{"163092":{"id":"163092","parent":"0","time":"1571286862","url":"http:\/\/newsnet.fr\/163092","source":"http:\/\/www.cadtm.org\/Le-Venezuela-dystopique","category":"Latina","title":"Le Venezuela dystopique","catalog-images":"1\/newsnet_163092_cd2029.jpg","image":"http:\/\/newsnet.fr\/img\/newsnet_163092_cd2029.jpg","hub":"newsnet","url-explicit":"http:\/\/newsnet.fr\/art\/le-venezuela-dystopique","admin":"newsnet","views":"474","priority":"3","length":"36914","lang":"fr","content":"\u003Cp\u003E\u003Cspan class=\"philum ic-img2\"\u003E\u003C\/span\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u00ab Nous n'avons jamais ouvert beaucoup de salle de th\u00e9\u00e2tre dans ce pays. Et pour quoi ? La structure fondamentale du pouvoir a toujours \u00e9t\u00e9 notre meilleure sc\u00e8ne \u00bb (Jos\u00e9 Ignacio Cabrujas)\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe Venezuela est plong\u00e9 dans une crise dont on ne voit pas le bout. Certains experts parlent m\u00eame d'une situation \u00e9conomique qui rappelle manifestement celle soufferte lors d'une guerre civile [\u003Ca href=\"#nb1\" id=\"nh1\"\u003E1\u003C\/a\u003E]. Apr\u00e8s des ann\u00e9es \u00e0 travailler sur les conditions de la mise en place et r\u00e9ception de la R\u00e9volution bolivarienne dans les classes populaires, et ensuite au sein de l'\u00c9tat, j'aimerais ici proposer des clefs de lecture de l'actuel d\u00e9sastre v\u00e9n\u00e9zu\u00e9lien post-chaviste.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe pays s'est vid\u00e9 de plus de 10% de sa population en deux ans, et semble incarner dramatiquement les affres de la maladie hollandaise ou, ce que l'on serait tent\u00e9 d'appeler la calamit\u00e9 de la colonialit\u00e9 du pouvoir d'une \u00e9conomie extractiviste mono-exportatrice. Malgr\u00e9 tout, il fut un temps le pays de cocagne de la gauche internationale. Mais rappelons d'abord quelques unes des \u00e9tapes du d\u00e9sastre.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cb\u003EL'\u00e9conomie en chute libre\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe Venezuela conna\u00eet une situation \u00e9conomique sans pr\u00e9c\u00e9dent, que certains chiffres peuvent ais\u00e9ment illustrer : en plus d'une chute de pr\u00e8s de 70% de sa production p\u00e9troli\u00e8re entre 2008 et 2019 (Sutherland 2019), 700 entreprises ont ferm\u00e9 en 2018. Sur la p\u00e9riode qui correspond \u00e0 la R\u00e9volution Bolivarienne (1998-2019), ce chiffre s'\u00e9l\u00e8ve \u00e0 500 000 selon les informations prodigu\u00e9es par Consecomercio [\u003Ca href=\"#nb2\" id=\"nh2\"\u003E2\u003C\/a\u003E]. De l'ensemble de ces entreprises, en 2018, 576 sont propri\u00e9t\u00e9s de l'Etat [\u003Ca href=\"#nb3\" id=\"nh3\"\u003E3\u003C\/a\u003E] (quatre fois plus qu'au Br\u00e9sil et dix fois plus qu'en Argentine). A cela s'ajoute une indemnisation colossale \u00e0 rembourser au g\u00e9ant p\u00e9trolier am\u00e9ricain ConocoPhillips de 8 milliards 700 millions de dollars \u00e0 travers le tribunal du Centre International d'Arbitrage des Diff\u00e9rends (CIADI), d\u00e9pendant de la Banque Mondiale [\u003Ca href=\"#nb4\" id=\"nh4\"\u003E4\u003C\/a\u003E].\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EMais cette crise profonde ne date pas d'aujourd'hui, et la chute de la production (ainsi que celle des importations) est vertigineuse \u00e0 partir de 2010. La construction d'alternatives non-capitalistes \u00e0 l'\u00e9conomie a pourtant \u00e9t\u00e9 bon train un temps, port\u00e9e par les incroyables dividendes du boom p\u00e9trolier des ann\u00e9es 2000. Ainsi, alors qu'en 2006, il existait 180 000 coop\u00e9ratives, puis 265 000 en 2008 [\u003Ca href=\"#nb5\" id=\"nh5\"\u003E5\u003C\/a\u003E], l'id\u00e9e se d\u00e9sint\u00e8gre progressivement et est remplac\u00e9e par celle des \u00ab noyaux de d\u00e9veloppement endog\u00e8ne \u00bb, puis par les \u00ab entreprises de production sociale \u00bb, parall\u00e8lement \u00e0 la r\u00e9cup\u00e9ration d'entreprises par l'\u00c9tat, gr\u00e2ce \u00e0 des expropriations et des nationalisations cibl\u00e9es. En principe, ces m\u00e9canismes et ces figures ont \u00e9t\u00e9 mis en place sur la base de la souverainet\u00e9 \u00e9conomique, la recherche d'alternatives au syst\u00e8me capitaliste, et la \u00ab d\u00e9mocratisation du capital \u00bb.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDepuis trois ans, les conditions \u00e9conomiques se sont largement d\u00e9grad\u00e9es, donnant lieu \u00e0 une inflation cumul\u00e9e de 1 700 000% en 2018, soit 3-4% par jour. Des situations hors du commun prennent le pas sur la normalit\u00e9 : une entreprise comme Goodyear, par exemple, ferme et indemnise ses travailleurs avec des pneus [\u003Ca href=\"#nb6\" id=\"nh6\"\u003E6\u003C\/a\u003E].