{"169021":{"id":"169021","parent":"168996","time":"1581759647","url":"http:\/\/newsnet.fr\/169021","source":"http:\/\/www.wsws.org\/fr\/articles\/2020\/02\/15\/comi-f15.html","category":"Histoire","title":"\u00c0 la veille de la r\u00e9volution: le parti bolch\u00e9vique, les comit\u00e9s d'usine, et le mouvement de masse de la classe ouvri\u00e8re","catalog-images":"10\/\/8\/newsnet_169021_708697.jpg\/newsnet_169021_586f9c.png\/newsnet_169021_650a85.jpg\/newsnet_169021_94e0c6.jpg\/newsnet_169021_71b074.jpg\/newsnet_169021_606ec4.jpg\/newsnet_169021_0e0c25.jpg\/newsnet_169021_85c646.png\/newsnet_169021_4HS9TH7ZUwE.jpg","image":"http:\/\/newsnet.fr\/img\/newsnet_169021_85c646.png","hub":"newsnet","url-explicit":"http:\/\/newsnet.fr\/art\/a-la-veille-de-la-revolution-le-parti-bolchevique-les-comites-d-usine-et-le-mouvement-de-masse-de-la-classe-ouvriere","admin":"newsnet","views":"587","priority":"3","length":"57486","lang":"fr","content":"\u003Cp\u003EPar Tom Carter\u003Cbr \/\u003E\n15 f\u00e9vrier 2020\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ci\u003EVoici la transcription d'une conf\u00e9rence prononc\u00e9e le 14 octobre, 2017, par Tom Carter. Il s'agit de la septi\u00e8me conf\u00e9rence d'une s\u00e9rie de pr\u00e9sentations internationales en ligne du Comit\u00e9 international de la Quatri\u00e8me Internationale pour c\u00e9l\u00e9brer le centenaire de la R\u00e9volution russe de 1917.\u003C\/i\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"http:\/\/youtube.com\/watch?v=4HS9TH7ZUwE\" target=\"_blank\"\u003E\u003Cspan class=\"philum ic-chain\"\u003E\u003C\/span\u003E youtube\u003C\/a\u003E\u003Cspan style=\"background-color:#ffffff; color:#000000;\"\u003EOn the Eve of Revolution: Factory Committees and the Mass Movement of the Working Class\u003C\/span\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa centenaire de la r\u00e9volution russe, que le Comit\u00e9 international de la Quatri\u00e8me Internationale comm\u00e9more sur le \u003Ci\u003EWorld Socialist Web Site\u003C\/i\u003E, fait l'objet d'un int\u00e9r\u00eat accru partout dans le monde. Il a aussi fourni aux \u00e9lites dirigeantes une occasion de recycler tous les vieux mensonges et calomnies sur ce qui s'est vraiment pass\u00e9 dans les derniers mois de l'ann\u00e9e 1917.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe \u003Ci\u003ENew York Times\u003C\/i\u003E, une voix officielle de l'imp\u00e9rialisme am\u00e9ricain \u00e9troitement li\u00e9e \u00e0 l'appareil militaire et du renseignement, n'a m\u00e9nag\u00e9 aucun effort cette ann\u00e9e pour d\u00e9nigrer la r\u00e9volution russe dans une longue s\u00e9rie d'articles intitul\u00e9e: \u00abLe si\u00e8cle rouge\u00bb. Des efforts semblables sont en cours autour du monde.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ESouvent, le \u003Ci\u003ENew York Times\u003C\/i\u003E ne fait que r\u00e9gurgiter et embellir, 100 ans plus tard, la propagande des contre-r\u00e9volutionnaires blancs qui ont tent\u00e9 de renverser le gouvernement sovi\u00e9tique pendant la Guerre civile russe: les bolch\u00e9viks \u00e9taient des \u00abagents allemands\u00bb financ\u00e9s par \u00abl'or allemand\u00bb, les bolch\u00e9viks n'avaient aucun soutien de masse, la r\u00e9volution d'octobre \u00e9tait le produit d'une petite conspiration d'extr\u00e9mistes, etc.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EOn peut dire \u00e0 cet \u00e9gard que l'historien \u00e9lev\u00e9 par le \u003Ci\u003ENew York Times\u003C\/i\u003E au rang d'autorit\u00e9 sur la r\u00e9volution russe, Sean McMeekin, est un \u00abn\u00e9o-Blanc\u00bb. Dans le r\u00e9cit de McMeekin, la prise du pouvoir par les bolch\u00e9viks \u00e9tait un coup de poignard dans le dos d'une nation affaiblie par la guerre et les privations, une \u00abprise de contr\u00f4le hostile\u00bb que McMeekin traite d' \u00abaffaire audacieuse, risqu\u00e9e, et tr\u00e8s serr\u00e9e\u00bb. \u003Ca href=\"#nb1\" id=\"nh1\"\u003E1\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EMcMeekin ne cache pas ses sympathies politiques. \u00abMalgr\u00e9 des d\u00e9fauts de jeunesse, un d\u00e9veloppement \u00e9conomique in\u00e9gal et des vibrations de ferveur r\u00e9volutionnaire\u00bb, \u00e9crit-il, \u00abla Russie imp\u00e9riale en 1900 \u00e9tait viable, sa grandeur et son pouvoir \u00e9taient la fiert\u00e9 de beaucoup sinon de tous les sujets du tsar\u00bb. \u003Ca href=\"#nb2\" id=\"nh2\"\u003E2\u003C\/a\u003E Le probl\u00e8me du gouvernement imp\u00e9rial russe, selon McMeekin, \u00e9tait que le tsar \u00e9coutait \u00abses conseillers lib\u00e9raux\u00bb, et non \u00ables avertissements urgents de Raspoutine\u00bb. Le pouvoir sovi\u00e9tique, \u00e9crit-il, n'\u00e9tait pas \u00able produit d'une \u00e9volution sociale, de la lutte des classes, du d\u00e9veloppement \u00e9conomique, ou de forces historiques inexorables qu'aurait pr\u00e9dits la th\u00e9orie marxiste\u00bb mais, et il cite ici l'historien r\u00e9actionnaire Richard Pipes, le vil travail \u00abd'hommes bien identifi\u00e9s qui voulaient profiter de la situation\u00bb. La r\u00e9volution d'octobre, selon Pipes, \u00e9tait \u00abla capture du pouvoir \u00e9tatique par une petite minorit\u00e9\u00bb. \u003Ca href=\"#nb3\" id=\"nh3\"\u003E3\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EMcMeekin tente de donner du poids \u00e0 ces affirmations en les attribuant \u00e0 des \u00abhistoriens s\u00e9rieux\u00bb. Sans doute, de nombreux individus munis de nobles titres universitaires avancent ces th\u00e8ses partout dans le monde. Mais tous les historiens s\u00e9rieux et honn\u00eates - que leurs sympathies politiques soient ou non du c\u00f4t\u00e9 des bolch\u00e9viks - doivent prendre au s\u00e9rieux les preuves factuelles \u00e9crasantes du soutien de masse que les bolch\u00e9viks gagn\u00e8rent dans la p\u00e9riode menant \u00e0 octobre 1917.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EPour emprunter une expression au trotskyste am\u00e9ricain James Cannon, la r\u00e9volution d'octobre \u00e9tait une \u00abop\u00e9ration consciente\u00bb. Comme le dit l'historien Rex Wade:\u003C\/p\u003E\u003Cblockquote\u003EDe nombreux historiens de la r\u00e9volution ont d\u00e9peint la classe ouvri\u00e8re comme une masse passive et indiff\u00e9renci\u00e9e, facilement manipul\u00e9e par les radicaux et les bolch\u00e9viks. Les travailleurs \u00e9taient loin de cela. Ils ont activement pris part \u00e0 la r\u00e9volution dans des r\u00e9unions et des comit\u00e9s d'usine, par leurs diff\u00e9rentes organisations, en soutenant un parti ou l'autre, par les nombreuses r\u00e9unions informelles de rue ou d'usine. Leur participation aux grandes manifestations de 1917, en f\u00e9vrier et apr\u00e8s, refl\u00e9tait une d\u00e9cision que cela faisait avancer leurs int\u00e9r\u00eats. Ce n'\u00e9tait pas une simple manipulation par des partis politiques: ils ont choisi de participer. \u003Ca href=\"#nb4\" id=\"nh4\"\u003E4\u003C\/a\u003E\u003C\/blockquote\u003E\u003Cp\u003ECette conf\u00e9rence analysera certaines des formes les plus importantes du mouvement de masse ayant produit la r\u00e9volution russe, y compris les comit\u00e9s d'usine et le ph\u00e9nom\u00e8ne du contr\u00f4le ouvrier. Je vais me concentrer sur le r\u00f4le critique qu'elles ont jou\u00e9 apr\u00e8s les Journ\u00e9es de Juillet jusqu'\u00e0 la veille de l'insurrection bolch\u00e9vique, et particuli\u00e8rement pendant l'affaire Kornilov.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003ELes bolch\u00e9viks et la classe ouvri\u00e8re\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EPetrograd \u00e9tait au d\u00e9but de 1917 l'un des grands centres industriels du monde. Ce n'\u00e9tait pas une bourgade provinciale, mais la cinqui\u00e8me ville d'Europe. La production du mat\u00e9riel de guerre pour les arm\u00e9es du tsar se concentrait dans des usines qui utilisaient de nombreuses machines automatiques, aliment\u00e9es en grande partie par du courant \u00e9lectrique produit selon les m\u00e9thodes les plus modernes. Si de vastes r\u00e9gions de l'empire russe sombraient dans une mis\u00e8re rurale, Petrograd poss\u00e9dait de grands quartiers industriels, des l\u00e9gions d'ouvriers, et une technologie de fabrication relativement avanc\u00e9e.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EEn 1917, l'agglom\u00e9ration de Petrograd avait attir\u00e9 et prol\u00e9taris\u00e9 des centaines de milliers de paysans pauvres des campagnes avoisinantes. Pendant les 15 ann\u00e9es de l'avant-guerre, le nombre de travailleurs d'usine \u00e0 Petrograd \u00e9tait pass\u00e9 de 73.000 \u00e0 242.600. En 1917, ce chiffre s'\u00e9tablissait \u00e0 417.000. \u003Ca href=\"#nb5\" id=\"nh5\"\u003E5\u003C\/a\u003E Dans toute la Russie, il y avait environ 2 millions d'ouvriers, compar\u00e9s \u00e0 1,5 million en 1905. \u003Ca href=\"#nb6\" id=\"nh6\"\u003E6\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cspan class=\"philum ic-img2\"\u003E\u003C\/span\u003E The Putilov Works, 1917\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes m\u00e9tallos pr\u00e9dominaient dans la classe ouvri\u00e8re de Petrograd, et les machines qu'ils faisaient tourner devaient ressembler \u00e0 l'\u00e9poque \u00e0 de la science-fiction: \u00abforeuses, tourelles-revolver, al\u00e9seuses-fraiseuses verticales, machines \u00e0 d\u00e9gauchir automatiques et fraiseuses horizontales modernes\u00bb. \u003Ca href=\"#nb7\" id=\"nh7\"\u003E7\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EPetrograd \u00e9tait d\u00e9chir\u00e9e par d'immenses tensions et contradictions internes au d\u00e9but de 1917. Son \u00e9lite dirigeante vivait dans un luxe digne d'un conte de f\u00e9es. Ses membres se faisaient appeler par leurs titres de noblesse et se d\u00e9coraient selon leurs ordres de chevalerie. Des bonnes et des chauffeurs les servaient dans des palais dor\u00e9s. Dans la m\u00eame ville, \u00e0 l'ombre des chemin\u00e9es qui s'\u00e9levaient dans les quartiers industriels, de grands immeubles c\u00f4toyaient des concentrations d'industrie lourde parmi les plus importantes d'Europe. Le co\u00fbt du loyer \u00e0 Petrograd \u00e9tait astronomique. De nombreux travailleurs partageaient un lit dans une chambre partag\u00e9e: un ouvrier dormait pendant que l'autre \u00e9tait au travail. \u003Ca href=\"#nb8\" id=\"nh8\"\u003E8\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe travail \u00e9tait \u00e9puisant, l'air empoisonn\u00e9, les conditions de travail dangereuses. Les accidents industriels \u00e9taient fr\u00e9quents. Les machines frappaient les ouvriers, ou ces derniers tombaient de sommeil. Dix \u00e0 douze heures de travail dans une usine de Petrograd rapportaient \u00e0 un travailleur une poign\u00e9e de kopecks, \u00e0 peine de quoi payer la nourriture et le loyer. Les familles s'entassaient, souvent sans eau courante et sans ventilation ou syst\u00e8mes sanitaires ad\u00e9quats. L'infrastructure des quartiers ouvriers \u00e9tait soit n\u00e9glig\u00e9e, soit inexistante. Malgr\u00e9 les bas salaires, de nombreux travailleurs se privaient de nourriture afin d'envoyer quelques roubles \u00e0 leurs proches \u00e0 la campagne. Face aux prix et aux loyers \u00e9lev\u00e9s, des dizaines de milliers de femmes devaient travailler \u00e0 Petrograd, pour des salaires encore plus bas que ceux des hommes.