{"166856":{"id":"166856","parent":"156821","time":"1577960284","url":"http:\/\/newsnet.fr\/166856","source":"http:\/\/histoireetsociete.wordpress.com\/2020\/01\/02\/monika-karbowska-compte-rendu-de-la-comparution-dassange-le-19-et-20-decembre\/","category":"documentaires","title":"Monika Karbowska: compte-rendu de la comparution d'Assange le 19 et 20 d\u00e9cembre","catalog-images":"3\/\/1\/newsnet_166856_08bd7c.jpg\/newsnet_166856_f62051.jpg\/newsnet_166856_0e59c9.jpg\/newsnet_166856_4c9a89.jpg","image":"http:\/\/newsnet.fr\/img\/newsnet_166856_08bd7c.jpg","hub":"newsnet","url-explicit":"http:\/\/newsnet.fr\/art\/monika-karbowska-compte-rendu-de-la-comparution-d-assange-le-19-et-20-decembre","admin":"newsnet","views":"659","priority":"4","length":"35457","lang":"fr","content":"\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"http:\/\/www.tlaxcala-int.org\/biographie.asp?ref_aut=3138&lg_pp=fr\"\u003EMonika Karbowska Моника Карбовска\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe monde entier sait maintenant que celle qui juge Julian Assange, Vanessa Baraitser, s'est fait traiter de \u003Cb\u003E\u00ab wicked witch \u003Ci\u003E\u00bb,\u003C\/i\u003E m\u00e9chante sorci\u00e8re\u003C\/b\u003E, par un de nos camarades pr\u00e9sents dans le public. C'est un \u00e9pilogue qui aurait pu \u00eatre jubilatoire pour nous, mais la joie du tacle public ne devrait pas nous faire oublier que la situation reste tr\u00e8s grave : \u003Cb\u003EJulian Assange va mal, de plus en plus mal\u003C\/b\u003E alors que l'heure fatidique du \u00ab final extradition hearing \u00bb approche et que la strat\u00e9gie \u00ab gagnante \u00bb des avocats reste aussi myst\u00e9rieuse pour nous qu'elle l'\u00e9tait il y a 6 mois. De plus, l'audience fant\u00f4me, ultra secr\u00e8te et s\u00e9curis\u00e9e du 20 d\u00e9cembre pour le \u00ab European Investigation Order \u00bb, au cours de laquelle Julian a \u00e9t\u00e9 amen\u00e9 physiquement et se trouvait donc \u00e0 20 m\u00e8tres de nous n'\u00e9tait pas organis\u00e9e pour nous rassurer. Deux jours cruciaux, durs et intenses qui nous ont \u00e9puis\u00e9s. Mais deux jours de combat presque physique pour le voir, pour lui transmettre notre soutien par les cris et les slogans, pour protester contre l'injustice de cette r\u00e9pression sans pr\u00e9c\u00e9dent sur un seul homme isol\u00e9 et rendu malade par la torture.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cimg style=\"max-width:100%\" src=\"http:\/\/newsnet.fr\/img\/newsnet_166856_f62051.jpg\" \/\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E19 d\u00e9cembre\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EJe suis arriv\u00e9e une journ\u00e9e \u00e0 l'avance \u00e0 Londres avec l'objectif comprendre o\u00f9 et comment se passerait la myst\u00e9rieuse audience du 20 d\u00e9cembre annonc\u00e9e par certains m\u00e9dias, mais sans qu'aucune information ne filtre par les avocats de Julian Assange ou par les sites de WikiLeaks. Chemin faisant nous apprenons que le proc\u00e8s final de fin f\u00e9vrier aura lieu au tribunal de Woolwich, \u00e0 cot\u00e9 de la prison de Belmarsh, dans une salle de 25 places et avec une grande galerie ouverte aux journalistes. Comment nous, associations des droits de l'homme et militants engag\u00e9s, pourrons-nous y rentrer sans que l'absence de places pour tout le monde ne d\u00e9g\u00e9n\u00e8re en tensions et bagarres ? C'est un probl\u00e8me \u00e9vident que le tribunal sous-estime largement. Car si le principe du \u00ab premier arriv\u00e9 premier servi \u00bb est plus juste que les listes \u00e9tablies d'autorit\u00e9 par \u00ab Greeekemmy \u00bb, il ne r\u00e9sout pas l'\u00e9quation du manque d'espace. Et nous voulons \u00eatre plus nombreux car nous savons que c'est justement la pression populaire sur les autorit\u00e9s britanniques qui peut sauver Julian Assange de l'extradition.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ECependant, pour une fois la Westminster Magistrates' Court s'est donn\u00e9 les moyens de mettre en œuvre des r\u00e8gles d'organisation dures mais justes. Notre \u00e9quipe est arriv\u00e9e entre 6h40 et 7h15. Le groupe de Greekemmy arrive vers 7h30 et les personnes seront plus diverses que d'habitude. \u00c0 9 heures nous entrons dans le b\u00e2timent et nous voyons sur la liste du hall le nom de Julian Assange en t\u00eate des extrad\u00e9s salle 3. Devant la salle nous nous retrouverons devant la cheffe des huissiers du tribunal qui r\u00e9gule le flux avec le manager de la s\u00e9curit\u00e9. Elle est tr\u00e8s polie, nous fait placer en rang devant la porte et nous rassure que la file sera respect\u00e9e alors que nous sentons parfois poindre une inqui\u00e9tude d\u00e8s que le mot \u00ab liste \u00bb est prononc\u00e9. Mais elle reste heureusement inflexible face aux tentatives de resquille. Les journalistes sont beaucoup plus nombreux que d'habitude, ils s'asseyent sur les si\u00e8ges du couloir et discutent. L'\u00e9quipe d'avocats est compl\u00e8te : Gareth Peirce, Mark Summers et Edward Fitzgerald le barrister que nous ne pensions pas trouver aussi t\u00f4t \u00e0 un simple \u00ab case management hearing \u00bb. Des assistantes portent de lourds dossiers au dos desquels est \u00e9crit \u00ab Assange \u00bb. Un homme \u00e2g\u00e9 dont le visage m'est connu se trouve juste derri\u00e8re nous. C'est Tariq Ali, que Julian Assange avait rencontr\u00e9 en 2012 lors des mouvements Occupy Londres. Clair Dobbin arrive \u00e0 la t\u00eate de l'\u00e9quipe d'accusation, deux hommes jeunes et un plus \u00e2g\u00e9. Ils s'enferment dans une consultation room car l'audience ne commence pas tout de suite.