{"163998":{"id":"163998","parent":"163429","time":"1573085393","url":"http:\/\/newsnet.fr\/163998","source":"http:\/\/www.elcorreo.eu.org\/America-Latina-Les-processus-historiques-se-manifestent-par-vagues","category":"Latina","title":"Am\u00e9rica Latina : \u00ab Les processus historiques se manifestent par vagues \u00bb","image":"","hub":"newsnet","url-explicit":"http:\/\/newsnet.fr\/art\/america-latina-les-processus-historiques-se-manifestent-par-vagues","admin":"newsnet","views":"654","priority":"3","length":"30157","lang":"fr","content":"\u003Cp\u003E\u003Cb\u003EAlvaro Garc\u00eda Linera est l'actuel vice-pr\u00e9sident de Bolivie. Homme cl\u00e9 d'Evo Morales et architecte de la strat\u00e9gie socialiste du gouvernement, nous avons souhait\u00e9 l'interroger \u00e0 la veille d'\u00e9lections g\u00e9n\u00e9rales qui ont lieu apr\u00e8s 13 ans au pouvoir.\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELVSL - \u003Cb\u003ENous souhaiterions d\u00e9buter cet entretien avec une analyse du panorama politique actuel en Bolivie. Quel est le bilan du gouvernement par rapport aux promesses \u00e9lectorales des \u00e9lections pr\u00e9sidentielles de 2014 [triomphalement remport\u00e9es par l'actuel pr\u00e9sident Evo Morales et son vice-pr\u00e9sident Alvaro Garc\u00eda Linera ndlr] ? Pensez-vous que le terrain politique du MAS [Movimiento al socialismo, le parti au pouvoir depuis 2006] s'est r\u00e9duit du fait de la progression de figures d'opposition comme Carlos Mesa ou Oscar Ortiz ?\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cb\u003EAlvaro Garc\u00eda Linera\u003C\/b\u003E - Chaque \u00e9lection a ses particularit\u00e9s et il n'est pas possible que les m\u00eames sc\u00e9narios se r\u00e9p\u00e8tent. Aujourd'hui, les opposants ont des visages diff\u00e9rents de ceux d'il y a 5 ans ou 10 ans. Cependant, le point commun entre ces forces d'opposition reste l'absence d'un projet \u00e9tatique, \u00e9conomique et social alternatif ; c'est l\u00e0 o\u00f9 r\u00e9side leur principale faiblesse. Au-del\u00e0 de la nouveaut\u00e9 ou de l'anciennet\u00e9 des visages, des sigles et de la rh\u00e9torique, la grande limite des forces conservatrices r\u00e9side dans le fait qu'elles n'ont pu d\u00e9passer l'horizon qui pr\u00e9vaut aujourd'hui : celui de l'\u00c9tat plurinational [depuis la r\u00e9forme constitutionnelle de 2009 men\u00e9e par le MAS, la Bolivie est un \u00c9tat plurinational ndlr]. Elles n'ont pas de projet alternatif \u00e0 celui d'un \u00c9tat qui articule classes populaires et classes dirigeantes. Elles n'ont pas de projet alternatif sur le plan de l'\u00e9conomie, qui permettrait le d\u00e9passement de l'\u00c9tat comme acteur clef de l'\u00e9conomie et de la redistribution des richesses. Elles n'ont pas non plus de propositions alternatives, \u00e0 l'\u00e9mancipation et \u00e0 la responsabilisation des peuples indig\u00e8nes dans la construction de l'\u00c9tat.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa politique et l'\u00e9conomie de cette derni\u00e8re d\u00e9cennie reposent sur ces trois piliers ; ils n'ont pas de contrepartie aujourd'hui, et il n'existe pas de projet alternatif. En ce sens, nous sommes plus ou moins dans la m\u00eame situation qu'il y a cinq ans. Il reste \u00e0 voir comment s'exprime le soutien populaire en termes \u00e9lectoraux, mais nous avons confiance dans le fait que les bases fondamentales du projet et de la structure h\u00e9g\u00e9monique de la plurinationalit\u00e9 vont se maintenir.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E- \u003Cb\u003EPendant des ann\u00e9es, une offensive id\u00e9ologique et m\u00e9diatique a \u00e9t\u00e9 men\u00e9e, ayant pour finalit\u00e9 le retour de l'Am\u00e9rique latine dans la \u00ab longue nuit n\u00e9olib\u00e9rale \u00bb de laquelle elle \u00e9tait progressivement sortie dans les ann\u00e9es 2000. Cependant, la victoire sans pr\u00e9c\u00e9dent d'Andr\u00e9s Manuel L\u00f3pez Obrador au Mexique, et le surprenant avantage obtenu par le \u003Ci\u003EFrente de Todos\u003C\/i\u003E [le mouvement men\u00e9 par Alberto Fernandez et Cristina Kirchner contre le pr\u00e9sident Mauricio Macri], \u00e0 l'issue des primaires en Argentine, ont l'air de d\u00e9montrer que cet in\u00e9vitable retour au pass\u00e9 n'\u00e9tait rien de plus qu'une chim\u00e8re. Comment voyez-vous le r\u00f4le de la Bolivie dans les nouvelles alliances r\u00e9gionales et la possibilit\u00e9 de reconstruire un nouveau bloc de pouvoir continental alternatif au n\u00e9olib\u00e9ralisme ?