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EPour la classe ouvri\u00e8re de Petrograd, toute forme d'expression politique \u00e9tait interdite. Les travailleurs devaient se pr\u00e9senter seuls devant leur hi\u00e9rarchie pour \u00e9voquer des griefs. S'ils essayaient de faire gr\u00e8ve, ils risquaient de se faire battre, emprisonner, ou exiler en Sib\u00e9rie par la police. En juin 1915, la police tira sur des tisseurs en gr\u00e8ve \u00e0 Kostroma, faisant quatre morts et neuf bless\u00e9s. Deux mois plus tard, la troupe ouvrit le feu sur les travailleurs \u00e0 Ivanovo-Voznesensk. Il y eut seize travailleurs morts et trente bless\u00e9s.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes autorit\u00e9s tsaristes avaient un r\u00e9seau de mouchards et une police secr\u00e8te dans les quartiers ouvriers. Les travailleurs r\u00e9put\u00e9s \u00abpolitiques\u00bb \u00e9taient mis sur une liste noire, aucune usine ne les embauchait. Les industries li\u00e9es \u00e0 la guerre travaillaient sous discipline militaire, et la moindre dissension \u00e9tait trait\u00e9e de trahison. Dans des milliers de cas, les autorit\u00e9s tsaristes enr\u00f4l\u00e8rent dans l'arm\u00e9e des travailleurs soup\u00e7onn\u00e9s d'activit\u00e9 politique pour les envoyer au front.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes patrons contr\u00f4laient les usines comme des mini-dictateurs. Les contrema\u00eetres rassemblaient les travailleurs au d\u00e9but du quart de travail d'une mani\u00e8re d\u00e9gradante avant de les envoyer aux machines. Les travailleurs les traitaient de \u00abmini-tsars\u00bb (comme les travailleurs am\u00e9ricains d'aujourd'hui pourraient qualifier un contrema\u00eetre particuli\u00e8rement insultant de \u00abmini-Trump\u00bb).\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u00c0 la fin du quart de travail, on fouillait les travailleurs qui partaient, sous pr\u00e9texte d'emp\u00eacher le vol. Les travailleurs de Petrograd n'aimaient pas les bas salaires, les conditions de travail dangereuses, et l'absence de libert\u00e9 politique, mais ils d\u00e9testaient particuli\u00e8rement les fouilles, qui leur \u00f4taient une part essentielle de leur dignit\u00e9.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EMalgr\u00e9 ces conditions opprimantes, une activit\u00e9 politique clandestine vibrante existait \u00e0 Petrograd. Les mots \u00absocialisme\u00bb, \u00abmarxisme\u00bb, et \u00abr\u00e9volution\u00bb circulaient. Malgr\u00e9 les risques, les usines sortaient en gr\u00e8ve; s'il y avait une gr\u00e8ve, en toute probabilit\u00e9: (1) il y avait une cellule bolch\u00e9vique dans l'usine; (2) parmi les gr\u00e9vistes, certains avaient l'exp\u00e9rience de gr\u00e8ves pr\u00e9c\u00e9dentes. \u003Ca href=\"#nb9\" id=\"nh9\"\u003E9\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes bolch\u00e9viks n'\u00e9taient pas toutefois un mouvement syndical. Ils n'organisaient pas des gr\u00e8ves seulement sur des questions \u00e9conomiques ou li\u00e9es au travail. Ils essayaient au maximum de donner aux luttes \u00e9conomiques des travailleurs un caract\u00e8re politique ind\u00e9pendant. Les bolch\u00e9viks luttaient pour instruire les travailleurs sur les questions d'histoire, de politique et de culture. Ils s'effor\u00e7aient d'introduire dans la classe ouvri\u00e8re un sens de l'histoire de ses propres luttes, une connaissance des conditions politiques et \u00e9conomiques et de l'actualit\u00e9 en Russie et en Europe, et une compr\u00e9hension des int\u00e9r\u00eats sociaux et politiques ind\u00e9pendants de la classe ouvri\u00e8re internationale par opposition aux autres classes et couches de la soci\u00e9t\u00e9 - bref, de d\u00e9velopper la conscience socialiste de la classe ouvri\u00e8re.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDepuis la scission entre bolch\u00e9viks et mench\u00e9viks, les bolch\u00e9viks insistaient sur la distinction entre conscience spontan\u00e9e et conscience socialiste. \u00abLe d\u00e9veloppement spontan\u00e9 du mouvement ouvrier aboutit justement \u00e0 le subordonner \u00e0 l'id\u00e9ologie bourgeoise\u00bb, \u00e9crit L\u00e9nine dans \u003Ci\u003EQue faire\u003C\/i\u003E?C'est parce que \u00able mouvement ouvrier spontan\u00e9, c'est le trade-unionisme [syndicalisme]... et le trade-unionisme n'est que l'asservissement id\u00e9ologique des ouvriers par la bourgeoisie. C'est pourquoi notre objectif... est de combattre la spontan\u00e9it\u00e9, de d\u00e9tourner le mouvement ouvrier de cette tendance spontan\u00e9e qu'a le trade-unionisme \u00e0 se r\u00e9fugier sous l'aile de la bourgeoisie\u00bb, et de l'attirer plut\u00f4t sous l'aile du parti r\u00e9volutionnaire. \u003Ca href=\"#nb10\" id=\"nh10\"\u003E10\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ETrotsky met le tableau suivant dans \u003Ci\u003EL'Histoire de la r\u00e9volution russe\u003C\/i\u003E: \u003Ca href=\"#nb11\" id=\"nh11\"\u003E11\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cspan class=\"philum ic-img2\"\u003E\u003C\/span\u003E Political Strikes, 1903-1917\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EIl faut faire une distinction entre gr\u00e8ves \u00e9conomiques et politiques. Une gr\u00e8ve \u00e9conomique concernait les salaires ou les heures et les conditions de travail, alors qu'une gr\u00e8ve politique condamnait la politique gouvernementale, la pers\u00e9cution d'autres travailleurs ou de leurs dirigeants, ou marquait l'anniversaire d'un \u00e9v\u00e9nement historique important, tel que le Dimanche sanglant \u003Ca href=\"#nb12\" id=\"nh12\"\u003E12\u003C\/a\u003E. Bien s\u00fbr, de nombreuses gr\u00e8ves avaient des \u00e9l\u00e9ments \u00e0 la fois \u00e9conomiques et politiques, et la conscience des gr\u00e9vistes pouvait d\u00e9passer les revendications avanc\u00e9es par les dirigeants d'une gr\u00e8ve. Mais la mont\u00e9e des luttes politiques donne une indication importante de la conscience politique du mouvement ouvrier durant cette p\u00e9riode.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDans un passage qui fait \u00e9cho \u00e0 la situation actuelle, Trotsky d\u00e9crit la remont\u00e9e de la lutte ouvri\u00e8re r\u00e9volutionnaire apr\u00e8s la p\u00e9riode de r\u00e9action qui a suivi la r\u00e9volution de 1905.\u003C\/p\u003E\u003Cblockquote\u003ELes grandes d\u00e9faites sont d\u00e9courageantes pour longtemps. Les \u00e9l\u00e9ments r\u00e9volutionnaires perdent leur pouvoir sur la masse. Dans la conscience de celle-ci remontent en surface des pr\u00e9jug\u00e9s et des superstitions mal cuv\u00e9s. (...) Les sceptiques hochent la t\u00eate ironiquement. Il en fut ainsi en 1907-1911. Mais les processus mol\u00e9culaires dans les masses gu\u00e9rissent les plaies psychiques caus\u00e9es par les d\u00e9faites. Un nouveau tournant des \u00e9v\u00e9nements ou bien une sourde pouss\u00e9e \u00e9conomique inaugurent un nouveau cycle politique. Les \u00e9l\u00e9ments r\u00e9volutionnaires retrouvent leur auditoire. La lutte reprend \u00e0 un degr\u00e9 plus \u00e9lev\u00e9. \u003Ca href=\"#nb13\" id=\"nh13\"\u003E13\u003C\/a\u003E\u003C\/blockquote\u003E\u003Cp\u003EJe veux citer un passage du m\u00e9moire d'Alexander Buiko, un m\u00e9tallo bolch\u00e9vique qui a travaill\u00e9 dans l'usine Poutilov avant la r\u00e9volution. Dans ce passage, il d\u00e9crit ses efforts pour gagner les autres m\u00e9tallos, parmi lesquels il rencontrait certains des pr\u00e9jug\u00e9s r\u00e9pandus parmi ce que l'on appelait \u00e0 l'\u00e9poque \u00ables ouvriers qualifi\u00e9s\u00bb. Cela donne une id\u00e9e du travail patient que les bolch\u00e9viks ont men\u00e9 pendant des ann\u00e9es sur le terrain. Buiko \u00e9crit:\u003C\/p\u003E\u003Cblockquote\u003ESi un jeune homme commen\u00e7ait une discussion avec un ancien monteur ou tourneur qualifi\u00e9, on lui dirait: \"Apprenez d'abord \u00e0 tenir un marteau et \u00e0 utiliser un ciseau et une lame, ensuite vous pourrez parler comme un homme qui a quelque chose \u00e0 apprendre aux autres\". Pendant de longues ann\u00e9es, il a fallu endurer cela. Pour \u00eatre organisateur, il fallait conna\u00eetre le m\u00e9tier. Mais ensuite ils disaient, \"Il n'est pas mauvais gar\u00e7on, il travaille bien et il a une bonne t\u00eate pour la politique\". \u003Ca href=\"#nb14\" id=\"nh14\"\u003E14\u003C\/a\u003E\u003C\/blockquote\u003E\u003Cp\u003EDans ses campagnes parmi les ouvriers, le parti bolch\u00e9vique soutenait que tous les travailleurs, peu importe leur race, origine ou sexe, devaient s'unir dans une lutte commune contre le capitalisme et la guerre. Le parti bolch\u00e9vique avait un nombre remarquable de dirigeantes femmes - Nadezhda Krupska\u00efa, Alexandra Kollonta\u00ef, Elena Stasova, et d'autres - et publiait un journal destin\u00e9 aux ouvri\u00e8res, \u003Ci\u003ERabotnitsa.