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes journalistes peuvent entrer \u00e0 9h30 au nombre de dix. Joseph Farell poss\u00e8de cette fois une carte de presse et entre avec eux. Les autres protestent. Je crains que le manager de Mitie ne sacrifie nos places \u00e0 leur indignation et je m'engouffre avec mes coll\u00e8gues de Wikijustice aussi rapidement que possible dans le box du public. Alors l'huissi\u00e8re et le responsable de s\u00e9curit\u00e9 font encore entrer 5 journalistes qui se serrent debout. Les avocats et les accusateurs prennent place. Le secr\u00e9taire est le m\u00eame que le 18 novembre et le 13 d\u00e9cembre.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ENous sommes assis au premier rang au milieu. Tariq Ali prend place \u00e0 cot\u00e9 de John \u00e0 ma droite. Derri\u00e8re nous, alors que le groupe de \u00ab Greekemmy \u00bb clarifie qui prendra les 9 places restantes, je remarque une femme encore jeune, aux cheveux bruns et visage rond assise au fond. Elle s'av\u00e8rera \u00eatre Stella Morris, qui avait accompagn\u00e9 Julian Assange dans l'appartement \u00e9quatorien de 2015 jusqu'\u00e0 la fin. Je suis intrigu\u00e9e par la pr\u00e9sence \u00e0 ses c\u00f4t\u00e9s d'un adolescent de 15 \u00e0 18 ans qui lui ressemble. Que peut bien faire un jeune dans ce genre de proc\u00e8s ? \u00c0 10 heures Clair Dobbin est en place pour l'accusation au premier rang. Les trois hommes qui l'accompagnent s'asseyent juste devant l'\u00e9cran ou Julian Assange va apparaitre. Je r\u00e9ussis apr\u00e8s l'audience \u00e0 coincer le plus \u00e2g\u00e9 et lui demander quel est son r\u00f4le. Il sourit et r\u00e9pond \u00ab observer\u00bb. Du c\u00f4t\u00e9 de l'accusation ? Oui. C'est eux les \u00ab Am\u00e9ricains \u00bb que nous recherchons. Tout est presque en place, les agents de s\u00e9curit\u00e9 nous disent d'\u00e9teindre les portables. Une femme dit qu'elle est handicap\u00e9e et exige de pouvoir utiliser un ordinateur. Des journalistes protestent toujours contre des cartes de presse apparues \u00e0 la derni\u00e8re minute. Apparemment des m\u00e9decins n'ont pas pu rentrer alors qu'on leur avait certifi\u00e9 qu'ils rentreraient avec la liste. L'atmosph\u00e8re tendue et \u00e9touffante nous p\u00e8se. Le m\u00e9contentement est justifi\u00e9, mais les agents de s\u00e9curit\u00e9 nous disent que la salle 1 est impossible car elle n'est pas \u00e9quip\u00e9e. Alors il faut faire venir Julian physiquement ; ce qui n'aura pas lieu jeudi mais ce sera possible vendredi pour autre chose que son proc\u00e8s... Etranges, les priorit\u00e9s de ce tribunal !\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EVanessa Baraitser entre \u00e0 10h, on se l\u00e8ve. Tr\u00e8s vite apparait dans la vid\u00e9o de droite une pi\u00e8ce sombre avec 3 si\u00e8ges bleus et l'\u00e9criteau \"HMP Belmarsh Visitor court room 1\" avec la petite fen\u00eatre. La juge demande : \u00ab officer, Mr Assange please \u00bb. Le gardien r\u00e9pond mais reste invisible. Une \u00e0 deux minutes s'\u00e9coulent. On voit une silhouette passer derri\u00e8re la vitre, une d\u00e9marche un peu dodelinante, et Julian Assange apparait. Il s'assied comme avec peine sur le premier si\u00e8ge. On le voit \u00e0 moiti\u00e9. Baraitser lui dit de s'asseoir sur le si\u00e8ge du milieu ce qu'il fait. Il est cette fois film\u00e9 frontalement et de plus pr\u00e8s, ce qui donne une impression de volume, et qu'il est moins maigre que le 13 d\u00e9cembre. Il porte un pantalon gris, une chemise claire et un pull bleu ciel qui semble un peu grand. Il porte ses lunettes et regarde par-dessus. Ses cheveux sont courts, sa barbe courte. A c\u00f4t\u00e9 de nous quand Tariq Ali a vu Julian, il a cri\u00e9 d'effroi. Quelque chose comme \u003Cb\u003E\u00ab Ce n'est pas Julian, ce n'est pas possible ! \u00bb\u003C\/b\u003E en nous regardant avec stupeur. H\u00e9las oui, et pour la cinqui\u00e8me fois depuis octobre, nous commen\u00e7ons \u00e0 nous habituer \u00e0 ce spectacle brutal.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EBaraister lui demande s'il entend, il r\u00e9pond : \u00ab I think so \u00bb, \u00ab oui je crois \u00bb. La juge prononce elle-m\u00eame son nom et sa date de naissance et lui demande de confirmer. Il dit \u00ab Correct \u00bb et pose ses mains crois\u00e9es sur ses genoux. Ses gestes sont lents, ses paroles sont lentes. Il fait un effort, pousse discr\u00e8tement sa t\u00eate vers l'avant comme quand on a besoin de se rapprocher pour faire la focale. Cette fois il n'a pas de cernes noirs autour des yeux, mais il parait \u00e9puis\u00e9 et reste immobile et prostr\u00e9. Comme toujours, une impression de tristesse et d'indignation nous envahit. Pourrons-nous enfin un jour ext\u00e9rioriser cette col\u00e8re ?