13/05/2020 wsws.org  7 min #173799

Alors que le coronavirus se propage, les mesures de confinement sont levées dans toute l'Europe

Par Will Morrow
13 mai 2020

Des gouvernements dans toute l'Europe ont levé les mesures de confinement lundi, rouvert écoles et entreprises et renvoyé sur les lieux de travail des millions de travailleurs, alors que le coronavirus mortel continue de se propager sur le continent. Le déconfinement se poursuit même lorsque de nouvelles informations font état d'une augmentation des cas dans des zones où sa propagation était maîtrisée et les restrictions avaient été assouplies.

En France, où environ 2.800 personnes sont encore sous ventilation dans les hôpitaux et 70 personnes sont mortes dans les dernières 24 heures, portant le nombre total des morts à 26.380, le confinement de huit semaines commencé le 17 mars a aussi pris fin lundi. Les écoles ont rouvert pour les plus jeunes, et les entreprises non essentielles ont repris leurs activités, le secteur de l'hôtellerie et de la restauration se limite à un service de plats à emporter.

En Allemagne, la chancelière Angela Merkel a ordonné mercredi dernier la fin du lock-out, et la réouverture des écoles et des entreprises. Des restaurants avaient déjà commencé à offrir des services de repas à emporter dans le Land de Mecklembourg-Poméranie occidentale, dans le nord-est du pays. Des entreprises non essentielles ont également été rouverts en Autriche ; les élèves de dernière année étaient déjà retournés à l'école la semaine dernière.

Le Premier ministre britannique Boris Johnson a prononcé un discours télévisé national dimanche soir appelant les travailleurs du bâtiment et de l'industrie manufacturière et ceux qui ne pouvaient travailler à domicile à reprendre le travail. Lundi, des données de l'Office national des statistiques du pays montraient que les travailleurs de la construction et ceux peu qualifiés du secteur primaire étaient parmi les plus susceptibles de mourir de la maladie. Leur taux de mortalité à la date du 20 avril est de 21,4 pour 100.000 personnes. Les chiffres sont semblables pour les travailleurs sociaux et des opérateurs de machines.

Johnson a également demandé que les écoles se préparent à rouvrir, déclarant que tous les élèves devaient être scolarisés pendant au moins un mois avant l'été. Le nombre de décès causés par le coronavirus, largement sous-estimé par les autorités britanniques, a encore augmenté lundi de 268 pour atteindre 32.065. Près de 4.000 nouveaux cas ont été signalés.

La Belgique, qui a le taux de mortalité par habitant dû au coronavirus le plus élevé au monde, avec plus de 53.000 cas confirmés et 8.707 décès, sur un peu plus de 11 millions d'habitants, a également rouvert écoles et magasins lundi. En Italie, où une analyse du taux national de mortalité indique que le nombre réel de décès dus au coronavirus est supérieur à 50.000, toutes les entreprises non essentielles ont été rouvertes lundi dernier.

En Espagne, les habitants de nombreuses régions du pays sont autorisés depuis lundi à aller au restaurant, à rendre visite à leur famille et à assister à des rassemblements de 10 personnes maximum. Le gouvernement du Parti socialiste (PSOE) et du parti pseudo de gauche Podemos, met en œuvre le déconfinement alors même que l'armée prédit que sa politique entraînera une seconde vague du virus dans le pays, où celui-ci a déjà tué 26.744 personnes.

Au Danemark, les écoles secondaires doivent ouvrir la semaine prochaine, tandis que les centres commerciaux ont ouvert lundi. En Norvège, toutes les classes ont repris mardi, après l'ouverture des classes pour les 6-10 ans. En Finlande, les écoles rouvriront le 14 mai. Aux Pays-Bas, les élèves de dernière année sont déjà rentrés la semaine dernière. En Grèce, tous les magasins ont ouvert lundi.

Ce retour en masse au travail dans toute l'Europe procède de la même politique criminelle que celle menée par le gouvernement Trump aux États-Unis. Il est mené dans tous les pays de concert avec les syndicats, et imposé par eux alors qu'ils répriment toute lutte des travailleurs contre le déconfinement.

La classe dirigeante européenne, comme son homologue américaine, ne cherche pas à mener une lutte contre la propagation du coronavirus. Sa politique est motivée par l'exigence de forcer les travailleurs à retourner au travail, quels que soient les risques pour leur vie et celle de leurs proches, pour continuer à extraire le profit.