\u003C\/i\u003E \u003Ca href=\"#nb15\" id=\"nh15\"\u003E15\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cimg style=\"max-width:100%\" src=\"http:\/\/newsnet.fr\/img\/newsnet_169021_650a85.jpg\" \/\u003E Klavdiya Nikolaeva\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EFille d'ouvrier, Klavdiya Nikolaeva, est n\u00e9e en 1893 et a adh\u00e9r\u00e9 au parti bolch\u00e9vique en 1909, vers l'\u00e2ge de 16 ans. En 1917, vers l'\u00e2ge de 24 ans, elle travaillait au comit\u00e9 de r\u00e9daction du journal \u003Ci\u003ERabotnitsa\u003C\/i\u003E \u00e0 Petrograd, une responsabilit\u00e9 politique majeure. Le parti bolch\u00e9vique avait de nombreux jeunes leaders de ce genre, v\u00e9ritables prodiges politiques. Apr\u00e8s la r\u00e9volution, Nikolaeva a soutenu Trotsky et adh\u00e9r\u00e9 \u00e0 l'Opposition de gauche.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EM\u00eame si tous les travailleurs n'\u00e9taient pas n\u00e9cessairement d'accord avec les bolch\u00e9viks au d\u00e9part, apr\u00e8s une longue p\u00e9riode de travail clandestin, les ouvriers de Petrograd en sont venus \u00e0 associer dans leur esprit les bolch\u00e9viks aux revendications les plus ambitieuses pour l'\u00e9mancipation politique, la r\u00e9organisation sociale, la paix, l'\u00e9galit\u00e9 et le progr\u00e8s humain. Les travailleurs les respectaient comme des gens de principes et les combattants les plus s\u00e9rieux et les plus courageux pour les int\u00e9r\u00eats ouvriers.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ETrotsky cite un rapport de police sur les bolch\u00e9viks dans la p\u00e9riode juste avant la guerre: \u00abL'\u00e9l\u00e9ment le plus \u00e9nergique, le plus all\u00e8gre, le plus capable de lutter infatigablement, de r\u00e9sister et de s'organiser constamment, se trouve dans les groupements et les individus qui se concentrent autour de L\u00e9nine\u00bb \u003Ca href=\"#nb16\" id=\"nh16\"\u003E16\u003C\/a\u003E. Au d\u00e9but de 1917, les noms d'usines telles que l'Aivaz, Baranovskii, Vulcan, Nobel, Nouveau Lessner, Phoenix, et Puzyrev \u00e9taient devenus synonymes de larges contingents d'ouvriers politis\u00e9s qui \u00e9taient membres ou sympathisants du parti bolch\u00e9vique \u003Ca href=\"#nb17\" id=\"nh17\"\u003E17\u003C\/a\u003E.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EEn f\u00e9vrier 1917, nous le savons, la classe ouvri\u00e8re renversa le r\u00e9gime tsariste et cette puissante activit\u00e9 politique souterraine \u00e9clata en surface. La r\u00e9volution de f\u00e9vrier \u00e9tait le fait d'\u00abouvriers conscients et bien tremp\u00e9s qui, surtout, avaient \u00e9t\u00e9 form\u00e9s \u00e0 l'\u00e9cole du parti de L\u00e9nine\u00bb, comme l'\u00e9crit Trotsky \u003Ca href=\"#nb18\" id=\"nh18\"\u003E18\u003C\/a\u003E. Mais le mouvement r\u00e9volutionnaire de masse des travailleurs de f\u00e9vrier n'\u00e9tait pas encore unifi\u00e9 et guid\u00e9 par le parti bolch\u00e9vique. En cons\u00e9quence, si les travailleurs ont pu renverser le tsar, la r\u00e9volution de f\u00e9vrier a men\u00e9 \u00e0 une prolif\u00e9ration h\u00e9t\u00e9rog\u00e8ne de luttes ouvri\u00e8res et d'organisations de toutes sortes, partout \u00e0 Petrograd et dans le pays, y compris des syndicats, des comit\u00e9s d'usine et des soviets.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003ELes comit\u00e9s d'usine et le contr\u00f4le ouvrier\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes travailleurs r\u00e9volutionnaires de Petrograd ont avanc\u00e9 pendant et apr\u00e8s la r\u00e9volution de f\u00e9vrier de nombreuses revendications, \u00e0 la fois politiques et \u00e9conomiques. Une qui ne manquait pas de piquant \u00e9tait de se faire payer les jours pass\u00e9s \u00e0 renverser le tsar.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EPendant la r\u00e9volution de f\u00e9vrier, un ph\u00e9nom\u00e8ne r\u00e9pandu \u00e9tait \u00abl'expulsion\u00bb des cadres. Les travailleurs dans les usines de Petrograd saisissaient litt\u00e9ralement les contrema\u00eetres et les directeurs, les mettaient dans des charrettes, les sortaient de l'usine et les balan\u00e7aient \u00e0 l'ext\u00e9rieur. Cette pratique vite diffus\u00e9e est devenue tr\u00e8s populaire. Selon l'historien Stephen A. Smith:\u003C\/p\u003E\u003Cblockquote\u003EPour les travailleurs, \"l'expulsion en charrette\" des cadres \u00e9tait une affirmation symbolique de leur dignit\u00e9 humaine et une humiliation rituelle de ceux qui leur avaient \u00f4t\u00e9 cette dignit\u00e9 dans leur travail quotidien. \u003Ca href=\"#nb19\" id=\"nh19\"\u003E19\u003C\/a\u003E\u003C\/blockquote\u003E\u003Cp\u003EBref, les travailleurs ne se contentaient pas de renverser le tsar, ils voulaient aussi renverser tous les \u00abmini-tsars\u00bb dans les usines.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDans de nombreuses usines, les travailleurs all\u00e8rent plus loin. Ayant \u00abexpuls\u00e9\u00bb les patrons, ils prirent \u00abcontr\u00f4le\u00bb des usines en utilisant les comit\u00e9s d'usine pour exercer ce contr\u00f4le. Le mouvement s'\u00e9tendit aux usines de tout l'ancien empire tsariste. La forme et la structure de ces comit\u00e9s \u00e9taient diff\u00e9rentes d'une usine \u00e0 l'autre, mais ce qui distinguait les comit\u00e9s d'usine des syndicats \u00e9tait le concept de contr\u00f4le ouvrier.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes comit\u00e9s d'usine forc\u00e8rent l'ouverture des comptes dans les usines. Ils d\u00e9couvrirent dans certains cas que des employeurs qui insistaient pour garder les salaires bas, sous le pr\u00e9texte que l'usine n'\u00e9tait pas rentable, r\u00e9alisaient en fait de gros profits. Les comit\u00e9s d'usine dressaient un bilan financier et un inventaire. Les capitalistes et les r\u00e9actionnaires tentaient constamment de discr\u00e9diter le mouvement ouvrier en sabotant la production et la distribution, et les comit\u00e9s bloquaient et d\u00e9masquaient ces efforts. Les comit\u00e9s prenaient le contr\u00f4le des embauches et des licenciements. Ils soutenaient qu'ils avaient le droit de licencier les contrema\u00eetres qui maltraitaient les ouvriers et de r\u00e9embaucher les travailleurs mis sur une liste noire.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cimg style=\"max-width:100%\" src=\"http:\/\/newsnet.fr\/img\/newsnet_169021_94e0c6.jpg\" \/\u003E All-Russian Conference of Factory Committees in Petrograd, 17 October 1917, with Trotsky and Riazanov in the center\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ETrotsky avait pr\u00e9dit ce ph\u00e9nom\u00e8ne avant 1917. Dans sa dispute avec L\u00e9nine sur le slogan de la \u00abdictature d\u00e9mocratique du prol\u00e9tariat et de la paysannerie\u00bb, Trotsky avait pr\u00e9vu que \u00able prol\u00e9tariat sera port\u00e9 au pouvoir par le processus tout entier de la r\u00e9volution\u00bb \u003Ca href=\"#nb20\" id=\"nh20\"\u003E20\u003C\/a\u003E. Il ne pourrait se limiter artificiellement au renversement du tsar et \u00e0 la cr\u00e9ation d'un r\u00e9gime d\u00e9mocratique bourgeois. En tant que force dirigeante de la r\u00e9volution, la classe ouvri\u00e8re ne devait pas et ne pouvait pas s'interdire de prendre des mesures de classe pour d\u00e9fendre ses int\u00e9r\u00eats, \u00e0 commencer sur les lieux de travail.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EQuand on se penche sur ce tourbillon de luttes sociales que fut 1917, il est difficile d'arriver \u00e0 des g\u00e9n\u00e9ralit\u00e9s. Chacune admet des exceptions, des variations r\u00e9gionales, des changements et des fluctuations dans le temps. Des travailleurs bolch\u00e9viques, mench\u00e9viques, socialistes-r\u00e9volutionnaires et sans-parti \u00e9taient tous impliqu\u00e9s autant dans les syndicats que dans les comit\u00e9s d'usine.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EMais si l'on prend la Russie dans son ensemble en 1917, on peut dire que les syndicats avaient tendance \u00e0 \u00eatre plus conservateurs ou \u00abpolitiquement neutres\u00bb, et \u00e0 favoriser la politique des mench\u00e9viks et des socialistes-r\u00e9volutionnaires. Les comit\u00e9s d'usine, par contre, \u00e9taient des bastions bolch\u00e9viques. Les bolch\u00e9viks encourag\u00e8rent la formation de ces comit\u00e9s. Des assembl\u00e9es de d\u00e9l\u00e9gu\u00e9s des comit\u00e9s d'usine approuv\u00e8rent \u00e0 maintes reprises des r\u00e9solutions bolch\u00e9viques.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe gouvernement provisoire chercha \u00e0 combattre les comit\u00e9s d'usine en leur accordant un statut officiel tout en les limitant essentiellement \u00e0 un r\u00f4le syndical. Prenant la parole \u00e0 un congr\u00e8s de comit\u00e9s d'usine le 13 juin, L\u00e9nine exhorta les travailleurs \u00e0 rejeter ces efforts: \u00abCamarades, ouvriers, assurez-vous d'obtenir un contr\u00f4le r\u00e9el, pas un contr\u00f4le fictif\u00bb, d\u00e9clara L\u00e9nine, \u00abet rejetez de la mani\u00e8re la plus r\u00e9solue toute r\u00e9solution ou proposition visant \u00e0 \u00e9tablir... un contr\u00f4le fictif qui n'existerait que sur papier\u00bb. \u003Ca href=\"#nb21\" id=\"nh21\"\u003E21\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes comit\u00e9s d'usine se sont vite r\u00e9pandus; lors d'une conf\u00e9rence des comit\u00e9s d'usine en juin, toutes les usines de plus de 5.000 travailleurs \u00e9taient repr\u00e9sent\u00e9es. Les d\u00e9l\u00e9gu\u00e9s qui participaient \u00e0 ces conf\u00e9rences arrivaient directement du travail, ayant \u00e9t\u00e9 \u00e9lus par leurs coll\u00e8gues dans l'atelier.