{"168787":{"id":"168787","parent":"156821","time":"1581326081","url":"http:\/\/newsnet.fr\/168787","source":"http:\/\/www.wsws.org\/fr\/articles\/2020\/02\/10\/jadd-f10.html","category":"Justice","title":"Les poursuites contre Julian Assange, la destruction du Droit et la mont\u00e9e de l'\u00c9tat national s\u00e9curitaire","catalog-images":"8\/\/6\/newsnet_168787_dda38b.jpg\/newsnet_168787_d31069.jpg\/newsnet_168787_c4c6a5.jpg\/newsnet_168787_49c788.jpg\/newsnet_168787_9323fc.jpg\/newsnet_168787_8f9678.jpg\/newsnet_168787_862106.jpg\/newsnet_168787_44d281.jpg\/newsnet_168787_60936a.jpg","image":"http:\/\/newsnet.fr\/img\/newsnet_168787_8f9678.jpg","hub":"newsnet","url-explicit":"http:\/\/newsnet.fr\/art\/les-poursuites-contre-julian-assange-la-destruction-du-droit-et-la-montee-de-l-etat-national-securitaire","admin":"newsnet","views":"523","priority":"4","length":"59259","lang":"fr","content":"\u003Cp\u003EPar Richard Hoffman\u003Cbr \/\u003E\n10 f\u00e9vrier 2020\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa proc\u00e9dure d'extradition engag\u00e9e par les \u00c9tats-Unis contre Julian Assange doit commencer en ce mois de f\u00e9vrier 2020. Les poursuites contre Assange marquent une nouvelle \u00e9tape dans l'attaque des libert\u00e9s civiles fondamentales et du Droit lui-m\u00eame par la classe dirigeante am\u00e9ricaine, britannique et de fait, mondiale.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa classe dirigeante a attaqu\u00e9 les fondements constitutionnels et juridiques de la d\u00e9mocratie bourgeoise durant les deux derni\u00e8res d\u00e9cennies. Le droit \u00e0 un proc\u00e8s \u00e9quitable et la libert\u00e9 d'expression ont \u00e9t\u00e9 au centre de cette attaque. Il y a dans les poursuites contre Assange, des \u00e9l\u00e9ments nouveaux et dangereux.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe gouvernement am\u00e9ricain s'est toujours efforc\u00e9 de saper la libert\u00e9 d'expression et la capacit\u00e9 de la presse \u00e0 informer de ses affaires et de la fa\u00e7on dont il appliquait le droit. Mais l'attaque politique et juridique contre Assange repr\u00e9sente une nouvelle qualit\u00e9 dans l'intensification du d\u00e9mant\u00e8lement des libert\u00e9s fondamentales et du Droit m\u00eame en tant que mode de gouvernement bourgeois.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDes administrations am\u00e9ricaines successives ont poursuivi une v\u00e9ritable contre-r\u00e9volution dans leurs efforts pour construire un \u00c9tat national s\u00e9curitaire et autoritaire.\u003C\/p\u003E\u003Cfigure\u003E\u003Cimg src=\"http:\/\/newsnet.fr\/img\/newsnet_168787_dda38b.jpg\" \/\u003E\u003Cfigcaption\u003EJulian Assange\u003C\/figcaption\u003E\u003C\/figure\u003E\u003Cp\u003EL'actuel gouvernement am\u00e9ricain cherche \u00e0 \u00e9riger en \u00abloi\u00bb qu'une activit\u00e9 journalistique divulguant ou publiant des informations class\u00e9es, de d\u00e9fense ou autres, est criminelle et revient \u00e0 de l'espionnage, et que des journalistes seront mis en prison comme espions.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe gouvernement britannique, par sa fa\u00e7on de traiter Assange, a \u00e9galement pi\u00e9tin\u00e9 d'innombrables droits juridiques fondamentaux du fondateur de WikiLeaks - notamment le droit \u00e0 un proc\u00e8s \u00e9quitable, la pratique juridique coutumi\u00e8re, l'habeas corpus [loi vot\u00e9e dans les pays anglo-saxons qui garantit la libert\u00e9 individuelle et \u00e9vite la d\u00e9tention arbitraire] et la reconnaissance du droit international - tout en agissant comme la servante judiciaire de l'Am\u00e9rique. Le pr\u00e9sent article vise \u00e0 examiner certaines des implications politiques et juridiques plus larges de la d\u00e9fense de Julian Assange et \u00e0 expliquer pourquoi cette affaire soul\u00e8ve d'immenses questions historiques pour l'avenir de l'humanit\u00e9.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003EL'affaire John Peter Zenger\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EPr\u00e8s de 300 ans se sont \u00e9coul\u00e9s depuis le fameux proc\u00e8s de John Peter Zenger, un \u00e9diteur new-yorkais qui fut accus\u00e9 de diffamation, une infraction de l'\u00e9poque, concernant la publication d'informations oppos\u00e9es au gouvernement. C'\u00e9tait en 1734 et l'Am\u00e9rique \u00e9tait une colonie britannique. L'affaire Zenger eut des implications r\u00e9volutionnaires consid\u00e9rables dans une \u00e9poque d'ascension d'une nouvelle classe progressiste, la bourgeoisie am\u00e9ricaine.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EJohn Peter Zenger \u00e9tait un immigrant allemand et l'\u00e9diteur d'un journal intitul\u00e9 \u003Ci\u003ENew York Weekly Journal\u003C\/i\u003E. Cette publication critiquait s\u00e9v\u00e8rement le gouvernement colonial et le gouverneur, William S. Cosby. Zenger accusait entre autre le gouvernement de truquer les \u00e9lections et le gouverneur Cosby d'avoir commis divers crimes.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EZenger n'avait fait que publier le mat\u00e9riel; les sources de l'information \u00e9taient anonymes et il refusait de r\u00e9v\u00e9ler leur identit\u00e9. Il fut jet\u00e9 en prison pendant huit mois et maltrait\u00e9 par les autorit\u00e9s coloniales; on lui refusa entre autre une plume, de l'encre ou encore du papier gr\u00e2ce auxquels il p\u00fbt communiquer avec le monde ext\u00e9rieur et pr\u00e9parer sa d\u00e9fense. Le gouverneur fit br\u00fbler en public le \u003Ci\u003ENew York Weekly Journal\u003C\/i\u003E.\u003C\/p\u003E\u003Cfigure\u003E\u003Cimg src=\"http:\/\/newsnet.fr\/img\/newsnet_168787_d31069.jpg\" \/\u003E\u003Cfigcaption\u003EL\u00e9gende: une image d'Andrew Hamilton d\u00e9fendant John Peter Zenger au tribunal\u003C\/figcaption\u003E\u003C\/figure\u003E\u003Cp\u003EZenger fut accus\u00e9 de diffamation, terme dont la signification juridique, \u00e0 l'\u00e9poque, ne touchait en rien \u00e0 la v\u00e9rit\u00e9 ou la fausset\u00e9 d'une \u00e9nonciation, mais seulement \u00e0 la publication de d\u00e9clarations critiques sur le gouvernement. Zenger admit la publication de ces documents, mais d\u00e9fendit, pour la premi\u00e8re fois dans l'histoire de la colonie, le droit \u00e0 la libert\u00e9 d'expression. Son avocat, Andrew Hamilton, de Philadelphie, s'adressa au jury sur la question capitale en jeu dans le proc\u00e8s. \u00c9tant donn\u00e9 les mesures prises aujourd'hui par le gouvernement am\u00e9ricain contre Julian Assange, cela vaut la peine de citer longuement le discours fort et brillant de Hamilton:\u003C\/p\u003E\u003Cblockquote\u003EC'est naturel, c'est un privil\u00e8ge, j'irai plus loin, c'est un droit que tous les hommes libres revendiquent, qu'ils ont le droit de se plaindre quand ils sont bless\u00e9s. Ils ont le droit de protester publiquement contre les abus de pouvoir dans les termes les plus forts, de mettre leurs voisins sur leurs gardes contre les ruses ou la violence ouverte des hommes en position d'autorit\u00e9. Ils ont le droit d'affirmer avec courage l'id\u00e9e qu'ils ont des b\u00e9n\u00e9dictions de la libert\u00e9, la valeur qu'ils lui accordent et leur r\u00e9solution face \u00e0 tous les risques \u00e0 la pr\u00e9server comme l'un des plus grands bienfaits que le ciel puisse accorder...\u003Cp\u003ELe pouvoir peut \u00e0 juste titre \u00eatre compar\u00e9 \u00e0 un grand fleuve. Tant qu'on le maintient dans ses limites, il est \u00e0 la fois beau et utile. Mais lorsqu'il d\u00e9borde de ses rives, il est alors trop imp\u00e9tueux pour se laisser endiguer; il emporte tout devant lui, et apporte la destruction et la d\u00e9solation partout o\u00f9 il passe. Si, donc, c'est l\u00e0 la nature du pouvoir, faisons au moins notre devoir, et, comme les sages qui appr\u00e9cient la libert\u00e9, prenons le plus grand soin de soutenir la libert\u00e9, seul rempart contre un pouvoir sans loi, qui \u00e0 tous les \u00e2ges, a sacrifi\u00e9 \u00e0 sa convoitise d\u00e9brid\u00e9e et \u00e0 son ambition sans bornes le sang des meilleurs hommes ayant jamais v\u00e9cu...\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EVous le voyez, je travaille sous le poids de nombreuses ann\u00e9es et je suis courb\u00e9 par de grandes infirmit\u00e9s corporelles. Pourtant, vieux et faible comme je suis, je dois consid\u00e9rer de mon devoir, si n\u00e9cessaire, d'aller dans la r\u00e9gion la plus extr\u00eame du pays o\u00f9 mes services pourraient \u00eatre d'une quelconque utilit\u00e9\u00a0; d'aider \u00e0 \u00e9teindre la flamme des poursuites visant des informations, anim\u00e9es par le gouvernement pour priver un peuple du droit de critiquer et de se plaindre, aussi, des tentatives arbitraires d'hommes au pouvoir....\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EMais pour conclure, la question dont la Cour et vous, messieurs du jury, \u00eates saisis n'est pas d'une importance mineure ou priv\u00e9e. Ce n'est pas la cause d'un seul malheureux imprimeur, ni celle de New York seulement, que vous jugez maintenant. Non! Elle peut, par ses cons\u00e9quences, affecter tout homme libre qui vit sous un gouvernement britannique sur le continent am\u00e9ricain. C'est la meilleure des causes. C'est la cause de la libert\u00e9. Et je ne doute pas que votre droite conduite aujourd'hui vous apportera non seulement l'amour et l'estime de vos concitoyens, mais que tous les hommes qui pr\u00e9f\u00e8rent la libert\u00e9 \u00e0 une vie d'esclavage vous b\u00e9niront et vous honoreront comme des hommes ayant d\u00e9jou\u00e9 les efforts de la tyrannie par un verdict impartial et non corrompu, et ayant \u00e9tabli un noble fondement permettant d'assurer \u00e0 nous-m\u00eames, notre post\u00e9rit\u00e9 et nos voisins, ce \u00e0 quoi la nature et les lois de notre pays nous ont donn\u00e9 droit, \u00e0 la libert\u00e9 de pouvoir d\u00e9masquer et combattre le pouvoir arbitraire (dans ces r\u00e9gions du monde du moins) en disant et en \u00e9crivant la v\u00e9rit\u00e9.