\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EVanessa Baraitser introduit le \"case management hearing\", la pr\u00e9paration des audiences finales d'extradition de fin f\u00e9vrier. Elle donne la parole \u00e0 Fitzgerald. Alors une des femmes derri\u00e8re moi s'exclame qu'on n'entend rien. Elle se fait vertement rappeler \u00e0 l'ordre par l'agente de s\u00e9curit\u00e9 qui menace de la faire sortir de force. Maitre Fitzgeral annonce que le \u00ab full extradition hearing \u00bb est pr\u00e9vu pour 5 jours mais il faudrait 3 ou 4 semaines ce qui n'est pas faux. Il souligne la \u00ab grande difficult\u00e9 de voir Monsieur Assange \u00bb. Il reste tr\u00e8s poli, il parle m\u00eame d'\u00eatre reconnaissant pour un d\u00e9lai suppl\u00e9mentaire. Tariq Ali nous regarde avec un air stup\u00e9fait. Je crois qu'il n'a jamais vu la \"'justice\" britannique ni les avocats de Julian Assange en action. Je lui fais comprendre du regard que tout cela nous indigne mais ne nous \u00e9tonne plus....\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ECependant Edward Fitzgerald pose enfin le probl\u00e8me politique : pour la premi\u00e8re fois depuis le d\u00e9but de toute cette affaire il est enfin dit \u003Cb\u003Equ'il est interdit d'extrader pour des motifs politiques\u003C\/b\u003E, or le motif est politique ! Certes l'avocat de Julian Assange ne va pas jusqu'\u00e0 demander la lib\u00e9ration imm\u00e9diate de son client... Il dit que 21 t\u00e9moins doivent comparaitre, puis il \u00e9voque un r\u00e9sum\u00e9 du proc\u00e8s espagnol pour l'espionnage dans l'appartement \u00e9quatorien qui est visiblement utilis\u00e9 comme vice de proc\u00e9dure pour contrer la demande d'extradition. J'ai du mal \u00e0 en saisir la logique. \u003Cb\u003EDire que le proc\u00e8s de Julian Assange n'est pas \u00e9quitable du fait que les Am\u00e9ricains ont eu connaissance de la strat\u00e9gie de d\u00e9fense de leur cible ne me parait pas suffisant pour invalider le fait que les USA se donnent le droit de poursuivre un journaliste pour ses publications.\u003C\/b\u003E Pis, j'ai l'impression que cette id\u00e9e persistante du \u00ab vice de forme \u00bb \u00e9vacue justement la question de fond : le scandale de cette exigence exorbitante de faire taire et punir quelqu'un qui n'est pas ressortissant am\u00e9ricain et a publi\u00e9 \u00e0 l'ext\u00e9rieur de leurs fronti\u00e8res. En 2011 les m\u00eames avocats \u00e9taient convaincus qu'ils et elles feraient tomber le mandat d'arr\u00eat europ\u00e9en pour vice de forme. Or, ils ont perdu car le formulaire europ\u00e9en est politiquement r\u00e9dig\u00e9 de fa\u00e7on \u00e0 ce que son \u00e9criture formelle ne puisse \u00eatre contest\u00e9e. C'est le vice de fond qui doit \u00eatre examin\u00e9, c'est-\u00e0-dire le dossier complet dans le pays \u00e9metteur...Julian Assange avait perdu sa libert\u00e9 et maintenant sa sant\u00e9 \u00e0 ce jeu des vices de forme rat\u00e9s.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u00c0 10h10 Julian Assange s'approche de l'\u00e9cran, essaye de suivre, pose les bras sur les cuisses, en position d'\u00e9coute et d'attention, pendant 1 ou 2 minutes. Fitzgerald propose le16 janvier comme date limite de remise des preuves. Mais Clair Dobbin s'y oppose. \u003Cb\u003ELorsqu'elle parle Julian Assange a un mouvement de recul, ses \u00e9paules s'affaissent un peu plus, son regard se vide.\u003C\/b\u003E Il n'arrive plus \u00e0 se concentrer. Plus les discussions sur les dates avancent, plus il luttera pour ne pas dormir, comme quand on est \u00e9puis\u00e9 et que la pression du sommeil est trop forte. Fitzgerald qualifie la date du 10 janvier de \"guillotine\" (j'ai bien aim\u00e9 le terme mais il aurait fallu que le fameux instrument se retourne ici contre les \u00e9lites au pouvoir) : il d\u00e9crit les \u00e9normes dossiers \u00e0 \u00e9tudier, 40 000 pages rien que celui de Chelsea Manning ainsi que les documents du proc\u00e8s espagnol. Il faudrait de plus au moins un jour et demi pour prouver que la juridiction ne permet pas d'extrader pour raison politique. Selon moi, il faudrait plus. Julian Assange reste immobile comme s'il n'entendait pas. C'est d\u00e9routant et d\u00e9rangeant de voir que l'accus\u00e9 ne peut pas participer \u00e0 son proc\u00e8s et qu'on s'habitue \u00e0 ce que tout le monde parle \u00e0 sa place. L'avocat apparait alors comme une esp\u00e8ce de tutelle sur le mode - il est malade donc l'avocat prend sa place. Les \u00ab Am\u00e9ricains \u00bb, eux, suivent les \u00e9v\u00e9nements avec attention. Dans la bataille des dates, la juge ne fait m\u00eame plus attention \u00e0 Assange, elle parle aux avocats et \u00e0 Clair Dobbin qui d\u00e9fend son beurre \u00e2prement. En l'absence de procureur britannique, la guerre est livr\u00e9e directement entre les avocats de Julian Assange et les Am\u00e9ricains. L'Etat britannique a abandonn\u00e9 m\u00eame son r\u00f4le d'arbitre et abdiqu\u00e9 sa souverainet\u00e9... Julian Assange a l'air plus que jamais d'un humain en cage. Je vois qu'il fait un effort pour toucher les papiers du dossier qu'il tient en main, mais n'y arrive pas. Fitzgerald demande alors pourquoi le tribunal de Belmarsh a \u00e9t\u00e9 choisi pour le proc\u00e8s mais la juge ne r\u00e9pond pas. L'avocat consulte alors l'\u00e9cran vid\u00e9o du regard, mais Julian Assange ne dit rien et l'avocat s'en contente et n'insiste pas. Alors qu'il aurait pu parler plus fort et constatant la non r\u00e9action de son client dire \u00ab stop, on ne peut continuer ainsi \u00bb.