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes employeurs, bien s\u00fbr, lutt\u00e8rent comme ils pouvaient contre la formation de ces comit\u00e9s. On peut citer le cas d'un atelier de fabrication de cuir employant 19 ouvriers o\u00f9 le patron r\u00e9pondit \u00e0 une tentative d'organiser un comit\u00e9 en licenciant tous les salari\u00e9s \u003Ca href=\"#nb22\" id=\"nh22\"\u003E22\u003C\/a\u003E. Dans d'autres cas, la direction tenta de licencier les dirigeants des comit\u00e9s, et les travailleurs durent sortir en gr\u00e8ve pour faire r\u00e9embaucher les dirigeants.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELorsque les ouvriers et leurs familles crevaient de faim, les comit\u00e9s d'usine tentaient de leur fournir de la nourriture et d'organiser le ravitaillement. Les comit\u00e9s d'usine imposaient la discipline dans les usines et menaient une campagne contre l'alcoolisme. Dans le chaos et l'anarchie de la p\u00e9riode r\u00e9volutionnaire, les comit\u00e9s ouvriers assur\u00e8rent la production des outils, des v\u00eatements et des produits de base dont on avait d\u00e9sesp\u00e9r\u00e9ment besoin.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ECe qui d\u00e9rangeait peut-\u00eatre le plus les autorit\u00e9s \u00e9tait l'affirmation de nombreux comit\u00e9s d'usine qu'ils n'avaient pas confiance dans l'arm\u00e9e du gouvernement provisoire, et qu'ils formaient en cons\u00e9quence leurs propres milices, la Garde rouge. C'est dans les usines bolch\u00e9viques que la Garde rouge fut form\u00e9e de la mani\u00e8re la plus syst\u00e9matique et c'est l\u00e0 o\u00f9 elle fut la plus militante.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe 26 avril, les ouvriers du quartier de Peterhof pos\u00e8rent des conditions sur qui pouvait adh\u00e9rer \u00e0 la Garde rouge:\u003C\/p\u003E\u003Cblockquote\u003ESeule la fleur de la classe ouvri\u00e8re peut y adh\u00e9rer. Il nous faut une garantie qu'aucune personne indigne ou h\u00e9sitante n'entrera dans nos rangs. Tous ceux qui veulent adh\u00e9rer \u00e0 la Garde rouge doivent recevoir une recommandation du comit\u00e9 de quartier d'un parti socialiste. \u003Ca href=\"#nb23\" id=\"nh23\"\u003E23\u003C\/a\u003E\u003C\/blockquote\u003E\u003Cp\u003EHommes et femmes militaient dans la Garde rouge. La Garde rouge assurait la s\u00e9curit\u00e9 des quartiers industriels et d\u00e9fendait les domiciles et lieux de travail des ouvriers contre une vague d'incendies criminels allum\u00e9s par des forces de l'extr\u00eame droite. La Garde rouge soutenait que seule la classe ouvri\u00e8re pouvait d\u00e9fendre les gains de la r\u00e9volution russe contre les forces de la contre-r\u00e9volution. Les mench\u00e9viks d\u00e9non\u00e7aient la Garde rouge et attribuaient sa formation \u00e0 \u00abl'agitation l\u00e9niniste\u00bb.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cspan class=\"philum ic-img2\"\u003E\u003C\/span\u003E Red Guards from the Vulcan factory\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes comit\u00e9s d'usine se pench\u00e8rent avec beaucoup d'int\u00e9r\u00eat sur les questions culturelles. Dans l'usine Poutilov, les travailleurs fond\u00e8rent un club culturel qui avait une biblioth\u00e8que et un buffet \u003Ca href=\"#nb24\" id=\"nh24\"\u003E24\u003C\/a\u003E. Ce club avait 2.000 membres. Il se donnait comme but \u00abd'unir et de cultiver un public ouvrier dans un esprit socialiste, ce qui demande le d\u00e9veloppement des connaissances g\u00e9n\u00e9rales sur le socle de l'alphab\u00e9tisme et d'une culture de base\u00bb. \u003Ca href=\"#nb25\" id=\"nh25\"\u003E25\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ESur l'\u00eele Vassilievski, on fonda en mars 1917 un club nomm\u00e9 Aube nouvelle, qui eut bient\u00f4t 800 membres d'une usine de tuyauterie. Ce club organisa une exp\u00e9dition g\u00e9ographique, un voyage en navire \u00e0 vapeur, des conf\u00e9rences, et un concert de fanfare pour les travailleurs. \u003Ca href=\"#nb26\" id=\"nh26\"\u003E26\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EPour l'ouverture d'un club \u00e0 une usine de fusils, on organisa un r\u00e9cital d'airs d'op\u00e9ras du compositeur russe Modest Moussorgsky et l'interpr\u00e9tation par un orchestre ouvrier de l'Internationale et de la Marseillaise des travailleurs. \u00abLe club avait une biblioth\u00e8que de 4.000 livres, une salle de lecture, un petit th\u00e9\u00e2tre et une \u00e9cole. Le soir, on organisait des s\u00e9ances d'alphab\u00e9tisation et des cours sur le droit, les sciences naturelles et les math\u00e9matiques\u00bb. \u003Ca href=\"#nb27\" id=\"nh27\"\u003E27\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDes clubs ouvriers de Petrograd pr\u00e9sent\u00e8rent des pi\u00e8ces de c\u00e9l\u00e8bres \u00e9crivains russes tels que Alexandre Ostrovski, L\u00e9on Tolsto\u00ef et Nikolas Gogol, ainsi que des œuvres du dramaturge allemand Gerhart Hauptmann et d'autres. \u003Ca href=\"#nb28\" id=\"nh28\"\u003E28\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes bolch\u00e9viks, nous le savons, refus\u00e8rent de soutenir le gouvernement provisoire ou la guerre. Tout au long de l'ann\u00e9e, ils men\u00e8rent une lutte politique dans la classe ouvri\u00e8re contre toutes les autres tendances. Sous l'impact des \u00e9v\u00e9nements, les usines commenc\u00e8rent l'une apr\u00e8s l'autre \u00e0 rallier le camp bolch\u00e9vique. Dans \u003Ci\u003EL'Histoire de la r\u00e9volution russe\u003C\/i\u003E, Trotsky fait l'\u00e9loge d'un organisateur en particulier \u00e0 l'usine Poutilov:\u003C\/p\u003E\u003Cblockquote\u003EL'usine Poutilov, comptant quarante mille ouvriers, sembla, dans les premiers mois de la r\u00e9volution, \u00eatre la citadelle des socialistes-r\u00e9volutionnaires. Mais sa garnison ne r\u00e9sista pas longtemps aux bolch\u00e9viks. \u00c0 la t\u00eate des assaillants, l'on pouvait voir le plus souvent Volodarsky. Juif, tailleur de son m\u00e9tier, ayant v\u00e9cu des ann\u00e9es en Am\u00e9rique et poss\u00e9dant bien l'anglais, Volodarsky \u00e9tait un excellent orateur pour les masses, logique, inventif et cr\u00e2ne. Certain accent am\u00e9ricain donnait une expression toute particuli\u00e8re \u00e0 sa voix sonore qui tintait nettement dans des r\u00e9unions de milliers d'hommes. \u00ab\u00c0 partir du moment o\u00f9 il se montra dans le rayon de Narva\u00bb - raconte l'ouvrier Minitchev - \u00e0 l'usine Poutilov, le terrain commen\u00e7a \u00e0 trembler sous les pieds de messieurs les socialistes-r\u00e9volutionnaires, et, en quelque deux mois, les ouvriers de Poutilov suivirent les bolch\u00e9viks.\u00bb \u003Ca href=\"#nb29\" id=\"nh29\"\u003E29\u003C\/a\u003E\u003C\/blockquote\u003E\u003Cp\u003EAux \u00c9tats-Unis pendant la guerre, Volodarsky militait au sein du Syndicat international des tailleurs et du Parti socialiste. Il \u00e9crivait pour un journal \u00e0 New York. Il adh\u00e9ra \u00e0 l'organisation inter-rayons (Mezhraiontsy) de Trotsky \u00e0 son retour en Russie et adh\u00e9ra ensuite au parti bolch\u00e9vique avec Trotsky. Il fut assassin\u00e9 par les socialistes-r\u00e9volutionnaires en 1918.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe comit\u00e9 d'usine de Poutilov encourageait les travailleurs \u00e0 participer \u00e0 des cours du soir:\u003C\/p\u003E\u003Cblockquote\u003ENous devons nous laisser impr\u00e9gner de l'id\u00e9e que la connaissance est tout. C'est l'essence de la vie et elle seule peut donner un sens \u00e0 la vie. (...) Les questions de la culture et des lumi\u00e8res sont \u00e0 pr\u00e9sent les questions les plus br\u00fblantes. (...) Camarades, ne perdez pas l'occasion d'acqu\u00e9rir des connaissances scientifiques. Ne passez pas une seule heure sans but. Chaque heure est pr\u00e9cieuse. Il ne faut pas simplement rattraper, mais d\u00e9passer les classes contre lesquelles nous luttons. La vie l'exige de nous, c'est ce qu'elle nous indique du doigt. Nous sommes les ma\u00eetres de nos vies \u00e0 pr\u00e9sent et il nous faut ma\u00eetriser toutes les armes du savoir. \u003Ca href=\"#nb30\" id=\"nh30\"\u003E30\u003C\/a\u003E\u003C\/blockquote\u003E\u003Cp\u003ELe taux d'alphab\u00e9tisme atteignait 94,7 pour cent parmi les monteurs de Poutilov et 92 pour cent parmi les m\u00e9tallos de Petrograd, compar\u00e9 \u00e0 17 pour cent \u00e0 l'\u00e9poque dans les zones rurales de la Russie europ\u00e9enne. \u003Ca href=\"#nb31\" id=\"nh31\"\u003E31\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes formes de contr\u00f4le ouvrier \u00e9tablies apr\u00e8s f\u00e9vrier \u00e9taient \u00e0 bien des \u00e9gards le reflet de la dualit\u00e9 des pouvoirs qui existait sur le plan politique. Certains aspects du contr\u00f4le sur les lieux de travail sont pass\u00e9s de fait aux mains des travailleurs r\u00e9volutionnaires, mais la propri\u00e9t\u00e9 l\u00e9gale et le droit de disposition restaient sur papier aux mains des capitalistes.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ETrotsky disait que sous les conditions appropri\u00e9es, le contr\u00f4le ouvrier \u00e9tait une \u00ab\u00e9cole de l'\u00e9conomie planifi\u00e9e\u00bb. Ainsi, en 1917, le comit\u00e9 d'usine de Poutilov donna les instructions suivantes sur comment construire un comit\u00e9 d'usine:\u003C\/p\u003E\u003Cblockquote\u003EIl faut que ces comit\u00e9s, qui s'int\u00e9ressent \u00e0 tous les aspects de la vie des membres de la base, fassent preuve d'un maximum d'initiative et d'ind\u00e9pendance. Le succ\u00e8s des organisations ouvri\u00e8res dans les usines en d\u00e9pend enti\u00e8rement. En s'accoutumant \u00e0 l'autogestion, les travailleurs pr\u00e9parent le moment o\u00f9 la propri\u00e9t\u00e9 priv\u00e9e des usines et des manufactures sera abolie, et les moyens de production et les b\u00e2timents \u00e9rig\u00e9s par les travailleurs passeront aux mains de la classe ouvri\u00e8re en son ensemble. Donc, en faisant les petites choses, nous devons constamment garder en t\u00eate le grand objectif d\u00e9terminant vers lequel tend le peuple ouvrier. \u003Ca href=\"#nb32\" id=\"nh32\"\u003E32\u003C\/a\u003E\u003C\/blockquote\u003E\u003Cp\u003ELa classe dirigeante, \u00e9branl\u00e9e par la r\u00e9volution de f\u00e9vrier, fut forc\u00e9e d'accepter le contr\u00f4le ouvrier pour une courte p\u00e9riode. Mais d\u00e8s que les capitalistes se furent r\u00e9tablis, ils voulurent \u00e0 tout prix r\u00e9affirmer leurs pr\u00e9rogatives.