\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ESi les thurif\u00e9raires du gouvernement crient \u00e0 la guerre \u00e9conomique, m\u00e9lop\u00e9e pour d\u00e9noncer les ravages de graves sanctions \u00e9conomiques pens\u00e9es et ex\u00e9cut\u00e9es depuis les \u00c9tats-Unis, l'opposition et une partie toujours plus importante de la soci\u00e9t\u00e9 rappelle la concentration du pouvoir, la corruption et le r\u00f4le des militaires, des institutions vid\u00e9es de leur substance, et une vie quotidienne rythm\u00e9e par la m\u00e9ga-inflation. Il semble donc que nous soyons face \u00e0 une situation de \u00ab chaos id\u00e9al-typique \u00bb (Bozarslan 2001) par laquelle on peut aussi analyser la perte de sens et le d\u00e9sarroi des gens ordinaires.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDans ce contexte, la crise-r\u00e9volution \u00e9merge comme un r\u00e9v\u00e9lateur qui nous renvoie aussi au couple l\u00e9gitimit\u00e9\/ob\u00e9issance. En effet, grand nombre d'observateurs font \u00e9tat de l'incroyable r\u00e9signation - ou inertie - qui habite la population, malgr\u00e9 des privations r\u00e9elles, et quelques soul\u00e8vements infructueux, les choses poursuivent leur cours, accompagn\u00e9es par un net recul \u00e9lectoral du chavisme maduriste \u00e0 partir de 2013.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ENotre hypoth\u00e8se ici est que le Venezuela appara\u00eet comme le parangon d'une dystopie intimement li\u00e9e au sentiment d'effondrement global ambiant, et par l\u00e0 \u00e0 la crise et la red\u00e9finition du capitalisme. Le Venezuela repr\u00e9sente une \u00e9vocation, une repr\u00e9sentation en miniature de cette crise : p\u00e9tro-Etat macroc\u00e9phalique, tant\u00f4t omnipotent, tant\u00f4t invert\u00e9br\u00e9, qui r\u00e9ussit \u00e0 se hisser au niveau de l'utopie politique, p\u00eache aujourd'hui en eaux troubles, celles des affres d'un monde dominant aux abonn\u00e9es absents d'une r\u00e9flexion sur notre survie, \u00e0 toute.s. Il est \u00e9galement le reflet du reflux des id\u00e9ologies progressistes \u00e9tatiques, de la multipolarit\u00e9, tout cela rapport\u00e9 au contre-coup symbolique de la d\u00e9cadence de la R\u00e9volution bolivarienne [\u003Ca href=\"#nb7\" id=\"nh7\"\u003E7\u003C\/a\u003E], et la victoire concomitante d'options politiques ultra-conservatrices et lib\u00e9rales dans la r\u00e9gion.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDans ce contexte d'effondrement en miniature, on assiste aussi \u00e0 l'\u00e9clatement des identit\u00e9s politiques et de l'axe droite-gauche : il est aujourd'hui question de continuit\u00e9 (dans la crise) ou de rupture (avec la crise). Les efforts de d\u00e9finition politique sont vains et essouffl\u00e9s par les diff\u00e9rentes strat\u00e9gies de gestion de la crise et de reproduction des groupes de pouvoir. Dans cet entrelacement des r\u00e9gimes de pouvoir et d'int\u00e9r\u00eats, les partis politiques d'opposition repr\u00e9sentent l'ordre ancien aux yeux des partisans de la r\u00e9volution - de moins en moins nombreux au demeurant [\u003Ca href=\"#nb8\" id=\"nh8\"\u003E8\u003C\/a\u003E] -, alors que le PSUV et les militaires se font l'establishment du Nouveau qui se r\u00e9p\u00e8te invariablement. Sur le plan des structures, nous y voyons la continuit\u00e9 de groupements qui ont peu \u00e9volu\u00e9 ces deux derni\u00e8res d\u00e9cennies. Ce que l'on observe rel\u00e8ve plut\u00f4t de la monopolisation de la repr\u00e9sentation et des ressources politiques, de la marginalisation et l'absence d'autres groupes.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cb\u003EPassage d'un \u00c9tat social de droit \u00e0 un \u00c9tat d\u00e9faillant\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EC'est une construction qui s'inscrit dans la dur\u00e9e, et qui vient achopper sur l'id\u00e9e d'un revirement permanent, d'une r\u00e9solution violente de la crise, tant par le discours employ\u00e9 que par les \u00e9l\u00e9ments ext\u00e9rieurs, en premier lieu l'inflation.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDans les ann\u00e9es 1980, l'\u00e9conomiste Albert Hirschman parlait d\u00e9j\u00e0 d'une \u00ab matrice sociopolitique de l'inflation \u00bb (Hirschman 1980) et son coll\u00e8gue Norbert Lechner de \u00ab culture de l'inflation qui d\u00e9stabilise les exp\u00e9riences accumul\u00e9es, acc\u00e9l\u00e8re les attentes, raccourcit les d\u00e9lais et, en d\u00e9finitive, d\u00e9valorise le futur \u00bb. Tout cela, reprenait-il, \u00ab affecte profond\u00e9ment le fonctionnement de la d\u00e9mocratie \u00bb (Lechner 1991).\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELorsqu'il est question du Venezuela, les analyses vont bon train quant aux explications d'une situation qui semble chaque jour plus inextricable. Certaines voix s'\u00e9l\u00e8vent pour parler d'une \u00ab modernit\u00e9 avort\u00e9e \u00bb (Vasquez 2019) mais peu de personnes s'essayent \u00e0 une analyse des tenants et aboutissants de la situation de crise, sans recourir \u00e0 une prise de position arc-bout\u00e9e sur une ontologie de l'all\u00e9geance \u00e0 un projet politique ou \u00e0 son rejet inconditionnel.