\u003C\/blockquote\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u00c0 la fin du discours de Hamilton, le jury re\u00e7ut l'ordre de condamner Zenger, mais apr\u00e8s avoir d\u00e9lib\u00e9r\u00e9 pendant une tr\u00e8s courte p\u00e9riode, il est revenu avec un verdict unanime de non-culpabilit\u00e9. L'affaire Zenger a ensuite donn\u00e9 lieu \u00e0 l'\u00e9laboration d'une doctrine juridique, finalement concr\u00e9tis\u00e9e dans le premier amendement de la Constitution am\u00e9ricaine, et selon laquelle une information v\u00e9ridique ne pouvait jamais \u00eatre diffamatoire (ou s\u00e9ditieuse) et que l'expression ne pouvait \u00eatre restreinte par aucune mesure gouvernementale.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe Gouverneur Morris, une figure majeure de la Convention constitutionnelle de 1787, a d\u00e9crit l'affaire Zenger comme \u00able germe de la libert\u00e9 am\u00e9ricaine, l'\u00e9toile du matin de cette libert\u00e9 qui a ensuite r\u00e9volutionn\u00e9 l'Am\u00e9rique\u00bb.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EPeut-\u00eatre plus que tout autre \u00e9v\u00e9nement, le proc\u00e8s Zenger a commenc\u00e9 le processus qui conduisit \u00e0 la R\u00e9volution am\u00e9ricaine.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003ELa loi naturelle\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa d\u00e9fense de Zenger reposait sur des conceptions du Droit naturel qui \u00e9tait consid\u00e9r\u00e9 comme le fondement des droits. Ces conceptions, qui gagnaient du terrain en Am\u00e9rique, \u00e9taient le produit des r\u00e9volutions anglaises et des id\u00e9es de John Locke et des Lumi\u00e8res naissantes qui remontaient aux d\u00e9bats philosophiques classiques de l'Antiquit\u00e9 sur la question du sens de la loi et du pouvoir par rapport au droit, comme le montre par exemple la \u00ab\u00a0R\u00e9publique\u00a0\u00bb de Platon.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u00c0 la fin du XVIe si\u00e8cle, le juriste et humaniste n\u00e9erlandais Grotius fut le premier \u00e0 avancer la conception moderne du Droit naturel. Grotius affirmait que la vraie loi n'\u00e9tait ni une cr\u00e9ation humaine accidentelle ni une \u00e9manation de la soci\u00e9t\u00e9 politique, de l'\u00c9tat ou de l'\u00c9glise, mais une caract\u00e9ristique authentique et n\u00e9cessaire de l'Homme, refl\u00e9tant sa nature sociale essentielle. Le concept de Droit naturel se heurte \u00e0 deux obstacles majeurs: le pouvoir arbitraire de la royaut\u00e9, et l'\u00c9glise et ses conceptions th\u00e9ologiques et hi\u00e9rarchiques.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EAu cours du si\u00e8cle des Lumi\u00e8res, de grands penseurs originaux, tels que Locke, Montesquieu et Voltaire ont avanc\u00e9 les conceptions de droits d\u00e9mocratiques fond\u00e9s sur le Droit naturel. Dans son ouvrage r\u00e9volutionnaire \u00abL'esprit des lois\u00bb publi\u00e9 en 1748, Montesquieu \u00e9crit que\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u00ab\u00a0Les lois, dans la signification la plus \u00e9tendue, sont les rapports n\u00e9cessaires qui d\u00e9rivent de la nature des choses\u00a0\u00bb. Une fois lib\u00e9r\u00e9s du joug de la religion, nous devrions toujours \u00eatre soumis \u00e0 la r\u00e8gle de la Justice. La loi a sa structure objective, qu'aucun caprice arbitraire ne peut modifier. Avant que des lois puissent \u00eatre promulgu\u00e9es, il fallait que des relations justes soient possibles. \u00ab\u00a0Dire qu'il n'y a rien de juste ou d'injuste, que ce qu'ordonnent ou d\u00e9fendent les lois positives, c'est dire qu'avant qu'on eut trac\u00e9 le cercle, tous les rayons n'\u00e9taient pas \u00e9gaux\u00a0\u00bb.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EL'id\u00e9e d'une n\u00e9cessit\u00e9 objective de la loi exprimant la nature sociale de l'Homme \u00e9tait profond\u00e9ment influenc\u00e9e par la r\u00e9volution scientifique qui avait pr\u00e9c\u00e9d\u00e9 ces conqu\u00eates intellectuelles. Ces conceptions du Droit naturel et des droits d\u00e9mocratiques ont constitu\u00e9 un progr\u00e8s consid\u00e9rable dans la conscience humaine, fondamental et vital pour le progr\u00e8s et la civilisation de l'humanit\u00e9. Partout, les gens se r\u00e9jouissaient de la transformation repr\u00e9sent\u00e9e par ces id\u00e9es. Voltaire a compar\u00e9 \u00e0 l'\u00e9poque ce progr\u00e8s de la conscience \u00e0 un enfant qui commence \u00e0 marcher. Ces conceptions ont trouv\u00e9 leur manifestation dans les grandes d\u00e9clarations d\u00e9mocratiques qui ont accompagn\u00e9 les r\u00e9volutions am\u00e9ricaine et fran\u00e7aise, et ont constitu\u00e9 la base id\u00e9ologique de la forme de gouvernement constitutionnel qu'elles ont cr\u00e9\u00e9e. La D\u00e9claration d'ind\u00e9pendance a reproduit mot pour mot plusieurs passages du Deuxi\u00e8me trait\u00e9 de gouvernement \u00e9crit par Locke, notamment ce qui avait trait aux \u00abdroits inali\u00e9nables\u00bb et au \u00ab\u00a0long train d'abus\u00bb.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ES'inspirant des conceptions du Droit naturel des Lumi\u00e8res, les r\u00e9volutionnaires am\u00e9ricains ont entrepris de cr\u00e9er un gouvernement et une Constitution bas\u00e9s sur la raison. L'id\u00e9e principale \u00e9tait que les droits n'\u00e9taient pas accord\u00e9s par un pouvoir politique quelconque, mais qu'ils \u00e9manaient de la nature m\u00eame de l'Homme. Comme l'a d\u00e9clar\u00e9 John Dickinson en 1766:\u003C\/p\u003E\u003Cblockquote\u003ECe ne sont pas des parchemins et des sceaux qui nous transmettent nos droits et libert\u00e9s. Ils sont cr\u00e9\u00e9s en nous par les d\u00e9crets de la Providence, qui \u00e9tablissent les lois de notre nature. Ils naissent avec nous; ils existent avec nous; et ne peuvent nous \u00eatre enlev\u00e9s par aucune puissance humaine, sans nous enlever la vie. En bref, ils sont fond\u00e9s sur les maximes immuables de la raison et de la justice (cit\u00e9es dans Gordon S. Wood; \u00abThe Creation of the American Republic 1776-1787\u00bb (La cr\u00e9ation de la R\u00e9publique am\u00e9ricaine 1776-1787) Chapel Hill, 1969 p. 293).\u003C\/blockquote\u003E\u003Cp\u003ELa nature de la d\u00e9mocratie am\u00e9ricaine cr\u00e9\u00e9e par la r\u00e9volution et incarn\u00e9e dans sa constitution, refl\u00e8te une perspective politique \u00e0 la fois unique et intense. L'id\u00e9e de la \u00abSouverainet\u00e9 du peuple\u00bb et de l'inali\u00e9nabilit\u00e9 de ses droits \u00e9tait radicale de bout en bout. Comme l'a \u00e9crit Gordon Wood dans son ouvrage fondamental \u00ab\u00a0La cr\u00e9ation de la R\u00e9publique am\u00e9ricaine\u00a0\u00bb:\u003C\/p\u003E\u003Cblockquote\u003ELa th\u00e9orie banale de la souverainet\u00e9 populaire a acquis une v\u00e9rit\u00e9 dans les mains des Am\u00e9ricains que les radicaux europ\u00e9ens, malgr\u00e9 tous leurs discours sur la totalit\u00e9 du pouvoir dans le peuple, avaient \u00e0 peine consid\u00e9r\u00e9 comme imaginable, sauf en ces rares p\u00e9riodes de r\u00e9volution. La \u00ab\u00a0libert\u00e9 civile\u00a0\u00bb est devenue pour les Am\u00e9ricains non pas un 'gouvernement des lois', rendu acceptable par des chartes, des d\u00e9clarations de droits ou des pactes, mais un pouvoir existant dans le peuple en g\u00e9n\u00e9ral \u00e0 tout moment, pour n'importe quelle cause, ou sans cause, si ce n'est son propre plaisir souverain, capable de modifier ou d'annihiler le sens et l'essence de tout ancien gouvernement, et d'en adopter un nouveau \u00e0 sa place\u00bb. (op. cit., p. 362).\u003C\/blockquote\u003E\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003EMadison et la libert\u00e9 d'expression\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EJames Madison, l'un des p\u00e8res fondateurs des \u00c9tats-Unis, a \u00e9t\u00e9 le principal architecte de la D\u00e9claration des droits. Il \u00e9tait le principal partisan de cette n\u00e9cessit\u00e9 que, dans une v\u00e9ritable d\u00e9mocratie, le droit \u00e0 la libert\u00e9 d'expression soit absolu. Selon la doctrine de la Souverainet\u00e9 du Peuple, Madison soutenait que \u00abpour que le peuple gouverne sagement, il doit \u00eatre libre de penser et de parler sans crainte de repr\u00e9sailles\u00bb. Madison \u00e9tait initialement oppos\u00e9 \u00e0 l'\u00e9num\u00e9ration de droits s\u00e9par\u00e9ment de la structure de la Constitution, au motif qu'une \u00e9num\u00e9ration impliquerait une limitation. Madison a cependant reconnu la volont\u00e9 populaire exprim\u00e9e dans les conventions de ratification, qui avaient approuv\u00e9 les recours \u00e0 la Constitution et leur avait donn\u00e9 forme dans la D\u00e9claration des droits.\u003C\/p\u003E\u003Cfigure\u003E\u003Cimg src=\"http:\/\/newsnet.fr\/img\/newsnet_168787_c4c6a5.jpg\" \/\u003E\u003Cfigcaption\u003EL\u00e9gende: James Madison\u003C\/figcaption\u003E\u003C\/figure\u003E\u003Cp\u003ESur le droit \u00e0 la libert\u00e9 d'expression et son r\u00f4le central absolu dans une soci\u00e9t\u00e9 libre et d\u00e9mocratique, Madison a \u00e9t\u00e9 cat\u00e9gorique et sans \u00e9quivoque. La divulgation publique doit \u00eatre totalement libre et sans entrave. Madison se m\u00e9fiait r\u00e9solument du gouvernement populaire; c'est pourquoi il insistait pour dire que la divulgation politique doit \u00eatre solide et vigoureuse afin que le gouvernement puisse \u00eatre librement critiqu\u00e9 et ses abus r\u00e9v\u00e9l\u00e9s. \u00abL'opinion publique\u00bb, \u00e9crivait-il en 1791, \u00abfixe des limites \u00e0 chaque gouvernement, et est le v\u00e9ritable souverain de chaque gouvernement libre.