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u00abLes contradictions du r\u00e9gime, inconciliables par leur essence m\u00eame avec le contr\u00f4le ouvrier, s'aiguiseront in\u00e9vitablement avec l'\u00e9largissement de sa base et de ses t\u00e2ches, et deviendront \u00e0 bref d\u00e9lai insupportables\u00bb, devait \u00e9crire Trotsky plus tard \u003Ca href=\"#nb33\" id=\"nh33\"\u003E33\u003C\/a\u003E. Trotsky expliqua que cette situation de \u00abdualit\u00e9 des pouvoirs\u00bb n'offrait que deux issues possibles: soit la capture du pouvoir politique par la classe ouvri\u00e8re, soit une dictature contre-r\u00e9volutionnaire.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003EL'affaire Kornilov\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDans la Russie de 1917, la seconde variante prit la forme d'une tentative de coup d'\u00c9tat par le g\u00e9n\u00e9ral Kornilov, connue sous le nom d'\u00abAffaire Kornilov\u00bb. La conf\u00e9rence pr\u00e9c\u00e9dente a d\u00e9j\u00e0 pr\u00e9sent\u00e9 le contexte de ce coup de force.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDe l'avis g\u00e9n\u00e9ral, Lavr Kornilov \u00e9tait un voyou et un personnage peu attirant. Le coll\u00e8gue de Kornilov, le g\u00e9n\u00e9ral Evegenii Martynov le d\u00e9crit comme un \u00abignorant absolu en politique\u00bb, et le g\u00e9n\u00e9ral Mikhail Alekseev comme \u00abun homme au cœur de lion et au cerveau de mouton\u00bb \u003Ca href=\"#nb34\" id=\"nh34\"\u003E34\u003C\/a\u003E. Kornilov aimait faire des parades avec des troupes en uniformes ethniques, arm\u00e9es de sabres et regardant avec f\u00e9rocit\u00e9 ses foules de partisans. Physiquement trapu aux jambes arqu\u00e9es, il projetait l'image d'un f\u00e9roce chien de garde. Il \u00e9tait un sympathisant des Cent-noirs d'extr\u00eame droite, l'\u00e9quivalent russe du Ku Klux Klan am\u00e9ricain.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa carri\u00e8re militaire de Kornilov ne fut pas particuli\u00e8rement distingu\u00e9e. Captur\u00e9 par les Autrichiens alors qu'il errait dans un bois en 1915, il parvint \u00e0 s'\u00e9chapper. Pendant l'offensive manqu\u00e9e de K\u00e9rensky, il se distingua en donnant l'ordre de tirer sans distinction sur les troupes battant en retraite. Les soldats le d\u00e9test\u00e8rent pour cela, naturellement, mais dans l'extr\u00eame droite, cela fit de lui un h\u00e9ros national. Apr\u00e8s avoir abandonn\u00e9 Riga plus tard durant la guerre, Kornilov ordonna \u00e0 ses officiers de fusiller au hasard des soldats au bord de la route pour l\u00e2chet\u00e9, alors que les soldats s'\u00e9taient en fait battus vaillamment. Lorsque des officiers refus\u00e8rent de commettre une telle atrocit\u00e9, Kornilov s'emporta et mena\u00e7a de les traduire devant un tribunal militaire pour insubordination.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cspan class=\"philum ic-img2\"\u003E\u003C\/span\u003E Lavr Kornilov, August 1917\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe programme de Kornilov \u00e9tait grossier mais simple. Alors que Alexander K\u00e9rensky pr\u00e9tendait n\u00e9gocier avec les partis socialistes \u00abmod\u00e9r\u00e9s\u00bb tels que les mench\u00e9viks et les socialistes-r\u00e9volutionnaires, Kornilov n'allait pas s'abaisser de la sorte. Pour lui, tous les socialistes - bolch\u00e9viks, mench\u00e9viks et socialistes-r\u00e9volutionnaires - \u00e9taient les \u00abennemis int\u00e9rieurs de la Russie\u00bb et vraisemblablement des espions \u00e0 la solde de puissances \u00e9trang\u00e8res. Kornilov voulait marcher sur la capitale, \u00e9craser les organisations ouvri\u00e8res, faire pendre les dirigeants, et utiliser l'artillerie contre quiconque chercherait \u00e0 se mettre sur son chemin.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EPour les castes d'\u00e9lite des officiers tsaristes, les hauts fonctionnaires, les propri\u00e9taires terriens, et les magnats de la banque et des affaires, Kornilov \u00e9tait entour\u00e9 de l'aur\u00e9ole du sauveur national. Toute la presse officielle le suivait. Il disposait m\u00eame du soutien de dirigeants socialistes-r\u00e9volutionnaires tels que Boris Savinkov et K\u00e9rensky lui-m\u00eame.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EAvant de marcher sur Petrograd, Kornilov participa \u00e0 une s\u00e9rie d'intrigues avec K\u00e9rensky, qui \u00e9tait tout autant \u00abkornilovien\u00bb que Kornilov lui-m\u00eame. La dispute entre les deux hommes \u00e9tait sur qui allait diriger le gouvernement de sang et de fer qu'ils voulaient tous les deux construire pour \u00e9craser les ouvriers de Petrograd. C'est K\u00e9rensky qui nomma Kornilov chef de l'arm\u00e9e le 31 juillet (18 juillet, \u00ab ancien style \u00bb a.s.), afin d'utiliser \u00e0 son propre avantage le soutien grandissant dont jouissait Kornilov dans les milieux dirigeants.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe 24 ao\u00fbt (11 ao\u00fbt, a.s.), Kornilov fit savoir \u00e0 son chef d'\u00e9tat-major qu'il \u00e9tait \u00abgrand temps de pendre les espions allemands dirig\u00e9s par L\u00e9nine\u00bb et de disperser le soviet de Petrograd \u00abde mani\u00e8re \u00e0 ce qu'il ne puisse pas se r\u00e9assembler o\u00f9 que ce soit\u00bb \u003Ca href=\"#nb35\" id=\"nh35\"\u003E35\u003C\/a\u003E. Le 25 ao\u00fbt (12, a.s.) Kornilov ordonna \u00e0 l'arm\u00e9e de marcher sur Petrograd. Il d\u00e9clara: \u00abLe corps d'arm\u00e9e sera install\u00e9 dans la banlieue de Petrograd le soir du 28 ao\u00fbt. Je demande que la loi martiale soit proclam\u00e9e \u00e0 Petrograd le 29 ao\u00fbt.\u00bb\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EParmi les troupes envoy\u00e9es \u00e0 Petrograd se trouvait la Division indig\u00e8ne de cavalerie caucasienne, la \u00abDivision sauvage\u00bb du tsar. Les partisans de Kornilov pouvaient \u00e0 peine contenir leur excitation devant le bain de sang \u00e0 venir dans la capitale. Ils parlaient avec satisfaction de ces \u00abmontagnards, peu leur importe qui massacrer\u00bb \u003Ca href=\"#nb36\" id=\"nh36\"\u003E36\u003C\/a\u003E. Ce qui fait penser aux slogans qu'allait adopter plus tard l'arm\u00e9e blanche: \u00abAucune restriction! Dieu est avec nous... sabrons \u00e0 droite et \u00e0 gauche!\u00bb \u003Ca href=\"#nb37\" id=\"nh37\"\u003E37\u003C\/a\u003E L'\u00e9quivalent moderne serait le slogan li\u00e9 \u00e0 l'occupation am\u00e9ricaine de l'Irak: \u00abTuez-les tous, Dieu reconna\u00eetra les siens!\u00bb\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EQue comptait faire Kornilov avec l'arm\u00e9e \u00e0 Petrograd? Lors de la d\u00e9faite de la r\u00e9volution russe de 1905, l'arm\u00e9e bombarda l'arrondissement Presnenski de Moscou. Tout le quartier industriel, avec ses ouvriers et leurs familles, fut r\u00e9duit en ruines. L'arm\u00e9e lan\u00e7a des exp\u00e9ditions punitives le long des chemins de fer. \u00abLes troupes arriveraient \u00e0 une gare et commenceraient \u00e0 tirer sur tout le monde, y compris de simples passants - femmes, enfants, cheminots, n'importe qui - et \u00e0 les abattre. On pendait les gens le long du chemin, pour terrifier les masses.\u00bb \u003Ca href=\"#nb38\" id=\"nh38\"\u003E38\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EIl vaut la peine de noter que la distance entre 1871 et 1917 est la m\u00eame qui s\u00e9pare 1971 d'aujourd'hui. Le massacre des communards \u00e0 Paris s'\u00e9tait d\u00e9roul\u00e9 du vivant de nombreux membres du parti bolch\u00e9vique, et la direction du parti n'a jamais perdu ce danger de vue. Quand la contre-r\u00e9volution prit le pouvoir en Finlande en 1918, Victor Serge estime qu'au total, plus de 100.000 ouvriers finlandais furent massacr\u00e9s.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EIl faut \u00e9galement souligner qu'il y avait, parmi Kornilov et ses partisans, un \u00e9l\u00e9ment important d'antis\u00e9mitisme pathologique. Le correspondant de guerre britannique John Ernest Hodgson, qui avait pass\u00e9 un peu de temps avec le g\u00e9n\u00e9ral kornilovien Anton Denikine, a fait l'observation suivante:\u003C\/p\u003E\u003Cblockquote\u003EJe n'avais pas \u00e9t\u00e9 avec Denikine plus d'un mois quand j'ai \u00e9t\u00e9 oblig\u00e9 de conclure que le Juif jouait un r\u00f4le majeur dans le soul\u00e8vement russe. Les officiers et les hommes de l'arm\u00e9e mettaient presque tous les probl\u00e8mes de leurs pays sur le compte des h\u00e9bra\u00efques. Ils pensaient que tout ce cataclysme avait \u00e9t\u00e9 maniganc\u00e9 par une soci\u00e9t\u00e9 secr\u00e8te myst\u00e9rieuse de Juifs internationaux qui, aux ordres et \u00e0 la solde de l'Allemagne, avait saisi le moment psychologique et les r\u00eanes du gouvernement. Tous les chiffres et les faits disponibles alors semblaient renforcer cette affirmation. Pas moins de 82 pour cent des commissaires bolch\u00e9viques \u00e9taient des Juifs connus; le f\u00e9roce et implacable \"Trotsky\", qui partageait un bureau avec L\u00e9nine, \u00e9tait un yiddish dont le vrai nom \u00e9tait Bronstein. Parmi les officiers de Denikine, cette id\u00e9e \u00e9tait une obsession empreinte d'une telle amertume qu'ils en venaient \u00e0 faire les d\u00e9clarations les plus violentes et fantastiques. \u003Ca href=\"#nb39\" id=\"nh39\"\u003E39\u003C\/a\u003E\u003C\/blockquote\u003E\u003Cp\u003EPendant la guerre civile, les arm\u00e9es blanches massacr\u00e8rent des Juifs dans toute la Russie europ\u00e9enne et exhort\u00e8rent leurs partisans \u00e0 d\u00e9truire \u00able mal qui r\u00f4de dans les cœurs des Juifs-communistes\u00bb. De nombreux historiens d\u00e9ploreront, de leurs points de vue respectifs, la violence de la guerre civile russe, mais il faut se souvenir ce \u00e0 quoi Trotsky et l'Arm\u00e9e rouge \u00e9taient confront\u00e9s. Sans surprise, de nombreux chefs de l'arm\u00e9e blanche allaient, plus tard dans leurs carri\u00e8res, collaborer avec les nazis \u003Ca href=\"#nb40\" id=\"nh40\"\u003E40\u003C\/a\u003E. Telles \u00e9taient les forces qui se mobilisaient derri\u00e8re le putsch de Kornilov.