au respect le plus élémentaire du droit ne semblent pas poser trop de problèmes à Bruxelles, cela d'autant plus que personne ne semble s'en offusquer en Suisse. La Berne fédérale préfère simuler l'ignorance craintive, porter le regard ailleurs et poursuivre sa politique. Les associations économiques, tout comme les médias locaux le plus souvent en dévotion face à Bruxelles - n'ont ni le cran, ni le courage de dénoncer les manœuvres de chantage indignes d'un Etat de droit pratiquées par Bruxelles.

Ce sont de telles faiblesses, une telle façon indigne de ramper devant l'UE qui enlèvent à la Berne fédérale toute la crédibilité que l'on accorderait à un partenaire dans le cadre de négociations. Ces faiblesses helvétiques, cette propension à s'incliner, sont les raisons profondes qui affaiblissent, voir anéantissent, la position de la Suisse dans le cadre des négociations avec Bruxelles. Si, sans dramatiser et de façon objective, la Berne fédérale et les médias suisses voulaient bien publiquement dénoncer les chantages pratiqués, nous pourrions revenir à un type de négociation impartial et respectueux des intérêts de chacun des deux partenaires.

Celui qui se soumet dans la précipitation tout prétextant sans cesse la soi-disant «mise en danger des accords existants » ne peut se transformer, finalement, qu'en dindon de la farce. C'est vraisemblablement dans cette situation abracadabrantesque que s'est mise la Berne fédérale...

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31.10.2018

Si des négociateurs se laissent constamment pousser dans leurs derniers retranchements par des nouvelles exigences de la partie adverse, sans jamais oser y opposer leurs propres exigences mais s'efforçant tout au contraire de lui plaire. Si nos propres médias, au lieu de remplir leur tâche dans un esprit critique, se complaisent dans la louange des négociateurs bruxellois - alors tout succès est hors de notre portée.

Briefée par les journaux dominicaux, la Berne fédérale se déclare surprise que Bruxelles, dans la phase ultime des négociations devant conduire la Suisse à signer l'accord-cadre imposé y ajoute, dernière couche, la reconnaissance par la Suisse des directives liées à la «citoyenneté européenne ».

La directive concernant la citoyenneté européenne

Ceux qui - comme par exemple le comité « UE-Non » - se sont donnés la peine d'étudier dans le détail, et avec sérieux, le mandat de négociation et en particulier, les positions et documents émis par la partie adverse savent depuis des années que la Suisse serait mise tôt ou tard en demeure d'accepter avec l'accord-cadre de reconnaître et appliquer, au moins sur ses points essentiels, les directives sur la « citoyenneté européenne ». Cette exigence n'a jamais été cachée par Bruxelles et n'est donc un secret pour personne. On peut finalement compter sur les doigts de la main les pays du sud de l'Union Européenne qui, embourbés dans leur endettement, cherchent désespérément à s'en sortir en appelant à l'aide leurs partenaires et saisissant toute chance qui se présente pour tenter, ne fut-ce que partiellement, de combler la dette sociale engendrée par leurs importants taux de chômage en lorgnant du côté d'une Suisse légendairement plus riche. Ceux qui veulent quitter ces pays du sud de l'UE pour gagner la Suisse - ce qui se fait sans problème grâce à la libre circulation des personnes - pourraient y bénéficier assez rapidement de l'aide sociale propre à ce pays. Un intérêt si élémentaire qu'il est évoqué et défendu depuis des années par Lisbonne, Madrid, Paris, Rome et Athènes.

Celui se montre surpris par de telles exigences, ou même débordé, n'a clairement pas sa place à la table des négociations. N'a-t-il pas encore pris conscience que la même exigence a été formulée à l'égard de la Suisse en matière d'indemnisation en cas de chômage ? La catastrophe que représente un Euro fort pour les pays moins compétitifs du sud pourrait être en partie évitée par la participation de la Suisse. On ne peut juste pas se déclarer surpris d'un tel objectif et d'une si grande motivation.

La tactique de négociation de Bruxelles

Le reste fait simplement partie d'une tactique élémentaire de la négociation. L'UE est parfaitement consciente depuis des années que la volonté d'imposer la « citoyenneté européenne » se heurterait à une vague d'impopularité dans notre pays. Elle ne peut conduire Berne qu'à la renonciation et à la résistance. C'est pour cette raison que Bruxelles n'a pas placé cette exigence au premier plan durant la phase préliminaire des négociations avec la Suisse. Elle a peut-être même laissé au contraire planer un certain doute ou l'illusion que cette exigence n'est pas une condition absolue. C'est cette tactique qui a entraîné la Berne fédérale à faire croire aux Suissesses et aux Suisses que l'accord-cadre n'était pas si contraignant que cela - un simple petit manteau d'entre-saison permettant de garantir juridiquement et harmoniser les traités bilatéraux déjà conclus. C'est au moment où les négociateurs suisses sont réapparus à Bruxelles avec l'idée de n'avoir qu'à signer un accord sans grande conséquence que - à ce moment précis - leur a été présentée la pièce maîtresse des exigences sur un ton péremptoire - «à prendre ou à laisser ».

Aucune raison de négocier dans la précipitation

Cette manière de procéder appelle la réflexion suivante: la Suisse n'a pas à se comporter comme si elle était sous pression. Elle peut sagement attendre le moment où Bruxelles aura trouvé, d'une façon ou d'une autre, une solution pour le problème bien plus important que constitue le Brexit. Les seuls qui sont sous pression sont la Berne fédérale et l'organisation faîtière Economiesuisse. Ces deux acteurs principaux ont joué dans toute cette affaire avec de fausses cartes vis-à-vis de la population et se trouvent aujourd'hui piteusement mis sur la touche par Bruxelles.

La Suisse, au vu de tous les bouleversements qui agitent actuellement l'Union Européenne sur plusieurs fronts, n'a pas à craindre un gel prolongé des négociations.

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