\u00bb\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ESelon la th\u00e9orie d\u00e9mocratique, c'est le peuple, et seulement le peuple, qui gouverne. Et pour que le peuple gouverne avec sagesse, ses membres doivent pouvoir communiquer les uns avec les autres - librement, sans crainte de r\u00e9pression gouvernementale. La libert\u00e9 d'expression et la libert\u00e9 de la presse sont donc des conditions pr\u00e9alables essentielles \u00e0 un gouvernement d\u00e9mocratique. L'engagement de Madison en faveur de la libert\u00e9 d'expression \u00e9tait absolu. Sa pr\u00e9sidence (1809-1818) n'a g\u00e9n\u00e9ralement pas \u00e9t\u00e9 per\u00e7ue favorablement, mais il est significatif que m\u00eame en temps de grandes crises (comme la guerre de 1812), Madison n'a pas limit\u00e9 les droits. Il a insist\u00e9 sur le droit \u00e0 la libert\u00e9 d'expression m\u00eame en temps de guerre.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa reconnaissance de la place cruciale prise par la libert\u00e9 d'expression dans une d\u00e9mocratie est exprim\u00e9e dans le fait que ce droit fut le premier \u00e0 \u00eatre \u00e9num\u00e9r\u00e9 dans les amendements \u00e0 la Constitution.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003ELa libert\u00e9 d'expression en temps de guerre\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EEn tant que droit prot\u00e9g\u00e9 par une constitution d\u00e9mocratique bourgeoise (par opposition \u00e0 une constitution socialiste), la classe dirigeante a cherch\u00e9 de temps en temps \u00e0 le limiter lorsqu'elle s'est sentie en danger. Les mouvements socialistes et communistes ont g\u00e9n\u00e9ralement \u00e9t\u00e9 les principales cibles de cette suppression lorsqu'ils se sont oppos\u00e9s aux objectifs de guerre imp\u00e9rialiste des \u00c9tats-Unis. En 1917 et 1918, le gouvernement am\u00e9ricain a adopt\u00e9 respectivement la Loi sur l'espionnage et La loi sur la s\u00e9dition, d\u00e9lib\u00e9r\u00e9ment dirig\u00e9es contre l'opposition socialiste \u00e0 la guerre.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDans l'affaire Schenk versus \u00c9tats-Unis, la Cour supr\u00eame, y compris Oliver Wendell Holmes et Louis Brandeis, a confirm\u00e9 la condamnation de Charles Schenk, un militant socialiste pour avoir distribu\u00e9 des pamphlets anti-conscription. La Cour a estim\u00e9 que la Loi sur l'espionnage ne violait pas le Premier Amendement parce que les activit\u00e9s de Schenk contre la conscription pr\u00e9sentaient un \u00abdanger clair et pr\u00e9sent\u00bb pour les op\u00e9rations militaires et la s\u00e9curit\u00e9 nationale des \u00c9tats-Unis, conscription incluse. La Cour supr\u00eame a clairement cherch\u00e9 \u00e0 soutenir les objectifs de guerre imp\u00e9rialiste des \u00c9tats-Unis contre l'opposition socialiste. La Cour supr\u00eame a \u00e9galement confirm\u00e9 \u00e0 l'unanimit\u00e9 les condamnations prononc\u00e9es dans les c\u00e9l\u00e8bres affaires Debs v. \u00c9tats-Unis (1919) et Frohwerk v. \u00c9tats-Unis (1919). Debs et Frohwerk \u00e9taient tous deux d'\u00e9minents opposants socialistes \u00e0 la guerre, et Debs a \u00e9t\u00e9 quatre fois candidat \u00e0 la pr\u00e9sidence du Parti socialiste.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe gouvernement a promulgu\u00e9 la Loi sur la s\u00e9dition en 1918 \u00e0 la demande de Woodrow Wilson. Il a interdit la critique des objectifs de guerre du gouvernement, de l'arm\u00e9e et la \u00abpromotion de principes contraires \u00e0 la Loi\u00bb. Le gouvernement a lanc\u00e9 deux mille inculpations en vertu de la Loi sur l'espionnage et de la Loi sur la s\u00e9dition, et les proc\u00e8s ont abouti \u00e0 plus de mille condamnations. On a abrog\u00e9 la Loi sur la s\u00e9dition en 1920 mais la Loi sur l'espionnage resta largement en vigueur. Le gouvernement am\u00e9ricain l'invoque dans sa mise en accusation de Julian Assange. Ce n'est pas l\u00e0 un hasard, mais le produit des m\u00eames pulsions militaristes de l'imp\u00e9rialisme am\u00e9ricain que celles qui furent \u00e0 l'origine de cette loi il y a cent ans.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003ELa pouss\u00e9e vers l'h\u00e9g\u00e9monie mondiale de l'Am\u00e9rique apr\u00e8s la fin de l'Union sovi\u00e9tique\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa pers\u00e9cution de Julian Assange pour avoir r\u00e9v\u00e9l\u00e9 les crimes de guerre des \u00c9tats-Unis en Irak doit \u00eatre examin\u00e9e dans le contexte historique de la crise de l'imp\u00e9rialisme am\u00e9ricain, de l'approfondissement du conflit de classe aux \u00c9tats-Unis, de la peur de la r\u00e9volution chez les \u00e9lites et de l'attaque qui en a r\u00e9sult\u00e9 contre les droits d\u00e9mocratiques et le constitutionnalisme ces deux derni\u00e8res d\u00e9cennies.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EApr\u00e8s l'effondrement de l'Union sovi\u00e9tique, les \u00c9tats-Unis se sont rapidement tourn\u00e9s vers une politique \u00e9trang\u00e8re militaire agressive. En m\u00eame temps, le triomphalisme capitaliste ne pouvait dissimuler les profonds probl\u00e8mes sous-jacents de l'\u00e9conomie am\u00e9ricaine provenant de l'\u00e9visc\u00e9ration de l'industrie, de l'augmentation spectaculaire du parasitisme financier, de l'endettement des entreprises, et de la perte de terrain acc\u00e9l\u00e9r\u00e9e au profit de ses principales rivales. L'Union sovi\u00e9tique s'\u00e9tait effondr\u00e9e, mais les \u00c9tats-Unis se trouvaient dans un d\u00e9clin syst\u00e9mique irr\u00e9versible. Le premier grand choc symptomatique post-sovi\u00e9tique s'est produit en 1998, avec l'effondrement du fonds sp\u00e9culatif Long Term Capital Management d'une valeur de 126 milliards de dollars (le responsable de LTCM, Myron Scholes, avait re\u00e7u l'ann\u00e9e pr\u00e9c\u00e9dente le prix Nobel d'\u00e9conomie pour sa m\u00e9thode de d\u00e9terminer la valeur des produits d\u00e9riv\u00e9s). Dix ans plus tard, l'agonie du capitalisme am\u00e9ricain se trouvait v\u00e9rifi\u00e9e au-del\u00e0 de tout doute raisonnable avec l'effondrement de Lehman Bros.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ED\u00e8s le d\u00e9but des ann\u00e9es 1990, la classe dirigeante am\u00e9ricaine, son arm\u00e9e et sa s\u00e9curit\u00e9 nationale, ont cherch\u00e9 \u00e0 d\u00e9fendre l'h\u00e9g\u00e9monie mondiale des \u00c9tats-Unis en recourant \u00e0 la force militaire. Elles ont poursuivi une strat\u00e9gie visant \u00e0 emp\u00eacher l'\u00e9mergence de tout rival qui contesterait l'h\u00e9g\u00e9monie am\u00e9ricaine. L'Am\u00e9rique allait d\u00e9sormais exercer une domination incontest\u00e9e sur des r\u00e9gions et des ressources cl\u00e9s, contre ses principaux rivaux d'Europe et d'Asie, par la projection mondiale d'une puissance militaire \u00e9crasante.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EAu sommet de l'OTAN de novembre 1991 \u00e0 Rome, les \u00c9tats-Unis ont pr\u00e9sent\u00e9 un \u00abnouveau concept strat\u00e9gique\u00bb pour l'Alliance atlantique. Ce concept mettait l'accent sur le \u00abcontexte mondial\u00bb et la n\u00e9cessit\u00e9 pour l'Alliance d'assumer un \u00abr\u00f4le militaire strat\u00e9gique plus \u00e9tendu et moins d\u00e9fensif\u00bb. Les \u00c9tats-Unis et la Grande-Bretagne ont tous deux proclam\u00e9 le droit de mener des \u00abinterventions humanitaires\u00bb impliquant l'utilisation de la force militaire pour r\u00e9soudre des diff\u00e9rends au sein d'autres nations et emp\u00eacher des \u00abviolations des droits de l'homme\u00bb.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa campagne de l'imp\u00e9rialisme am\u00e9ricain visant \u00e0 \u00e9tablir une supr\u00e9matie sans \u00e9gale sur le globe s'est acc\u00e9l\u00e9r\u00e9e dans les ann\u00e9es 1990 et fut \u00e9tendue, en particulier aux r\u00e9gions du Moyen-Orient et du bassin de la Caspienne, riches en \u00e9nergie.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EUn document du minist\u00e8re de la D\u00e9fense (1992) intitul\u00e9 \u00abThe Defence Planning Guidance\u00bb (Orientations en mati\u00e8re de planification de la D\u00e9fense) r\u00e9sumait ainsi la nouvelle doctrine imp\u00e9rialiste:\u003C\/p\u003E\u003Cblockquote\u003ENotre premier objectif est d'emp\u00eacher la r\u00e9apparition d'un nouveau rival. C'est l\u00e0 une consid\u00e9ration dominante qui sous-tend la nouvelle strat\u00e9gie de d\u00e9fense r\u00e9gionale. Elle exige... d'emp\u00eacher toute puissance hostile de dominer une r\u00e9gion dont les ressources seraient, avec un contr\u00f4le renforc\u00e9, suffisantes pour g\u00e9n\u00e9rer une puissance mondiale. Ces r\u00e9gions comprennent l'Europe occidentale, l'Asie orientale, le territoire de l'ex-Union sovi\u00e9tique et l'Asie du Sud-Ouest.\u003C\/blockquote\u003E\u003Cp\u003ELes \u00c9tats-Unis ont fait de cette doctrine de la guerre pr\u00e9ventive leur politique officielle. Celle-ci avait, depuis le d\u00e9but des ann\u00e9es 1990, gagn\u00e9 en influence parmi les intellectuels soutenant une politique \u00e9trang\u00e8re am\u00e9ricaine plus agressive. En 1992, par exemple, le lib\u00e9ral Michael Walzer a fait circuler un document sign\u00e9 par soixante intellectuels, formulant les principes d'une nouvelle conception pour une \u00abguerre juste\u00bb. Dans son livre \u00abGuerres justes et injustes\u00bb (New York, 1992), Walzer soutenait que, lorsque les \u00c9tats-Unis \u00e9taient confront\u00e9s \u00e0 un \u00abdanger inhabituel et terrible\u00bb et \u00e0 une \u00abmenace radicale pour les valeurs humaines\u00bb, aucune restriction de nature \u00e9thique ou juridique n'\u00e9tait applicable, et tout moyen de destruction pr\u00e9ventive moralement l\u00e9gitime.