La réouverture des salles de classe, qui expose les enfants, les enseignants et leurs familles à la maladie, souligne la criminalité de cette politique. Les enfants sont envoyés à l'école afin que leurs parents puissent aller travailler même si les scientifiques continuent d'avertir que les écoles fonctionnent comme des vecteurs de la propagation du virus. De surcroît, on a découvert que les enfants peuvent développer, à cause du coronavirus, un syndrome rare et potentiellement mortel, la maladie de Kawasaki.

Au moment où tout reprend le travail, les indices apparaissent déjà qui démontrent que cela entraîne une nouvelle augmentation du nombre des cas. En Allemagne, où l'establishment politique a mené une campagne systématique dans les médias pour minimiser le danger du virus, l'Institut Robert Koch a rapporté hier que l'indice de reproduction du virus avait augmenté au-delà de 1,0 [10 personnes en infectent 10 autres] sur plusieurs jours, l'indication d'une propagation exponentielle.

En France, deux nouveaux foyers sont apparus ce week-end, en Dordogne et dans la Vienne. Le cas de la Vienne, dans le centre de la France, s'est produit dans une école parce que les enseignants avaient dû y venir pour préparer le retour des élèves. Le ministre français de l'Éducation, Olivier Blanquer, a néanmoins déclaré dans une interview au Journal du Dimanche le même jour, que chaque enfant en France devrait être à l'école au moins un jour ce mois-ci.

Le gouvernement Macron incarne le caractère criminel de la politique de la classe dirigeante. Pendant des semaines, il a déclaré qu'il n'ordonnerait la fin du confinement que lorsqu'il disposerait des capacités suffisantes pour des tests de masse et la recherche des contacts afin de contenir la propagation. Il avait estimé que cela signifierait au moins 700.000 tests par semaine et déclaré qu'il serait prêt au moment d'ordonner le déconfinement. Le directeur de la santé Jérôme Salomon avait inclus les chiffres quotidiens des tests dans le briefing du gouvernement.

Alors que la date limite de déconfinement approchait, on a discrètement abandonné cette promesse. Si le gouvernement ne fournit pas de relevé central du nombre de tests effectués dans le pays, une analyse publiée hier par la section d'investigation de Radio France, qui a compilé diverses sources locales, a conclu qu'on avait effectué environ 149.000 tests dans la semaine du 27 avril au 3 mai, soit moins d'un quart du seuil censé être requis par le gouvernement pour un déconfinement.

Autrement dit, le déconfinement n'a rien à voir avec le respect des conditions d'un plan scientifique préconçu pour lutter contre le virus. Il a été déterminé par la politique économique du gouvernement qui a fabriqué le prétexte mensonger approprié, pour l'abandonner ensuite quand il ne pouvait plus être maintenu.

Dès le début de la pandémie, la classe dirigeante européenne, comme ses homologues à l'international, a réagi à la pandémie non pas comme à une urgence sanitaire, mais comme à un incident affectant les marchés. Elle a entrepris une lutte non pas pour sauver des vies mais pour protéger les profits de la grande entreprise.

Les gouvernements nationaux ont lancé des plans de sauvetage de plusieurs centaines de milliards d'euros en faveur des grandes sociétés ; la Banque centrale européenne a voté en mars un programme d'achat d'actifs de 750 milliards d'euros pour 2020, achetant des obligations aux entreprises et aux gouvernements nationaux afin de soutenir les cours de la bourse. Depuis, les achats d'actifs ont été portés à 1.100 milliards d'euros. Alors que l'élite financière et industrielle a été protégée de toute perte de richesse, les banques centrales rachètent des centaines de milliards d'euros d'actifs sans valeur, les transférant directement des bilans des entreprises et des banques au Grand livre des banques centrales. La classe dominante fera payer à la classe ouvrière ces sommes immenses par des coupes de salaires et de retraites et une austérité brutale contre leurs conditions de vie.

La levée du confinement en Europe signifie que la classe dirigeante mène des politiques qui, et elle le sait, entraîneront la mort de dizaines, voire de centaines de milliers de personnes.

(Article paru d'abord en anglais 12 mai 2020)

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