\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E- On assiste curieusement \u00e0 une sorte de co\u00efncidence philosophique entre le discours de la fin de l'histoire, mis en avant par les courants lib\u00e9raux des ann\u00e9es 1980, et certains courants progressistes, qui \u00e9voquent la fin d'un \u00ab cycle \u00bb progressiste. Je parle de co\u00efncidence car ces deux courants portent un regard t\u00e9l\u00e9ologique sur l'histoire, comme si elle \u00e9tait fond\u00e9e sur des lois qui se situent au-del\u00e0 de l'action humaine. Les discours n\u00e9olib\u00e9raux et ceux qui \u00e9voquent la \u00ab fin d'un cycle \u00bb ont malheureusement co\u00efncid\u00e9 ; mais l'histoire a montr\u00e9 qu'elle n'\u00e9volue pas en fonction de lois, qu'il n'est aucune t\u00e9l\u00e9ologie \u00e0 l'œuvre. En r\u00e9alit\u00e9, c'est dans l'histoire m\u00eame que r\u00e9side la contingence, le renouveau, l'impr\u00e9visible et les probabilit\u00e9s.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EAinsi, au moment m\u00eame o\u00f9 certains criaient \u00e0 la fin du cycle des gauches et annon\u00e7aient une nouvelle \u00e8re conservatrice, on assistait aux victoires \u00e9lectorales du Mexique. Ceux-l\u00e0 ont alors r\u00e9pondu qu'il s'agissait d'un dernier sursaut avant la fin du cycle des gauches. Puis s'est produit la victoire des progressistes lors des primaires en Argentine. Nous souhaitons que cela se passe aussi en Bolivie et en Uruguay.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ECe que ces approches fantaisistes de la r\u00e9alit\u00e9 ne prennent pas en compte, c'est que les processus historiques ne suivent pas des cycles ni des \u00ab lois \u00bb ind\u00e9pendantes de l'action humaine. Les processus historiques se manifestent par vagues. Face au concept de \u00ab fin de cycle \u00bb, je propose celui de \u00ab vagues \u00bb. Les actions collectives et les luttes sociales se manifestent sous la forme de vague. Elles se mettent en marche, avancent, triomphent, arrivent au sommet, puis s'arr\u00eatent, reculent, mais elles peuvent ensuite se remettre en marche avec une autre vague, et encore une troisi\u00e8me vague, etc.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EJe pense donc que nous sommes en train d'assister - nous allons pouvoir le v\u00e9rifier \u00e0 la fin de ce mois d'octobre - \u00e0 une nouvelle vague de processus progressistes dans un monde et une Am\u00e9rique latine \u00e0 la recherche de solutions, d'alternatives \u00e0 l'in\u00e9galit\u00e9, \u00e0 la mis\u00e8re et \u00e0 l'exploitation. C'est la raison pour laquelle je propose cette logique de \u00ab vagues \u00bb, o\u00f9 le moteur de l'action se situe chez les personnes, et non dans des processus bas\u00e9s sur des \u00ab lois \u00bb que personne ne comprend.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe deuxi\u00e8me probl\u00e8me de cette lecture en termes de \u00ab fin de cycle \u00bb est qu'elle con\u00e7oit les victoires conservatrices et le retour du n\u00e9olib\u00e9ralisme comme le d\u00e9but d'un long cycle qui pourrait durer une ou deux d\u00e9cennies. Les choses ne sont pas ainsi. Le grand probl\u00e8me de ce n\u00e9olib\u00e9ralisme 2.0, c'est qu'il n'accouche d'aucun projet de soci\u00e9t\u00e9. Il consiste avant tout en une action de vengeance, une manifestation de d\u00e9go\u00fbt [\u00e0 l'\u00e9gard des processus progressistes] et une volont\u00e9 de r\u00e8glement de comptes. Ce n'est pas un projet qui provoque de l'enthousiasme : il interpelle seulement des \u00e9motions n\u00e9gatives dans le but de trouver des coupables aux probl\u00e8mes et de les r\u00e9gler par des r\u00e9ponses d\u00e9magogiques. Cela ne peut fonctionner qu'\u00e0 court terme. On ne peut pas construire une h\u00e9g\u00e9monie de longue dur\u00e9e, une acceptation morale des gouvern\u00e9s par les gouvernants, avec pour seules bases la haine et la rancune. C'est pour cette raison que ce n\u00e9olib\u00e9ralisme 2.0 n'a pas d'avenir sur le long terme. Ses possibilit\u00e9s sont tr\u00e8s limit\u00e9es parce qu'il n'a pas r\u00e9ussi \u00e0 cr\u00e9er une nouvelle proposition alternative de mode de vie et de soci\u00e9t\u00e9.