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EJe propose donc de regarder d'un peu plus pr\u00e8s les effets de l'hyperinflation dans d'autres contextes, pour s'extirper du conflit politique hautement symbolique qui prend forme autour de la situation v\u00e9n\u00e9zu\u00e9lienne. Dans un cadre d'hyperinflation, la possibilit\u00e9 de pr\u00e9diction entre les individus et les biens dispara\u00eet, s'\u00e9tablit alors une incoh\u00e9rence des syst\u00e8mes d'\u00e9quivalence entre les biens, et un \u00e9vanouissement de l'autorit\u00e9 publique comme dans la situation argentine analys\u00e9e par Kessler et Sigal (1997).\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa culture de l'urgence a toujours \u00e9t\u00e9 un th\u00e8me r\u00e9current de l'analyse du contexte v\u00e9n\u00e9zu\u00e9lien [\u003Ca href=\"#nb9\" id=\"nh9\"\u003E9\u003C\/a\u003E] (Pedrazzini, Sanchez 1998, Coronil 1997) mais elle est renforc\u00e9e par une rationalit\u00e9 inflationniste (Kessler, Sigal 1997) qui raccourcit le temps, figeant ainsi toute possibilit\u00e9 de penser des r\u00e9alisations \u00e0 moyen et long termes. Dans une \u00e9conomie inflationniste, l'\u00e9pargne devient sp\u00e9culation. On sp\u00e9cule \u00e0 d\u00e9faut de pouvoir pr\u00e9voir. Cet \u00e9tat de fait a des effets tr\u00e8s nets sur les modes de gouvernementalit\u00e9.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa comparaison avec le contexte argentin hyper-inflationniste des ann\u00e9es 1990 permet l'analogie entre les \u00ab sp\u00e9culateurs fourmis \u00bb argentins et les bachaqueros v\u00e9n\u00e9zu\u00e9liens. Les sp\u00e9culateurs fourmis renvoient aux petits \u00e9pargnants qui allaient imm\u00e9diatement changer en dollar une partie de leur salaire au moment des crises inflationnaires pouvant ainsi \u00ab revendre \u00bb cette somme de devises sur le march\u00e9 noir. Le terme bachaqueros au Venezuela se r\u00e9f\u00e8re \u00e0 une grosse fourmi rouge (bachaco) et, particuli\u00e8rement depuis la crise qui s'initie en 2013, aux personnes qui vont vendre au march\u00e9 noir des produits de premi\u00e8re n\u00e9cessit\u00e9 soumis \u00e0 un contr\u00f4le des prix, soit par la voie de l'accaparement, soit par l'exfiltration des marchandises vers la Colombie o\u00f9 elles sont rachet\u00e9es en devise (\u00e9changeable, ce qui n'est pas le cas du bolivar, monnaie d\u00e9valu\u00e9e qui s'\u00e9change aujourd'hui au poids). Il s'agit bien \u00e0 premi\u00e8re vue de strat\u00e9gie de subsistance organis\u00e9e par les classes populaires, et non d'un syst\u00e8me de domination en soi, comme cela a souvent \u00e9t\u00e9 r\u00e9p\u00e9t\u00e9 par le gouvernement. Des formes d'extractivisme populaire, en somme.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u00ab Les cercles ferm\u00e9s d'\u00e9pargne \u00e0 buts d\u00e9termin\u00e9s \u00bb \u00e0 l'argentine, sont remplac\u00e9s au Venezuela par des \u00ab telares \u00bb (m\u00e9tiers \u00e0 tisser) ou \u00ab fleurs de l'abondance \u00bb qui sont des groupes form\u00e9s en g\u00e9n\u00e9ral sur Whatsapp, compos\u00e9s par des femmes en grande majorit\u00e9, qui s'organisent selon le degr\u00e9 d'engagement dans le telar et l'apport \u00e9mis (de 100 \u00e0 des milliers de dollars), esp\u00e9rant ainsi en r\u00e9cup\u00e9rer dix fois le montant au bout d'un certain temps. Ces dispositifs semblent sceller une solidarit\u00e9 qui fait d\u00e9faut dans le monde quotidien, autant qu'elles deviennent une forme de th\u00e9saurisation-retour sur investissement \u00e0 l'ombre de l'inflation. N\u00e9anmoins, ils nous rappellent aussi les exp\u00e9riences d'\u00e9changes pyramidales avant l'effondrement total.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EQuoi qu'il en soit, la routinisation dans ces contextes est presque inconcevable. Il en va de m\u00eame dans l'espace gouvernemental, o\u00f9 malgr\u00e9 des airs de contr\u00f4le et de recomposition des forces \u00e0 l'issue d'une crise (alimentaire, \u00e9nerg\u00e9tique, politique) les r\u00e9actions sont des tropismes de d\u00e9fense et de frein \u00e0 l'irr\u00e9pressible marche forc\u00e9e du temps et des ressources. A l'instar d'autres \u00e9conomies d\u00e9cadentes, la \u00ab panne \u00bb devient un jalon normal du processus de production politique ou \u00e9conomique. Il y a peu, la m\u00e9ga-coupure de courant qui a touch\u00e9 l'ensemble du pays pendant plus de 48 heures, et continue dans certaines r\u00e9gions de mani\u00e8re perl\u00e9e, a r\u00e9v\u00e9l\u00e9 l'impuissance du gouvernement, taxant \u00ab l' Empire \u00bb d'une attaque cibl\u00e9e, sans quoi l'explication devenait trop encombrante pour lui, du fait d'un processus de d\u00e9t\u00e9rioration avanc\u00e9e de toutes les infrastructures, et \u00e9troitement li\u00e9 \u00e0 un \u00e9cheveau de corruption, nous y reviendrons.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EFinalement, l'\u00c9tat devient coercitif et r\u00e9pressif car il n'a pas les moyens de contrecarrer les effets de la crise \u00e9conomique qui fragilise chaque jour un peu plus le tissu social, face aux revendications l\u00e9gitimes qui agitent des secteurs sociaux en proie \u00e0 l'\u00e9rosion de leur subsistance, et de leur existence m\u00eame.