16/11/2018 reseauinternational.net  6 min #148358

Les nouveaux coups d'État n'utilisent pas les baïonnettes, ils utilisent le pouvoir judiciaire

par Héctor Bernardo

La Présidente du Parti Travailliste Gleisi Hoffmann a parlé du triomphe de Jair Bolsonaro, de la nomination du Juge Moro au poste de Ministre de la Justice du Brésil et de l’avenir du géant sud-américain. Gleisi Hoffmann a déclaré :

« Le procès de Lula doit être annulé. Lula doit avoir droit à un procès équitable« … « C’est le pire moment de la démocratie brésilienne« .

Gleisi Hoffmann

En 2016, le Brésil a subi un coup d’État parlementaire qui a mis fin au gouvernement de Dilma Rousseff et installé comme président de facto Michel Temer, dénoncé par WikiLeaks comme l’un des informateurs du service de l’ambassade des États-Unis.

Les instigateurs du coup d’État ont pris un virage à 180 degrés par rapport aux politiques qui avaient été approuvées par le vote populaire et ont imposé un programme néolibéral. Ils ont ensuite redéfini l’intervention militaire de l’État de Rio de Janeiro et c’est dans ce contexte que s’est produit l’assassinat de la conseillère Marielle Franco.

Après le coup d’Etat contre Dilma Rousseff, une persécution médiatico-judiciaire s’est déchaînée contre le Parti Travailliste (PT) et contre son référent suprême, l’ancien Président Luiz Inácio « Lula » da Silva.

Le juge Sergio Moro, lié au Département d’État américain, au multimédia Rede Globo et aux pouvoirs économiques et financiers, a condamné l’ex-mandataire sans preuves. L’interdiction de Lula, associée à une campagne de désinformation et de fausses informations qui ont circulé dans WhatsApp, a permis au leader d’extrême droite Jair Bolsonaro de s’imposer au second tour des élections et de devenir le nouveau Président du Brésil.

Bolsonaro entrera en fonction le 1er janvier, mais il a déjà annoncé que son Ministre de la Justice sera le juge qui a condamné et généré l’interdiction de Lula da Silva.

Afin d’analyser ces faits et de comprendre ce que sera l’avenir du géant sud-américain, Contexto a interviewé la Présidente du PT, Gleisi Hoffmann, qui a assuré que c’était le pire moment de la démocratie brésilienne et que :

« Nous devons nous réorganiser, dialoguer avec le peuple, construire une force sociale et politique qui peut influencer les décisions du Congrès National et ainsi stopper nos échecs« .

– Que représente le triomphe de Bolsonaro ?

Le triomphe de Bolsonaro représente un échec pour la démocratie brésilienne, pour les droits sociaux et pour les droits humains du peuple brésilien. Bolsonaro est un candidat de l’armée, ils l’ont soutenu tout au long de la campagne. Il ne fait aucun doute que ce sera un pas en arrière pour l’ensemble du système démocratique, pour les droits sociaux qui ont été acquis. Le gouvernement de Bolsonaro sera ultralibéral.

Sergio Moro

– Qu’est-ce que cela signifie que Bolsonaro ait choisi le juge Sergio Moro pour être Ministre de la Justice pour son futur gouvernement ? 

Non seulement Bolsonaro a convoqué le juge Sergio Moro comme Ministre de la Justice, au grand dam de tout le monde, mais Moro l’a accepté. Cela a montré à quel point le procès et la condamnation du Président Lula étaient biaisés. Sergio Moro est responsable du retrait de Lula du scrutin et de la victoire électorale de Bolsonaro. Le procès de Lula doit être annulé. Lula doit avoir droit à un procès équitable. 

– Pensez-vous que l’attaque des médias et du pouvoir judiciaire contre Lula a un rapport avec l’attaque contre Cristina Fernández de Kirchner en Argentine ? 

Je ne doute pas qu’il existe un lien entre l’attaque contre Lula et l’attaque contre Cristina Kirchner. C’est une nouvelle façon de frapper en Amérique Latine. Les nouveaux coups d’État n’utilisent plus les baïonnettes, ils utilisent le pouvoir judiciaire.

– Quel a été le rôle du Rede Globo dans tout ce processus ? 

Le rôle du Rede Globo était de construire des relations publiques pour le processus de coup d’État, pour la destitution de Dilma, pour l’emprisonnement de Lula et, maintenant, pour la viabilité du gouvernement Bolsonaro.

Henry Kissinger a dit un jour que « partout où le Brésil se penche, toute l’Amérique Latine se penche. Les intérêts américains ont-ils joué un rôle dans cette attaque contre le PT et la démocratie brésilienne ?

Je n’en doute pas. Le président américain a été l’un des premiers à célébrer l’élection de Bolsonaro et lui a fait de grands éloges. L’Amérique s’intéresse à notre pétrole et à notre économie. Je ne doute pas que les Américains aient été impliquées dans tout le processus. Même Steven Bannon, qui était conseiller de Donald Trump, était également conseiller pour la campagne Bolsonaro.

– Compte tenu du coup d’État contre Dilma Rousseff, de l’emprisonnement et de l’interdiction de Lula, de l’intervention militaire, du triomphe d’un fasciste, tous ces moments constituent-ils le pire moment de la démocratie au Brésil ? 

 – Après la dictature, nous avons connu la plus longue période de démocratie. Plus de trente ans. Mais, sans aucun doute, c’est le pire moment de notre récente démocratie. Nous devons maintenant nous réorganiser, parler au peuple, construire une force sociale et politique qui puisse influencer les décisions du Congrès National et ainsi stopper les échecs.

Source :  “Los nuevos golpes no usan las bayonetas, usan al Poder Judicial”

traduit par Pascal, revu par Martha pour  Réseau International

 reseauinternational.net

 Commenter