13/07/2020 2 articles wsws.org  7 min #176717

Le Sozialistische Gleichheitspartei condamne le terrorisme d'extrême droite dirigé contre une parlementaire du Parti de gauche

Par Ulrich Rippert (secrétaire national du SGP)
13 juillet 2020

Janine Wissler, présidente de la faction parlementaire du Parti de gauche du Land de Hesse, a reçu à plusieurs reprises des menaces de mort par courrier électronique signées «NSU 2.0». Ses données personnelles avaient auparavant été récupérées sur un ordinateur des services de police.

NSU 2.0 est une référence au NSU (National Socialist Underground - Parti national-socialiste souterrain) néonazi, dont les membres sont responsables du meurtre d'au moins neuf personnes issues de l'immigration et d'une policière entre 2000 et 2006.

Le Sozialistische Gleichheitspartei (Parti de l'égalité socialiste - SGP) et le World Socialist Web Site condamnent fermement ces attaques qui, selon les connaissances actuelles, sont basées sur une conspiration d'extrême droite au sein des forces de police de la Hesse.

Samedi, le Frankfurter Rundschau a fait état des menaces de mort proférées contre Wissler et a décrit les résultats de ses propres recherches. Selon le reportage, un ordinateur de la police de la capitale de l'État, Wiesbaden, avait récupéré des données privées de la politicienne du Parti de gauche en février. Peu de temps après, Janine Wissler a reçu deux lettres contenant des abus et des menaces, ainsi que des données personnelles qui n'étaient pas publiques.

Ces lettres présentaient des similitudes avec les menaces proférées à l'encontre de l'avocate de Francfort Seda Başay-Yildiz, qui représentait la famille d'une victime du meurtre de la NSU au tribunal. Depuis l'été 2018, Başay-Yildiz a reçu plusieurs lettres de menaces contenant des insultes grossières, qui étaient également signées «NSU 2.0».

En réponse à l'article du Frankfurter Rundschau, Wissler a de nouveau reçu une menace de mort par courrier électronique.

Jeudi, le ministre de l'Intérieur du Land de Hesse, Peter Beuth (Union chrétienne-démocrate-CDU), a été contraint de publier un communiqué de presse dans lequel il admettait qu'un réseau d'extrême droite dans les forces de police ne pouvait plus être exclu. La signature «NSU 2.0» a éveillé ce soupçon, a déclaré Beuth. Il a annoncé - comme il l'avait fait auparavant - une «enquête approfondie». Il a dit qu'il allait nommer un enquêteur spécial pour investiguer sans relâche sur les menaces dirigées contre Wissler et l'avocate Başay-Yildiz.

Les enquêtes menées jusqu'à présent, qui n'ont abouti à rien, indiquent ce que tout cela signifie. Les meurtres de la NSU ont eu lieu sous les yeux des services secrets nationaux et d'au moins deux douzaines de leurs informateurs confidentiels. Cependant, malgré des années de procédures judiciaires et de nombreuses commissions d'enquête, l'implication étroite des services secrets dans cette série de meurtres a été étouffée.

Cette dissimulation a renforcé les réseaux terroristes d'extrême droite dans l'appareil d'État. Après la première lettre «NSU 2.0» à Başay-Yildiz qui menaçait de «massacrer» sa fille de deux ans, un groupe de discussion d'extrême droite a été découvert dans la police municipale de Francfort. Les policiers s'échangeaient des photos d'Hitler et des croix gammées. Une policière de ce groupe avait récupéré les données utilisées dans la lettre de menace concernant la famille de Mme Başay-Yildiz et son adresse personnelle sur l'ordinateur interne de la police. En décembre 2018, six policiers, dont cinq dans le commissariat 1 de Francfort, ont été suspendus de leurs fonctions.

En réponse, «NSU 2.0» a envoyé une deuxième lettre de menace à Başay-Yildiz. Les terroristes d'extrême droite se sont sentis tellement en sécurité qu'ils ont ouvertement exprimé leurs liens avec la police de Hesse. Ils ont écrit: «Vous [insulte vulgaire] ne savez manifestement pas ce que vous avez fait à nos collègues de la police».

Même à l'époque, il était clair qu'il ne s'agissait pas de cas individuels, mais d'une conspiration terroriste d'extrême droite de grande envergure au sein des forces de police. Le ministre de l'Intérieur Beuth suit maintenant le même modèle que celui de son prédécesseur, Volker Bouffier (CDU), l'actuel premier ministre du Land de Hesse, dans le cas de la NSU.