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EQuand le Prince Georgy Lvov communiqua les exigences de Kornilov \u00e0 K\u00e9rensky, ce dernier pensa que c'\u00e9tait une plaisanterie et \u00e9clata de rire. Le Prince Lvov r\u00e9pliqua d'un ton grave que ce n'\u00e9tait pas dr\u00f4le, et que si K\u00e9rensky tenait \u00e0 la vie, il devait fuir Petrograd aussi vite que possible. Pour diriger la marche sur Petrograd, Kornilov avait choisi le g\u00e9n\u00e9ral Aleksandr Kymov, qui disait qu'il n'h\u00e9siterait pas, au besoin, \u00ab\u00e0 faire pendre tous les membres du Soviet\u00bb \u003Ca href=\"#nb41\" id=\"nh41\"\u003E41\u003C\/a\u003E. Le 28 ao\u00fbt, la bourse de Petrograd monta en fl\u00e8che par anticipation du triomphe \u00e0 venir de Kornilov.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EQuand la nouvelle parvint aux quartiers industriels, les usines commenc\u00e8rent toutes \u00e0 faire sonner leurs sifflets d'alarme. Les ouvriers de Petrograd avaient v\u00e9cu 1905 et ils savaient ce que ferait Kornilov si on lui permettait de p\u00e9n\u00e9trer dans la ville. Les chefs bolch\u00e9viques avaient \u00e9voqu\u00e9 ce danger tout au long de l'ann\u00e9e. Les bolch\u00e9viks avaient expliqu\u00e9 que la classe dirigeante ne faisait qu'attendre son tour, et que t\u00f4t ou tard, elle abandonnerait ses fausses r\u00e9formes et ses fausses coalitions pour tenter d'\u00e9craser la classe ouvri\u00e8re par la force. Les ouvriers entendirent les sonneries d'alarmes et sortirent dans la rue: les chefs bolch\u00e9viques \u00e9taient d\u00e9j\u00e0 \u00e0 leurs postes et donnaient des ordres pour la d\u00e9fense de la ville. En quelques heures, la classe ouvri\u00e8re organis\u00e9e se leva avec force.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EEn mai, quand le dirigeant mench\u00e9vique Irakli Ts\u00e9r\u00e9telli et la direction des soviets pers\u00e9cutaient les marins plus radicaux de Cronstadt, Trotsky avait pris la d\u00e9fense des marins. Trotsky avait lanc\u00e9 un avertissement \u00e0 Ts\u00e9r\u00e9telli: \u00abLorsqu'un g\u00e9n\u00e9ral contre-r\u00e9volutionnaire tentera de passer le nœud coulant au cou de la r\u00e9volution, les cadets savonneront la corde, mais les matelots de Cronstadt surgiront pour lutter et mourir avec nous\u00bb \u003Ca href=\"#nb42\" id=\"nh42\"\u003E42\u003C\/a\u003E. Et Trotsky avait totalement raison - sur la question du g\u00e9n\u00e9ral contre-r\u00e9volutionnaire, sur les Cadets, et sur les marins de Cronstadt. Quand ces derniers apprirent que Kornilov \u00e9tait aux portes de la ville, ils march\u00e8rent sur la capitale, arm\u00e9s jusqu'aux dents et pr\u00eats \u00e0 mourir pour la d\u00e9fendre.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes marins de \u003Ci\u003EL'Aurore\u003C\/i\u003E envoy\u00e8rent une d\u00e9l\u00e9gation sp\u00e9ciale \u00e0 la prison o\u00f9 \u00e9tait enferm\u00e9 Trotsky pour lui demander conseil: fallait-il d\u00e9fendre ou prendre d'assaut le palais d'Hiver? Trotsky leur conseilla de s'occuper d'abord de Kornilov et ensuite de r\u00e9gler ses comptes \u00e0 K\u00e9rensky.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe parti bolch\u00e9vique dirigea les efforts pour d\u00e9fendre la ville. Toute la population de la ville \u00e9tait mobilis\u00e9e, creusait des tranch\u00e9es, installait des barbel\u00e9s, et organisait le ravitaillement aux fortifications. Plus tard, le mench\u00e9vik-internationaliste Nicola\u00ef Soukhanov allait \u00e9crire:\u003C\/p\u003E\u003Cblockquote\u003ELe comit\u00e9 [de lutte contre la contre-r\u00e9volution] qui pr\u00e9parait la d\u00e9fense devait mobiliser les masses d'ouvriers et de soldats. Mais les masses, dans la mesure o\u00f9 elles \u00e9taient organis\u00e9es, l'\u00e9taient par les bolch\u00e9viks, qu'elles suivaient. \u00c0 l'\u00e9poque, c'\u00e9tait la seule organisation suffisamment large, unifi\u00e9e par une discipline \u00e9l\u00e9mentaire, et li\u00e9e aux couches les plus opprim\u00e9es de la capitale. Sans elle, le comit\u00e9 \u00e9tait impuissant. Sans les bolch\u00e9viks, il aurait pu au maximum faire passer le temps avec des appels et des discours oisifs d'orateurs qui avaient perdu leur autorit\u00e9. Avec les bolch\u00e9viks, le comit\u00e9 avait \u00e0 sa disposition toute la force des ouvriers et des soldats organis\u00e9s. \u003Ca href=\"#nb43\" id=\"nh43\"\u003E43\u003C\/a\u003E\u003C\/blockquote\u003E\u003Cp\u003EQuand les partisans de Kornilov tentaient d'envoyer des t\u00e9l\u00e9grammes, les ouvriers refusaient de les envoyer. Quand ils prenaient leurs voitures pour aller aux bureaux du gouvernement, les chauffeurs refusaient de les transporter. Quand ils voulaient faire imprimer des tracts, les typographes refusaient de toucher aux machines. Quand les officiers ordonnaient aux soldats de se rallier \u00e0 Kornilov, les soldats d\u00e9tenaient leurs officiers. Les ouvriers dans les usines li\u00e9es \u00e0 l'industrie de guerre produisaient des armes pour eux-m\u00eames qu'ils apportaient ensuite sur le champ de bataille.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EApr\u00e8s les Journ\u00e9es de Juillet, le gouvernement provisoire avait tent\u00e9 de d\u00e9sarmer la Garde rouge, mais n'avait r\u00e9ussi qu'\u00e0 la pousser dans la clandestinit\u00e9. Les ouvriers avaient permis aux autorit\u00e9s de confisquer les armes trop vieilles, mais avaient cach\u00e9 les armes plus efficaces quand c'\u00e9tait possible. C'est \u00e0 cette \u00e9poque que les bolch\u00e9viks transform\u00e8rent la Garde rouge d'une milice arm\u00e9e des quartiers industriels en noyau de l'arm\u00e9e bolch\u00e9vique. Les compagnies de la Garde rouge, comme les comit\u00e9s d'usine, n'\u00e9taient formellement associ\u00e9es \u00e0 aucun parti. Mais les ouvriers bolch\u00e9viques formaient le noyau de chaque compagnie ainsi que sa direction. Le parti bolch\u00e9vique fournissait aux unit\u00e9s de la Garde rouge des instructeurs militaires et, quand c'\u00e9tait possible, des armes. On organisait les exercices militaires d'abord dans les appartements des ouvriers, puis ouvertement dans les cours des usines.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EAlors que Kornilov marchait sur Petrograd, les compagnies de la Garde rouge sortirent dans les rues, arm\u00e9es de carabines et de mitrailleuses. Par dizaines de milliers, les Gardes rouges prirent rapidement contr\u00f4le des emplacements strat\u00e9giques \u00e0 Petrograd. Dans les quartiers industriels, la Garde rouge \u00e9tablissait des postes de recrutement, devant lesquels se formaient de longues queues de volontaires.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes cheminots envoyaient des messages le long des rails que personne ne devait transporter de soldats. Ils remplirent des wagons de bois de charpente qu'ils pos\u00e8rent en obstacles sur les rails, dont ils d\u00e9chiraient souvent des kilom\u00e8tres. Ils mettaient parfois les troupes de Kornilov \u00e0 bord de trains qu'ils transportaient ensuite des centaines de kilom\u00e8tres dans le mauvais sens. Les forces de Krymov se retrouv\u00e8rent bient\u00f4t coinc\u00e9es et isol\u00e9es sur des centaines de kilom\u00e8tres de rails.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDes orateurs r\u00e9volutionnaires de Petrograd se rendirent \u00e0 ces trains immobilis\u00e9s pour s'adresser aux troupes. On peut imaginer la consternation de Krymov quand ses soldats commenc\u00e8rent \u00e0 organiser des assembl\u00e9es de masse, \u00e9lire des comit\u00e9s, arr\u00eater leurs officiers, et adopter des r\u00e9solutions. Des drapeaux rouges apparaissaient au-dessus des divisions de Kornilov, une par une. M\u00eame la \u00abDivision sauvage\u00bb, apr\u00e8s avoir rencontr\u00e9 des d\u00e9l\u00e9gu\u00e9s musulmans du Congr\u00e8s des soviets, hissa le drapeau rouge. En quelques jours, le coup de Kornilov s'\u00e9tait \u00e9vapor\u00e9.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003EConclusion\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EPlus tard, Trotsky \u00e9crirait: \u00abL'arm\u00e9e qui s'\u00e9tait lev\u00e9e contre Kornilov \u00e9tait la future arm\u00e9e d'Octobre\u00bb. \u003Ca href=\"#nb44\" id=\"nh44\"\u003E44\u003C\/a\u003E En arr\u00eatant l'offensive de Kornilov, la classe ouvri\u00e8re s'affirmait pour la premi\u00e8re fois sous la direction d'un parti marxiste r\u00e9volutionnaire. S'\u00e9tant mesur\u00e9s avec les forces de la contre-r\u00e9volution, les travailleurs de Petrograd regard\u00e8rent autour d'eux et dress\u00e8rent un bilan de la situation. Dirig\u00e9s par les bolch\u00e9viks, ils \u00e9taient plus forts que Kornilov, plus forts que K\u00e9rensky et ses partisans parmi les socialistes-r\u00e9volutionnaires et les mench\u00e9viks. Aucune force sociale ne pouvait les arr\u00eater. Ils \u00e9taient transport\u00e9s. Les ouvriers et les soldats se voyaient en h\u00e9ros qui avaient sauv\u00e9 le pays d'un terrible d\u00e9sastre. Trotsky cite un soldat d'une division de voitures blind\u00e9es qui disait: \u00absi telle \u00e9tait la vaillance, l'on pourrait se battre avec le monde entier\u00bb. \u003Ca href=\"#nb45\" id=\"nh45\"\u003E45\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes bolch\u00e9viks avaient eu raison d'avertir les travailleurs qu'il ne pouvait y avoir de \u00abcoalition\u00bb avec la bourgeoisie. La classe dirigeante \u00e9tait d\u00e9termin\u00e9e \u00e0 replonger la classe ouvri\u00e8re \u00e0 la premi\u00e8re occasion dans l'esclavage. Tous les partis qui pr\u00f4naient la conciliation avec la bourgeoisie se voyaient discr\u00e9dit\u00e9s, y compris les mench\u00e9viks et les socialistes-r\u00e9volutionnaires. Comme le soutenaient les bolch\u00e9viks, le choix \u00e9tait entre une dictature contre-r\u00e9volutionnaire et le pouvoir ouvrier. Les ouvriers comprirent que le seul choix \u00e9tait de prendre le pouvoir eux-m\u00eames.