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EC'est encore plus flagrant pendant la pause \u00e0 10h30. Alors que la juge est partie la salle vaque \u00e0 ses affaires. Les avocats se mettent \u00e0 l'\u00e9cart. On voit un petit carr\u00e9 dans l'\u00e9cran qui montre ce que Julian Assange voit de la salle : il ne voit que la juge et la premi\u00e8re rang\u00e9e. La logique voudrait que ses avocats lui parlent, le saluent, rien, ils se sauvent de son champ de vision et il reste seul. Par contre les trois \"Am\u00e9ricains\" se l\u00e8vent. Ils sont debout devant nous et l'observent d'un air gourmand et satisfait. On dirait qu'ils regardent leur gibier. Nous sommes derri\u00e8re eux et nous voyons leur man\u00e8ge, leurs sourires entendus. On n'entend pas ce qu'ils se disent, mais ils sont visiblement contents. On bouillonne dans notre impuissance et on a h\u00e2te que cette pause finisse. Car ceux qui ont le droit de parler \u00e0 Julian Assange ne le font pas et nous, on nous interdit de lui parler, de lui \u00e9crire et de lui faire le moindre signe.. On nous fait participer \u00e0 l'isolement qu'on lui inflige. Enfin dix minutes plus tard le ping-pong des dates reprend. Tout le monde parle de \"more flexibility\" et sort son agenda : \u00ab 'Pouvez-vous le 20 janvier, le 21 ? Non. Alors le 22 peut-\u00eatre? On va voir si ces dates sont possibles \u00bb. C'est d\u00e9routant pour nous.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EVanessa Baraitser se tourne enfin vers Julian Assange : \u00ab Vous allez comparaitre le 14 janvier pour le \"call over hearing\" et le 23 janvier pour la prochaine audience de gestion en vid\u00e9o \u00bb. Personne ne se donne plus la peine de se demander qu'il ait droit \u00e0 un proc\u00e8s physique. Baraitser ne lui demande m\u00eame plus s'il a compris. Visiblement c'est tellement pli\u00e9 qu'elle s'en moque. Il ne r\u00e9agit pas \u00e0 l'annonce des dates. Puis il dit \u00ab \u003Cb\u003EJ'ai entendu le programme \u00bb.\u003C\/b\u003E J'entends distinctement le mot \"schedule\". Sa voix est h\u00e9sitante et hach\u00e9e. C'est alors que John se l\u00e8ve et s'approche de la vitre. Sans crier il dit d'une voix forte \u003Cb\u003E\u00ab J'ai appr\u00e9ci\u00e9 la pantomime avec madame le juge en \"wicked witch\", la sorci\u00e8re m\u00e9chante \u00bb... John prononce trois phrases. L'\u00e9motion est \u00e0 son comble. C'est la stupeur.\u003C\/b\u003E Le responsable de la s\u00e9curit\u00e9 entre dans notre espace et saisit John par le bras, mais John r\u00e9siste. Je prends le bras du manager doucement pour le calmer... Dans un espace confin\u00e9 ce corps-\u00e0-corps face \u00e0 la violence institutionnelle ultime est \u00e9trange. Julian a d\u00fb entendre le d\u00e9but du cri de John avant que le garde ne s'en rende compte et \u00e9teigne l'\u00e9cran. Baraister se sauve, Fitzgerald et Dobbin qui \u00e9taient en train de discuter ensemble sont stup\u00e9faits, immobiles, bouche b\u00e9e, face \u00e0 face, le public est \u00e9vacu\u00e9, car on sent la peur que l'\u00e9motion soulev\u00e9e par John ne d\u00e9g\u00e9n\u00e8re.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EJ'ai tellement chaud que je suis prise de vertige et je perds l'\u00e9quilibre en essayant de ramasser mes affaires. La s\u00e9curit\u00e9 m'entoure, ils ont peur qu'on invente encore une autre action. On se retrouve dans le couloir un peu sonn\u00e9s. Je saisis l'Am\u00e9ricain pour lui demander qui il est. Puis on voit Joseph Farell, Tariq Ali et Stella Morris enferm\u00e9s dans la consultation room num\u00e9ro 2. Le jeune gar\u00e7on y est aussi, assis par terre. Lorsqu'il sort, j'essaye de comprendre son r\u00f4le dans cette affaire. Il me dit qu'est \u00e9tudiant et fait une recherche avec Gareth Peirce. Le plus dur, l'audience du lendemain, nous attend encore.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EMais le soir je peux me d\u00e9tendre, me disant qu'avec un peu de chance Vanessa Baraitser rentrera chez elle, retrouvera ce soir sa famille et pensera qu'elle s'est fait \u00e0 quelques jours de No\u00ebl traiter de \u003Cb\u003E\u00ab wicked witch \u00bb\u003C\/b\u003E \u00ab m\u00e9chante sorci\u00e8re \u00bb par un homme lucidement d\u00e9sesp\u00e9r\u00e9. Peut-\u00eatre qu'elle en aura assez d'endosser ce r\u00f4le et accorderait le plus beau cadeau \u00e0 Julian Assange : la justice...\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ENous comprenons que les m\u00e9dias qui pr\u00e9sentent l'audience de demain comme le proc\u00e8s de la \u00ab legal team \u00bb contre l'entreprise espagnole Undercover Global accus\u00e9e de violation de vie priv\u00e9e et de corruption ne nous disent pas qui est exactement le plaignant. Nous ne savons pas si Julian Assange est plaignant ou t\u00e9moin. Le lendemain sera encore une journ\u00e9e intense et active, pass\u00e9e \u00e0 arracher les informations cach\u00e9es par le Cour et \u00e0 essayer \u00e0 tout prix d'apercevoir Julian dans le fourgon des prisonniers et dans la salle d'audience. Assur\u00e9ment un moment important de son proc\u00e8s dont nous ne savons rien avec certitude et dont les journalistes seront absents.