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cb\u003EDu chaos mon\u00e9taire \u00e0 la dystopie\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EL'inflation et la monnaie sont un catalyseur effectif de cette situation : la disparition du liquide, l'utilisation des moyens de paiement \u00e9lectronique, l'absence de papier pour toutes les t\u00e2ches qui incombent \u00e0 un \u00c9tat (notamment la monnaie, et les papiers d'identit\u00e9s) cong\u00e9dient tout ordre rationnel. La monnaie se rach\u00e8te \u00e0 un prix sup\u00e9rieur \u00e0 sa valeur d'usage, car dans une \u00e9conomie de p\u00e9nurie tout est objet d'accaparement et de sp\u00e9culation, m\u00eame l'argent...Un tel chaos mon\u00e9taire ressortit \u00e0 une expression dystopique de la soci\u00e9t\u00e9 et de l'exp\u00e9rience du monde.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDu c\u00f4t\u00e9 du gouvernement, les tours de passe-passe rh\u00e9torique pr\u00e9sentant l'inflation comme \u00e9tant \u00ab provoqu\u00e9e \u00bb (inducida) ou sp\u00e9culative ont laiss\u00e9 place \u00e0 un d\u00e9sert explicatif, seulement arros\u00e9 par de constantes augmentations du salaire minimum. D'ailleurs, il n'y a plus de statistiques \u00e9manant de la Banque Centrale depuis 2014 [\u003Ca href=\"#nb10\" id=\"nh10\"\u003E10\u003C\/a\u003E]. A l'inverse du cas argentin o\u00f9 la crise inflationniste a men\u00e9 \u00e0 la d\u00e9mission de plusieurs gouvernements, au Venezuela, elle semble sceller le destin d'une reproduction ad nauseam du d\u00e9sastre sous des oripeaux de \u00ab guerre \u00e9conomique \u00bb et d'accentuation des sanctions \u00e9conomiques am\u00e9ricaines.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDans ce contexte, la loi du plus fort est celle qui s'impose. En premier lieu celle des militaires, qui ont \u00e9t\u00e9 savamment utilis\u00e9s par Ch\u00e1vez mais maintenus \u00e0 distance par un jeu d'\u00e9quilibre du pouvoir qui a explos\u00e9 en mille morceaux au moment de sa mort et du relais de pouvoir \u00e0 Maduro. En second lieu celle de Maduro (et ses cliques) qui a h\u00e9rit\u00e9 de groupes de pouvoir disparates, d'une \u00e9conomie en chute libre, monopolis\u00e9e par des technocrates moribonds car trop li\u00e9s aux r\u00e9seaux de corruption nationaux et trans-nationaux. On distingue alors un glissement m\u00e9taphorique entre l' \u00ab Etat magique \u00bb tel qu'il a \u00e9t\u00e9 d\u00e9fini par Coronil, et le chaos de la magie noire p\u00e9troli\u00e8re. Du Sauveur au Destructeur, il n'y a qu'un pas.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cb\u003EDe l'\u00c9tat magique \u00e0 la magie noire de la corruption\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EEn 1985, Charles Tilly, socio-historien am\u00e9ricain, publiait un article sur la construction de l'\u00c9tat en tant que crime organis\u00e9. Se pencher sur les r\u00e9seaux de corruption mobilis\u00e9s durant plus d'une d\u00e9cennie au Venezuela fait ind\u00e9niablement \u00e9cho \u00e0 cette formule tillienne. Lorsque l'on \u00e9tablit une cartographie des r\u00e9seaux de corruption v\u00e9n\u00e9zu\u00e9liens, on se retrouve face \u00e0 un v\u00e9ritable \u00e9cheveau dans lequel des acteurs h\u00e9t\u00e9rog\u00e8nes s'entrem\u00ealent en d'\u00e9poustouflants rebondissements. Pour s'introduire dans cette toile, il faut rapprocher quatre \u00e9l\u00e9ments : les aliments, le p\u00e9trole, les militaires et le syst\u00e8me financier. Je n'ai pas la pr\u00e9tention ici d'offrir un reflet parfait et surtout exhaustif d'un ph\u00e9nom\u00e8ne dont la complexit\u00e9 n'a de paire. Malgr\u00e9 tout, je vais tenter d'en donner un aper\u00e7u en isolant un segment de la grande toile de la corruption v\u00e9n\u00e9zu\u00e9lienne.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EMais d'abord rappelons quelques donn\u00e9es int\u00e9ressantes : en 2012, l'\u00c9tat commercialisait 49% des aliments consomm\u00e9s dans le pays, et dans le m\u00eame temps, les importations atteignaient leur niveau record, dont 60% sont g\u00e9n\u00e9r\u00e9es par l'Etat. En 2014, le taux de p\u00e9nurie s'\u00e9levait \u00e0 30% suivant la courbe de baisse drastique des importations. En 2015, les entreprises agroalimentaires expropri\u00e9es r\u00e9duisaient leur production entre 5 et 14% par rapport \u00e0 l'ann\u00e9e ant\u00e9rieure. En 2016, les CLAP [\u003Ca href=\"#nb11\" id=\"nh11\"\u003E11\u003C\/a\u003E] sont cr\u00e9\u00e9s ainsi que la Grande Mission Approvisionnement Souverain S\u00fbr, sous contr\u00f4le militaire, qui impose aux producteurs priv\u00e9s de vendre 50% de leur production [\u003Ca href=\"#nb12\" id=\"nh12\"\u003E12\u003C\/a\u003E] (Giacalone, Hernandez, Zerpa 2017 : 72-73).