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EIl a \u00e9t\u00e9 capable de le faire dans les ann\u00e9es 1980, ce fut l\u00e0 sa force. Tandis que leurs adversaires cherchaient \u00e0 conserver ce qui existait, les n\u00e9olib\u00e9raux ont dit : \u00ab nous allons changer le monde de cette fa\u00e7on : libres entreprises, globalisation et \u00e9conomie de libre-\u00e9change \u00bb. C'\u00e9tait une proposition de mode de vie et de soci\u00e9t\u00e9 qui a su provoquer l'enthousiasme, l'adh\u00e9sion, et le consensus actif des secteurs subalternes des classes populaires. Mais aujourd'hui ce n'est plus le cas.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDe plus, ce n\u00e9olib\u00e9ralisme 2.0 survient \u00e0 un moment o\u00f9 le monde entier constate l'effondrement de la croyance en la fin de l'histoire bas\u00e9e sur des pr\u00e9ceptes n\u00e9olib\u00e9raux. L'Angleterre et les \u00c9tats-Unis, porte-drapeaux du libre-march\u00e9 il y a trente ans, sont aujourd'hui devenus protectionnistes. L'\u00e9conomie planifi\u00e9e de la Chine, avec un parti unique, est aujourd'hui le porte-drapeau du libre-\u00e9change. Les communistes sont devenus les libre-\u00e9changistes, et les partisans du libre-\u00e9change et de la d\u00e9mocratie lib\u00e9rale sont en train de devenir protectionnistes : c'est le monde \u00e0 l'envers.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EAinsi, la proposition n\u00e9olib\u00e9rale n'est plus attractive, et ses mod\u00e8les ne sont plus id\u00e9aux : l'Angleterre et les \u00c9tats-Unis, qui \u00e9taient vus comme un horizon \u00e0 conqu\u00e9rir, se situent aujourd'hui \u00e0 contre-courant. Dans ce sc\u00e9nario de chaos g\u00e9n\u00e9ralis\u00e9, d'effondrement du r\u00e9cit globalisateur n\u00e9olib\u00e9ral, les projets lib\u00e9raux mis en place dans quelques pays ne poss\u00e8dent plus l'\u00e9clat, la force, la conviction et l'int\u00e9grit\u00e9 d'antan. Ils n'arrivent plus \u00e0 capter l'enthousiasme des gens.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes classes ais\u00e9es peuvent mettre des ann\u00e9es \u00e0 se venger des classes moyennes et populaires et \u00e0 r\u00e9gler leurs comptes, mais elles ne pourront jamais emporter l'esprit collectif de la soci\u00e9t\u00e9 sur le long terme. C'est pour cette raison que ce sont des projets de court terme, et qu'ils finissent par \u00eatre confront\u00e9s \u00e0 de nouvelles vagues de mal-\u00eatre populaire, car ces projets g\u00e9n\u00e8rent une pauvret\u00e9 g\u00e9n\u00e9ralis\u00e9e.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E- \u003Cb\u003ELe projet du MAS a combin\u00e9 plusieurs dimensions de la politique r\u00e9volutionnaire : la gestion de l'\u00c9tat, la lutte politique contre l'opposition, la prise en compte et la r\u00e9ponse aux demandes des mouvements sociaux. D'apr\u00e8s vous, quels sont les principaux centres de gravit\u00e9 du pouvoir politique au sein du MAS, et quels sont les enjeux clefs qui se pr\u00e9sentent au gouvernement d'Evo Morales ?\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E- Un des divers enseignements que l'on peut tirer de l'exp\u00e9rience bolivienne repose sur le fait qu'on ne construit pas un gouvernement ni une stabilit\u00e9 sociale et politique en se fondant uniquement sur la force parlementaire. Le gouvernement et la stabilit\u00e9 sociale et politique se construisent par l'action collective, la pr\u00e9sence dans la rue. Il s'agit d'un point d\u00e9cisif.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes deux piliers de la forme de gouvernement que nous avons construite sont les suivants : une majorit\u00e9 parlementaire doubl\u00e9e d'une majorit\u00e9 sociale dans la rue. L'action collective dans la rue est un \u00e9l\u00e9ment clef pour comprendre les nouvelles formes de d\u00e9mocratisation. Le second pilier consiste dans l'articulation complexe et flexible des organisations sociales au sein des structures de pouvoir et de d\u00e9cision. Les syndicats, corporations, conf\u00e9d\u00e9rations, mouvements paysans, indig\u00e8nes, juntes d'action communale, forment une structure de pouvoir dans l'\u00c9tat.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ECette articulation est flexible : parfois ces organisations se retirent, puis d\u00e9cident de se r\u00e9incorporer au sein de l'\u00c9tat. La structure du gouvernement bolivien consiste dans une conf\u00e9d\u00e9ration flexible d'organisations sociales. Le MAS n'est pas vraiment un parti, mais plut\u00f4t une organisation fluide et souple, fruit de la n\u00e9gociation entre organisations sociales. C'est aussi quelque chose de nouveau dans les formes d'organisations collectives : les organisations sociales se font \u00c9tat, se font gouvernement, et donnent une autre dynamique au processus politique bolivien.