{"167670":{"id":"167670","parent":"166452","time":"1579431300","url":"http:\/\/newsnet.fr\/167670","source":"http:\/\/www.journaldeleconomie.fr\/Pourquoi-l-eco-sera-pire-que-le-franc-CFA_a8258.html","category":"Afrique","title":"Pourquoi l'\u00e9co sera pire que le franc Cfa.","catalog-images":"3\/\/1\/newsnet_167670_fe5c1f.jpg","image":"http:\/\/newsnet.fr\/img\/newsnet_167670_fe5c1f.jpg","hub":"newsnet","url-explicit":"http:\/\/newsnet.fr\/art\/pourquoi-l-eco-sera-pire-que-le-franc-cfa","admin":"newsnet","views":"444","priority":"2","length":"8660","lang":"fr","content":"\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003EOn dit que c'est une r\u00e9forme historique. Annonc\u00e9e samedi 21 d\u00e9cembre dernier depuis Abidjan par les pr\u00e9sidents Fran\u00e7ais et Ivoirien, la cr\u00e9ation de l'\u00e9co d\u00e8s l'ann\u00e9e prochaine en remplacement du sulfureux franc CFA semble constituer un nouveau moment fort de la coop\u00e9ration mon\u00e9taire franco-africaine. Soixante-quatorze ans apr\u00e8s sa cr\u00e9ation sous la p\u00e9riode coloniale et 25 ans apr\u00e8s la derni\u00e8re grande r\u00e9forme de son fonctionnement, le franc CFA n'a pas suffi \u00e0 sortir du sous-d\u00e9veloppement les \u00e9conomies qui l'ont en partage. Malgr\u00e9 bien des \u00e9volutions, sa permanence dans les relations franco-africaines depuis la colonisation alimente des ressentiments et des soup\u00e7ons \u00e0 l'endroit de l'ancienne m\u00e9tropole, en Afrique comme en France.\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe 27 D\u00e9cembre 2019, par Loup Viallet\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cimg style=\"max-width:100%\" src=\"http:\/\/newsnet.fr\/img\/newsnet_167670_fe5c1f.jpg\" \/\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EAu-del\u00e0 du changement de nom de la monnaie africaine, la r\u00e9forme de la coop\u00e9ration mon\u00e9taire franco-africaine portant cr\u00e9ation de l'\u00e9co est-elle \u00e0 la veille de transformer les relations entre la France et ses anciennes colonies\u00a0? Les mesures port\u00e9es par Emmanuel Macron et Alassane Ouattara sont-elles de nature \u00e0 accro\u00eetre l'autonomie des \u00c9tats-membres de la future union mon\u00e9taire\u00a0?\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cb\u003E\u003Ci\u003EPourquoi les d\u00e9cisions avanc\u00e9es par les pr\u00e9sidents Macron et Ouattara ne permettront pas l'autonomie de la politique mon\u00e9taire de la future zone \u00e9co.\u003C\/i\u003E\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ED'abord, le rapatriement dans la Banque Centrale d'Afrique de l'Ouest des devises centralis\u00e9es \u00e0 Paris ne signifie pas qu'avec la cr\u00e9ation de l'\u00e9co, les autorit\u00e9s africaines vont pouvoir d\u00e9terminer librement le taux de change de leur nouvelle monnaie. En r\u00e9alit\u00e9 les \u00c9tats-membres de la future union mon\u00e9taire seront encore tr\u00e8s loin d'avoir parachev\u00e9 leur autonomie financi\u00e8re.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EEn effet, le recouvrement de leurs devises plac\u00e9es en garantie \u00e0 Paris (environ 5 milliards d'euros) ne correspond pas \u00e0 une valeur telle qu'ils disposeront d'une capacit\u00e9 financi\u00e8re suffisante pour prot\u00e9ger leur nouvelle monnaie des variations fortes issues des diverses pressions que leurs \u00e9conomies traversent d\u00e9j\u00e0, c'est-\u00e0-dire les cons\u00e9quences du r\u00e9chauffement climatique, l'appr\u00e9ciation ou la d\u00e9pr\u00e9ciation du dollar, les crises politiques et militaires, la crise de la demande ou de l'offre. Ce sont d'ailleurs ces \u00e9l\u00e9ments qui rendent vuln\u00e9rable et al\u00e9atoire la valeur des autres devises du continent africain, qui ne b\u00e9n\u00e9ficient pas d'un cours fixe accroch\u00e9 \u00e0 celui d'une grande monnaie internationale.