04/03/2020 wsws.org  8 min #169863

170 ans de prison : les Etats-Unis annoncent 17 nouvelles inculpations contre Julian Assange

Trump a ordonné l'arrestation d'Assange par la police britannique et voulait sa mort

Par Thomas Scripps et Chris Marsden
4 mars 2020

La journaliste Cassandra Fairbanks a fait des révélations explosives sur une série de communications sur le cas du fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, entre elle et l'agent Républicain Arthur Schwartz.

Elles confirment que la tentative d'extradition d'Assange est une entreprise criminelle. Elle vise à réduire au silence une personne qui a exposé les crimes de guerre américains en Afghanistan et en Irak, et à intimider tous les opposants à la guerre impérialiste. Ils prouvent que toutes les méthodes pour y parvenir sont discutées, y compris la peine de mort.

Assange est à mi-chemin d'une audience qui a commencé la semaine dernière pour décider de son extradition vers les États-Unis où il risque 175 ans de prison pour espionnage. En avril 2019, la police britannique l'a emprisonné après avoir traîné illégalement hors de l'ambassade équatorienne avec la collusion de l'ambassadeur à Londres, où il bénéficiait de l'asile politique.

Selon les fuites de Fairbanks, de hauts fonctionnaires américains ont conclu un accord avec le gouvernement équatorien en 2018 pour garantir l'arrestation d'Assange. Apparemment, il s'agissait d'un accord pour qu'ils puissent l'arrêter en échange de l'exclusion de la peine de mort, alors que l'administration Trump aurait clairement souhaité appliquer la peine de mort.

C'était l'actuel directeur national du renseignement du président Trump, Richard Grenell, qui a organisé l'accord alors qu'il travaillait comme ambassadeur des États-Unis en Allemagne. Les informations de Fairbanks indiquent clairement que l'arrestation et l'extradition d'Assange se sont organisées sur instruction directe du bureau du président.

Fairbanks explique qu'elle a posté un message de soutien à Assange dans un groupe de discussion composé de militants pro-Trump, dont Grenell et Schwartz, le 30 octobre 2018. Schwartz, avec qui elle «avait toujours été amie», lui a téléphoné peu après pour lui dire qu'elle devait cesser de soutenir WikiLeaks:

«Il disait... qu'un accord avait déjà été conclu pour entrer dans l'ambassade, qu'ils allaient arrêter Julian.... Il disait que j'étais impliquée dans le monde social de Trump... et que les gens comprendraient que je soutenais WikiLeaks avant que je ne sache que Julian était un méchant. Mais que ces gens-là ne seraient pas très compréhensifs quand toutes ces mauvaises choses se révéleraient à son sujet.»

Fairbanks a décrit l'appel comme «menaçant» et «intimidant».

Dans des textos ultérieurs via le service crypté Signal, archivés par Fairbanks, Schwartz a dit à Fairbanks en référence à Assange: «Je ne serais pas aussi émotif tant que vous n'aurez pas vu exactement ce que cette ordure, ce vaurien a fait.... Il y a une bonne raison pour que la peine de mort soit envisagée.»

Fairbanks confirme également que la société de sécurité UC Global enregistrait chaque conversation d'Assange à l'ambassade. Ensuite UC Global les relayait directement à l'Administration Trump. En janvier 2019 et de nouveau le 27 mars, elle s'est rendue à l'ambassade équatorienne pour avertir Assange. Soupçonnant une surveillance, ils ont utilisé des notes écrites et des bruits pour essayer de garder leur conversation privée. Malgré ces précautions, le 29 mars 2019, Fairbanks a reçu un autre appel de Schwartz dans lequel il «m'a dit qu'il savait que je l'avais dit à Assange. Aussi, une enquête le Département d'État cherchait à trouver la personne qui m'avait divulgué cette information.»

Le 10 septembre 2019, Fairbanks a publié un tweet faisant référence à un reportage d'ABC News révélant publiquement l'accord conclu entre les gouvernements équatorien et américain pour obtenir l'arrestation d'Assange. Des sources anonymes ont déclaré à ABC News que l'ambassadeur de l'Équateur en Allemagne, Manuel Mejia Dalmau, a tenu une «réunion d'urgence» fin 2018 avec Grenell, demandant si les États-Unis s'engageraient à ne pas appliquer la peine de mort à Assange.

Grenell a contacté le ministère américain de la Justice et a apparemment reçu l'accord du vice-procureur général Rod Rosenstein, lui permettant ainsi de conclure un accord avec l'Équateur.

Fairbanks a tweeté que Grenell «était celui qui avait conclu l'accord pour l'arrestation de Julian Assange». Peu de temps après, Schwartz l'a appelée pour lui demander de retirer le tweet, en disant: «Le rôle de Rick est classé secret... Quelqu'un va aller en prison.» Schwartz a révélé que Grenell agissait sur ordre direct du président Donald Trump. «S'il vous plaît. Je vous en supplie... Il [Grenell] reçoit des ordres du président, OK?»