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cimg style=\"max-width:100%\" src=\"http:\/\/newsnet.fr\/img\/newsnet_166856_0e59c9.jpg\" \/\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E20 d\u00e9cembre\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cb\u003EVendredi 20 d\u00e9cembre 2019.\u003C\/b\u003E Retour \u00e0 la Westminster Magistrates' Court sous une pluie battante. C'est peut-\u00eatre aujourd'hui le vrai proc\u00e8s, au contraire de la pantomime d'hier si bien caract\u00e9ris\u00e9e par John. Naturellement, comme dit Maitre Goscinski, il suffirait que la juge soit courageuse et ordonne par la force de loi de son ind\u00e9pendance l'arr\u00eat des poursuites et la lib\u00e9ration imm\u00e9diate de Julian Assange et on pourrait lui pr\u00e9parer une jolie f\u00eate de Noel familiale et chaleureuse pour son premier jour de vraie libert\u00e9. R\u00eavons, mais pas trop t\u00f4t. O\u00f9 est pass\u00e9 l'ind\u00e9pendance de la justice en Occident ?\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ECe 20 d\u00e9cembre la Cour ne nous est pas hostile mais nous a pr\u00e9par\u00e9 dissimulations et chausse-trappes. \u00c0 7h15 plusieurs journalistes attendent d\u00e9j\u00e0 devant la porte m\u00e9tallique de la rue lat\u00e9rale par laquelle arrivent les accus\u00e9s prisonniers. Ils sont s\u00fbrs de leur scoop, Julian sera l\u00e0. Moi je pense au tribunal espagnol o\u00f9 ce proc\u00e8s pour corruption n'est pas cens\u00e9 \u00eatre secret mais tout \u00e0 fait public et accessible. Il doit \u00eatre possible dans ce tribunal de voir Julian Assange parlant d'ici en vid\u00e9o vers l'Espagne. Nos camarades nous rejoignent et d\u00e8s 8 heures, des voitures noires sortent en convois du tribunal, puis des fourgons des entreprises Serco et Geoamey. On se d\u00e9chaine. \u00c0 chaque fois on se dit que Julian peut \u00eatre dedans. Les photographes se ruent sur les hublots des fourgons, flashent, me bousculent alors que j'essaye d'atteindre les m\u00eames hublots avec notre message \"SOS received\". Il pleut, tout est mouill\u00e9, il y a une grosse flaque devant la porte et chaque fois qu'une voiture passe on est \u00e9clabouss\u00e9s d'eau sale. Le troisi\u00e8me fourgon s'arr\u00eate dans la rue avant de tourner vers l'entr\u00e9e. On se pr\u00e9cipite. Un des journalistes me pousse tellement fort que je tombe dans le caniveau. On tambourine sur la voiture. Je colle le message sur le hublot au-dessus de ma t\u00eate, un journaliste me dit de d\u00e9gager, je r\u00e9ponds \u00ab Non. Notre message est important aussi \u00bb. Alors je remarque que les photographes regardent leur photo apr\u00e8s avoir shoot\u00e9 et voient donc la t\u00eate du d\u00e9tenu dans leur \u00e9cran. Aucun n'est certainement Julian sinon ils seraient vite partis avec leur butin. Mon papier est tellement mouill\u00e9 qu'il colle \u00e0 la vitre du fourgon. Je r\u00e9fl\u00e9chis si je ne dois pas le laisser l\u00e0 entrer dans le tribunal avec la voiture. Car alors peut'\u00eatre que le message va rester et Julian pourra le voir, ou quelqu'un lui donnera le message...Justement une des gardiennes actionne la porte qui remonte comme un store. Elle nous parle, nous dit qu'elle l'a vu, qu'elle l'aime bien... On entre directement dans le tunnel discuter avec elle, on est donc \u00e0 l'int\u00e9rieur du tribunal. Les agents de s\u00e9curit\u00e9 priv\u00e9e ne lui sont pas hostiles, ils et elles doivent juste gagner de quoi vivre.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EEntre temps toute notre \u00e9quipe est arriv\u00e9e et on d\u00e9cide d'aller \u00e0 l'int\u00e9rieur. On a la petite queue avec le public habituel des extrad\u00e9s, leurs familles et leurs avocats. Il est bient\u00f4t 9h30 et les listes sur les panneaux d'affichage sont toujours celles de la veille. On se partage le travail, on va \u00e0 tous les \u00e9tages, on v\u00e9rifie toutes les portes. Des rumeurs courent que Julian est arriv\u00e9 avec une voiture noire, que l'audience sera salle 1... Devant cette salle je discute avec une femme polonaise dont c'est le propre proc\u00e8s d'extradition. Elle va se d\u00e9fendre seule et elle est inqui\u00e8te. \u00c7a parle beaucoup polonais dans la salle d'attente dont les si\u00e8ges sont remplis, des f\u00eates de Noel et du retour au pays. J'ai l'impression d'\u00eatre dans un endroit tr\u00e8s familier. Enfin un employ\u00e9 sort du bureau changer les listes. Celle de la salle 3 affiche pas moins de 40 personnes \u00e0 extrader ! Je suis l'employ\u00e9 au deuxi\u00e8me et au troisi\u00e8me \u00e9tage d\u00e9di\u00e9 aux \u00ab crimes \u00bb. Sur la porte de la derni\u00e8re salle 10 je lis : \u00ab EIO Home Office \u00bb. European Investigation Order, Mandat d'Enqu\u00eate Europ\u00e9en, et Home Office, minist\u00e8re de l'int\u00e9rieur britannique : c'est l\u00e0.