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe parti socialiste-r\u00e9volutionnaire, populaire parmi les paysans et les soldats du rang, s'est effondr\u00e9. Une section de la direction des socialistes-r\u00e9volutionnaires \u00e9tait profond\u00e9ment impliqu\u00e9e dans le putsch de Kornilov, et le soutien pour ce parti faiblissait d\u00e9j\u00e0 parce qu'il n'avait obtenu aucune r\u00e9forme agraire importante. \u00abLes masses, ayant perdu confiance dans les partis d\u00e9tenant la majorit\u00e9 dans les soviets ont vu de leurs propres yeux le danger de contre-r\u00e9volution\u00bb, \u00e9crit Trotsky dans \u003Ci\u003ELes le\u00e7ons d'octobre\u003C\/i\u003E. \u00abElles ont conclu que c'\u00e9tait \u00e0 pr\u00e9sent aux bolch\u00e9viks de trouver une issue \u00e0 cette situation.\u00bb \u003Ca href=\"#nb46\" id=\"nh46\"\u003E46\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EApr\u00e8s la d\u00e9faite du coup de force de Kornilov, les bolch\u00e9viks remport\u00e8rent la majorit\u00e9 dans les soviets de Moscou, Petrograd et d'un nombre croissant de r\u00e9gions. \u00c0 un congr\u00e8s syndical dans l'Oural qui repr\u00e9sentait 150.000 travailleurs, les r\u00e9solutions bolch\u00e9viques l'emport\u00e8rent. Selon un soldat de la garnison de Moscou, \u00abtous les effectifs avaient d\u00e9j\u00e0 pris la couleur du bolch\u00e9visme... Tous \u00e9taient frapp\u00e9s de voir comment s'\u00e9taient r\u00e9alis\u00e9es les pr\u00e9visions (des bolch\u00e9viks)... annon\u00e7ant que le g\u00e9n\u00e9ral Kornilov serait bient\u00f4t sous les murs de Petrograd\u00bb. \u003Ca href=\"#nb47\" id=\"nh47\"\u003E47\u003C\/a\u003E Une conf\u00e9rence panrusse des comit\u00e9s d'usine adopta une r\u00e9solution qui d\u00e9clarait que le contr\u00f4le ouvrier est \u00abdans l'int\u00e9r\u00eat de tout le pays et m\u00e9rite le soutien de l'arm\u00e9e et de la paysannerie r\u00e9volutionnaires\u00bb. Trotsky ajoute: \u00abCette r\u00e9solution, qui ouvre la voie \u00e0 un nouvel ordre \u00e9conomique, \u00e9tait adopt\u00e9e par les repr\u00e9sentants de toutes les entreprises industrielles de Russie, avec seulement cinq votes contre et neuf abstentions\u00bb. \u003Ca href=\"#nb48\" id=\"nh48\"\u003E48\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EL'\u00e9mergence d'une majorit\u00e9 bolch\u00e9vique dans les soviets marquait un tournant dans la r\u00e9volution russe. Avant l'affaire Kornilov, les bolch\u00e9viks avaient \u00e9t\u00e9 une minorit\u00e9 au sein des soviets \u00e9tablis apr\u00e8s f\u00e9vrier. Le 8 octobre (25 septembre a.s.), une nouvelle majorit\u00e9 dans le soviet de Petrograd \u00e9lisait L\u00e9on Trotsky, l'ancien porte-parole de ce soviet pendant la r\u00e9volution de 1905, au poste peut-\u00eatre le plus important de la Russie r\u00e9volutionnaire: celui de pr\u00e9sident du soviet de Petrograd. Lors de son \u00e9lection, Trotsky, \u00e0 peine sorti de prison, \u00e9tait toujours inculp\u00e9 de haute trahison par le gouvernement K\u00e9rensky. Quand il monta sur la plateforme, les d\u00e9l\u00e9gu\u00e9s des ouvriers et des soldats l'accueillirent avec \u00abun tonnerre d'applaudissements\u00bb, selon un observateur. \u003Ca href=\"#nb49\" id=\"nh49\"\u003E49\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u00abLe bolch\u00e9visme conqu\u00e9rait le pays\u00bb, allait \u00e9crire Trotsky. \u00abLes bolch\u00e9viks devenaient une force irr\u00e9sistible. Derri\u00e8re eux marchait le peuple.\u00bb \u003Ca href=\"#nb50\" id=\"nh50\"\u003E50\u003C\/a\u003E Ce passage soudain d'une position de minorit\u00e9 \u00e0 une position de majorit\u00e9 provoqua une vive controverse au sein de la direction bolch\u00e9vique sur la strat\u00e9gie \u00e0 suivre. Cette controverse sera le sujet de la prochaine conf\u00e9rence.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cspan class=\"philum ic-img2\"\u003E\u003C\/span\u003E Leon Trotsky\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDans un article publi\u00e9 cette ann\u00e9e sous le titre \u00abLa r\u00e9volution de f\u00e9vrier et l'occasion manqu\u00e9e de K\u00e9rensky\u00bb, le \u003Ci\u003ENew York Times\u003C\/i\u003E, comme par hasard, omet totalement le nom \u00abKornilov\u00bb \u003Ca href=\"#nb51\" id=\"nh51\"\u003E51\u003C\/a\u003E. Le journal d\u00e9plore la formation du pouvoir sovi\u00e9tique apr\u00e8s octobre tout en faisant le silence sur l'autre option. Mais le \u003Ci\u003ENew York Times\u003C\/i\u003E la conna\u00eet bien car, en 1917, le \u003Ci\u003ENew York Times\u003C\/i\u003E endossa Kornilov, en \u00e9crivant qu'il \u00e9tait \u00abseulement le repr\u00e9sentant des forces qui, rest\u00e9es trop longtemps silencieuses, se sont finalement rassembl\u00e9es pour arr\u00eater le d\u00e9p\u00e9rissement rapide de la Russie, pour la sauvegarder en tant que nation, pour arr\u00eater sa dissolution, en un mot, pour la sauver.\u00bb \u003Ca href=\"#nb52\" id=\"nh52\"\u003E52\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EMcMeekin s'exprime plus cr\u00fbment sur l'affaire Kornilov: \u00abDans une d\u00e9marche \u00e0 courte vue, K\u00e9rensky permit \u00e0 l'organisation militaire bolch\u00e9vique de se r\u00e9armer et ainsi d'acqu\u00e9rir les armes dont elle se servirait pour le renverser deux mois plus tard\u00bb \u003Ca href=\"#nb53\" id=\"nh53\"\u003E53\u003C\/a\u003E. Le sens de cette remarque est clair. Ne pas \u00abpermettre\u00bb aux bolch\u00e9viks de s'armer signifie \u00abpermettre\u00bb \u00e0 Kornilov d'entrer dans Petrograd.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cspan class=\"philum ic-img2\"\u003E\u003C\/span\u003E The \u003Ci\u003ENew York Times\u003C\/i\u003E endorses Kornilov, September 12, 1917\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ESi les bolch\u00e9viks n'avaient pas emp\u00each\u00e9 le coup de force de Kornilov, naturellement, nous ne discuterions pas aujourd'hui de la r\u00e9volution d'octobre. Sans r\u00e9volution d'octobre, le monde serait \u00e9videmment tr\u00e8s diff\u00e9rent. L'ann\u00e9e 1917 ne marquerait pas la fondation du premier \u00c9tat ouvrier socialiste, mais la fondation de la premi\u00e8re dictature g\u00e9nocidaire du 20e si\u00e8cle - non pas en Espagne, en Italie ou en Allemagne, mais en Russie en 1917.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EUne victoire du coup de force de Kornilov aurait port\u00e9 au pouvoir une cabale de g\u00e9n\u00e9raux d\u00e9ments, d'antis\u00e9mites pathologiques et de fanatiques religieux qui c\u00e9l\u00e9braient ouvertement le bain de sang qu'ils pr\u00e9paraient \u00e0 Petrograd. Apr\u00e8s avoir fusill\u00e9 tous les socialistes de la ville, ils auraient pourchass\u00e9 et tent\u00e9 d'exterminer les socialistes dans toute l'Europe de l'Est et l'Asie. Et ils auraient b\u00e9n\u00e9fici\u00e9 de l'appui enthousiaste des capitalistes, g\u00e9n\u00e9raux et aristocrates russes pour ce projet, ainsi que du soutien de la France, de la Grande-Bretagne et des \u00c9tats-Unis.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EQuand des publications comme le \u003Ci\u003ENew York Times\u003C\/i\u003E d\u00e9noncent les bolch\u00e9viks, ce qu'elles disent en fait c'est qu'elles auraient pr\u00e9f\u00e9r\u00e9 Kornilov. Le \u003Ci\u003ENew York Times\u003C\/i\u003E \u00e9tait indign\u00e9 de la d\u00e9faite de Kornilov en 1917; un si\u00e8cle plus tard, le journal l'est toujours. Heureusement pour la classe ouvri\u00e8re de Petrograd, et pour la civilisation humaine sur terre, Kornilov fut vaincu en 1917 et il n'a pas pu mettre son programme \u00e0 ex\u00e9cution.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EAu milieu du 19e si\u00e8cle, sous l'ancien r\u00e9gime esclavagiste du sud des \u00c9tats-Unis, il \u00e9tait ill\u00e9gal d'apprendre \u00e0 lire \u00e0 un esclave. Les ma\u00eetres craignaient ce qui se passerait si la conscience politique des esclaves se d\u00e9veloppait. De m\u00eame, en 2017, d'\u00e9normes efforts sont d\u00e9ploy\u00e9s pour couper les travailleurs et les jeunes de l'histoire et des traditions de la r\u00e9volution russe. Les classes dirigeantes sont terrifi\u00e9es par ce qui se passerait si les masses opprim\u00e9es d\u00e9couvraient ce que des travailleurs politiquement conscients, organis\u00e9s et guid\u00e9s th\u00e9oriquement par un parti marxiste r\u00e9volutionnaire, peuvent accomplir. C'est ce qui explique la nouvelle vague de falsifications et de calomnies dirig\u00e9es contre les bolch\u00e9viks en 2017.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe parti bolch\u00e9vique a dirig\u00e9 un mouvement de masse politiquement conscient. L'impact de ce mouvement, dans l'espace et dans le temps, est sans parall\u00e8le. C'est le mouvement le plus puissant et le plus progressiste que l'histoire mondiale ait connu jusqu'\u00e0 pr\u00e9sent. La classe ouvri\u00e8re internationale, face aux d\u00e9fis du 21e si\u00e8cle, peut et doit aller plus loin.