03/03/2020 reseauinternational.net  8 min #169818

Ukraine - Un général du Sbu évoque un scénario chypriote pour le Donbass

par Christelle Néant.

En  Ukraine, Vassily Vovk, un général du  SBU, a  déclaré sur Obozrevatel.TV, que Volodymyr Zelensky a dans les cartons un « plan B » concernant le  Donbass, qui n'est ni plus ni moins que le scénario chypriote dont j'ai parlé l'an passé, à savoir arrêter la guerre et renoncer à la région, en tout cas pour l'instant...

Le retour de la revanche du scénario chypriote de l'Ukraine pour le Donbass

Après un relatif « repos médiatique » suite à  la réunion au Format Normandie du mois de décembre 2019, le scénario chypriote fait son retour dans les déclarations publiques d'officiels et de politiques ukrainiens.

Ainsi, Vassily Vovk, un général du SBU et ancien chef du département central d'investigation des services de sécurité ukrainiens, a déclaré  en réponse à l'interview accordée récemment par Vladislav Sourkov, que l'Ukraine envisagerait de « clôturer » les Républiques Populaires de Donetsk et de Lougansk (RPD et RPL), de retirer ses troupes et de dire « au revoir » à ces territoires, c'est-à-dire pour faire court, d'appliquer  le scénario chypriote que j'avais évoqué à plusieurs reprises l'an passé.

Il commence par commenter l'interview accordée par Sourkov, et surtout sa phrase sur le non-retour du Donbass au sein de l'Ukraine.

« Nous avons entendu Sourkov. Il n'a pas démissionné. Personne ne démissionne à Moscou, et il n'y a pas d'anciens officiers du KGB. Il affirme que l'Ukraine n'est pas le pays auquel le Donbass devrait être restitué. Ils ne nous rendront pas le Donbass ukrainien, ils rendront l'Ukraine au Donbass - c'est leur but », a-t-il expliqué.

Vovk explique ensuite qu'actuellement l'Ukraine cherche surtout à empêcher qu'il y ait de nouvelles victimes dans le Donbass (une déclaration qui a de quoi faire rire jaune quand on voit que l'armée ukrainienne continue chaque jour de bombarder tant les positions des deux milices populaires que les quartiers résidentiels de la RPD et de la RPL), avant de reparler du fameux « plan B », c'est-à-dire le scénario chypriote.

Des informations que le général du SBU tiendrait de personnes proches des représentants qui négocient au sein du groupe de contact à Minsk.

« J'ai des raisons de dire que le gouvernement a une option de secours sur ce qu'il faut faire. Ce n'est peut-être pas une option de secours, mais la principale. Des gens meurent-ils à notre frontière avec la Crimée ? Faisons en sorte qu'ils n'y meurent pas eux aussi [dans le Donbass - NDLR]. Il est clair que la  Russie ne nous rendra pas le Donbass. Faisons la même frontière administrative, et laissons-les y vivre pour l'instant », a déclaré M. Vovk.

Il a ensuite expliqué pourquoi la Russie n'intégrera pas selon lui les territoires de la RPD et de la RPL au sein de la fédération, comme elle l'a fait pour la Crimée.

« La Russie a seulement besoin d'un jour de congé, pour organiser un référendum, et elle prendra ces territoires. Mais elle n'en a pas besoin - cela renforcerait et étendrait les sanctions. Il faut qu'il y ait ce furoncle en Ukraine, cette infection qui fait mal et qui ronge. Pour influencer l'Ukraine de cette façon, » a-t-il déclaré.

Le général a terminé en exhortant les Ukrainiens « à ne pas vivre d'illusions, mais à évaluer réellement la situation » et à dire « au revoir » au Donbass.

« Les dirigeants de l'État et le Président, sur la base de ce que j'entends et de la surveillance systématique de ses discours, constatent déjà qu'il est nécessaire de passer à l'option numéro 2, qui, dans l'ensemble, est la première option. C'est la frontière, un arrêt complet des tirs et « les gars, au revoir », » a conclu Vovk.

Le scénario chypriote pour le Donbass, « plan B » ou « plan A » de l'Ukraine ?

La déclaration de Vovk est très instructive, car il confirme (à deux reprises dans sa déclaration) ce que je disais déjà l'an passé à savoir que le scénario chypriote n'est pas le « plan B » de Zelensky mais en réalité son « plan A », son plan principal. Mais pour le bon déroulement de celui-ci, le Président ukrainien doit faire croire qu'il s'agit du plan de secours, celui de la dernière chance.