\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ECe que l'on peut ais\u00e9ment retenir de ces quelques chiffres, c'est une \u00e9volution qui passe par la d\u00e9privatisation de la production alimentaire, l'augmentation du poids de l'importation dans l'activit\u00e9 \u00e9conomique nationale, la reprivatisation indirecte de la manne p\u00e9troli\u00e8re sous forme de \u00ab cadeaux \u00bb fait aux apparatchiks du r\u00e9gime, et enfin, la militarisation du contr\u00f4le de la distribution. Il s'agit donc bien d'une forme de redistribution par le haut de ce qui devrait surtout \u00eatre un instrument de compensation des in\u00e9galit\u00e9s sociales.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EPour faire vite, je m'arr\u00eaterai plus sp\u00e9cifiquement sur le syst\u00e8me de reprivatisation de la manne p\u00e9troli\u00e8re et la nature des \u00ab cadeaux \u00bb dont il est question ici. Partons d\u00e9j\u00e0 du chiffre mirobolant de ce qui est estim\u00e9 avoir \u00e9t\u00e9 soustrait des comptes publics p\u00e9troliers depuis les d\u00e9buts de la r\u00e9volution bolivarienne : 6 milliards de dollars dans un seul circuit de corruption, celui autour de PDVSA et de Rafael Ram\u00edrez, le presque \u00e9ternel ministre du p\u00e9trole et pr\u00e9sident de PDVSA durant les ann\u00e9es Ch\u00e1vez, aujourd'hui en cavale dor\u00e9e. Ceci sans compter ce qui est le deuxi\u00e8me plus gros moteur de la corruption dans ces ann\u00e9es-l\u00e0 : la fuite des capitaux li\u00e9e au contr\u00f4le des changes [\u003Ca href=\"#nb13\" id=\"nh13\"\u003E13\u003C\/a\u003E].\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EQuoiqu'il en soit, 2008 est l'ann\u00e9e la plus faste pour la fuite de capitaux via des m\u00e9canismes illicites (assignation indus de devise, importation en surfacturation, d\u00e9tournement, note bancaire structur\u00e9e), o\u00f9 selon un calcul, la somme totale \u00e9quivaudrait \u00e0 presque 50% des revenus p\u00e9troliers [\u003Ca href=\"#nb14\" id=\"nh14\"\u003E14\u003C\/a\u003E]. C'est aussi \u00e0 ce moment que commence la chute lente mais soutenue de la production p\u00e9troli\u00e8re dans un contexte de crise \u00e9conomique mondiale, de baisse des prix du p\u00e9trole et d'acc\u00e9l\u00e9ration de la fuite des capitaux.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EPas besoin d'\u00eatre ing\u00e9nieur p\u00e9trolier pour comprendre qu'il n'y a plus de fonds disponibles pour soutenir l'investissement en infrastructure qu'exige l'extraction p\u00e9troli\u00e8re. De cette \u00e9quation mortif\u00e8re, aliment\u00e9e par la magie noire de la corruption, les membres de la \u00ab boli-bourgeoisie \u00bb en sont les premiers op\u00e9rateurs. Ce groupe d'acteurs entrepreneurs appara\u00eet apr\u00e8s la rupture entre le secteur priv\u00e9 et le gouvernement \u00e0 l'issue du lock out patronal et p\u00e9trolier de 2003.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EMais revenons \u00e0 notre cas de figure. Pour un des accus\u00e9s de tisser la toile de cette inf\u00e2me op\u00e9ration, la meilleure d\u00e9fense semble encore le culot : lorsqu'un journaliste commente \u00e0 Nervis Villalobos (ex-viceministre d'\u00e9nergie) que le fait de cr\u00e9er une entreprise off shore suppose de cacher quelque chose, l'imp\u00e9trant r\u00e9pond qu'il devait lui, en retour, se prot\u00e9ger de l'ins\u00e9curit\u00e9 r\u00e9gnant au Venezuela [\u003Ca href=\"#nb15\" id=\"nh15\"\u003E15\u003C\/a\u003E].\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EC'est donc \u00e0 un festin vampirique que se sont invit\u00e9s les membres d'un r\u00e9seau de corruption qui prend des allures de Tr\u00e9sor National d'un \u00c9tat sans \u00c9tat, et surtout sans lois. Les calculs ne concordent pas tous, mais laissent percevoir l'\u00e9tendue du d\u00e9minage. Lorsque l'on examine de pr\u00e8s ce ph\u00e9nom\u00e8ne, le plus surprenant est le r\u00f4le tenu par les \u00c9tats-Unis : v\u00e9ritable justice extra-territoriale d'une guerre asym\u00e9trique, le gendarme \u00ab n\u00e9cessaire \u00bb d'une r\u00e9volution d\u00e9plum\u00e9e et, en m\u00eame temps, l'op\u00e9rateur de la corruption (\u00e0 travers des entreprises transnationales telles que CITGO, Refco, Rosemont, Stanford Bank notamment) et, in fine, l'acteur primordial de l'\u00e9conomie v\u00e9n\u00e9zu\u00e9lienne.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EGr\u00e2ce au FCPA (Foreign Corrupt Practices Act), un dispositif qui permet d'agir sur les march\u00e9s et les autorit\u00e9s nationales, et bien s\u00fbr aux dollars, la monnaie universelle, les Etats-Unis, deviennent le tribunal des \u00e9changes \u00e9conomiques : si des transactions ill\u00e9gales se sont d\u00e9roul\u00e9es sur son territoire ou en monnaie am\u00e9ricaine, le d\u00e9partement de Justice s'empare du cas. C'est chose faite dans une affaire in\u00e9dite qui implique directement sept v\u00e9n\u00e9zu\u00e9liens (et peut-\u00eatre huit), m\u00eal\u00e9es \u00e0 un \u00e9cheveau de d\u00e9tournement de fonds publics d'un milliard de dollars entre 2011 et 2013. Celui-ci n'aurait \u00e9t\u00e9 possible sans les bonnes dispositions de Rafael Ram\u00edrez, voire sa participation directe [\u003Ca href=\"#nb16\" id=\"nh16\"\u003E16\u003C\/a\u003E].