25/05/2019 lemonde.fr  4 min #156868

« Nos droits fondamentaux sont conditionnés par le respect du droit de la nature à exister et s'épanouir »

« Nous appartenons à la Terre et non l'inverse. Il est vital pour l'humanité de repenser radicalement sa place dans le monde en repensant un droit et une gouvernance centrés sur la Terre. » FSR / GraphicObsession

Tribune. Les pires scénarios présentés dans les derniers rapports du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), de l'Académie américaine des sciences et de la Plate-forme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) concernant le dérèglement climatique, la hausse des océans et l'érosion de la biodiversité devraient astreindre nos dirigeants à proposer des politiques publiques et des lois en capacité de répondre à un nouveau défi, celui de l'avenir de l'humanité.

Emile de Girardin expliquait que « Gouverner, c'est prévoir ; et ne rien prévoir, c'est courir à sa perte ». Des civilisations ont disparu parce qu'elles n'avaient pas pu - ou voulu - prévoir les conséquences de leurs actes, et nous ne semblons pas apprendre de l'Histoire. Les tentatives collectives de la dernière chance pour limiter les dommages infligés à l'écosystème Terre échouent l'une après l'autre sur le rivage de la souveraineté nationale : l'Accord universel de Paris pour le climat en 2015 n'a aucune force contraignante, les négociations pour l'adoption d'un Pacte mondial pour l'Environnement viennent d'échouer à Nairobi dans la nuit du 22 mai.

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Il est maintenant trop tard pour changer de carburant, il nous faut quitter le véhicule de la croissance. Il est trop tard pour espérer maintenir un modèle capitaliste et consumériste sur une planète exsangue, dont la biosphère, l'hydrosphère et l'atmosphère sont sous pression et dont les limites de générosité sont atteintes. La Terre va devenir inhabitable, invivable.

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Si les conditions de la vie elle-même sont menacées sur Terre, comment pourrions-nous espérer garantir à l'humanité son droit à l'eau, à l'alimentation, à la santé et même à l'habitat, comment donner force au droit à un environnement sain ? Le choix qui nous est posé à ce moment de notre histoire collective est soit d'accepter de vivre de façon plus sobre et plus équitable en harmonie avec le vivant, soit de regarder mourir une grande majorité d'entre nous.

Stopper l'écocide en cours

Dans les systèmes juridiques en vigueur dans presque tous les pays, la nature est considérée comme une propriété, ce qui confère au propriétaire le droit de l'exploiter, l'endommager ou la détruire. Or nous appartenons à la Terre et non l'inverse. Il est vital pour l'humanité de repenser radicalement sa place dans le monde en repensant un droit et une gouvernance centrés sur la Terre.

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Il nous faut renverser notre échelle des normes afin d'une part de réaffirmer la suprématie des droits de l'Homme sur le droit commercial et, d'autre part, de reconnaître que nos droits fondamentaux sont conditionnés par le respect du droit de la nature à exister et s'épanouir. La première étape serait d'oser imposer un cadre contraignant aux activités industrielles pour qu'elles respectent les limites que la planète nous offre, et ainsi préservent nos conditions d'existence.

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