23/11/2020 reseauinternational.net  4 min #181994

Le soutien des états-Unis au séparatisme tibétain est troublant

par Andrew Korybko.

La Maison Blanche a  accueilli vendredi Lobsang Sangay, le chef du « gouvernement en exil » autoproclamé du Tibet. Les médias ont rapporté que c'était la première fois en six décennies que le gouvernement américain faisait une telle chose. Cette évolution est extrêmement inquiétante car elle montre que l'administration Trump soutient le séparatisme en Chine. Elle suggère également que Donald Trump, qui pourrait perdre son recours juridique contre les résultats des élections de ce mois-ci, tente d'aggraver encore les relations avec la Chine avant de quitter son poste.

Le Tibet est une région autonome au sein de la République Populaire de Chine qui a été libérée par le gouvernement central en 1950. Avant cela, les chefs religieux radicaux maintenaient la majorité de la population en esclavage dans un système féodal. Les États-Unis ont ensuite soutenu les militants tibétains pendant les 22 années suivantes jusqu'à ce que l'ancien Président américain Richard Nixon mette fin à ce qui a été décrit comme le « programme tibétain de la CIA » lorsque son pays a entamé son rapprochement historique avec la Chine.

Trump met tout cela en danger en déroulant le tapis rouge pour que Sangay puisse rencontrer son coordinateur spécial pour les questions tibétaines. C'est une démarche très inamicale qui laisse entendre que le Président accorde du crédit aux prétentions de Sangay de diriger un « gouvernement en exil ». En effet, cela équivaut à un soutien tacite à son programme politique et laisse entendre que les États-Unis ne respectent plus leur politique d'une seule Chine. En vérité, cependant, ils ont déjà violé ce principe en vendant des armes à Taiwan et en y envoyant des fonctionnaires au début de cette année.

Mais l'angle tibétain mérite une attention particulière en raison du rôle qu'il pourrait jouer dans la politique étrangère américaine. L'alliance militaire de facto des États-Unis avec l'Inde est un fait accompli dans la géopolitique asiatique, et le Pentagone pourrait espérer l'utiliser pour relancer le programme tibétain de la CIA dans le pire des scénarios. Heureusement, le gouvernement indien ne semble pas intéressé par cette question pour l'instant, en dépit du fait qu'il accueille le Dalaï Lama à Dharamsala.

Néanmoins, il est difficile de discerner quelle fin poursuit Trump pour entreprendre une action aussi radicale. On ne sait pas s'il restera en fonction après janvier, il pourrait donc essayer de gâcher un éventuel rapprochement entre la Chine et les États-Unis sous une éventuelle administration Biden. Si c'est le cas, alors l'accueil de Sangay par la Maison Blanche n'est qu'un spectacle politique sans réelle signification. Toutefois, si ses contestations judiciaires aboutissent, il pourrait être très difficile pour la Chine de traiter avec les États-Unis après ce qui vient de se passer.

C'est une chose que des pays comme la Chine et les États-Unis se fassent concurrence dans divers domaines, mais c'en est une autre que l'un d'entre eux soutienne le séparatisme chez l'autre, comme les États-Unis le font contre la Chine dans leur dernière action. De telles actions doivent être condamnées par la communauté internationale pour le terrible précédent qu'elles établissent. On ne peut s'attendre à ce que les États-Unis soutiennent des objectifs séparatistes similaires dans d'autres pays à l'avenir s'ils sont prêts à le faire contre la Chine, qui est beaucoup plus puissante que la plupart des pays. Ce seul fait montre à quel point l'administration Trump fait preuve de fourberie dans ce qui pourrait être ses derniers mois au pouvoir.

Biden ferait bien de condamner la démarche de Trump s'il est sincère quant à l'amélioration des relations avec la Chine s'il devait réussir à prendre ses fonctions dans moins de deux mois. Les membres du Congrès devraient également faire part de leurs préoccupations. Il ne s'agit pas non plus d'une question partisane puisque la politique officielle des États-Unis est de reconnaître l'unité de la République Populaire de Chine. Trump brise donc tacitement la politique américaine en faisant venir Sangay à la Maison Blanche.

En regardant vers l'avenir, les États-Unis doivent cesser de provoquer la Chine en accueillant des dirigeants séparatistes. C'est contraire au droit international et à la propre politique du gouvernement américain. Trump semble obsédé par l'idée de gâcher l'éventuelle présidence de Biden, surtout en ce qui concerne les relations bilatérales avec la République Populaire. Il est trop tard pour qu'il puisse réparer son héritage de ruine des relations avec la Chine, mais Biden pourrait commencer à construire son propre héritage en condamnant la démarche de Trump et en cherchant plutôt à améliorer les relations avec la Chine.

 Andrew Korybko

source :  oneworld.press

traduit par  Réseau International

 reseauinternational.net

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