\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EUne autre surprise de cette foire d'empoigne milliardaire, c'est la pr\u00e9sence des militaires dans tous les r\u00e9seaux de corruption sans en constituer le cœur apparent. La recette fondamentale du d\u00e9sastre v\u00e9n\u00e9zu\u00e9lien peut donc s'\u00e9grainer ainsi : un doigt de hi\u00e9rarque politique et de n\u00e9potisme, saupoudr\u00e9 de quelques op\u00e9rateurs du monde entrepreneurial et de la finance et une pinc\u00e9e de militaires.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ETout ce beau monde est depuis 2017 soumis \u00e0 une pression sans pareil : la confiscation et le gel de comptes, avoirs et propri\u00e9t\u00e9s par les \u00c9tats-Unis. C'est ce qui en fait des acteurs politiques de poids - et de l'ombre - aujourd'hui, notamment dans le cadre des n\u00e9gociations entam\u00e9es en Norv\u00e8ge, puis dans les \u00celes de la Barbade entre le gouvernement et l'opposition.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EL'ironie de l'histoire p\u00e9troli\u00e8re \u00ab r\u00e9volutionnaire \u00bb v\u00e9n\u00e9zu\u00e9lienne pourrait donc se r\u00e9sumer au fait que Rafael Ramirez, en voulant purger l'industrie de ces mauvaises habitudes \u00ab capitalistes \u00bb (cadeaux et autres largesses \u00e0 ses fonctionnaires interm\u00e9diaires et hauts-fonctionnaires) a pr\u00e9cipit\u00e9 une structure faite de saccage et de gabegie mirobolante [\u003Ca href=\"#nb17\" id=\"nh17\"\u003E17\u003C\/a\u003E]. Cette crise structurelle (et culturelle) s'est intensifi\u00e9e \u00e0 partir de 2009, lorsque la crise \u00e9conomique globale s'est faite ressentir, et a men\u00e9 \u00e0 une s\u00e9lectivit\u00e9 dans la distribution de pr\u00e9bendes \u00e9conomiques.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cb\u003EConclusions en suspens\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EIl y a quelques jours, j'ai eu l'occasion de m'entretenir avec un ancien haut-fonctionnaire de l'industrie p\u00e9troli\u00e8re v\u00e9n\u00e9zu\u00e9lienne, en attente de jugement aux Etats-Unis. Son verdict est sans appel : ce sont l'avarice et la cupidit\u00e9 personnelle qui ont men\u00e9 au naufrage de PDVSA et du Venezuela. Il ne peut y avoir, selon lui, de cause \u00e0 effet entre une institution et la mani\u00e8re dont elle est g\u00e9r\u00e9e. Alors qu'une grande partie des trames de corruption semble mener \u00e0 Ram\u00edrez, il reste un des acteurs les plus respect\u00e9s malgr\u00e9 tout, dans sa d\u00e9fense (et les faiblesses qui l'entourent) du socialisme du 21\u003Csup\u003Ee\u003C\/sup\u003E si\u00e8cle. C'est cela qui aurait d\u00e9truit la m\u00e9ritocratie, \u00e0 coup de permissivit\u00e9 et de pr\u00e9servation des relations sociales au sein de la m\u00e9ga-entreprise.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EApr\u00e8s la destitution en 2017 de Luisa Ortega, Procureure de la R\u00e9publique toute-puissante pendant les ann\u00e9es fastes du chavisme, aujourd'hui exil\u00e9e en Colombie, l'\u00c9tat aurait suspendu des dizaines de milliers d'enqu\u00eates en cours pour corruption [\u003Ca href=\"#nb18\" id=\"nh18\"\u003E18\u003C\/a\u003E]. Un pas de plus dans le marasme, et un punitivisme en mati\u00e8re de corruption tr\u00e8s s\u00e9lectif.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ECe qui nous rappelle en d\u00e9finitive que l'\u00e9conomie d'enclave propre \u00e0 la nature et aux modalit\u00e9s de la production renti\u00e8re p\u00e9troli\u00e8re, une \u00e9conomie latifundiste en quelque sorte, est le terreau privil\u00e9gi\u00e9 de la corruption et le ressort principal de l'h\u00e9morragie v\u00e9n\u00e9zu\u00e9lienne. Le Venezuela, El Dorado des nouveaux colonisateurs hispaniques au 16\u003Csup\u003Ee\u003C\/sup\u003E si\u00e8cle, s'est converti en \u00ab Venezuela Saoudite \u00bb dans les ann\u00e9es 1980, et en Venezuela chaviste, terre d'espoirs de la gauche internationale dans les ann\u00e9es 2000. Reste maintenant le Venezuela dystopique, o\u00f9 l'effondrement \u00e9cologique, \u00e9conomique, politique et sociale est t\u00e9l\u00e9vis\u00e9e.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cb\u003EBibliographie\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EBozarslan Hamit, \u00ab Le chaos apr\u00e8s le d\u00e9luge : notes sur la crise turque des ann\u00e9es 70 \u00bb, Cultures &\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EConflits, 24-25, hiver 1996- printemps 1997.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ECoronil Fernando, The Magical State : Nature, Money and Modernity in Venezuela, Chicago, The University of Chicago Press, 1997.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EGiacalone, Rita, Hern\u00e1ndez, Martha Y., Zerpa, Sadcidi, \u00ab Interpretaci\u00f3n te\u00f3rica del conflicto Estado-sector privado en el sistema agroalimentario venezolano (2001-2016) \u00bb, Revista de Ciencias Sociales, Vol. XXIII, No. 1, 2017, pp. 67-80.