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EQuant aux d\u00e9fis, il y en a plusieurs. Le fait que le monde pl\u00e9b\u00e9ien ait maintenant acc\u00e8s aux postes de pouvoir et de d\u00e9cision dans les parlements, les minist\u00e8res, les mairies et les collectivit\u00e9s territoriales desquels il \u00e9tait en permanence exclu a cr\u00e9\u00e9 un app\u00e9tit pour la participation politique et la volont\u00e9 de r\u00e9aliser une forme de carri\u00e8re : \u00ab je suis dirigeant ouvrier, et la prochaine \u00e9tape est de devenir conseiller municipal, d\u00e9put\u00e9, vice-ministre, ou ministre \u00bb. Je ne critique pas cette attitude, apr\u00e8s 500 ans de marginalisation et de gestion publique aux mains d'une oligarchie d'\u00e0 peine quelques familles, il s'agit d'un \u00e9largissement du droit d'\u00eatre reconnu et de prendre des d\u00e9cisions.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EMais cela provoque un probl\u00e8me dans l'organisation sociale, car ce sont des militants, syndicalistes, paysans, ouvriers, indig\u00e8nes, qui passent subitement d'une carri\u00e8re syndicale ou sociale \u00e0 la gestion de la politique \u00e9tatique, d\u00e9laissant ainsi leur domaine ant\u00e9rieur sans cadre politique. Cela se traduit par une d\u00e9politisation lente et graduelle des structures sociales du pays. \u00c0 moyen terme, ceci peut devenir compliqu\u00e9.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ENous avons besoin d'une repolitisation permanente des secteurs sociaux. En Bolivie, tous les cinq ans, les d\u00e9put\u00e9s, s\u00e9nateurs, maires, conseillers municipaux et \u00e9lus d\u00e9partementaux changent \u00e0 98 %. Autrement dit, tous les cinq ans il y a un renouvellement de 98 % des cadres politiques en moyenne. Cela se produit tr\u00e8s rapidement, et l'on voit arriver de nouveaux visages au niveau des directions interm\u00e9diaires, encore et encore : cela produit des dirigeants avec moins de formation et moins d'exp\u00e9rience, une trajectoire moins importante, ce qui, avec le temps, pourrait fragiliser la structure organisationnelle des syndicats.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EC'est pour moi l'un des risques qui nous impose, dans les cinq prochaines ann\u00e9es, de soutenir les processus de repolitisation de la vie syndicale, de qualification des cadres dirigeants des syndicats, corporations et des communaut\u00e9s paysannes et indig\u00e8nes. Ce serait un premier d\u00e9fi \u00e0 relever.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E- \u003Cb\u003EVous avez confess\u00e9 en 2017 l'envie de pouvoir lib\u00e9rer plus de temps pour vous d\u00e9dier \u00e0 \u00ab l'objectif de former de nouveaux cadres socialistes \u00bb. Entre-temps, les circonstances ont exig\u00e9 un nouveau mandat de votre part en tant que vice-pr\u00e9sident. On sait que cela reste n\u00e9anmoins une des grandes orientations que vous avez en t\u00eate, et par la m\u00eame occasion l'un des d\u00e9fis fondamentaux pour la survie \u00e0 long terme du processus de changement. Quels seraient, d'apr\u00e8s vous, les limites de cette t\u00e2che, et quel r\u00f4le peuvent tenir les organisations de jeunesse autour du Movimiento del Socialismo (comme La Resistencia, Generaci\u00f3n Evo, Siglo XXI ou Columna Sur) dans ce processus et leurs branches internationales, leurs initiatives de jeunesse \u00e0 l'\u00e9chelle mondiale ?\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E- Ces organisations de jeunesse sont une de nos grandes r\u00e9ussites. Elles sont une force vitale qui enrichit et renouvelle sans cesse les id\u00e9es et les leaders, il faut les encourager. Cependant, il est aussi n\u00e9cessaire de renforcer la formation politique, id\u00e9ologique et collective dans les constructions de direction, de formations d'opinions dans les syndicats ouvriers, dans les communaut\u00e9s rurales, dans le leadership de quartiers.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EComme le M\u00c1S est fondamentalement une structure prol\u00e9tarienne o\u00f9 ceux qui prennent les d\u00e9cisions appartiennent \u00e0 ces secteurs sociaux, c'est principalement l\u00e0 qu'il manque une organisation de formation de cadres. J'ai l'intention de cr\u00e9er une grande \u00e9cole de formation au cours des cinq prochaines ann\u00e9es, avec autant de jeunes de ces diff\u00e9rents secteurs, mais aussi des syndicalistes, des voisins, des travailleurs manuels et intellectuels. Ils recevront des cours intensifs et durables.