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170 ans de prison : les Etats-Unis annoncent 17 nouvelles inculpations contre Julian Assange

L'Association du barreau international condamne les attaques de la Grande-Bretagne sur les droits juridiques d'Assange

Par Oscar Grenfell
13 mars 2020

L'Institut des droits de l'homme de l'Association internationale du barreau (IBAHRI) a publié mardi un communiqué condamnant ce qu'il a qualifié de «mauvais traitements réservés à Julian Assange lors de son procès d'extradition aux États-Unis en février 2020». L'organisation d'avocats a exhorté «le gouvernement du Royaume-Uni à prendre des mesures pour protéger» l'éditeur de WikiLeaks.

Cette déclaration est la dernière confirmation que les tentatives d'extradition d'Assange par le gouvernement et le système judiciaire britanniques vers les États-Unis - où il sera mis en examen en vertu de la loi sur l'espionnage passible de peines de prison à vie pour avoir révélé, en tant que journaliste et éditeur, des crimes de guerre américains - font fi des lois.

Le rapport IBAHRI détaille les mauvais traitements extraordinaires infligés à Assange qui ont eu lieu au cours de la première semaine de l'audience d'extradition, qui a commencé le 25 février. Il note que, selon ses avocats, «M. Assange a été menotté 11 fois; déshabillé deux fois et fouillé; ses dossiers confisqués après le premier jour de l'audience; et sa demande de s'asseoir avec ses avocats pendant le procès, plutôt que dans une cage de verre blindée, refusée.»

Julian Assange, fondateur de Wikileaks, transporté dans un fourgon de prisonniers au tribunal de Westminster à Londres, le vendredi 20 décembre 2019.(AP Photo/Frank Augstein)

Dans ses commentaires de présentation du rapport, le coprésident de l'IBAHRI, Michael Kirby, juriste australien de renom, universitaire et ancien juge de la Haute Cour, a déclaré que l'organisation «craignait que les mauvais traitements infligés à Julian Assange constituent des violations de son droit à un procès équitable et des protections inscrites dans la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, dont le Royaume-Uni est signataire. »

Kirby a déclaré qu'il était «profondément scandaleux» que le gouvernement britannique ait gardé le silence et «n'ait pris aucune mesure pour mettre fin à une conduite aussi grossière et disproportionnée de la part des responsables judiciaires de la Couronne. De plus, nous sommes surpris que le juge qui préside n'ait rien dit ni rien fait pour réprimander les responsables et leurs supérieurs pour une telle conduite dans l'affaire d'un accusé dont le délit n'est pas un acte de violence personnelle».

Kirby a décrit le traitement d'Assange comme «scandaleux et excessif». Il a déclaré que cela rappelait le tristement célèbre «scandale de la prison d'Abou Ghraïb», qui a été déclenché par la publication de photos montrant des soldats américains torturant et humiliant des détenus dans l'établissement à la suite de l'invasion illégale de l'Irak en 2003.

Anne Ramberg, coprésidente de l'IBAHRI et secrétaire générale de l'Association du barreau suédois, a ajouté: «L'IBAHRI s'associe à la préoccupation généralisée concernant les mauvais traitements infligés à M. Assange. Il doit bénéficier de l'égalité d'accès à une représentation juridique effective. Avec ce procès d'extradition, nous assistons à une grave atteinte à une procédure équitable et à l'état de droit.»

La déclaration a souligné les dispositions du droit interne et international britannique qui rendent obligatoires un procès équitable et le respect des droits de l'accusé. En conclusion, elle a cité le constat du rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture, Nils Melzer, selon lequel Assange présente des symptômes de torture psychologique médicalement vérifiables à la suite de sa persécution d'une décennie. «Si M. Assange était considéré comme une victime de torture psychologique, son extradition serait illégale au regard du droit international des droits de l'homme», déclare l'IBAHRI.