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EHirschman Albert, \u00ab La matriz social y pol\u00edtica de la inflaci\u00f3n : elaboraci\u00f3n sobre la experiencia latinoamericana \u00bb, in El Trimestre Econ\u00f3mico, n. 187, pp. 679-709.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EKessler Gabriel, Sigal Sylvia, \u00ab Comportements et repr\u00e9sentations face \u00e0 la dislocation des r\u00e9gulations sociales : l'hyperinflation en Argentine \u00bb, in Cultures & Conflits n\u00b0 24-25 (1997) pp.37-77.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELechner Norberto, \u00ab Condiciones socio-culturales de la transicion democratica ; a la busqueda de la comunidad perdida, in Estudios Internacionales, 94, 1991, 209-228.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EPedrazzini Yves, Sanchez Magaly Bandes, gangs et enfants de la rue : culture d'urgence \u00e0 Caracas, Editions Charles L\u00e9opold, 1998.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ESutherland Manuel, Impacto y naturaleza real de las sanciones econ\u00f3micas impuestas a Venezuela, Provea, 2019.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EVasquez Lezama Paula, \u00ab Cuando se consume el cuerpo del pueblo. La incertidumbre como pol\u00edtica de supervivencia en Venezuela \u00bb, in Revista Iberoamericana, vol. LXXXV, n\u00b0 266, janv-mars 2019, pp. 101-118.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003ENotes\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E[\u003Ca href=\"#nh1\" id=\"nb1\"\u003E1\u003C\/a\u003E] Kennett Rogoff, ancien responsable \u00e9conomique pour le FMI. Anatoly Kurmanaev, \u00ab Venezuela's Collapse Is the Worst Outside of War in Decades, Economists Say \u00bb in New York Times, 17\/05\/2019, \u003Ca href=\"https:\/\/www.nytimes.com\/2019\/05\/17\/world\/americas\/venezuela-economy.html\"\u003Enytimes.com\u003C\/a\u003E.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E[\u003Ca href=\"#nh2\" id=\"nb2\"\u003E2\u003C\/a\u003E] \u003Ca href=\"https:\/\/www.portafolio.co\/internacional\/numero-de-empresas-cerradas-en-venezuela-505363\"\u003Eportafolio.co\u003C\/a\u003E.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E[\u003Ca href=\"#nh3\" id=\"nb3\"\u003E3\u003C\/a\u003E] \u003Ca href=\"https:\/\/transparencia.org.ve\/project\/crisis-venezolana-esta-estrechamente-relacionada-con-la-corrupcion-y-el-mal-desempeno-de-las-576-empresas-propiedad-del-estado\"\u003Etransparencia.org.ve\u003C\/a\u003E.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E[\u003Ca href=\"#nh4\" id=\"nb4\"\u003E4\u003C\/a\u003E] A titre de comparaison, l'Argentine dans le litige entre Repsol et l'YPF a \u00e9cop\u00e9 d'une indemnisation de l'entreprise p\u00e9troli\u00e8re espagnole de 5 milliards de dollars.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E[\u003Ca href=\"#nh5\" id=\"nb5\"\u003E5\u003C\/a\u003E] \u003Ca href=\"https:\/\/gestionparticipativavenezuela.files.wordpress.com\/2008\/12\/cooperativas-legalizadas-acumulado-por-ano-gp.pdf\" target=\"_blank\"\u003Egestionparticipativavenezuela.files.wordpress.com\u003C\/a\u003E ; Fox, Michael (2007) : \"Venezuela's Co-op Boom\", en : Venezuelanalysis.com, \u003Ca href=\"http:\/\/www.venezuelanalysis.com\/analysis\/2393\"\u003Evenezuelanalysis.com\u003C\/a\u003E.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E[\u003Ca href=\"#nh6\" id=\"nb6\"\u003E6\u003C\/a\u003E] \u003Ca href=\"https:\/\/prodavinci.com\/goodyear-cierra-en-venezuela-y-sus-trabajadores-recibiran-neumaticos-como-parte-de-su-liquidacion\"\u003Eprodavinci.com\u003C\/a\u003E.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E[\u003Ca href=\"#nh7\" id=\"nb7\"\u003E7\u003C\/a\u003E] Quelque soit le jugement que l'on porte sur cet \u00e9pisode politique durable, il faut admettre qu'il a repr\u00e9sent\u00e9 un champ d'espoir pour une partie de la gauche internationale, et a g\u00e9n\u00e9r\u00e9 un effet d'entra\u00eenement dans la r\u00e9gion, avec la vague de victoires \u00e9lectorales de partis \u00ab progressistes \u00bb, anti-imp\u00e9rialistes dans leur discours et architectes de nouveaux droits sur le papier.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E[\u003Ca href=\"#nh8\" id=\"nb8\"\u003E8\u003C\/a\u003E] Selon un r\u00e9cent sondage, Maduro est cr\u00e9dit\u00e9 de 15% d'avis favorable \u00e0 sa gestion. \u003Ca href=\"https:\/\/elpitazo.net\/politica\/guaido-es-el-lider-politico-mas-popular-segun-encuesta-de-datanalisis\"\u003Eelpitazo.net\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E[\u003Ca href=\"#nh9\" id=\"nb9\"\u003E9\u003C\/a\u003E] Ce n'est d'ailleurs pas qu'une notion analytique, mais aussi un leitmotiv des politiques publiques : \u00ab l'urgence \u00e9lectrique \u00bb, \u00ab l'urgence alimentaire \u00bb ont \u00e9t\u00e9 deux grandes op\u00e9rations de d\u00e9ploiement de l'autorit\u00e9 publique ces derni\u00e8res ann\u00e9es. Dans le cas Pudreval (des centaines de tonnes d'aliments import\u00e9s retrouv\u00e9s en d\u00e9composition en 2011), un ancien fonctionnaire raconte : \u00ab on nous a demand\u00e9 d'acheter des aliments soudainement, dans le cadre de l' \u00ab urgence alimentaire \u00bb alors qu'on \u00e9tait sp\u00e9cialis\u00e9 dans l'infrastructure p\u00e9troli\u00e8re. Il a fallu alors improviser \u00bb. Et notamment n\u00e9gocier avec des entreprises inexistantes ou de tr\u00e8s douteuse trajectoire. cf. \u003Ca href=\"http:\/\/enelojodelaguila.blogspot.com\/2011\/07\/el-mal-olor-de-pdval-no-salpico-todos.html\"\u003Eenelojodelaguila.blogspot.com\u003C\/a\u003E.