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EIl ne faut pas oublier que la premi\u00e8re g\u00e9n\u00e9ration qui est entr\u00e9e dans la structure de gouvernement du M\u00c1S venait de deux versants. D'une part, de la vieille \u00e9cole de la gauche : ceux qui ont fond\u00e9 les partis socialiste, communiste et la gauche partisane. D'autre part, de l'ancienne formation de cadres de la lutte syndicale : des manifestations, des blocages, des arrestations et des d\u00e9tentions du monde syndical. Ces deux versants ont \u00e9t\u00e9 la p\u00e9pini\u00e8re qui a aliment\u00e9 la premi\u00e8re g\u00e9n\u00e9ration du gouvernement du M\u00c1S.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EMais ce n'est plus le cas. Il n'y a plus de grandes manifestations et de blocages, et plus d'\u00e9cole pour former les cadres. La formation que donnait la gauche \u00e0 ses cadres politiques au fil des d\u00e9cennies s'est aussi beaucoup affaiblie, c'est comme si le M\u00c1S les avait absorb\u00e9s, et ce militantisme, petit mais solide, n'a pas dur\u00e9. Aujourd'hui, ce sont d'autres circonstances qui obligent \u00e0 travailler sur ces deux aspects. D'abord avec la jeunesse, mais aussi avec les organisations sociales, dans une perspective de construction de nouveaux leaderships, id\u00e9ologiquement r\u00e9form\u00e9s et politiquement bien pr\u00e9par\u00e9s \u00e0 la nouvelle bataille qui approche.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E- \u003Cb\u003EAujourd'hui en Bolivie, apr\u00e8s des ann\u00e9es d'intrusion nord-am\u00e9ricaine dans le processus de changement, les nouveaux \u00ab plans Condor \u00bb paraissent indiquer l'orchestration d'une sorte de \u00ab r\u00e9volutions de couleur \u00bb financ\u00e9e et encourag\u00e9e depuis l'ext\u00e9rieur. La privatisation de certaines universit\u00e9s par l'opposition, les campagnes de d\u00e9sinformation autour de la Chiquitania, le retour de la violence adverse et les gr\u00e8ves ont mis en \u00e9vidence cette tendance. Quels sont les m\u00e9canismes d'autod\u00e9fense d\u00e9mocratique dont peut se servir le peuple face \u00e0 ce type de harc\u00e8lement id\u00e9ologique et culturel ?\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E- En politique, les adversaires font tout leur possible pour nous affaiblir, sinon ils ne seraient pas des adversaires. M\u00eame si on ne les voit pas, ils le font.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDe plus, je suis d'avis que quand quelqu'un lance un objet dur et solide sur un vase de verre, celui qui casse le vase de verre ne le fait pas gr\u00e2ce \u00e0 la solidit\u00e9 de l'objet, mais gr\u00e2ce \u00e0 la faiblesse du vase. Il faut construire un vase qui est durable, et qui r\u00e9siste quand on lance un objet solide. C'est ainsi que j'imagine les processus r\u00e9volutionnaires : il y aura toujours des attaques de part et d'autre. Des pays \u00e9trangers, des logiques imp\u00e9rialistes, il y en aura toujours. Je serais na\u00eff si je n'anticipais pas toutes ces actions. Ainsi, il faut construire quelque chose qui sera en mesure de r\u00e9sister.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EC'est ce que l'on a essay\u00e9 de faire ces 13 derni\u00e8res ann\u00e9es, se d\u00e9brouiller pour que le vase ne se casse pas, construire un vase qui n'est pas fragile face aux coups qu'il re\u00e7oit de l'ext\u00e9rieur. Il est \u00e9vident que ces derniers temps, les forces conservatrices et l'intelligentsia plan\u00e9taire - conservatrice elle aussi -, ont peaufin\u00e9 leur strat\u00e9gie. Ils utilisent aussi la culture et le sens commun pour construire un appui et une adh\u00e9sion durables. C'est ce que faisait aussi la gauche qui tout au long de sa vie a \u00e9t\u00e9 marginale, mais qui s'est employ\u00e9e \u00e0 construire des id\u00e9es-forces pour convertir les petites id\u00e9es en horizons qui capturent des parties de l'imaginaire collectif. D\u00eetes-moi quelle influence vous avez sur le sens commun, et je vous dirai de quelle force politique vous disposez. La gauche s'est \u00e9loign\u00e9e de ce travail. Nos d\u00e9bats th\u00e9oriques, nos cours de formation, notre capacit\u00e9 \u00e0 analyser la situation concr\u00e8te visaient \u00e0 figer les id\u00e9es-forces qui peuvent irradier et capturer l'imaginaire des gens, l'ordre moral et la logique du monde. La droite le sait aussi, et c'est ce qu'elle essaie de faire, c'est pourquoi elle a chang\u00e9. \u00c0 la place des coups d'\u00e9tats, des dictatures, elle a compris que la bataille politique est une bataille pour des id\u00e9es-forces, \u00e0 travers le sens commun, pour l'ordre logique, moral, proc\u00e9dural et instrumental de la vie quotidienne des gens.