Lorsque Halit Yozgat a été assassiné par le NSU à Kassel en 2006, Bouffier a caché le plus longtemps possible la présence sur les lieux du crime d'Andreas Temme, un officier du bureau de protection de la constitution du Land de Hesse (comme on appelle les services secrets), chargé de surveiller les informateurs confidentiels. Lorsque l'affaire ne pouvait plus être dissimulée, il n'a accordé à Temme qu'une autorisation limitée de témoigner. Les dossiers de l'affaire sont toujours sous clé et le resteront pendant encore 30 ans.

En conséquence, la conspiration terroriste d'extrême droite au sein de l'appareil d'État est restée intacte. Sa prochaine victime a été le président du district de Kassel, Walter Lübcke (CDU), qui a été abattu de sang-froid sur la terrasse de sa maison le 2 juin de l'année dernière. Le meurtrier présumé, Stephan Ernst, fréquentait les mêmes cercles néonazis de Kassel que la NSU et était connu depuis trois décennies par la police et les services secrets comme un violent criminel d'extrême droite.

Le meurtre de Lübcke a été le prélude à toute une série de tentatives d'assassinat perpétrées par des terroristes d'extrême droite. Le 9 octobre 2019, plus de 70 participants d'une célébration du Yom Kippour à Halle n'ont échappé à un meurtre de masse que par chance. L'assassin d'extrême droite Stephan Balliet a tiré sur deux passants après avoir été incapable d'entrer dans la synagogue.

Le 19 février de cette année, un terroriste d'extrême droite a abattu neuf personnes dans la ville de Hanau, en Hesse, et en a blessé six autres, dont certaines gravement. Le massacre a eu lieu dans deux bars de shisha, fréquentés principalement par des immigrants. Le procureur général fédéral chargé de l'enquête a évoqué les «attitudes profondément racistes» de l'auteur. Quelques jours auparavant, la police avait arrêté 12 extrémistes de droite soupçonnés de préparer des massacres simultanés dans plusieurs mosquées.

Les conspirations d'extrême droite au sein de l'armée sont connues depuis longtemps. La semaine dernière, la ministre de la Défense Annegret Kramp-Karrenbauer (CDU) a été contrainte de dissoudre partiellement le commandement des forces spéciales (KSK) parce que de plus en plus de détails sur les réseaux terroristes d'extrême droite ont été mis au jour. Cependant, comme pour la police, la restructuration du KSK ne sert pas à combattre et à éliminer les réseaux d'extrême droite, mais à les protéger et à les maintenir.

Aujourd'hui, le terrorisme d'extrême droite est dirigé contre une politicienne du Parti de gauche. C'est un avertissement sérieux.

Les représentants du gouvernement et de tous les partis au Bundestag (parlement fédéral) ont exprimé leur «grande inquiétude» concernant les menaces de mort proférées à l'encontre de Janine Wissler et ont déclaré leur soutien. Ils ont fait la même chose après le massacre de Hanau, l'assassinat de Halle et le meurtre de sang-froid de Walter Lübcke. Comme d'habitude, ils ont souligné leur «horreur», leur «consternation» et leur compassion envers les proches des victimes.

En vérité, il n'existe aucune institution au sein de l'ensemble de l'establishment politique - parmi les partis, les autorités chargées de l'enquête et le système judiciaire - qui est désireuse et capable de mettre fin à la conspiration d'extrême droite dans l'appareil d'État.

Les mêmes politiciens et partis qui aujourd'hui mettent en garde contre les «dangers pour la démocratie» ont créé le climat idéologique et les conditions politiques nécessaires au terrorisme d'extrême droite. Ceci est directement lié au retour de la politique de grande puissance allemande et à un programme frénétique de réarmement militaire, qui est massivement promu par la grande coalition des chrétiens-démocrates et des sociaux-démocrates, soutenue par tous les partis du Bundestag.

Pour mettre en œuvre cette politique, l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) et d'autres forces d'extrême droite ont été systématiquement promues par l'élite au pouvoir. L'AfD fonctionne comme l'aile politique du terrorisme d'extrême droite. L'appareil de sécurité, qui est truffé de réseaux d'extrême droite, est son aile étatique, et le gouvernement de grande coalition est son parapluie protecteur et son complice.

La seule façon de mettre fin au terrorisme d'extrême droite est de mobiliser la classe ouvrière sur la base d'un programme socialiste international.

Malgré ses profondes divergences politiques avec le Parti de gauche, le Sozialistische Gleichheitspartei appelle à la défense de Janine Wissler et à une opposition politique active aux attaques dont elle fait l'objet. Il est grand temps de mettre fin à la conspiration entre la grande coalition, l'appareil d'État et l'extrême droite. Pas de retour de l'Allemagne à une politique agressive de grande puissance! Pour un programme socialiste contre le fascisme et la guerre!

(Article paru en anglais le 11 juillet 2020)

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