\u003C\/p\u003E\u003Cfigure\u003E\u003Cimg src=\"http:\/\/newsnet.fr\/img\/newsnet_168787_49c788.jpg\" \/\u003E\u003Cfigcaption\u003EL\u00e9gende: La strat\u00e9gie de s\u00e9curit\u00e9 nationale des \u00c9tats-Unis 2002\u003C\/figcaption\u003E\u003C\/figure\u003E\u003Cp\u003ELe gouvernement am\u00e9ricain a expos\u00e9 en d\u00e9tail sa nouvelle doctrine de guerre pr\u00e9ventive dans deux rapports, le \u00abRapport d'examen quadriennal de la d\u00e9fense\u00bb du 30 septembre 2001, et celui sur la \u00abStrat\u00e9gie de s\u00e9curit\u00e9 nationale des \u00c9tats-Unis\u00bb, du 17 septembre 2002. Cette doctrine proclame le droit des \u00c9tats-Unis de d\u00e9noncer unilat\u00e9ralement d'autres \u00c9tats souverains, de forcer des inspections afin d'assurer un \u00abd\u00e9sarmement pr\u00e9ventif\u00bb et de recourir \u00e0 la force militaire quand ils le jugent n\u00e9cessaire ou souhaitable.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa 'Strat\u00e9gie de s\u00e9curit\u00e9 nationale' de 2002 proclamait aussi le droit des \u00c9tats-Unis d'agir \u00abde fa\u00e7on pr\u00e9ventive\u00bb dans des circonstances o\u00f9 ils percevaient une menace. Les doctrines de la guerre pr\u00e9ventive, de l'autod\u00e9fense pr\u00e9ventive, de la guerre humanitaire et de la guerre juste sont toutes ill\u00e9gales en Droit international. Le recours \u00e0 la force, \u00e0 la guerre, est interdit depuis Nuremberg et est codifi\u00e9 dans les chartes et conventions de Droit international. L'adoption de ces doctrines par les \u00c9tats-Unis repr\u00e9sente, en termes historiques, une immense r\u00e9gression de la condition id\u00e9ologique de la civilisation occidentale.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EEn 2003, les \u00c9tats-Unis ont planifi\u00e9 et lanc\u00e9 leur guerre d'agression contre l'Irak. Les pr\u00e9tendues menaces d'\u00abarmes de destruction massive\u00bb se sont av\u00e9r\u00e9es frauduleuses et, en tout \u00e9tat de cause, n'auraient pu constituer une base l\u00e9gale pour le d\u00e9clenchement de la guerre. Selon les pr\u00e9c\u00e9dents \u00e9tablis \u00e0 Nuremberg, les dirigeants civils et militaires qui ont planifi\u00e9 et men\u00e9 la guerre d'agression contre l'Irak auraient d\u00fb \u00eatre inculp\u00e9s devant un tribunal d\u00fbment constitu\u00e9, b\u00e9n\u00e9ficier d'une proc\u00e9dure compl\u00e8te et r\u00e9guli\u00e8re et jug\u00e9s pour crimes contre la paix, crimes contre l'humanit\u00e9 et crimes contre les lois de la guerre.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EL'invasion ill\u00e9gale de l'Irak en 2003 a repr\u00e9sent\u00e9 une immense escalade de la strat\u00e9gie post-sovi\u00e9tique am\u00e9ricaine. La criminalit\u00e9 des actions de l'Am\u00e9rique et sa brutalit\u00e9, exprim\u00e9es dans des crimes odieux comme la destruction et les tueries de Falloujah, rappellent l'agression, la criminalit\u00e9 et la violence de l'attaque de la Pologne par Hitler en 1939. La plupart des informations publi\u00e9es par Assange par le biais de WikiLeaks, objets de l'acte d'accusation, concernaient les activit\u00e9s ill\u00e9gales et criminelles des \u00c9tats-Unis dans les guerres d'Irak et d'Afghanistan et le traitement des d\u00e9tenus de Guantanamo Bay. Des millions de gens dans le monde ont regard\u00e9 horrifi\u00e9s la vid\u00e9o \u00abCollateral Murder\u00bb prise en Irak, lors de sa divulgation en 2010.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003EL'attaque contre le constitutionnalisme et la l\u00e9galit\u00e9\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDepuis 2000, le militarisme en soutien \u00e0 l'effort h\u00e9g\u00e9monique mondial des \u00c9tats-Unis \u00e0 l'ext\u00e9rieur, va de pair avec des attaques contre le constitutionnalisme et les droits d\u00e9mocratiques \u00e0 l'int\u00e9rieur. La premi\u00e8re attaque contre le constitutionnalisme a \u00e9t\u00e9 le vol des \u00e9lections de 2000, lorsque les R\u00e9publicains, les D\u00e9mocrates et la Cour supr\u00eame ont escroqu\u00e9 les citoyens am\u00e9ricains, les privant de leur droit de vote. Albert Gore a peut-\u00eatre compris la gravit\u00e9 des implications, mais il ne s'est pas battu pour d\u00e9fendre les droits du peuple. Au cours des deux d\u00e9cennies qui ont suivi, la bourgeoisie am\u00e9ricaine a montr\u00e9 une volont\u00e9 d\u00e9lib\u00e9r\u00e9e de d\u00e9manteler l'ordre constitutionnel \u00e9tabli, de mettre en place un r\u00e9gime juridique r\u00e9pressif et d'instaurer un r\u00e9gime autoritaire.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EL'Administration de George W. Bush s'est saisie du 11 septembre 2001 comme d'un pr\u00e9texte pour sa \u00abguerre contre la terreur\u00bb, afin d'augmenter consid\u00e9rablement les pouvoirs de l'\u00c9tat. L'objectif \u00e9tait d'\u00e9tendre le pouvoir ex\u00e9cutif et d'\u00e9visc\u00e9rer le constitutionnalisme.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ESous couvert de \u00abguerre contre la terreur\u00bb, l'Administration Bush a cherch\u00e9 d'une mani\u00e8re sans pr\u00e9c\u00e9dent \u00e0 se placer au-dessus de la loi. Le trou noir juridique de Guantanamo Bay, con\u00e7u pour nier l''habeas corpus', a peut-\u00eatre \u00e9t\u00e9 la mesure anticonstitutionnelle la plus extraordinaire prise depuis des si\u00e8cles. L'attaque contre le constitutionnalisme a \u00e9t\u00e9 pleinement soutenue par le Parti d\u00e9mocrate. De nombreuses mesures ont \u00e9t\u00e9 prises pour faire progresser le r\u00e9gime autoritaire sous couvert de campagne guerri\u00e8re des \u00c9tats-Unis au Moyen-Orient. Parmi elles\u00a0:\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E* Le Patriot Act et le Homeland Security Act (Loi sur la s\u00e9curit\u00e9 du pays) autorisant fouilles, arrestations, d\u00e9tentions, contr\u00f4les et surveillances arbitraires.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E* La cr\u00e9ation de cat\u00e9gories non juridiques telles que \u00abcombattant ennemi\u00bb pour refuser le droit \u00e0 un proc\u00e8s \u00e9quitable.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E* La pratique de la torture.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E* Le rejet des normes du Droit international, dont le d\u00e9saveu des Conventions de Gen\u00e8ve et le rejet de la comp\u00e9tence de la Cour p\u00e9nale internationale.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa Loi \u00abUS PATRIOT\u00bb (nom complet: 'Loi de 2001 sur l'unification et le renforcement de l'Am\u00e9rique, fournissant les outils appropri\u00e9s pour restreindre, intercepter et entraver le terrorisme') et la cr\u00e9ation de Guantanamo Bay ont lanc\u00e9 le projet de la classe dirigeante de reconstituer le r\u00e9gime juridique am\u00e9ricain sur des bases autoritaires. Cette loi pr\u00e9voyait des pouvoirs d'arrestation pratiquement illimit\u00e9s, la d\u00e9tention pour une dur\u00e9e ind\u00e9termin\u00e9e, des perquisitions et saisies, une surveillance et un contr\u00f4le, tous sans mandats. Les communications informatiques et t\u00e9l\u00e9phoniques, les documents commerciaux, les registres de biblioth\u00e8que et autres renseignements personnels \u00e9taient tous susceptibles d'\u00eatre saisis par le FBI en vertu de cette loi.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDans un sens tr\u00e8s r\u00e9el, la loi fournissait le cadre l\u00e9gislatif d'un \u00c9tat national s\u00e9curitaire. Des dizaines de proc\u00e8s ont \u00e9t\u00e9 intent\u00e9s pour contester la loi pour des motifs constitutionnels et, dans presque tous les cas o\u00f9 cela a r\u00e9ussi, le Congr\u00e8s (avec un appui bipartite \u00e9crasant) a adopt\u00e9 des lois suppl\u00e9mentaires pour surmonter les obstacles constitutionnels et maintenir le cadre r\u00e9pressif.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EAvec quelques modifications, qui n'ont pas alt\u00e9r\u00e9 son caract\u00e8re fondamental d'\u00c9tat policier, la Loi PATRIOT a \u00e9t\u00e9 r\u00e9-autoris\u00e9e \u00e0 plusieurs reprises au cours des 18 derni\u00e8res ann\u00e9es\u00a0; entre autre par l'Administration Obama qui, en 2015, a l\u00e9gif\u00e9r\u00e9 \u00e0 nouveau sur des parties de la loi devant expirer en 2015, du \u00e0 une loi intitul\u00e9e USA Freedom Act.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EUne ramification de la Loi PATRIOT a \u00e9t\u00e9 le Programme de surveillance du terrorisme, qui permit au gouvernement de suivre secr\u00e8tement des milliards d'appels t\u00e9l\u00e9phoniques, de textes et de communications informatiques effectu\u00e9s par des millions de citoyens am\u00e9ricains, sans mandat. Sous diverses formes l\u00e9gislatives (\u00e0 commencer par la loi de 2008 sur la surveillance du renseignement \u00e0 l'\u00e9tranger), la surveillance sans mandat s'est poursuivie sous les gouvernements Obama et Trump. Cela comprenait le syst\u00e8me de surveillance PRISM r\u00e9v\u00e9l\u00e9 par Edward Snowden. Maintenant, ce sont les grandes soci\u00e9t\u00e9s de t\u00e9l\u00e9communications qui conservent les donn\u00e9es recueillies dans le cadre de ce syst\u00e8me.