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EAinsi, ils sont aujourd'hui plus sophistiqu\u00e9s, ce qui rend la bataille de la gauche d'autant plus compliqu\u00e9e, mais peu importe. Si je n'avais pas un adversaire intelligent en face, je deviendrais quelqu'un avec des limites \u00e9videntes. Ce sont les points forts de ton adversaire, ses strat\u00e9gies, qui t'obligent \u00e0 avoir des capacit\u00e9s pour pouvoir l'affronter et le vaincre.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ECes nouvelles tactiques de l'opposition ne me surprennent pas, on les attendait, elles \u00e9taient pr\u00e9visibles, mais on doit les affronter avec de nouvelles strat\u00e9gies et de nouvelles tactiques nous aussi, capables de de contrecarrer l'assaut, et ramener du c\u00f4t\u00e9 progressiste le regard g\u00e9n\u00e9ral sur le monde et sur le futur. Ce que nous sommes en train de vivre est nouveau, mais ce n'est pas surprenant, cela fait partie du monde infini mais limit\u00e9 des possibilit\u00e9s qui peuvent arriver dans la lutte politique.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E- \u003Cb\u003EEn parlant pr\u00e9cis\u00e9ment des strat\u00e9gies futures et de comment r\u00e9pondre aux nouvelles manœuvres de l'adversaire, nous voulions vous poser une question en lien avec les nouveaux d\u00e9fis li\u00e9s aux r\u00e9seaux sociaux et \u00e0 l'\u00e9mergence du cyberespace et de la domination d'internet. Les derni\u00e8res \u00e9lections br\u00e9siliennes ont d\u00e9montr\u00e9 le tournant dangereux qui se joue dans cette nouvelle configuration. Apr\u00e8s des ann\u00e9es d'utopies optimistes, cet espace, que beaucoup d\u00e9crivent comme par\u00e9 d'une aura d\u00e9mocratique, s'est av\u00e9r\u00e9 \u00eatre un terrain plac\u00e9 sous le contr\u00f4le d'une minorit\u00e9 d'entreprises multinationales et de pouvoirs globaux. Concr\u00e8tement, aujourd'hui, ce sont les r\u00e9seaux comme Facebook et Whatsapp qui utilisent massivement les bots, les appels t\u00e9l\u00e9phoniques, et qui sont le point de d\u00e9part des campagnes d'intoxication massive de la sph\u00e8re publique. Pour beaucoup de critiques, le manque de protection sur les r\u00e9seaux de Bolivie s'est d'abord refl\u00e9t\u00e9 dans la d\u00e9faite du 21 f\u00e9vrier, puis dans la facilit\u00e9 avec laquelle les adversaires de l'Estado Plurinacional de Bolivia ont r\u00e9ussi \u00e0 engager sur les r\u00e9seaux sociaux une campagne de d\u00e9sinformation sur la Chiquitania. Est-ce que la p\u00e9riode 2020-2025 sera aussi une p\u00e9riode de domination des r\u00e9seaux sociaux ? Le processus peut-il aussi rassembler des millions de personnes gr\u00e2ce aux r\u00e9seaux sociaux ?\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E- Il est certain que les r\u00e9seaux sociaux ont introduit une nouvelle plateforme dans l'espace politique, un nouveau support technique de construction de l'opinion publique. En mati\u00e8re de construction de l'opinion publique, il y a d'abord eu le face \u00e0 face et les joutes oratoires qui remontent \u00e0 des milliers d'ann\u00e9es, puis est apparue l'imprimerie, jusqu'aux journaux, ensuite la radio, puis la t\u00e9l\u00e9vision et enfin les r\u00e9seaux sociaux.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EIl y a donc cinq supports technologiques fondamentaux de communication et chacun poss\u00e8de sa complexit\u00e9, ses caract\u00e9ristiques, ses vertus, ses limites et ses formes de manipulation. C'est un \u00e9l\u00e9ment nouveau qu'il est important de comprendre. Je ne fais pas partie de ceux qui croient que les r\u00e9seaux sociaux peuvent r\u00e9inventer le monde, ce n'est pas vrai. \u00c9videmment, ils peuvent cr\u00e9er des imaginaires, comme le faisait la radio \u00e0 son \u00e9poque ou la t\u00e9l\u00e9vision. Ils peuvent d\u00e9former la r\u00e9alit\u00e9 comme le faisaient les journaux, la radio et la t\u00e9l\u00e9vision. Ils peuvent renforcer certains pr\u00e9jug\u00e9s sociaux comme l'ont fait les autres plateformes et supports technologiques. De m\u00eame que pour tous ces m\u00e9dias, qui a le plus d'argent a le plus de pouvoir.