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa lecture de la directive europ\u00e9enne de 2014 m'apprend que ce nouveau dispositif, qui n'existait pas quand Julian Assange \u00e9tait poursuivi en 2010, permet d'interroger un suspect, une victime ou un t\u00e9moin qui habite dans un autre pays europ\u00e9en par une proc\u00e9dure acc\u00e9l\u00e9r\u00e9e via un simple formulaire par vid\u00e9o ou par un ordre de transfert dans le pays \u00e9metteur. Le pays ex\u00e9cutant, ici la Grande-Bretagne, doit amener \u00e0 l'audience des repr\u00e9sentants de son institution charg\u00e9s d'ex\u00e9cuter la proc\u00e9dure, ici le Home Office. Les d\u00e9l\u00e9gu\u00e9s du Home Office sont aussi charg\u00e9s, article 24, point 5 de la directive, de veiller au respect des droits fondamentaux du citoyen interrog\u00e9, ne riez pas s'il vous plait.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EMais qui est le plaignant, qui est l'accus\u00e9 ? Nous attendons devant la porte avec une autre militante et deux avocats. C'est alors que la femme brune qui fait les rapports sur les audiences de Julian Assange sous le nom twitter de Naomi Colvin apparait avec une autre jeune femme. \u00c0 10 heures nous entrons, salle 10 il n'y a que le juge et le greffier ainsi que les avocats des affaires num\u00e9ro 1 et 3. Bient\u00f4t un jeune homme arrive comme accus\u00e9 dans l'affaire num\u00e9ro 1. Son cas est ajourn\u00e9 car il n'y a pas de procureur. Son avocat n'est pas content mais ne peut rien dire, il sort avec son client. Je m'efforce de bien comprendre pour ne rien perdre de ce que le juge et le greffier marmonnent entre eux, j'ai bien trop peur de rater le EIO. Mais il apparait vite que ce ne peut pas \u00eatre ici que Julian va apparaitre, la salle est vide, il n'y a ni gardiens ni agents de s\u00e9curit\u00e9. On pers\u00e9v\u00e8re n\u00e9anmoins tout en comprenant que rien ne sera public et qu'on ne nous dira pas la v\u00e9rit\u00e9. L'affaire 3 est report\u00e9e aussi. Alors que le juge est parti, je demande au greffier \u00ab o\u00f9 est le EIO \u00bb ? \u00ab Salle 4 \u00bb me r\u00e9pond-il. En sortant je vois Naomi Colvin et son amie d\u00e9sorient\u00e9es. Je leur crie \u00ab salle 4 \u00bb et je cours au premier \u00e9tage.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EEst-ce un vice de proc\u00e9dure que l'audience fant\u00f4me soit annonc\u00e9e publique salle 10 et report\u00e9e oralement en catimini salle 4 ? C'est possible. \u003Cb\u003EPourquoi ce secret ? Pour qu'on ne sache pas ou est Julian qui normalement devrait comparaitre libre ?\u003C\/b\u003E La salle 4 se trouve au bout du couloir dans l'aile gauche, juste au-dessus de la porte blind\u00e9e o\u00f9 les fourgons am\u00e8nent les prisonniers dans l'espace de derri\u00e8re, le back office, \u00e0 cot\u00e9 des toilettes femmes. Elle est vide et ferm\u00e9e. On ne peut communiquer avec les militants rest\u00e9s dehors \u00e0 cause du brouillage des portables. On attend, on discute. Il est 11h pass\u00e9es quand brusquement on aper\u00e7oit dans la consultation room 2 en face de la salle 4 \u003Cb\u003EStella Morris, la jeune femme brune avec le gar\u00e7on adolescent d'hier\u003C\/b\u003E. Je ne sais pas exactement qui est Stella Morris, les articles parlent encore d'une avocate de Julian Assange mais j'ai des doutes. Rares sont ceux qui disent la v\u00e9rit\u00e9 sur leur r\u00f4le dans cette affaire. Alors un homme en costume sort de la pi\u00e8ce suivis par les deux protagonistes. C'est \u003Cb\u003EFidel Narvaez,\u003C\/b\u003E l'ancien consul, puis premier secr\u00e9taire de l'ambassade de l'\u00c9quateur sous Raphael Correa. J'ai \u00e9t\u00e9 en contact avec lui par les r\u00e9seaux de gauche. Je suis n\u00e9anmoins surprise. Est-il le plaignant en tant que responsable de l'administration des locaux \u00e9quatoriens espionn\u00e9s ? Et Stella Morris la victime t\u00e9moignant en tant qu'ancienne employ\u00e9e ? Le huis clos, c'est \u00e0 cause de la minorit\u00e9 de son fils \u00e0 l'\u00e9poque des faits ? Mais pourquoi le cacher ?\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ENous demandons poliment \u00e0 Monsieur Narvaez si et quand Julian Assange va comparaitre. \u00c0 14h30, nous dit-il. Des agents de s\u00e9curit\u00e9 font courir le bruit que c'est pli\u00e9, qu'il est parti, ou qu'il ne va passer qu'en vid\u00e9o. Notre ami John arrive alors et nous dit que \u00e7a y est, Julian est arriv\u00e9. Les photographes en sont certains car ils ont fait la photo. C'\u00e9tait un grand fourgon, le plus grand de tous. Il est midi, nous ne pouvons pas esp\u00e9rer arracher Julian aux entrailles du back office du tribunal. Nous ne pouvons qu'esp\u00e9rer qu'ils vont lui donner \u00e0 manger et tout le monde part d\u00e9jeuner. Nous revenons \u00e0 14 heures et croisons \u003Cb\u003EStella Morris\u003C\/b\u003E dans les couloirs qui refuse de nous donner la moindre info. Le couloir est rempli de Polonais et de Roumains en attente de jugement, on s'assied avec eux, puis petit \u00e0 petit le couloir se vide, les affaires sont exp\u00e9di\u00e9es. Un peu avant 14h30 \u003Cb\u003EFidel Narvaez\u003C\/b\u003E arrive et attend devant la salle 4. Je me pr\u00e9sente et je lui parle de l'audience d'hier, que Julian va mal... Il reste tr\u00e8s \u00e9vasif. L'affaire est tr\u00e8s tr\u00e8s compliqu\u00e9e. Mais aujourd'hui qui est le plaignant exactement ? On ne comprend rien, pourquoi le huis clos, pourquoi pas la salle 10, alors Julian sera l\u00e0 ou non ? On esp\u00e8re juste que Julian Assange est bien t\u00e9moin et pas encore accus\u00e9 de quelque chose. L'id\u00e9al serait qu'une plainte en son nom soit r\u00e9dig\u00e9e pour violation de SA vie priv\u00e9e.