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa n\u00e9gation extraordinaire de l'habeas corpus et du droit \u00e0 un proc\u00e8s r\u00e9gulier \u00e0 Guantanamo Bay participait du m\u00eame caract\u00e8re contre-r\u00e9volutionnaire que la loi PATRIOT (voir l'article du WSWS\u00abGuantanamo Bay, \"habeas corpus\" et le Texan qui serait roi\u00bb: \u003Ca href=\"https:\/\/www.wsws.org\/en\/articles\/2004\/01\/habe-j05.html\"\u003Ewsws.org\u003C\/a\u003E)\u003C\/p\u003E\u003Cfigure\u003E\u003Cimg src=\"http:\/\/newsnet.fr\/img\/newsnet_168787_9323fc.jpg\" \/\u003E\u003Cfigcaption\u003EL\u00e9gende: John Yoo\u003C\/figcaption\u003E\u003C\/figure\u003E\u003Cp\u003ELes actions du gouvernement ont \u00e9t\u00e9 justifi\u00e9es sur la base de concepts juridiques formul\u00e9s par des avocats d'extr\u00eame droite du minist\u00e8re de la Justice dirig\u00e9 par John Yoo. Ils ont avanc\u00e9 une version extr\u00eame de la \u00abth\u00e9orie de l'ex\u00e9cutif unitaire\u00bb, s'inspirant des notions juridiques germaniques autoritaires du 'Staatsrecht' soulignant la primaut\u00e9 de la s\u00e9curit\u00e9 nationale sur les droits d\u00e9mocratiques fondamentaux et la l\u00e9galit\u00e9.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EYoo a t\u00e9moign\u00e9 plus tard, lors d'une enqu\u00eate du minist\u00e8re de la Justice sur les m\u00e9morandums sur la torture qu'il avait r\u00e9dig\u00e9s, que, selon lui, \u00able pouvoir du pr\u00e9sident de faire la guerre \u00e9tait si \u00e9tendu qu'il avait le pouvoir constitutionnel d'ordonner le massacre d'un village\u00bb. Il n'est pas surprenant que le minist\u00e8re de la Justice et le D\u00e9partement d'\u00c9tat aient estim\u00e9, pendant la \u00abguerre contre le terrorisme\u00bb, que les Conventions de Gen\u00e8ve \u00e9taient une chose insignifiante et pittoresque qui n'engageait pas les \u00c9tats-Unis. John Yoo est aujourd'hui professeur de droit \u00e0 la Facult\u00e9 de droit de l'Universit\u00e9 de Berkeley.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa refus de l'habeas corpus pour les d\u00e9tenus de Guantanamo a \u00e9t\u00e9 contest\u00e9 devant la Cour supr\u00eame des \u00c9tats-Unis dans l'affaire Rasul v. \u00c9tats-Unis d'Am\u00e9rique (2004). La Cour a statu\u00e9 \u00e0 6 contre 3 (les juges dissidents \u00e9tant Rehnquist, Scalia et Thomas) que les d\u00e9tenus de Guantanamo, quelle que soit leur nationalit\u00e9, avaient le droit de contester la l\u00e9galit\u00e9 de leur d\u00e9tention devant les tribunaux f\u00e9d\u00e9raux.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe gouvernement r\u00e9agit en adoptant une loi interdisant l'acc\u00e8s aux tribunaux, intitul\u00e9e Loi sur le traitement des d\u00e9tenus, qui fut adopt\u00e9e avec un soutien \u00e9crasant des D\u00e9mocrates. Cette loi accorde \u00e9galement l'immunit\u00e9 aux agents du gouvernement et au personnel militaire face aux poursuites pour des m\u00e9thodes d'\u00abinterrogatoire renforc\u00e9\u00bb qui avaient \u00e9t\u00e9 justifi\u00e9es par les th\u00e9ories juridiques \u00e9tatistes de fonctionnaires du minist\u00e8re de la Justice. La d\u00e9claration de signature du pr\u00e9sident Bush, qui expose son interpr\u00e9tation officielle de la loi, dit:\u003C\/p\u003E\u003Cblockquote\u003ELe pouvoir ex\u00e9cutif interpr\u00e9tera [les dispositions] relatives aux d\u00e9tenus d'une mani\u00e8re compatible avec l'autorit\u00e9 constitutionnelle du Pr\u00e9sident, \u00e0 savoir superviser le pouvoir ex\u00e9cutif unitaire, en tant que commandant en chef, et compatible avec les limitations constitutionnelles du pouvoir judiciaire. Cela contribuera \u00e0 la r\u00e9alisation de l'objectif commun du Congr\u00e8s et du Pr\u00e9sident de prot\u00e9ger le peuple am\u00e9ricain contre de nouvelles attaques terroristes.\u003C\/blockquote\u003E\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003ELib\u00e9ralisme en mati\u00e8re de s\u00e9curit\u00e9 nationale\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EL'attaque du constitutionnalisme sous l'Administration Bush a \u00e9t\u00e9 largement d\u00e9fendue par les \u00e9lites lib\u00e9rales. Corrompues par des d\u00e9cennies de profits boursiers, elles avaient depuis longtemps abandonn\u00e9 tout soutien, m\u00eame th\u00e9orique, aux normes constitutionnelles ou au droit international. Cela est refl\u00e9t\u00e9 dans les \u00e9crits d'auteurs tels que Michael Ignatieff qui, dans son livre de 2004 intitul\u00e9 \u00abThe Lesser Evil: Political Ethics in the Age of Terror\u00bb (Le moindre mal: l'\u00e9thique politique \u00e0 l'\u00e8re de la terreur), a promu le mythe de la \u00abguerre contre la terreur\u00bb et soutenu la r\u00e9duction des droits constitutionnels sur la base absurde que \u00abla Constitution n'[\u00e9tait] pas un pacte de suicide\u00bb.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDe vastes couches de la classe moyenne sup\u00e9rieure lib\u00e9rale ais\u00e9e devenaient des partisans acharn\u00e9s de la supr\u00e9matie de la \u00abs\u00e9curit\u00e9 nationale\u00bb sur la protection constitutionnelle des droits fondamentaux.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDans sa campagne actuelle de destitution, le Parti d\u00e9mocrate cherche \u00e0 destituer un pr\u00e9sident d\u00e9mocratiquement \u00e9lu qu'il consid\u00e8re comme un obstacle aux objectifs de guerre du complexe D\u00e9mocrates-CIA-Pentagone. Le v\u00e9ritable objectif et la v\u00e9ritable pr\u00e9occupation de la destitution sont le changement de r\u00e9gime en Russie, et non le respect de la Constitution des \u00c9tats-Unis, pour laquelle le Parti d\u00e9mocrate n'a aucune all\u00e9geance de principe.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EL'Administration Obama n'a ni pris des mesures pour modifier le cours de la strat\u00e9gie h\u00e9g\u00e9monique de l'Am\u00e9rique, ni d\u00e9fendu les fondements constitutionnels de l'\u00c9tat. Elle a au contraire renforc\u00e9 la trajectoire r\u00e9actionnaire des \u00c9tats-Unis et le programme contre-r\u00e9volutionnaire de la bourgeoisie. Elle fit avancer avec vigueur la doctrine de la \u00abguerre pr\u00e9ventive\u00bb.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDans son discours d'acceptation du prix Nobel de la Paix en 2009, Obama a express\u00e9ment adh\u00e9r\u00e9 \u00e0 cette doctrine. Sous ce rapport, si sa pr\u00e9sidence \u00e9tait cens\u00e9e repr\u00e9senter une alternative lib\u00e9rale aux objectifs de politique \u00e9trang\u00e8re de la classe dirigeante, il est devenu absolument clair qu'il existait, dans tout l'\u00e9ventail politique de l'\u003Ci\u003Eestablishment\u003C\/i\u003E, un soutien \u00e9crasant en faveur d'une destruction du cadre du Droit international et de la l\u00e9galit\u00e9 entre nations.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EObama a fustig\u00e9 \u00abl'ambivalence quant \u00e0 l'utilisation de la force militaire\u00bb et a proclam\u00e9 le droit de Washington \u00e0 utiliser la puissance militaire \u00e0 des fins de \u00abguerre juste\u00bb, de \u00abguerre pr\u00e9ventive\u00bb et de \u00abguerre de pr\u00e9emption\u00bb - toutes des doctrines ill\u00e9gales aux racines m\u00e9di\u00e9vales qui furent condamn\u00e9es \u00e0 Nuremberg comme n'\u00e9tant rien qu'un camouflage pour l'agression et la conqu\u00eate. Le \u003Ci\u003EWall Street Journal\u003C\/i\u003E a chaleureusement applaudi la d\u00e9claration d'Obama \u00e0 Oslo.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EAinsi, ayant clairement indiqu\u00e9 que la guerre d'agression \u00e9tait sa politique \u00e9trang\u00e8re, le gouvernement Obama a poursuivi les ex\u00e9cutions extrajudiciaires, montrant que ses vues sur le droit constitutionnel am\u00e9ricain \u00e9taient en accord avec celles sur les principes de Nuremberg. Les assassinats par drones \u00e9taient une pratique favorite du pr\u00e9sident. Ils y en eut des centaines. Les expulsions d'immigr\u00e9s sans papiers faisaient aussi partie de ses mesures favorites. Il y en eut des millions.\u003C\/p\u003E\u003Cfigure\u003E\u003Cimg src=\"http:\/\/newsnet.fr\/img\/newsnet_168787_8f9678.jpg\" \/\u003E\u003Cfigcaption\u003EL\u00e9gende: Eric Holder, avec Obama et Hillary Clinton\u003C\/figcaption\u003E\u003C\/figure\u003E\u003Cp\u003EL'Administration Obama a ouvertement formul\u00e9 des perspectives contre-r\u00e9volutionnaires, sa campagne guerri\u00e8re militariste appuyant ses conceptions en fait de droit constitutionnel. Apr\u00e8s l'assassinat d'Anwar al Awlaki, un citoyen am\u00e9ricain, dans une de ses frappes de drones, divers groupes de droit constitutionnel exprim\u00e8rent leurs craintes et appr\u00e9hensions. Les ex\u00e9cutions extrajudiciaires de citoyens am\u00e9ricains \u00e9taient-elles l\u00e9gales? ont-ils demand\u00e9. R\u00e9pondant \u00e0 la facult\u00e9 de droit de l'Universit\u00e9 Northwestern \u00e0 des questions sur l'assassinat d'Al Awlaki, l'avocat en chef du gouvernement am\u00e9ricain, le procureur g\u00e9n\u00e9ral Eric Holder, donna cette r\u00e9ponse \u00e0 glacer le sang:\u003C\/p\u003E\u003Cblockquote\u003ECertains ont fait valoir que le pr\u00e9sident devait obtenir la permission d'un tribunal f\u00e9d\u00e9ral avant de prendre des mesures contre un citoyen am\u00e9ricain qui est un haut dirigeant op\u00e9rationnel d'Al-Qa\u00efda ou de forces associ\u00e9es. Cela n'est tout simplement pas exact. \u00abProc\u00e9dure r\u00e9guli\u00e8re\u00bb et \u00abprocessus judiciaire\u00bb ne sont pas une seule et m\u00eame chose, surtout lorsqu'il s'agit de s\u00e9curit\u00e9 nationale. La Constitution garantit une proc\u00e9dure r\u00e9guli\u00e8re, et non pas une proc\u00e9dure judiciaire.\u003C\/blockquote\u003E\u003Cp\u003ECe sophisme juridique n'a pas de pr\u00e9c\u00e9dent dans les plus de 800 ans d'histoire juridique \u00e9coul\u00e9s depuis que la Grande Charte (Magna Carta) est devenue loi en 1215. Dans ce document cl\u00e9, on trouve: \u00abaucun homme libre ne sera saisi, d\u00e9poss\u00e9d\u00e9 de ses biens ou l\u00e9s\u00e9, sauf par la \"loi du pays\"\u00bb (chapitre 29), une expression qui renvoie aux pratiques coutumi\u00e8res des tribunaux d'Angleterre.