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E[\u003Ca href=\"#nh10\" id=\"nb10\"\u003E10\u003C\/a\u003E] Cela n'est plus vrai depuis mai 2019, o\u00f9 de mani\u00e8re surprenante les chiffres de l'inflation ont \u00e9t\u00e9 republi\u00e9s apr\u00e8s plusieurs ann\u00e9es de black out communicationnel, et laisse \u00e0 penser \u00e0 un revirement subtil de certains groupes de pouvoir au sein de l'appareil d'\u00c9tat, \u00e0 la suite de l'auto-proclamation de Guaid\u00f3 comme Pr\u00e9sident de la R\u00e9publique par int\u00e9rim, et la tentative manqu\u00e9e de soul\u00e8vement militaire le 30 avril 2019.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E[\u003Ca href=\"#nh11\" id=\"nb11\"\u003E11\u003C\/a\u003E] Comit\u00e9s Locaux d'Approvisionnement et Production, \u00e0 l'image des Conseils d'Approvisionnement et de Contr\u00f4le de Prix (JAP) chilien sous Allende. Ils forment une trame d'organisations territoriales et locales, qui prend en charge la r\u00e9ception et la r\u00e9partition de caisses contenant des aliments non-p\u00e9rissables, pour un prix modique. Les aliments sont import\u00e9s de diff\u00e9rents pays via un r\u00e9seau commercial li\u00e9 aux int\u00e9r\u00eats des cliques \u00e9conomiques proches du gouvernement (\u00e9conomiques et militaires). Il est int\u00e9ressant de voir que les Clap ont pris le pas sur le \u00ab pouvoir populaire \u00bb, tout du moins dans sa forme invocatrice : \u00ab Tout le pouvoir aux Clap \u00bb affirme une brochure du Parti Socialiste Uni du Venezuela (\u003Ca href=\"http:\/\/www.psuv.org.ve\/publicaciones\/todo-poder-para-clap\/page\/5\"\u003Epsuv.org.ve\u003C\/a\u003E)\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E[\u003Ca href=\"#nh12\" id=\"nb12\"\u003E12\u003C\/a\u003E] Cette m\u00eame ann\u00e9e, c'est la Camimpeg qui vient blinder un peu plus l'influence des militaires sur les secteurs strat\u00e9giques de l'\u00e9conomie, en cr\u00e9ant cette Corporation anonyme militaire d'industries mini\u00e8res, p\u00e9troli\u00e8res et gasif\u00e8res.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E[\u003Ca href=\"#nh13\" id=\"nb13\"\u003E13\u003C\/a\u003E] Celle-ci est \u00e9valu\u00e9e par les am\u00e9ricains a plus de 20 milliards par an. \u003Ca href=\"https:\/\/elpais.com\/internacional\/2019\/05\/27\/actualidad\/1558970548_641126.html\"\u003Eelpais.com\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E[\u003Ca href=\"#nh14\" id=\"nb14\"\u003E14\u003C\/a\u003E] \u003Ca href=\"https:\/\/www.larazon.net\/2014\/09\/marea-socialista-en-2008-se-fugo-casi-el-50-porciento-de-los-ingresos-petroleros\"\u003Elarazon.net\u003C\/a\u003E. On peut par ailleurs s'essayer \u00e0 un d\u00e9compte macabre et ind\u00e9cent qui propulserait le chiffre de 400 milliards de dollars de fuite de capitaux sur tout la p\u00e9riode bolivarienne. Et on serait peut \u00eatre encore loin du compte selon Alek Boyd, journaliste v\u00e9n\u00e9zu\u00e9lien sp\u00e9cialis\u00e9 dans la corruption, qui \u00e9value le \u00ab trou \u00bb de Pdvsa en billions de dollars. \u003Ca href=\"http:\/\/infodio.com\/130218\/justice\/department\/money\/laudering\/bribery\/nervis\/villalobos\"\u003Einfodio.com\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E[\u003Ca href=\"#nh15\" id=\"nb15\"\u003E15\u003C\/a\u003E] \u003Ca href=\"https:\/\/www.elmundo.es\/internacional\/2019\/02\/01\/5c53608c21efa0a4378b46d6.html\"\u003Eelmundo.es\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E[\u003Ca href=\"#nh16\" id=\"nb16\"\u003E16\u003C\/a\u003E] \u003Ca href=\"https:\/\/elpitazo.net\/politica\/abogado-afirma-que-gobierno-de-eeuu-vinculo-a-rafael-ramirez-en-otro-caso-de-soborno\"\u003Eelpitazo.net\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E[\u003Ca href=\"#nh17\" id=\"nb17\"\u003E17\u003C\/a\u003E] Extrait d'un entretien avec un ancien haut-fonctionnaire p\u00e9trolier, aujourd'hui poursuivi aux Etats-Unis pour corruption.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E[\u003Ca href=\"#nh18\" id=\"nb18\"\u003E18\u003C\/a\u003E] \u003Ca href=\"https:\/\/www.barril.info\/fr\/actualites\/venezuela-2017-luisa-ortega-maduro-rupture-constitution?lang=fr\"\u003Ebarril.info\u003C\/a\u003E.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"http:\/\/www.cadtm.org\/Le-Venezuela-dystopique\"\u003Ecadtm.org\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E","_links":[]}}