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EMonsieur Narvaez reste \u00e0 attendre sur un des si\u00e8ges du couloir \u00e0 \u00e9tudier un dossier. Vers 15 heures je reconnais \u003Cb\u003EAlistar Lyon\u003C\/b\u003E, du cabinet de Gareth Peirce qui fait les 100 pas devant la salle 4. C'est le seul avocat auquel Julian Assange parlait pendant sa comparution le 21 octobre. Je n'attends pas, on doit au moins savoir ce qui se passe. Il est gentil, nous discutons de la situation sociale et de la vie en France. Oui, il est aujourd'hui avocat de Julian Assange. C'est tout ce qu'il peut me dire. Je me dis qu'au moins Julian ne sera pas tout seul. Quelques minutes plus tard, vers 15h10, la salle 4 est \u00e9clair\u00e9e et on s'affaire \u00e0 l'int\u00e9rieur. Le manager ouvre la porte et tout va tr\u00e8s vite. Alistar Lyon entre pr\u00e9cipitamment dans la salle, puis un homme et une femme genre fonctionnaire sortent d'une salle de consultation et le suivent. Le \u00ab Home Office \u00bb, disent nos amis. \u003Cb\u003ELe manager de la s\u00e9curit\u00e9 de Mitie verrouille\u003C\/b\u003E la porte de la salle tout en restant \u00e0 l'int\u00e9rieur. \u003Cb\u003EMais juste avant que deux agents de s\u00e9curit\u00e9 ne bouchent toute la vue en se pla\u00e7ant devant la porte, Julie a eu le temps de voir Julian. Elle a pu le voir debout, cheveux blancs coup\u00e9s, plut\u00f4t ras\u00e9 et sans lunettes.\u003C\/b\u003E Il parle \u00e0 Lyon face \u00e0 face avec derri\u00e8re la vitre du box de droite. Moi, je vois bien Lyon mais plus \u00e0 droite la s\u00e9curit\u00e9 bouche la vue. D\u00e8s que Julian sera assis on ne verra plus rien. Mais on reste, dans l'espoir de le voir et pour faire pression.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EJulian est derri\u00e8re deux portes et une vitre mais \u00e0 peine \u00e0 20 m\u00e8tres de nous. C'est horrible et rageant de le savoir si pr\u00e8s. Alors qu'on pense aux murs infranchissables de Belmarsh, \u00e0 la prison plus secr\u00e8te ou il est si bien dissimul\u00e9 au monde. Il n'y a pas de mots pour d\u00e9crire notre impuissance. C'est \u00e9trange, car en m\u00eame temps toute notre soumission n'est que volontaire. Je connais la profession d'agent de s\u00e9curit\u00e9, boulot de prol\u00e9taires. Personne ne prendrait de risques. Il suffirait qu'on les bouscule, ils s'effaceraient... Mais les autres derri\u00e8re feraient disparaitre Julian dans les profondeurs des oubliettes de b\u00e9ton et nous serions interdites d'entr\u00e9e ou expuls\u00e9es...\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EAlors on reste camp\u00e9es devant la porte devant les hommes dans l'espoir que notre pr\u00e9senceva se sentir \u00e0 l'int\u00e9rieur de la pi\u00e8ce. \u003Cb\u003ETant d'efforts de la part du syst\u00e8me pour soustraire \u00e0 la vue des proches un homme si affaibli que la veille il n'a pas pu dire ni son nom ni s'il a compris ce qui se joue dans son sort...\u003C\/b\u003E \u00c0 ce moment-l\u00e0 les proches, c'est nous, il n'y a plus personne d'autre pour \u00eatre proche de lui. Et dehors les militants dont la clameur monte. De plus en plus fort. La salle jouxte le mur donnant sur la rue du rassemblement. Il est possible que Julian entende \u00ab Free Free Julian Assange \u00bb, tellement les voix sont sinc\u00e8res et puissantes. Les agents de s\u00e9curit\u00e9 bougent d'un pied sur l'autre, ils sont fatigu\u00e9s. Je guette des signaux d'ennuis pour pouvoir agir. Ils plaisantent sur la clameur militante en parlant de \u003Cb\u003E\"french activism \u00bb.\u003C\/b\u003E On ne sent pas d'hostilit\u00e9 de leur part, mais une esp\u00e8ce de devoir r\u00e9sign\u00e9 par la n\u00e9cessit\u00e9 de garder son boulot. On essaye de les amadouer. On leur demande de juste nous permettre de voir Julian \u00e0 travers la vitre du sas, le manager de la s\u00e9curit\u00e9 a de toute fa\u00e7on verrouill\u00e9 la porte de l'int\u00e9rieur. Quels sont les secrets de l'audience ? Aucun journaliste ne pourra rien \u00e9crire dessus de vrai. Est-ce que cela dure aussi longtemps parce qu'il faut un interpr\u00e9tariat ? \u003Cb\u003EComment Julian peut-il aujourd'hui se concentrer pendant deux heures d'interrogatoire alors que la veille il n'arrivait pas \u00e0 finir une phrase sans h\u00e9sitation ?