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EEnsuite parce que le Conseil des Gouverneurs de la Banque centrale peut choisir de maintenir, en p\u00e9riode de croissance forte, une politique mon\u00e9taire restrictive et donc de ne pas utiliser cette nouvelle manne comme un moyen de relance mais plut\u00f4t comme une mani\u00e8re de ma\u00eetriser l'inflation. On observait d\u00e9j\u00e0 cette tendance \u00e0 la th\u00e9saurisation en 2014, lorsque le niveau des r\u00e9serves l\u00e9gales d\u00e9tenues par la BCEAO \u00e9tait de 30% sup\u00e9rieur \u00e0 celui exig\u00e9 par les trait\u00e9s. Il y a donc fort \u00e0 parier que cet afflux (limit\u00e9) de devises dans les comptes d'op\u00e9rations de la Banque Centrale des \u00c9tats d'Afrique de l'Ouest n'aura pas un effet substantiel sur le financement des \u00e9conomies de la zone \u00e9co. De ce point de vue, le probl\u00e8me en Afrique subsaharienne ne se situe d'ailleurs pas tant du c\u00f4t\u00e9 de la monnaie ou des r\u00e9serves disponibles que du c\u00f4t\u00e9 de la solvabilit\u00e9 des demandeurs de pr\u00eats et du manque de confiance des institutions financi\u00e8res \u00e0 leur \u00e9gard, ce que la r\u00e9forme \u00e9co ne r\u00e9glera pas.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EAu m\u00eame titre que la centralisation d'une partie des r\u00e9serves en devises des \u00c9tats de la zone franc dans les livres de comptes du tr\u00e9sor fran\u00e7ais, la pr\u00e9sence de repr\u00e9sentants fran\u00e7ais dans les conseils d'administrations de la monnaie africaine constitue une contrepartie \u00e0 la garantie de convertibilit\u00e9 du franc CFA en euros par la France dans le syst\u00e8me actuel. Cette participation, sans pouvoir de veto pour les repr\u00e9sentants fran\u00e7ais depuis la r\u00e9forme de 2010, pouvait \u00eatre per\u00e7ue comme un h\u00e9ritage colonial, mais aussi comme un gage de cr\u00e9dibilit\u00e9 et de transparence. La r\u00e9forme de l'\u00e9co entend les supprimer d\u00e9finitivement plut\u00f4t que d'accro\u00eetre la pr\u00e9sence d'experts internationaux (et pas seulement Fran\u00e7ais) dans les institutions mon\u00e9taires africaines ainsi que le proposait r\u00e9cemment le pr\u00e9sident B\u00e9ninois Patrice Talon.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cb\u003E\u003Ci\u003EPourquoi la cr\u00e9ation de l'\u00e9co ne constitue pas le meilleur chemin pour faire progresser l'autonomie financi\u00e8re et l'autonomie politique des \u00c9tats d'Afrique de l'Ouest.\u003C\/i\u003E\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe syst\u00e8me de l'\u00e9co va donc accorder une autonomie factice \u00e0 la nouvelle monnaie africaine puisque, malgr\u00e9 la disparition du compte d'op\u00e9rations, la stabilit\u00e9 de l'\u00e9co sera encore assur\u00e9e par l'ext\u00e9rieur. Cependant, cette fois, la garantie fran\u00e7aise sera accord\u00e9e sans contreparties du c\u00f4t\u00e9 africain. Le nouveau syst\u00e8me mon\u00e9taire ne permettra donc pas de r\u00e9gler l'un des plus grands d\u00e9fauts du syst\u00e8me pr\u00e9c\u00e9dent, soit la \u00ab\u00a0servitude volontaire\u00a0\u00bb (NUBUKPO) ou \u00ab\u00a0l'\u00e9tat d'esprit de facilit\u00e9 et d'irresponsabilit\u00e9\u00a0\u00bb (DIARRA) de certains d\u00e9cideurs de la zone franc, qui se reposent sur l'assurance de convertibilit\u00e9 illimit\u00e9e de leur monnaie pour ne pas chercher \u00e0 \u00e9quilibrer leurs balances ext\u00e9rieures ou conduire les r\u00e9formes n\u00e9cessaires au parach\u00e8vement de leur int\u00e9gration \u00e9conomique r\u00e9gionale.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EOr, pour que la future monnaie commune \u00ab\u00a0\u00e9co\u00a0\u00bb soit r\u00e9ellement un instrument au service des \u00e9conomies africaines, il faut que la future union mon\u00e9taire corresponde \u00e0 un march\u00e9 commun ouest-africain. C'\u00e9tait le projet de l'UEMOA, fond\u00e9e en 1994 entre les huit pays d'Afrique de l'Ouest concern\u00e9s aujourd'hui par l'\u00e9co, sur le constat qu'il fallait doubler l'union mon\u00e9taire ouest-africaine d'une union \u00e9conomique qui permette la cr\u00e9ation d'un march\u00e9 commun unifi\u00e9 dans lequel la monnaie pourrait agir comme moteur. Mais force est de constater que depuis vingt-cinq ans, la construction de l'UEMOA a montr\u00e9 