Les avertissements de l'Association internationale du barreau ont le poids d'une organisation faisant autorité et composée de plus de 80.000 avocats dans le monde, de 190 barreaux et associations d'avocats dans quelque 170 pays et de nombreux grands cabinets d'avocats. Elle fut fondée en 1947, en réponse aux horribles violations du droit international qui s'étaient produites pendant la Seconde Guerre mondiale et l'Holocauste.

La déclaration de l'IBAHRI souligne le fait que la tentative d'extrader Assange aux États-Unis s'apparente davantage à une restitution extraordinaire qu'à un processus juridique respectant les normes du droit international.

La persécution d'Assange a été condamnée par des centaines d'avocats à travers le monde. Son traitement dans la prison de Belmarsh à sécurité maximale a été dénoncé par plus de 180 éminents professionnels de la santé organisés dans le groupe Doctors4Assange. Une lettre ouverte réclamant la liberté d'Assange et saluant son journalisme courageux a été signée par plus de 1400 journalistes dans 99 pays.

La déclaration de l'IBAHRI n'est pas seulement une condamnation du gouvernement et du système judiciaire britanniques, mais aussi de toutes les tendances politiques qui ont insisté pour dire qu'Assange aura un procès équitable et que la décision du tribunal devait être respectée.

Cela comprend le leader travailliste britannique Jeremy Corbyn et le ministre des Finances fantôme John McDonnell. Après avoir gardé un silence criminel sur le sort d'Assange pendant 10 mois, y compris pendant les élections générales britanniques, ils ont publié des déclarations qui soulevaient le risque de son extradition vers les États-Unis début février.

En même temps, cependant, Corbyn et McDonnell ont souligné que le sort d'Assange était entre les mains d'un tribunal. Leur promotion d'une procédure judiciaire qui équivaut à un simulacre de procès démontre que leur prétendue préoccupation pour le sort d'Assange est une imposture visant à détourner une colère croissante publique derrière les institutions mêmes qui sont à l'origine de sa persécution.

En Australie, le gouvernement fédéral de la Coalition et l'opposition du Parti travailliste ont cherché à justifier leur refus de défendre Assange en tant que citoyen et journaliste australien persécuté, en proclamant leur confiance dans le respect des procédures britanniques et l'état de droit.

Lors des audiences du Sénat la semaine dernière, la ministre australienne des Affaires étrangères Marise Payne et de hauts fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères et du Commerce (DFAT) ont faussement affirmé qu'ils étaient incompétents pour intervenir dans l'affaire d'Assange. Ils ont déclaré que leurs homologues britanniques les avaient informés que le traitement horrible réservé à Assange, y compris avoir été à plusieurs reprises déshabillé et menotté le premier jour de l'audience, était «la norme». Ils ont également défendu l'isolement d'Assange au fond de la salle d'audience dans une cage de verre blindée.

Le directeur juridique du DFAT, James Larsson, a déclaré que la «position de longue date» du gouvernement australien était qu'il ne pouvait intervenir dans les procédures judiciaires à l'étranger impliquant un citoyen australien qu'en cas de «violation flagrante des droits». Il a déclaré platement qu'il n'y avait aucune preuve que c'était le cas lors de l'audience d'extradition d'Assange.

La déclaration de l'IBAHRI montre que ces affirmations sont des mensonges à motivation politique. En outre, ils démontrent que le refus des gouvernements australiens successifs de respecter leurs obligations envers Assange est une décision politique, découlant du soutien à l'alliance américano-australienne et de la campagne de Washington pour faire taire ceux qui dénoncent ses guerres illégales et ses intrigues diplomatiques mondiales.

Le caractère sans foi ni loi de la procédure contre Assange souligne la futilité de toute perspective fondée sur un recours devant les tribunaux et l'establishment politique. Il souligne le fait que la lutte pour sa liberté doit être basée sur un mouvement politique de masse de la classe ouvrière en Grande-Bretagne, aux États-Unis, en Australie et au niveau international pour la défense des droits démocratiques.

(Article paru en anglais le 12 mars 2020)

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