\u003C\/b\u003E L'audition d'un homme dans un tel \u00e9tat ne peut pas avoir de valeur juridique. Il faut arr\u00eater cela, le rel\u00e2cher er le soigner dans un endroit de confiance pour qu'il soit apte \u00e0 se d\u00e9fendre lui-m\u00eame. C'est ce que Wikijustice r\u00e9clame depuis le d\u00e9but...Comment se fait il que le juge espagnol ne voie pas l'\u00e9tat de sant\u00e9 d\u00e9plorable du t\u00e9moin ? Il y a-t-il un juge anglais dans la salle ou est-ce que le Home Office joue le r\u00f4le de l'autorit\u00e9 judiciaire ? Que de questions. Et pourquoi le manager de la s\u00e9curit\u00e9 priv\u00e9e Mitie assiste \u00e0 un proc\u00e8s qui se d\u00e9roule \u00e0 huis clos ? Dans un huis clos aucune personne autre que les justiciables concern\u00e9s et l'autorit\u00e9 judiciaire ne peuvent \u00eatre pr\u00e9sents. Je le vois \u00e0 cot\u00e9 du garde en pull bleu fonc\u00e9 s'activer \u00e0 d\u00e9placer des meubles. \u00c0 la fin c'est lui qui ouvrira la porte m\u00e9tallique pour laisser sortir le fourgon ou Julian Assange est enferm\u00e9. Le tribunal sera vide \u00e0 17 heures, lui restera faire des heures suppl\u00e9mentaires consciencieusement. Fidel Narvaez est parti vers 16h30 sans avoir attendu la fin.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cb\u003ECar l'audition dure deux heures.\u003C\/b\u003E C'est lourd pour nous aussi car nous sommes \u00e9puis\u00e9s, mais toujours \u00e0 l'aff\u00fbt de la moindre possibilit\u00e9 de le voir. Les militants continuent de faire monter la voix de la protestation. Puis brusquement le manager d\u00e9verrouille la porte, les agents de s\u00e9curit\u00e9 s'effacent et je vois Alistar Lyon sortir en trombe de la salle et courir vers les locaux du secr\u00e9tariat \u00e0 l'autre bout du tribunal. Il a le visage d\u00e9fait de quelqu'un qui a fait face \u00e0 une mauvaise nouvelle. On s'inqui\u00e8te pour Julian. Puis sort un homme \u00e2g\u00e9 qui pouvait \u00eatre l'interpr\u00e8te et les deux fonctionnaires du Home Office. Les agents nous signifient que c'est fini sans formellement nous chasser. On ne veut pas rater la sortie de Julian. On sait qu'ils l'ont d\u00e9j\u00e0 \u00e9vacu\u00e9 par derri\u00e8re. Il faut tr\u00e8s vite dire aux militants de guetter le fourgon.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EIl pleut, il fait noir, mais comme on sait qu'il est juste derri\u00e8re la porte m\u00e9tallique il faut crier fort car il peut entendre. On crie, des militantes chantent. L'ambiance est forte et solidaire. Il y a un camion de police et 6 ou 7 flics devant la porte. Ils n'ont pas l'air agressifs et nous disent que c'est pour nous emp\u00eacher d'entrer dans le b\u00e2timent. Ils savent qu'on ne va pas le faire, tout le monde est bien trop ob\u00e9issant ici. Notre attente dure encore une heure. Ils attendent que le trafic du vendredi soir passe pour que le fourgon ne soit pas coinc\u00e9 dans les embouteillages ? Ils veulent le faire passer par l'autre porte de derri\u00e8re ? On ne sait pas. Puis lentement la porte se soul\u00e8ve. D'abord deux fourgons entrent vides, puis sortent, un petit et un grand, tous deux SERCO. On se rue dessus, ext\u00e9nu\u00e9s et en rage. Surtout sur le deuxi\u00e8me dont tout le monde dit que Julian est dedans. On est dix \u00e0 tambouriner sur le blindage en hurlant \"'we are with you\", \u00ab free Julian. \u00bb.de toutes nos forces. Les photographes flashent l'int\u00e9rieur. Une militante, Cynthia, nous dira que Julian Assange \u00e9tait assis du cot\u00e9 o\u00f9 elle se tenait et qu'elle a pu le voir quand le photographe a flash\u00e9 et \u00e9clair\u00e9 l'int\u00e9rieur.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes fourgons quittent le b\u00e2timent et les policiers ne nous emp\u00eachent pas de les suivre dans la rue, alors on les course \u00e0 pieds. Il y a des travaux, le convoi est bloqu\u00e9 100 m\u00e8tres plus loin. On court encore rattraper le fourgon ! On essaye d'ouvrir la porte... Dans des temps plus anciens les gens auraient \u00e9t\u00e9 plus offensifs mais, qui oserait faire aujourd'hui ce que faisaient les R\u00e9sistants des ann\u00e9es 40 et les militants des ann\u00e9es 60 et 70 ? On est \u00e9puis\u00e9s mais on l'a accompagn\u00e9 jusqu'au bout. Julian Assange n'est pas seul. J'esp\u00e8re qu'il a pu emporter derri\u00e8re les murs de la prison le cri de notre indignation et de notre solidarit\u00e9.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cspan class=\"philum ic-img2\"\u003E\u003C\/span\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ECourtesy of \u003Ca href=\"http:\/\/tlaxcala-int.org\"\u003ETlaxcala\u003C\/a\u003E\u003Cbr \/\u003E\nPublication date of original article: 02\/01\/2020\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"http:\/\/www.tlaxcala-int.org\/article.asp?reference=27726\"\u003Etlaxcala-int.org\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E","_links":{"parent_art":[{"title":"170 ans de prison : les Etats-Unis annoncent 17 nouvelles inculpations contre Julian Assange","url":"http:\/\/newsnet.fr\/apicom\/id:156821,json:1"}],"related_art":[{"title":"Audience judiciaire de Julian Assange, \u00ab pr\u00e9sent-absent \u00bb , le 13 d\u00e9cembre 2019 Des avocats pour g\u00e9rer la fin de cycle d'une \u00ab extraordinary rendition \u00bb ?","url":"http:\/\/newsnet.fr\/apicom\/id:166188,json:1"}],"related_by":[{"title":"Sous la pression de la juge, la compagne d'Assange r\u00e9v\u00e8le son identit\u00e9 et celle de leurs enfants","url":"http:\/\/newsnet.fr\/apicom\/id:172196,json:1"}]}}}