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ECeux qui peuvent contr\u00f4ler l'intelligence artificielle pour rep\u00e9rer vos couleurs pr\u00e9f\u00e9r\u00e9es, votre film pr\u00e9f\u00e9r\u00e9 et vous envoyer des messages avec vos couleurs pr\u00e9f\u00e9r\u00e9es \u00e0 l'heure \u00e0 laquelle vous \u00eates disponible et vous passez le plus de temps sur le portable pour regarder vos messages, aura le plus de marges de manœuvre. Le cas de l'entreprise \u003Ci\u003ECambridge Analytica\u003C\/i\u003E a d\u00e9montr\u00e9 qu'il est facile de manipuler les r\u00e9seaux avec un peu d'argent et un peu d'intelligence artificielle aux mains d'un certain nombre de personnes intelligentes qui savent construire ces m\u00e9canismes d'orientation de l'information.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ECependant, les r\u00e9seaux ont besoin de s'appuyer un minimum sur la r\u00e9alit\u00e9 pour rendre les choses cr\u00e9dibles, vraisemblable, ou au moins pour qu'elles g\u00e9n\u00e8rent des doutes. Elles ne peuvent pas inventer des choses extraordinaires, et l'intelligence artificielle ne peut pas manipuler les cerveaux de telle sorte qu'elle ferait changer d'avis radicalement quelqu'un d'un instant \u00e0 l'autre. Ce n'est pas vrai. On disait la m\u00eame chose de la t\u00e9l\u00e9vision, \u00ab la bo\u00eete idiote \u00bb. Les gens ne sont pas stupides, nous ne sommes pas non plus des \u00e9ponges sur lesquelles n'importe qui pourrait venir et laisser la marque qu'il veut. Les \u00eatres humains ont toujours \u00e9t\u00e9 des \u00eatres de croyances, donc bien \u00e9videmment les r\u00e9seaux sociaux sont un espace fantastique pour manipuler et r\u00e9orienter ces derni\u00e8res, mais elles doivent se fonder un minimum sur le terrain et sur la r\u00e9alit\u00e9 pour \u00eatre efficace. Elles n\u00e9cessitent un encadrement mat\u00e9riel fond\u00e9 sur la r\u00e9alit\u00e9 qui permet que la manipulation et l'information soient efficaces.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes r\u00e9seaux sociaux jouent un r\u00f4le d'informateurs, et surtout un grand r\u00f4le de d\u00e9sinformateurs. Mais ils ne peuvent pas non plus cr\u00e9er un monde compl\u00e8tement manipulable et diff\u00e9rent de celui que le citoyen vit tous les jours. Car ce dernier compare l'information qu'il vient de voir sur les r\u00e9seaux sociaux avec ce qu'il vit quand il va acheter du pain, quand il monte dans le bus, quand il parle avec ses coll\u00e8gues de travail. En d\u00e9finitive, il ne retient que l'essentiel et ce qui correspond le plus \u00e0 sa propre exp\u00e9rience.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ECombien de personnes utilisent les r\u00e9seaux sociaux ? 90 % des gens. Quels sont les m\u00e9dias cr\u00e9dibles ? La T\u00e9l\u00e9vision, la radio et les journaux. Les r\u00e9seaux sociaux apparaissent en dernier. Donc, ne c\u00e9dons pas \u00e0 l'image d'\u00eatres humains uniquement constitu\u00e9s d'os et de muscles, avec une t\u00eate creuse remplie par les r\u00e9seaux sociaux. Ce n'est pas le cas, les \u00eatres humains n'ont jamais \u00e9t\u00e9 et ne seront jamais des \u00eatres sans capacit\u00e9s de discernement ou d'esprit critique. Bien s\u00fbr que les r\u00e9seaux aident et peuvent approfondir \u00e0 diffuser un mensonge. Ils peuvent d\u00e9former les choses mais ils ne sont pas tout puissants : ils ne peuvent pas cr\u00e9er un monde virtuel \u00e9loign\u00e9 du monde r\u00e9el. Sont-ils efficaces ? Oui, en partie car ils sont li\u00e9s \u00e0 la r\u00e9alit\u00e9 des gens, mais s'ils s'en \u00e9loignent ils ne servent \u00e0 rien.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EC'est ce que nous avons appris. Pour nous, c'est un m\u00e9dia technologique comme a pu l'\u00eatre l'imprimerie, la t\u00e9l\u00e9vision ou la radio. D\u00e9sormais, nous disposons d'un nouveau m\u00e9dia avec de nouvelles r\u00e8gles et technologies, de nouvelles formes de construction de la volont\u00e9 collective et de l'information, plus sophistiqu\u00e9es, plus compliqu\u00e9es, plus difficiles, mais cela fait partie du syst\u00e8me que l'humanit\u00e9 a cr\u00e9\u00e9 petit \u00e0 petit depuis cinq mille ans. Ils jouent un r\u00f4le important, nous en sommes conscients et nous essayons d'y appara\u00eetre de plus en plus.