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EPour garantir que les droits fondamentaux (y compris le droit \u00e0 la vie et \u00e0 la libert\u00e9) ne puissent \u00eatre restreints que par un tribunal et afin d'\u00e9liminer toute incertitude possible quant au langage de la Magna Carta, le Parlement a promulgu\u00e9, sous le r\u00e8gne du roi \u00c9douard III (de 1327 \u00e0 1377) six lois pour clarifier le sens et la port\u00e9e des libert\u00e9s garanties par la Magna Carta.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ECes lois interpr\u00e9taient l'expression \u00abloi du pays\u00bb comme \u00e9tant les proc\u00e9dures judiciaires qui prot\u00e8gent les libert\u00e9s d'un sujet. L'une de ces lois, promulgu\u00e9e en 1354, introduisait l'expression \u00abdue process of law\u00bb (droit \u00e0 un proc\u00e8s \u00e9quitable). C'\u00e9tait la premi\u00e8re apparition de cette expression dans le droit anglo-am\u00e9ricain - pour d\u00e9crire la garantie de protection judiciaire offerte par la Magna Carta. Le cinqui\u00e8me amendement \u00e0 la Constitution des \u00c9tats-Unis reproduit cette expression dans sa clause sur le Droit \u00e0 un proc\u00e8s \u00e9quitable.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa suggestion que le gouvernement devrait pouvoir tuer des citoyens partout dans le monde sur la base de normes juridiques et de preuves jamais soumises \u00e0 un tribunal, ni avant ni apr\u00e8s les faits, ne pouvait pas d\u00e9montrer plus clairement que le \u00ablib\u00e9ralisme\u00bb \u00e9tait en train de se m\u00e9tamorphoser en fascisme.\u003C\/p\u003E\u003Cfigure\u003E\u003Cimg src=\"http:\/\/newsnet.fr\/img\/newsnet_168787_862106.jpg\" \/\u003E\u003Cfigcaption\u003EL\u00e9gende: Carl Schmitt\u003C\/figcaption\u003E\u003C\/figure\u003E\u003Cp\u003ELa pr\u00e9misse essentielle de Holder, \u00e0 savoir que droit et pouvoir ex\u00e9cutif ne faisaient qu'un, reprenait la jurisprudence nazie de l'avocat en chef du Troisi\u00e8me Reich Carl Schmitt. Schmitt avait \u00e9labor\u00e9 des th\u00e9ories juridiques selon lesquelles la volont\u00e9 du dirigeant (Fűhrer) \u00e9tait le droit - en particulier en p\u00e9riode de crise - mais aussi, en g\u00e9n\u00e9ral, dans le cadre de sa jurisprudence autoritaire.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EL'une des principales t\u00e2ches assign\u00e9es \u00e0 Schmitt en tant que chef-juriste nazi \u00e9tait d'\u00e9laborer des justifications juridiques pour les ex\u00e9cutions extrajudiciaires par Hitler. Dans son ouvrage \u00abF\u00fchrer Schutzt das Recht\u00bb (Le F\u00fchrer prot\u00e8ge la loi), \u00e9crit en 1934, suite \u00e0 la \u00ab\u00a0nuit des longs couteaux\u00bb o\u00f9 Hitler avait ordonn\u00e9 le meurtre de dirigeants des SA et celui de plusieurs politiciens conservateurs \u00e9minents, dont Kurt Schleicher, l'ancien chancelier, Schmitt a \u00e9crivit:\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u00ab\u00a0Le F\u00fchrer prot\u00e8ge la Loi des pires exc\u00e8s s'il cr\u00e9e imm\u00e9diatement la justice, au moment du danger, en vertu de son leadership en tant que Juge supr\u00eame. Le vrai chef est toujours aussi juge. La magistrature d\u00e9coule du leadership. Ceux qui cherchent \u00e0 s\u00e9parer les deux cherchent \u00e0 d\u00e9manteler l'\u00c9tat avec l'aide du Pouvoir judiciaire\u00bb. (Publi\u00e9 dans la \u003Ci\u003EDeutsche Juristische Zeitung\u003C\/i\u003E, en ao\u00fbt 1934)\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EC'\u00e9tait l\u00e0, essentiellement, l'avis de Holder. Et de l'avocat sorti de Harvard Barack Obama aussi.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003ELa strat\u00e9gie de \u00abgrande puissance\u00bb pour 2018\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ED\u00e9clarant qu'ils allaient intensifier leur campagne pour l'h\u00e9g\u00e9monie mondiale, les \u00c9tats-Unis annonc\u00e8rent, dans leur document de strat\u00e9gie de D\u00e9fense nationale de 2018, que la politique qu'ils avaient men\u00e9s pendant 20 ans de \u00ab\u00a0Guerre contre la terreur\u00a0\u00bb \u00e9tait \u00e0 pr\u00e9sent remplac\u00e9e par une strat\u00e9gie tourn\u00e9e directement contre la Chine et la Russie. La projection militariste des \u00c9tats-Unis, commenc\u00e9e apr\u00e8s l'effondrement de l'Union sovi\u00e9tique, devait maintenant \u00eatre atteindre un \u00e9chelon sup\u00e9rieur - celui d'un conflit majeur avec les \u00c9tats rivaux.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EOn amor\u00e7a, sur la base de cette escalade strat\u00e9gique, un d\u00e9veloppement gargantuesque des armements. En juin 2018, fut adopt\u00e9 un budget de d\u00e9penses militaires de 716 milliards de dollars - avec un soutien \u00e9crasant de la part des d\u00e9mocrates. En pleine campagne de destitution (et au milieu d'une guerre ill\u00e9gale brutale soutenue par les \u00c9tats-Unis au Y\u00e9men), on fit, le 12 d\u00e9cembre 2019, l\u00e0 encore avec un soutien d\u00e9mocrate \u00e9crasant, passer un budget militaire de 738 milliards de dollars.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDu aux processus inexorables du d\u00e9veloppement \u00e9conomique de ces 40 derni\u00e8res ann\u00e9es dans le monde, l'Am\u00e9rique est devenue son contraire. Comme l'Allemagne nazie, elle n'est pas assez confiante ou libre pour respecter les constitutions l\u00e9gales et donner \u00e0 un citoyen un proc\u00e8s \u00e9quitable. Mener des guerres agressives; d\u00e9truire les droits de ses citoyens; embrasser l'irrationalisme et l'autoritarisme sont des signes que la classe dirigeante, ainsi que les \u00e9lites et le pouvoir judiciaire qui la soutiennent, se trouvent dans une impasse historique et ont fait, intellectuellement et moralement banqueroute. C'est dans ce contexte historique et politique, que les \u00e9lites am\u00e9ricaines ont engag\u00e9 des poursuites contre Julian Assange, marquant ainsi une nouvelle \u00e9tape de la contre-r\u00e9volution.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003ELes poursuites contre Assange\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EAvant d'examiner l'acte d'accusation, il convient d'examiner bri\u00e8vement le caract\u00e8re ill\u00e9gal de la pers\u00e9cution d'Assange par la Grande-Bretagne et les \u00c9tats-Unis (et de fait, par la Su\u00e8de) avant son expulsion de l'ambassade d'\u00c9quateur.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDepuis le d\u00e9but de l'affaire, Assange a subi des abus de proc\u00e9dure et une ing\u00e9rence politique sans fin dans le processus juridique. Pratiquement tous les pr\u00e9ceptes, pratiques et protections proc\u00e9durales habituels auxquels a traditionnellement droit un accus\u00e9, ont \u00e9t\u00e9 \u00e9cart\u00e9s dans le but de le soumettre \u00e0 leur sc\u00e9nario.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EAssange n'a jamais fait l'objet d'accusations en Su\u00e8de. La nature extr\u00eamement faible des \u00e9l\u00e9ments de preuves en appui aux all\u00e9gations a conduit \u00e0 la d\u00e9claration de la premi\u00e8re procureure en chef de Stockholm, Eva Finne, qu'il n'y avait \u00abaucune suspicion de quelque crime que ce soit\u00bb. Les poursuites ne furent ensuite rouvertes que sous la pression politique.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EBien que lib\u00e9r\u00e9 par les autorit\u00e9s su\u00e9doises et libre de quitter la Su\u00e8de, il fit ensuite l'objet d'une notice rouge d'Interpol, g\u00e9n\u00e9ralement r\u00e9serv\u00e9e aux terroristes et criminels dangereux. La Cour supr\u00eame du Royaume-Uni approuva l'extradition d'Assange vers la Su\u00e8de sur la base d'un mandat d'arr\u00eat europ\u00e9en manifestement vici\u00e9 qui n'\u00e9tait pas sign\u00e9 par un officier de justice, comme l'exige la loi. Le gouvernement britannique a par la suite chang\u00e9 les termes de l'accord de Mandat d'arr\u00eat europ\u00e9en pour autoriser cette ill\u00e9galit\u00e9.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa procureure su\u00e9doise Marianne Ny a bloqu\u00e9 le droit d'Assange de faire appel devant la Cour europ\u00e9enne des droits de l'homme. Les poursuites avaient \u00e9t\u00e9 reprises \u00e0 la suite des repr\u00e9sentations de l'avocate de la plaignante, une militante de premier plan du mouvement su\u00e9dois pour les droits des femmes, membre du parti social-d\u00e9mocrate et de l'organisation r\u00e9clamant une taxe sur les hommes. La Cour supr\u00eame du Royaume-Uni a approuv\u00e9 l'extradition d'Assange, m\u00eame si les autorit\u00e9s su\u00e9doises refusaient de donner l'assurance qu'il ne serait pas extrad\u00e9 vers les \u00c9tats-Unis alors que ces derniers pr\u00e9paraient des poursuites contre lui en vertu de la Loi sur l'espionnage.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EEn violation de ses obligations l\u00e9gales, le gouvernement australien n'a pris aucune mesure pour fournir une assistance \u00e0 Assange, et la premier ministre australienne Julia Gillard a menac\u00e9 de priver Assange de sa citoyennet\u00e9, jusqu'\u00e0 ce qu'on lui dise que c'\u00e9tait ill\u00e9gal.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EComme il en avait le droit, Assange a demand\u00e9 l'asile politique, qui lui a \u00e9t\u00e9 accord\u00e9 par l'\u00c9quateur. En violation du droit international coutumier, ni la Grande-Bretagne ni les \u00c9tats-Unis n'ont reconnu l'asile d'Assange. Par cons\u00e9quent, celui-ci est rest\u00e9 emprisonn\u00e9 pendant de nombreuses ann\u00e9es \u00e0 l'ambassade \u00e9quatorienne. En 2016, des experts juridiques du Groupe de travail des Nations Unies sur la d\u00e9tention arbitraire ont statu\u00e9 qu'Assange \u00e9tait d\u00e9tenu ill\u00e9galement par la Grande-Bretagne et la Su\u00e8de. Ces pays n'ont pas tenu compte de ses d\u00e9cisions.