ses limites et l'int\u00e9gration r\u00e9gionale s'est essouffl\u00e9e consid\u00e9rablement pendant la derni\u00e8re d\u00e9cennie\u00a0: son budget communautaire et ses politiques r\u00e9gionales sont en baisse, sa TVA r\u00e9gionale est un \u00e9chec, son union douani\u00e8re a \u00e9t\u00e9 remplac\u00e9e par celle de la CEDEAO, ses \u00e9changes intra-communautaires stagnent en volume et en valeur. Dans ce contexte, la perspective d'un \u00e9largissement de la zone mon\u00e9taire actuelle \u00e0 d'autres \u00c9tats-membres, pr\u00e9sent\u00e9e comme une condition de la cr\u00e9ation de l'\u00e9co, risque de compromettre s\u00e9rieusement un processus d'int\u00e9gration d\u00e9j\u00e0 \u00e0 la peine \u00e0 huit \u00c9tats.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cb\u003E\u003Ci\u003EUne r\u00e9forme pr\u00e9cipit\u00e9e, qui supprime les symboles de la contestation du syst\u00e8me actuel mais en amplifie les d\u00e9fauts\u00a0;\u003C\/i\u003E\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa garantie fran\u00e7aise peut constituer un avantage comparatif si elle permet aux \u00c9tats qui en b\u00e9n\u00e9ficient de l'utiliser comme une assurance de stabilit\u00e9 mon\u00e9taire et de s\u00e9curit\u00e9 \u00e9conomique le temps de construire leur propre autonomie financi\u00e8re, jusqu'\u00e0 pouvoir enfin s'en passer. Ce n'est pas la direction que prend la coop\u00e9ration franco-africaine avec la cr\u00e9ation de l'\u00e9co, qui plut\u00f4t que de renforcer leur unit\u00e9, va acc\u00e9l\u00e9rer le morcellement \u00e9conomique des \u00c9tats d'Afrique de l'Ouest, tout en d\u00e9veloppant leur d\u00e9pendance financi\u00e8re envers la France, qui se trouvera plus que jamais garante de leurs d\u00e9ficits et soup\u00e7onn\u00e9e de contribuer \u00e0 nouveau \u00e0 l'affaiblissement d'une partie de l'Afrique.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes pr\u00e9sidents Fran\u00e7ais et Ivoirien pensent peut-\u00eatre tenir, avec la r\u00e9forme de l'\u00e9co, une victoire politique \u00e0 m\u00eame de servir leurs int\u00e9r\u00eats respectifs. D'un c\u00f4t\u00e9, cette annonce pourrait constituer un argument \u00e9lectoral massif pour le pr\u00e9sident Ouattara \u00e0 dix mois des \u00e9lections pr\u00e9sidentielles ivoiriennes. De l'autre, le pr\u00e9sident Macron veut sans doute r\u00e9ussir la double prouesse de faire tomber un symbole anti-Fran\u00e7ais sans rompre la coop\u00e9ration mon\u00e9taire franco-africaine. Il semble pourtant que la cr\u00e9ation de l'\u00e9co ne soit pas la meilleure r\u00e9ponse possible et constitue m\u00eame un compromis pire que le pr\u00e9c\u00e9dent\u00a0: la disparition des symboles g\u00eanants li\u00e9s au franc CFA ne suffira pas \u00e0 combler les graves d\u00e9fauts de la nouvelle coop\u00e9ration mon\u00e9taire. La victoire sera de courte dur\u00e9e.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cb\u003E\u003Ci\u003ELoup Viallet\u003C\/i\u003E\u003C\/b\u003E \u003Ci\u003Eest sp\u00e9cialiste de l'\u00e9conomie politique de l'Afrique contemporaine. R\u00e9dacteur du blog \"Questions africaines\"\u00a0: \u003Ca href=\"https:\/\/questionsafricaines.wordpress.com\"\u003Equestionsafricaines.wordpress.com\u003C\/a\u003E,\u003C\/i\u003E\u003Cbr \/\u003E\n\u003Ci\u003E\u003Ci\u003Eil contribue r\u00e9guli\u00e8rement dans Les Echos, Mondafrique, Les Yeux du Monde, Conflits.\u003C\/i\u003E\u003Cbr \/\u003E\n\u003Ci\u003ESes analyses ont donn\u00e9 lieu \u00e0 des conf\u00e9rences en France (\u00e0 l'ESSEC) et en C\u00f4te d'Ivoire (\u00e0 l'\u00c9cole Sup\u00e9rieure de Commerce et des Affaires de C\u00f4te d'Ivoire ainsi qu'\u00e0 l'Institut de Formation Sainte-Marie d'Abidjan).\u003C\/i\u003E\u003C\/i\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"https:\/\/www.journaldeleconomie.fr\/Pourquoi-l-eco-sera-pire-que-le-franc-CFA_a8258.html\"\u003Ejournaldeleconomie.fr\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E","_links":{"parent_art":[{"title":"Le franc Cfa change de nom et laisse place \u00e0 l'Eco","url":"http:\/\/newsnet.fr\/apicom\/id:166452,json:1"}]}}}