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EEn ce qui concerne les manipulations de l'intelligence artificielle r\u00e9alis\u00e9es par certains gouvernements \u00e9trangers, entreprises ou partis ayant trop d'argent, il faut les contrecarrer avec l'utilisation de cette m\u00eame intelligence artificielle pour y opposer une information plus v\u00e9ridique et v\u00e9rifiable. Il faut lutter, car un nouveau monde s'est ouvert avec les r\u00e9seaux sociaux, mais c'est un monde dont les r\u00e8gles du jeu et les tactiques d'occupation et d'affrontement ne sont pas si diff\u00e9rentes de celles auxquelles Sun Tzu a fait face il y a 3 500 ans.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E- \u003Cb\u003ENous aimerions vous poser une question plus personnelle. Qui est \u00c1lvaro Garc\u00eda Linera ? Vous avez \u00e9t\u00e9 syndicaliste, soldat dans l'arm\u00e9e T\u00fapac Katari, professeur et vice-pr\u00e9sident. Comment a \u00e9volu\u00e9 votre trajectoire politique ? Quelles r\u00e9f\u00e9rences intellectuelles d'Europe et d'Am\u00e9rique Latine se cachent derri\u00e8re \u00c1lvaro Garc\u00eda Linera ?\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E- Depuis l'adolescence je suis socialiste et communiste. Je suis un homme qui sait qu'il vaut la peine de vivre en essayant de transformer les conditions de vie des personnes en vue d'am\u00e9liorer l'\u00e9galit\u00e9, la justice et la libert\u00e9. Tout le reste n'est qu'\u00e9l\u00e9ments, outils temporaires et contingents servant ces objectifs qui d\u00e9finissent le communisme et le socialisme.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDe mon point de vue, le socialisme et le communisme n'impliquent pas de militer pour un parti mais de militer pour la soci\u00e9t\u00e9. Dans le cas bolivien, on ne peut pas \u00eatre socialiste, on ne peut pas \u00eatre communiste si on ne comprend pas la r\u00e9alit\u00e9, la justice, les rapports, les luttes, le mouvement ouvrier, le mouvement indig\u00e8ne et l'indianisme. En d'autres termes, on ne peut pas \u00eatre communiste en Bolivie sans \u00eatre en m\u00eame temps indianiste.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EJe suis quelqu'un qui essaie de constamment m\u00e9langer le d\u00e9bat contemporain, les luttes id\u00e9ologiques et les avanc\u00e9es en sciences sociales. J'aime m'impr\u00e9gner de savoir, mais il est clair qu'en m\u00eame temps je ne peux pas comprendre, je ne peux pas rendre utile ce savoir comme dans un simple exercice de r\u00e9flexion logique, de mots et d'id\u00e9es. Cet exercice me semble trop simple. Je peux comprendre cet exercice d'id\u00e9es, de concepts, d'auteurs afin d'enrichir ma compr\u00e9hension de ce qui se passe en Bolivie, sur le continent, dans le monde, et ce qui se passe dans la Bolivie indig\u00e8ne, non indig\u00e8ne, ouvri\u00e8re, pauvre, des \u00e9lites, des interventions, du colonialisme...\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EJ'ai donc toujours \u00e9t\u00e9 quelqu'un qui a m\u00eal\u00e9 ces id\u00e9es et cherche \u00e0 les articuler avec d'autres exp\u00e9riences du monde. Je crois que cette articulation id\u00e9ologique et spirituelle prend son origine dans mon militantisme au coll\u00e8ge. Je n'ai pas chang\u00e9 depuis. \u00c0 certains moments il y a des auteurs qui m'ont davantage influenc\u00e9, certaines actions politiques me semblant plus marquantes. Puis le temps passe et d'autres auteurs m'ont davantage attir\u00e9 : leurs politiques me surprennent et m'enthousiasment. Cependant, il y a un fil conducteur qui est celui du militantisme socialiste, communiste et indianiste. Je crois qu'\u00e0 ce niveau-l\u00e0 je n'ai pas chang\u00e9 et je ne changerai pas. Mais nous verrons bien ce que nous r\u00e9serve le futur.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cb\u003EIago Moreno\u003C\/b\u003E et \u003Cb\u003EDenis Rogatyuk\u003C\/b\u003E pour \u003Ca href=\"https:\/\/lvsl.fr\"\u003ELVSL\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cb\u003ETraduit de l'espagnol pour \u003Ca href=\"https:\/\/lvsl.fr\"\u003ELVSL\u003C\/a\u003E par\u003C\/b\u003E : Marie Miqueu, Lou Plaza et Rachel Rudloff.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"https:\/\/lvsl.fr\/alvaro-garcia-linera-les-processus-historiques-se-manifestent-par-vagues\"\u003ELVSL\u003C\/a\u003E, le 16 octobre 2019\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"http:\/\/www.elcorreo.eu.org\/America-Latina-Les-processus-historiques-se-manifestent-par-vagues\"\u003Eelcorreo.eu.org\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E","_links":{"parent_art":[{"title":"\u00c9quateur et Chili : l'\u00e9chec du discours de la r\u00e9ussite","url":"http:\/\/newsnet.fr\/apicom\/id:163429,json:1"}]}}}