Si on regarde la prévision de l'an passé, jusqu'ici tout se passe comme prévu. Zelensky continue de faire croire à coup de grandes déclarations publiques qu'il veut la paix dans le Donbass,  pour donner une bonne image de l'Ukraine (une hypocrisie admise publiquement par Kurt Volker récemment) et faire porter la responsabilité de l'échec des  accords de Minsk au camp adverse, alors même que c'est Kiev qui les sabote constamment.

Et pendant ce temps, d'autres officiels ukrainiens, comme  Vadim Pristaïko, le ministre des Affaires étrangères, continuent le travail de sape des accords de Minsk, en déclarant, comme il l'a fait récemment, qu'on est arrivé au bout de ses accords, et qu'il faut les réécrire parce qu'ils sont inapplicables.

« Nous sommes en 2020, nous n'avons pas encore atteint la paix. Nous pensons donc qu'il n'est pas seulement possible, mais nécessaire de modifier ce document [les accords de Minsk - NDLR], car certains de ses points ne peuvent pas être mis en œuvre », a déclaré le ministre avant la réunion du Conseil de Sécurité de l'ONU qui devait évaluer la situation dans le Donbass et l'application des accords de Minsk.

Vadim Pristaïko a confirmé que l'Ukraine travaillait sur une nouvelle version des accords de Minsk, bien que la Russie, la RPD et la RPL se soit publiquement opposées à leur modification, et a déclaré que la partie ukrainienne s'efforce maintenant de faire admettre à tous les participants du Format Normandie que « les accords de Minsk sont arrivés à épuisement et nécessitent des changements ».

Et pour justifier ces futures modifications, le ministre a déclaré que la formule Steinmeier et le retrait des troupes et des équipements étaient déjà une modification des accords de Minsk et que la Russie ne s'y opposait pas.

Sauf que c'est un énorme mensonge. La formule Steinmeier et la décision cadre pour le retrait des troupes et des équipements sont des compromis sur les détails permettant la mise en œuvre des accords de Minsk et pas du tout une modification en profondeur de ces derniers. La formule Steinmeier fixe l'ordre d'exécution des points politiques des accords de Minsk, qui étaient une pomme de discorde entre l'Ukraine, la RPD et la RPL.

Et je rappelle que c'est l'Ukraine qui a traîné des pieds pour signer la formule Steinmeier ! La Russie, la RPD et la RPL réclamaient cette signature depuis que la formule Steinmeier avait été élaborée en 2016 !

De plus, les  déclarations antérieures des officiels ukrainiens permettent de cerner ce qu'ils appellent «  réécrire les accords de Minsk pour qu'ils soient applicables ». L'Ukraine veut se débarrasser de tout le volet politique des accords de Minsk, et veut récupérer le contrôle sur la frontière sans avoir à voter la loi d'amnistie, le statut spécial du Donbass et modifier la constitution, afin de pouvoir ensuite mener un scénario croate (épuration ethnique) dans la région.

Les accords de Minsk ne sont pas inapplicables, contrairement à ce que prétend Pristaïko, c'est simplement que l'Ukraine ne veut pas les appliquer ! C'est ça la vérité. Mais aux dernières nouvelles la mauvaise volonté n'est pas une excuse valable pour modifier des accords de paix validés par une résolution de l'ONU !

Nous allons donc continuer à voir l'Ukraine jouer son tour de passe-passe entre les jolies déclarations de Zelensky sur sa volonté de rétablir la paix dans le Donbass (l'écran de fumée visant à cacher la réalité), et le sabotage constant des accords de Minsk par ses représentants, jusqu'à arriver au point de blocage voulu par Kiev pour justifier le scénario chypriote.

L'application de ce plan permettra à Zelensky de dire officiellement qu'il n'y a plus de guerre en Ukraine et que les investisseurs peuvent donc y venir en toute sécurité, après avoir fait passer la  levée du moratoire sur la vente des terres et celle sur la légalisation des jeux d'argent. Et hop, emballé c'est pesé.

Le pays sera vendu à la découpe, Zelensky, ses amis et ses sponsors étrangers s'en mettront plein les poches, et les Ukrainiens comprendront ce qui se passe lorsqu'il sera trop tard et que le pays s'effondrera totalement.

 Christelle Néant

source :  donbass-insider.com

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