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EApr\u00e8s avoir refus\u00e9 d'interroger Assange \u00e0 Londres pendant six ans, la procureure su\u00e9doise l'a finalement interrog\u00e9 \u00e0 Londres en 2016. Mais elle a interdit \u00e0 l'avocat su\u00e9dois d'Assange d'\u00eatre pr\u00e9sent, un d\u00e9ni fondamental des droits juridiques fondamentaux d'Assange. \u00c0 la suite de ce scandale, un juge de Stockholm a demand\u00e9 en 2017 que la procureure soit interrog\u00e9e sur son inconduite judiciaire. Plut\u00f4t que de faire face \u00e0 cet interrogatoire, elle a clos l'enqu\u00eate. Il s'est av\u00e9r\u00e9 par la suite qu'elle avait \u00e9galement supprim\u00e9 une correspondance \u00e9lectronique avec le FBI.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EApr\u00e8s l'abandon de l'enqu\u00eate su\u00e9doise, les avocats d'Assange ont demand\u00e9 que le mandat d'arr\u00eat britannique pour enfreinte \u00e0 la libert\u00e9 sous caution soit \u00e9galement abandonn\u00e9. Il existait pour cela une base juridique solide car les all\u00e9gations su\u00e9doises, \u00e0 l'origine de la mise en libert\u00e9 sous caution, avaient \u00e9t\u00e9 retir\u00e9es. Assange avait en outre un droit juridique international de demander l'asile, qui lui avait \u00e9t\u00e9 accord\u00e9 par un \u00c9tat souverain. De plus, il s'est trouv\u00e9 effectivement incarc\u00e9r\u00e9 pendant sept ans.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa juge Emma Arbuthnot a rejet\u00e9 la demande. Elle n'aurait cependant pas d\u00fb, selon la loi, si\u00e9ger dans cette affaire. Elle aurait en fait d\u00fb se r\u00e9cuser, car elle \u00e9tait l'\u00e9pouse d'un membre important du parlement et partenaire d'affaires du chef du MI6, l'\u00e9quivalent britannique de la CIA.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EOn a viol\u00e9 le droit d'habeas corpus d'Assange de fa\u00e7on flagrante par la peine d'un an d'emprisonnement qu'on lui a inflig\u00e9e pour enfreinte \u00e0 la libert\u00e9 sous caution\u00a0; dans des circonstances habituelles, une peine sans privation de libert\u00e9 est impos\u00e9e. Il ne pourrait y avoir d'exemple plus net d'une justice pr\u00eatant main-forte \u00e0 l'ill\u00e9galit\u00e9 de l'ex\u00e9cutif. Jeter Assange dans la prison de haute s\u00e9curit\u00e9 de Belmarsh et l'emp\u00eacher de pr\u00e9parer sa d\u00e9fense \u00e0 la demande d'extradition \u00e9tait un acte d\u00e9clar\u00e9 de vindicte politique cruelle et de non-droit. \u00c0 cet \u00e9gard, la conduite du gouvernement britannique est la m\u00eame que celle du gouverneur colonial \u00e0 l'\u00e9gard de Zenger en 1734.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EEn 2015, une cour f\u00e9d\u00e9rale de Washington bloqua la divulgation de toute information concernant l'enqu\u00eate du D\u00e9partement de la Justice sur WikiLeaks. La juge, Barbara J. Rothstein, donna comme motif que c'\u00e9tait une \u00abenqu\u00eate de s\u00e9curit\u00e9 nationale\u00bb, active et en cours. Divulguer des informations pouvait nuire aux \u00abpoursuites en instance\u00bb contre Assange. Dans sa d\u00e9cision, elle affirma qu'il \u00e9tait \u00abn\u00e9cessaire de faire preuve de la d\u00e9f\u00e9rence appropri\u00e9e envers l'ex\u00e9cutif dans les affaires de s\u00e9curit\u00e9 nationale\u00bb.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003EL'inculpation contre-r\u00e9volutionnaire\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EL'acte d'accusation original de six pages, dat\u00e9 du 6 mars 2018, inculpait Assange du chef d'accusation de conspiration avec Chelsea Manning pour avoir acc\u00e8s, sans autorisation, aux ordinateurs du minist\u00e8re de la D\u00e9fense. Il all\u00e9guait notamment qu'Assange avait tent\u00e9 de casser un mot de passe pour faciliter l'acc\u00e8s \u00e0 des dossiers secrets afin de dissimuler l'identit\u00e9 de Manning. Le mot de passe n'a pas \u00e9t\u00e9 cass\u00e9.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EL'accusation \u00e9tait fond\u00e9e sur le \u00abComputer Fraud and Abuse Act\u00bb (CFAA - Loi sur la fraude et les abus informatiques) - la principale loi anti-piratage des \u00c9tats-Unis. Le plaidoyer \u00e9tait faible quand aux faits et tr\u00e8s mince sur le plan juridique, clairement con\u00e7u pour contourner la n\u00e9cessit\u00e9 d'affronter directement les questions inh\u00e9rentes au Premier amendement (de la Constitution am\u00e9ricaine) concernant le droit d'Assange \u00e0 une activit\u00e9 prot\u00e9g\u00e9e par la libert\u00e9 d'expression. Ce chef d'accusation \u00e9tait toutefois un pr\u00e9texte transparent pour criminaliser l'activit\u00e9 journalistique d'Assange consistant \u00e0 obtenir des informations et \u00e0 les publier sur le site Web de WikiLeaks.\u003C\/p\u003E\u003Cfigure\u003E\u003Cimg src=\"http:\/\/newsnet.fr\/img\/newsnet_168787_44d281.jpg\" \/\u003E\u003Cfigcaption\u003EL\u00e9gende: La premi\u00e8re page de l'acte d'accusation am\u00e9ricain contre Assange\u003C\/figcaption\u003E\u003C\/figure\u003E\u003Cp\u003EL'acte d'accusation modifi\u00e9 qui compte 37 pages et fut d\u00e9pos\u00e9 le 23 mai 2019, \u00e9non\u00e7ait dix-sept chefs d'accusation contre Assange en vertu de la Loi sur l'espionnage de 1917 (Titre 18, section 793 du Code des \u00c9tats-Unis et sections connexes)\u00a0; il retenait comme 18e chef d'accusation l'all\u00e9gation de piratage informatique.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes quatorze premiers chefs d'accusation de la nouvelle version de l'acte se fondent sur des all\u00e9gations qu'Assange avait conspir\u00e9 avec Manning et qu'il avait coordonn\u00e9 directement avec elle l'acc\u00e8s aux renseignements class\u00e9s, ainsi que leur publication. Toutefois, les faits all\u00e9gu\u00e9s ne r\u00e9v\u00e8lent pas qu'Assange ait fait quoi que ce soit diff\u00e9rant fondamentalement de la pratique journalistique pour obtenir des renseignements, dont celle d'aider une source \u00e0 dissimuler son identit\u00e9. Il ne fait aucun doute qu'Assange ait agi avec z\u00e8le dans la recherche de renseignements r\u00e9v\u00e9lant la conduite des \u00c9tats-Unis en Irak, en Afghanistan et \u00e0 Guantanamo Bay. Mais le Premier amendement prot\u00e8ge avec z\u00e8le les droits des citoyens \u00e0 la libert\u00e9 d'expression.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDans une grande partie des commentaires en d\u00e9fense d'Assange, son activit\u00e9 est correctement d\u00e9fendue en s'appuyant sur le fait qu'il \u00e9tait journaliste. On doit cependant garder \u00e0 l'esprit que la protection de la libert\u00e9 d'expression par le Premier amendement n'est pas un droit limit\u00e9 aux journalistes. Tout citoyen a le droit de publier des informations sans restriction de la part du gouvernement. Comme l'a d\u00e9clar\u00e9 le Chief Justice Warren Burger en 1977, \u00abLa libert\u00e9 de la presse a une port\u00e9e illimit\u00e9e. Le Premier Amendement n'appartient \u00e0 aucune cat\u00e9gorie d\u00e9finissable de personnes ou d'entit\u00e9s; il appartient \u00e0 tous ceux qui exercent ses libert\u00e9s\u00bb.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes chefs d'accusation quinze \u00e0 dix-sept all\u00e8guent la publication pure et simple de secrets d'\u00c9tat, et cela ind\u00e9pendamment de toute activit\u00e9 ant\u00e9rieure impliquant Manning dans l'obtention ill\u00e9gale d'information. Par ces trois chefs d'accusation, le gouvernement cherche sp\u00e9cifiquement \u00e0 criminaliser de purs actes de publication d'informations classifi\u00e9es de d\u00e9fense. Ces chefs d'accusation sont de v\u00e9ritables \u00e9l\u00e9ments contre-r\u00e9volutionnaires de l'acte d'accusation. Ils visent \u00e0 d\u00e9truire la protection du Premier amendement concernant la publication d'informations gouvernementales classifi\u00e9es. Dans la th\u00e9orie juridique derri\u00e8re ces trois chefs d'accusation, il y a la th\u00e8se que si quelqu'un, n'importe o\u00f9 dans le monde, recevait par la poste, d'une source anonyme, du mat\u00e9riel classifi\u00e9 de d\u00e9fense et le publiait, il se rendrait coupable du crime d'espionnage.\u003C\/p\u003E\u003Cfigure\u003E\u003Cimg src=\"http:\/\/newsnet.fr\/img\/newsnet_168787_60936a.jpg\" \/\u003E\u003Cfigcaption\u003EL\u00e9gende: Daniel Ellsberg\u003C\/figcaption\u003E\u003C\/figure\u003E\u003Cp\u003EDans l'histoire juridique am\u00e9ricaine, seuls deux proc\u00e8s ont eu lieu contre des \u00e9diteurs tiers non gouvernementaux en vertu de la Loi sur l'espionnage. Le premier fut celui de l'ami de Daniel Ellsberg, Anthony Russo, en 1971, pour avoir aid\u00e9 Ellsberg \u00e0 copier les documents du Pentagone. Le deuxi\u00e8me fut l'affaire \u00c9tats-Unis contre Rosen en 2009. Dans les deux cas, le gouvernement a retir\u00e9 les actes d'accusation apr\u00e8s des d\u00e9cisions judiciaires pr\u00e9alables aux proc\u00e8s qui mettaient en doute la l\u00e9galit\u00e9 des poursuites et invoquaient une inconduite juridique des procureurs. Fait significatif, dans l'affaire des documents du Pentagone, il s'agissait d'une tentative de stopper la publication, et non de punir la publication comme un crime.