Fairbanks a accepté de retirer le tweet, ne révélant ses relations avec Schwartz que le 25 février. Elle combine son soutien à Assange avec des associations politiques avec des individus d'extrême droite et fascistes, y compris le personnel de l'Administration de Trump qui veut sa destruction. Schwartz s'est adressé à Fairbanks en tant qu'ami, lui donnant des informations qui n'étaient pas destinées à l'oreille du public.

Les échanges entre Schwartz et Fairbanks confirment que l'audience d'extradition commencée la semaine dernière au tribunal de Belmarsh est un procès-spectacle - une feuille de vigne pour couvrir une conspiration politique entre impérialismes américain et britannique qui vise à réduire Assange au silence pour toujours. Le verdict du procès d'extradition a déjà été déterminé en coulisses, aussi sûrement que l'était la collusion de l'Équateur avec la police britannique pour son arrestation.

Étant donné qu'Assange n'a commis aucun crime en publiant des informations clairement dans l'intérêt du public, la demande d'extradition américaine aurait dû être automatiquement rejetée. Le traité d'extradition anglo-américain [signé en 2003 mais entré en vigueur seulement en 2007 suite à la ratification des États-Unis] interdit l'extradition si l'infraction reprochée «pour laquelle l'extradition est demandée est un délit politique».

La loi britannique sur l'extradition (prise en 2003), qui intègre les termes du traité dans le droit interne, interdit l'extradition «dans le but de poursuivre ou de punir» quelqu'un pour ses «opinions politiques». l'extradition est interdite même dans les cas où quelqu'un «pourrait être lésé lors de son procès ou être puni, détenu ou limité dans sa liberté personnelle en raison» de ses «opinions politiques».

Les audiences d'extradition se poursuivent parce que le Royaume-Uni est tout aussi hostile à Assange que les États-Unis. Sajid Javid en tant que ministre de l'intérieur du gouvernement conservateur a approuvé la demande d'extradition américaine. Le week-end dernier, les journalistes Matt Kennard et Mark Curtis ont révélé que Javid a assisté à six réunions annuelles de l'American Enterprise Institute (AEI) qui a des liens étroits avec la communauté du renseignement américain. Il a pris la parole lors d'un événement aux côtés de Jonah Goldberg, alors rédacteur en chef de la National Review. Ce dernier a demandé dans une chronique publiée sur le site de l'AEI: «Pourquoi on n'a pas garrotté Assange dans sa chambre d'hôtel il y a des années?» L'idéologue néoconservateur Bill Kristol, qui a également pris la parole, a écrit une chronique où il demande: «Pourquoi ne pouvons-nous pas utiliser un de nos des ressources divers pour harceler, enlever ou neutraliser Julian Assange et ses collaborateurs, où qu'ils soient?»

Lors de l'audience d'extradition de la semaine dernière, l'équipe juridique d'Assange a expliqué qu'ils présenteraient les preuves d'un dénonciateur anonyme. Ce dernier détaillera les conversations entre UC Global et la CIA «sur la question de savoir si des mesures plus extrêmes devraient être envisagées, comme l'enlèvement ou l'empoisonnement de Julian Assange à l'ambassade». Ces discussions ont notamment suggéré que la porte de l'ambassade pourrait être laissée ouverte pour faire croire à un enlèvement qui aurait pu être «un accident».

Les autorités britanniques ont ignoré cette montagne de preuves de menaces contre la vie d'Assange car la possibilité d'une peine de mort interdit automatiquement l'extradition. Elles savent que la promesse faite à l'Équateur est sans valeur. Si Assange se fait extrader, il risque soit la prison à vie, soit l'exécution. Pour éviter cela, une mobilisation massive de la classe ouvrière est nécessaire pour défendre Assange.

On ne peut s'attendre à aucune justice de la part des tribunaux britanniques corrompus. Pendant les quatre jours de procédure de la semaine dernière, on a forcé Assange de s'asseoir dans une boîte de verre pare-balles. Il n'avait aucun accès à ses avocats pour bien encadrer sa défense. Il était sous la surveillance constante des agents de la prison. Sans doute aussi des espions de la CIA dans la salle d'audience. On l'a menotté, fouillé à nu et on l'a lourdement médicamenté - tout cela avec l'approbation de la présidente du tribunal, Vanessa Baraitser. Elle a décidé qu'Assange devait rester toujours sur ce banc d'accusés entouré de verre pare-balles lorsque l'audience d'extradition reprendrait en mai.

Pour mettre fin à ce cauchemar pseudo-juridique, il faut mener une lutte à travers le monde, avec des réunions organisées dans chaque lieu de travail, collège et université pour réclamer la liberté d'Assange et celle de l'héroïque leveuse d'alerte, Chelsea Manning.

(Article paru d'abord en anglais 3 mars 2020)

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