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ES'effor\u00e7ant d'accentuer le fondement politique de l'acte d'accusation, le gouvernement all\u00e8gue qu'Assange a publi\u00e9 des documents comprenant \u00ables noms de personnes ayant risqu\u00e9 leur s\u00e9curit\u00e9 et leur libert\u00e9 en fournissant des informations aux \u00c9tats-Unis et \u00e0 [leurs] alli\u00e9s\u00bb. Sur le plan juridique toutefois, la publication de ces informations n'est pas pertinente. Rien dans la Loi sur l'espionnage ne concerne la question de savoir si des noms ont \u00e9t\u00e9 publi\u00e9s ou pas. En outre, les procureurs auraient toujours la possibilit\u00e9 de faire valoir un autre \u00abpr\u00e9judice \u00e0 la s\u00e9curit\u00e9 nationale\u00bb pour justifier des poursuites en vertu de la Loi sur l'espionnage. La question juridique est une question de principe.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa perspective juridique de s\u00e9curit\u00e9 nationale sous-tendant l'acte d'accusation est bri\u00e8vement expos\u00e9e au paragraphe 29 de l'acte d'accusation. L\u00e0, on plaide qu'Assange, Manning et d'autres partageaient l'objectif de faire progresser la mission de WikiLeaks \u00aben tant qu'agence de renseignement du peuple subvertissant les mesures l\u00e9gales impos\u00e9es par le gouvernement des \u00c9tats-Unis pour prot\u00e9ger et s\u00e9curiser des informations classifi\u00e9es, afin de les divulguer au public\u00bb.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ECe plaidoyer juridique du D\u00e9partement de la Justice fait \u00e9cho aux d\u00e9clarations de Mike Pompeo, qui, en tant que chef de la CIA en 2017, d\u00e9non\u00e7a WikiLeaks comme un \u00abservice de renseignement non \u00e9tatique hostile\u00bb. Ces perspectives se sont cristallis\u00e9es dans la conception contre-r\u00e9volutionnaire selon laquelle le public n'a pas le droit d'\u00eatre inform\u00e9 des activit\u00e9s du gouvernement.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ERetirant tous les doutes sur l'objectif politique des poursuites, le Centre de contre-espionnage de l'arm\u00e9e am\u00e9ricaine a pr\u00e9par\u00e9 en 2008 un rapport secret sur WikiLeaks, fuit\u00e9 par la suite et publi\u00e9 en 2010. Ce rapport d\u00e9clarait que WikiLeaks repr\u00e9sentait \u00ab\u00a0une menace de contre-espionnage pour l'arm\u00e9e am\u00e9ricaine\u00bb. Il d\u00e9clarait\u00a0: \u00abWikileaks.org, un site Internet accessible au public, repr\u00e9sente une menace potentielle pour l'arm\u00e9e am\u00e9ricaine en mati\u00e8re de contre-espionnage, de s\u00e9curit\u00e9 op\u00e9rationnelle (OPSEC) et de s\u00e9curit\u00e9 de l'information (INFOSEC)\u00bb. Le rapport demandait la fermeture de WikiLeaks en d\u00e9truisant la confiance de ses lecteurs.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe but clairement politique des poursuites, et l'acte d'accusation lui-m\u00eame, bas\u00e9 sur la Loi sur l'espionnage qui est une loi incontestablement politique, font que les efforts des \u00c9tats-Unis pour extrader Assange violent le Trait\u00e9 d'extradition avec le Royaume-Uni. Il existe des pr\u00e9c\u00e9dents en droit anglais emp\u00eachant les tribunaux anglais de reconna\u00eetre les lois d'autres pays lorsqu'elles constituent un affront aux droits de l'homme.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ESi la Loi sur l'espionnage permet la criminalisation de l'activit\u00e9 journalistique, elle constitue un d\u00e9ni des droits humains fondamentaux qui, selon la jurisprudence, ne doit pas \u00eatre valid\u00e9 par les tribunaux anglais. Ce principe a \u00e9t\u00e9 \u00e9tabli dans le cas de jurisprudence Oppenheimer v Cattermole (1976) dans lequel la Chambre des Lords a d\u00e9clar\u00e9 que les tribunaux anglais ne reconna\u00eetraient pas une loi nazie constituant une grave violation des droits de l'homme (une \u00abloi\u00bb privant les Juifs de la citoyennet\u00e9 allemande).\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EVu le caract\u00e8re ill\u00e9gal de la conduite des deux gouvernements \u00e0 l'\u00e9gard d'Assange et le m\u00e9pris \u00e0 l'\u00e9gard de ses droits affich\u00e9 par le pouvoir judiciaire jusqu'\u00e0 pr\u00e9sent, il n'est nullement certain que les autorit\u00e9s de justice du Royaume-Uni respecteront le droit.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EAu moment de l'arrestation d'Assange, Daniel Ellsberg, le consultant qui a divulgu\u00e9 les documents du Pentagone au \u003Ci\u003ENew York Times\u003C\/i\u003E, a d\u00e9clar\u00e9\u00a0: \u00abLe Premier amendement est un pilier de notre d\u00e9mocratie et ceci est une attaque contre elle. Si l'on viole la libert\u00e9 d'expression \u00e0 ce point, notre r\u00e9publique est en danger. Les divulgations non autoris\u00e9es sont le moteur de la r\u00e9publique.\u00bb\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes poursuites contre Assange repr\u00e9sentent une escalade qualitative dans l'attaque depuis deux d\u00e9cennies de l'ordre juridico-constitutionnel des \u00c9tats-Unis. La conception juridique autoritaire avanc\u00e9e par le gouvernement am\u00e9ricain est que la \u00abs\u00e9curit\u00e9 nationale\u00bb, c'est-\u00e0-dire l'effort de guerre militariste des \u00c9tats-Unis, l'emporte sur les droits des peuples. Si le proc\u00e8s contre Assange aboutit, cela criminalisera le journalisme aux \u00c9tats-Unis.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003EConclusion\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EL'affaire Assange repr\u00e9sente une nouvelle \u00e9tape dans l'assaut mondial contre le constitutionnalisme et la l\u00e9galit\u00e9. La d\u00e9mocratie est incompatible avec le degr\u00e9 d'in\u00e9galit\u00e9 qui existe actuellement aux \u00c9tats-Unis, avec leur politique de guerre agressive d'h\u00e9g\u00e9monie mondiale et avec le caract\u00e8re de leurs \u00e9lites dirigeantes. La d\u00e9sint\u00e9gration du syst\u00e8me d\u00e9mocratique et la mont\u00e9e de l'\u00c9tat national s\u00e9curitaire sont la marque de la crise de plus en plus profonde de l'imp\u00e9rialisme.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe Parti d\u00e9mocrate joue un r\u00f4le d\u00e9terminant dans ce processus. Son hostilit\u00e9 envers Assange est aussi virulente et hyst\u00e9rique que la cabale fasciste qui entoure Trump. La bourgeoisie d\u00e9poussi\u00e8re les vieux textes de loi r\u00e9actionnaires tels que la Loi sur l'espionnage pour pr\u00e9parer le cadre juridique national de ses pr\u00e9paratifs de guerre. Pour les \u00e9lites dirigeantes, Assange n'est qu'un d\u00e9but. Ces processus n'expriment pas la force du syst\u00e8me, mais sa d\u00e9ch\u00e9ance historique et son d\u00e9rangement, et le fait qu'il doive donc \u00eatre renvers\u00e9. Le peuple a le droit d\u00e9mocratique de changer le syst\u00e8me de gouvernement et les lois, afin qu'ils r\u00e9pondent \u00e0 ses besoins et \u00e0 ses aspirations.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EL'histoire a donn\u00e9 \u00e0 la classe ouvri\u00e8re la t\u00e2che de d\u00e9fendre (et de d\u00e9velopper \u00e0 un niveau sup\u00e9rieur) les grandes conqu\u00eates r\u00e9volutionnaires du pass\u00e9. Le sens profond et la signification du droit \u00e0 la libert\u00e9 d'expression pour l'humanit\u00e9 furent d\u00e9crits avec \u00e9loquence par un grand lib\u00e9ral, le juge Hugo Black:\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u00ab\u00a0Depuis les premiers jours, les philosophes ont r\u00eav\u00e9 d'un pays o\u00f9 l'esprit et l'\u00e2me de l'homme seraient libres; o\u00f9 il n'y aurait pas de limites \u00e0 l'investigation; o\u00f9 les hommes seraient libres d'explorer l'inconnu et de remettre en question les croyances et les principes les plus profond\u00e9ment enracin\u00e9s.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ENotre premier amendement fut un effort audacieux pour adopter ce principe, pour cr\u00e9er un pays sans restrictions l\u00e9gales d'aucune sorte quant aux sujets sur lesquels on pouvait enqu\u00eater, discuter et qu'on pouvaient nier\u00a0\u00bb.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes auteurs de ce projet savaient, mieux que nous ne le savons peut-\u00eatre aujourd'hui, les risques qu'ils prenaient. Ils savaient que la libert\u00e9 de parole pouvait \u00eatre l'amie du changement et de la r\u00e9volution, mais ils savaient aussi qu'elle est toujours l'ennemie la plus mortelle de la tyrannie. Forts de cette connaissance, ils croyaient encore que le bonheur et la s\u00e9curit\u00e9 ultimes d'une nation r\u00e9sident dans sa capacit\u00e9 d'explorer, de changer, de cro\u00eetre et de s'adapter sans cesse aux nouvelles connaissances n\u00e9es de la recherche, libres de tout contr\u00f4le gouvernemental sur l'esprit et la pens\u00e9e de l'homme.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa lutte du mouvement socialiste pour lib\u00e9rer Assange est une composante essentielle de la lutte contre la guerre, la r\u00e9action et l'autoritarisme. La classe ouvri\u00e8re doit se d\u00e9fendre et d\u00e9fendre ses droits. Elle ne peut le faire aujourd'hui que par le renversement r\u00e9volutionnaire de l'\u00c9tat capitaliste. \u00c0 la place de celui-ci, la classe ouvri\u00e8re doit \u00e9tablir un gouvernement et une soci\u00e9t\u00e9 socialistes, vou\u00e9s au progr\u00e8s et au bien-\u00eatre humain et pacifique de tous les hommes. La vague montante de la r\u00e9volte contre le capitalisme dans le monde entier doit se transformer en effort conscient pour renverser le capitalisme et le remplacer par le socialisme international.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E(\u003Ca href=\"https:\/\/www.wsws.org\/en\/articles\/2020\/01\/15\/assa-j15.html\"\u003EArticle paru d'abord en anglais le 15 janvier 2020\u003C\/a\u003E)\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"http:\/\/www.wsws.org\/fr\/articles\/2020\/02\/10\/jadd-f10.html\"\u003Ewsws.org\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E"}}