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe programme bolch\u00e9vique ne repr\u00e9sentait rien de moins que la r\u00e9organisation de la civilisation humaine de toute la plan\u00e8te sur une base rationnelle et plus avanc\u00e9e, mettant fin \u00e0 la guerre imp\u00e9rialiste et \u00e0 l'exploitation de l'homme par l'homme. Son but \u00e9tait de renverser tous les gouvernements, d'ouvrir toutes les fronti\u00e8res, et d'arr\u00eater toutes les guerres. Et ce programme a obtenu un vaste soutien, non seulement en Russie, mais partout dans le monde, parce qu'il correspondait aux int\u00e9r\u00eats objectifs et aux luttes de la force sociale la plus puissante et la plus progressiste de l'histoire mondiale: la classe ouvri\u00e8re internationale.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003ENotes\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh1\" id=\"nb1\"\u003E1\u003C\/a\u003E Traduit de l'anglais, Sean McMeekin, \u003Ci\u003EThe Russian Revolution: A New History\u003C\/i\u003E (New York: Basic Books, 2017), p. xv.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh2\" id=\"nb2\"\u003E2\u003C\/a\u003E Ibid., p. 12.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh3\" id=\"nb3\"\u003E3\u003C\/a\u003E Ibid., p. xii\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh4\" id=\"nb4\"\u003E4\u003C\/a\u003E Traduit de l'anglais, Rex A. Wade, \u003Ci\u003EThe Russian Revolution 1917\u003C\/i\u003E (Cambridge: Cambridge University Press, 2017), p. 97.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh5\" id=\"nb5\"\u003E5\u003C\/a\u003E Traduit de l'anglais, S.A. Smith, \u003Ci\u003ERed Petrograd\u003C\/i\u003E (Cambridge: Cambridge University Press, 1983), pp. 9-10.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh6\" id=\"nb6\"\u003E6\u003C\/a\u003E L\u00e9on Trotsky, \u003Ci\u003EHistoire de la r\u00e9volution russe\u003C\/i\u003E, \u003Ci\u003E1. La R\u00e9volution de f\u00e9vrier\u003C\/i\u003E (\u00c9ditions du Seuil, 1950), p.72\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh7\" id=\"nb7\"\u003E7\u003C\/a\u003E Smith, \u003Ci\u003ERed Petrograd\u003C\/i\u003E, p. 29.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh8\" id=\"nb8\"\u003E8\u003C\/a\u003E Ibid., p. 14.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh9\" id=\"nb9\"\u003E9\u003C\/a\u003E Ibid., p. 38.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh10\" id=\"nb10\"\u003E10\u003C\/a\u003E L\u00e9nine, \u003Ci\u003EQue faire?\u003C\/i\u003E (Paris: \u00c9ditions Sociales, 1979), p. 73.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh11\" id=\"nb11\"\u003E11\u003C\/a\u003E Trotsky, \u003Ci\u003EHistoire de la r\u00e9volution russe\u003C\/i\u003E, \u003Ci\u003Etome 1\u003C\/i\u003E, pp. 71-72.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh12\" id=\"nb12\"\u003E12\u003C\/a\u003E Smith, \u003Ci\u003ERed Petrograd\u003C\/i\u003E, p. 49.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh13\" id=\"nb13\"\u003E13\u003C\/a\u003E Trotsky, \u003Ci\u003EHistoire de la r\u00e9volution russe\u003C\/i\u003E, \u003Ci\u003Etome 1\u003C\/i\u003E, p. 74.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh14\" id=\"nb14\"\u003E14\u003C\/a\u003E Cit\u00e9 dans Smith, \u003Ci\u003ERed Petrograd\u003C\/i\u003E, p. 29.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh15\" id=\"nb15\"\u003E15\u003C\/a\u003E Wade, \u003Ci\u003EThe Russian Revolution 1917\u003C\/i\u003E, pp. 117-118.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh16\" id=\"nb16\"\u003E16\u003C\/a\u003E Trotsky, \u003Ci\u003EHistoire de la r\u00e9volution russe\u003C\/i\u003E, \u003Ci\u003Etome 1\u003C\/i\u003E, p. 74.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh17\" id=\"nb17\"\u003E17\u003C\/a\u003E Smith, \u003Ci\u003ERed Petrograd\u003C\/i\u003E, p. 52.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh18\" id=\"nb18\"\u003E18\u003C\/a\u003E Trotsky, \u003Ci\u003EHistoire de la r\u00e9volution russe\u003C\/i\u003E, \u003Ci\u003Etome 1\u003C\/i\u003E, p. 196.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh19\" id=\"nb19\"\u003E19\u003C\/a\u003E Smith, Red Petrograd, p. 57.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh20\" id=\"nb20\"\u003E20\u003C\/a\u003E L\u00e9on Trotsky, \u003Ci\u003ETrois conceptions de la r\u00e9volution\u003C\/i\u003E (en ligne : \u003Ca href=\"https:\/\/www.marxists.org\/francais\/trotsky\/oeuvres\/1939\/08\/390800.htm\"\u003Emarxists.org\u003C\/a\u003E)\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh21\" id=\"nb21\"\u003E21\u003C\/a\u003E Traduit de l'anglais, V.I. Lenin, \"Speech at Conference of Shop Committees,\" \u003Ci\u003ECollected Works\u003C\/i\u003E, Vol. 24 (Moscow: Progress Publishers, 1964), p. 557.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh22\" id=\"nb22\"\u003E22\u003C\/a\u003E Smith, \u003Ci\u003ERed Petrograd\u003C\/i\u003E, p. 80.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh23\" id=\"nb23\"\u003E23\u003C\/a\u003E Ibid., pp. 100-101.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh24\" id=\"nb24\"\u003E24\u003C\/a\u003E Ibid., p. 96.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh25\" id=\"nb25\"\u003E25\u003C\/a\u003E Ibid.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh26\" id=\"nb26\"\u003E26\u003C\/a\u003E Ibid.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh27\" id=\"nb27\"\u003E27\u003C\/a\u003E Ibid.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh28\" id=\"nb28\"\u003E28\u003C\/a\u003E Ibid., p. 97.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh29\" id=\"nb29\"\u003E29\u003C\/a\u003E Trotsky, \u003Ci\u003EHistoire de la r\u00e9volution russe\u003C\/i\u003E, \u003Ci\u003Etome 1\u003C\/i\u003E, pp. 470-471.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh30\" id=\"nb30\"\u003E30\u003C\/a\u003E Smith, \u003Ci\u003ERed Petrograd\u003C\/i\u003E, p. 95.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh31\" id=\"nb31\"\u003E31\u003C\/a\u003E Ibid., p. 34.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh32\" id=\"nb32\"\u003E32\u003C\/a\u003E Ibid., p. 81.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh33\" id=\"nb33\"\u003E33\u003C\/a\u003E L\u00e9on Trotsky, \u003Ci\u003EAu sujet du contr\u00f4le ouvrier de la production\u003C\/i\u003E (en ligne : \u003Ca href=\"https:\/\/www.marxists.org\/francais\/trotsky\/oeuvres\/1931\/08\/lt19310820c.htm\"\u003Emarxists.org\u003C\/a\u003E)\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh34\" id=\"nb34\"\u003E34\u003C\/a\u003E Traduit de l'anglais, Alexander Rabinowitch, \u003Ci\u003EThe Bolsheviks Come to Power\u003C\/i\u003E, (Chicago: Haymarket Books, 2004), p. 97.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh35\" id=\"nb35\"\u003E35\u003C\/a\u003E Ibid., p. 109.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh36\" id=\"nb36\"\u003E36\u003C\/a\u003E Trotsky, \u003Ci\u003EHistoire de la r\u00e9volution russe\u003C\/i\u003E, \u003Ci\u003Etome 2\u003C\/i\u003E, p. 221.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh37\" id=\"nb37\"\u003E37\u003C\/a\u003E А. Литвин, Красный и белый террор 1918-1922, Эксмо, 2004, p. 174. (Cit\u00e9 sur Wikipedia: \u003Cspan id=\"bt7029120\"\u003E\u003Ca onclick=\"togglebub('wiki,call__7029120_https:\/\/en.wikipedia.org\/wiki\/White*Terror*(Russia)_1');\"\u003E\u003Cspan class=\"philum ic-wiki2\"\u003E\u003C\/span\u003E\u003C\/a\u003E\u003C\/span\u003E \u003Ca href=\"https:\/\/en.wikipedia.org\/wiki\/White_Terror_(Russia)\"\u003Een.wikipedia.org\u003C\/a\u003E)\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh38\" id=\"nb38\"\u003E38\u003C\/a\u003E Traduit de l'anglais, Fred Williams, \"The Legacy of 1905 and the Strategy of the Russian Revolution,\" \u003Ci\u003EWhy Study the Russian Revolution?\u003C\/i\u003E Vol. 1 (Oak Park, MI: Mehring Books, 2017), p. 60.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh39\" id=\"nb39\"\u003E39\u003C\/a\u003E Traduit de l'anglais, John Ernest Hodgson, \"With Denikin's Armies: Being a Description of the Cossak Counter-Revolution in South Russia, 1918-1920,\" (London: Temple Bar Publishing Co., 1932), pp. 54-56. (Cit\u00e9 sur Wikipedia: \u003Cspan id=\"bt7030310\"\u003E\u003Ca onclick=\"togglebub('wiki,call__7030310_https:\/\/en.wikipedia.org\/wiki\/Anton*Denikin_1');\"\u003E\u003Cspan class=\"philum ic-wiki2\"\u003E\u003C\/span\u003E\u003C\/a\u003E\u003C\/span\u003E \u003Ca href=\"https:\/\/en.wikipedia.org\/wiki\/Anton_Denikin\"\u003Een.wikipedia.org\u003C\/a\u003E)\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh40\" id=\"nb40\"\u003E40\u003C\/a\u003E Nikola\u00ef Markov, par exemple, \u00e9tait un personnage associ\u00e9 aux Cent-Noirs et \u00e0 l'Union du peuple russe, deux organisations d'extr\u00eame droite. Il \u00e9tait proche du g\u00e9n\u00e9ral Nikolai Yudenich, qui soutint la r\u00e9volte de Kornilov et fut plus tard un chef de l'arm\u00e9e blanche. En 1928, il devint un partisan du parti nazi et fit des tourn\u00e9es de propagande pour les nazis pendant les ann\u00e9es 1930. Pendant la Deuxi\u00e8me Guerre mondiale, les nazis mirent sur pied en Serbie occup\u00e9e le Corps russe de protection (Russkii Korpus), compos\u00e9 de 11.000 \u00e9migr\u00e9s blancs. L'unit\u00e9 \u00e9tait command\u00e9e par Boris Shteifon, un g\u00e9n\u00e9ral tsariste qui servit dans l'arm\u00e9e blanche et collabora ensuite avec les nazis. Anastasy Vonsyatsky \u00e9tait un officier blanc qui fut \u00e9vacu\u00e9 de la Crim\u00e9e avec d'autres participants \u00e0 l'insurrection blanche du g\u00e9n\u00e9ral Pyotr Wrangel. Apr\u00e8s avoir \u00e9migr\u00e9 aux \u00c9tats-Unis, il devint chef du Parti fasciste russe.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh41\" id=\"nb41\"\u003E41\u003C\/a\u003E Rabinowitch, \u003Ci\u003EThe Bolsheviks Come to Power\u003C\/i\u003E, p. 109\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh42\" id=\"nb42\"\u003E42\u003C\/a\u003E Trotsky, \u003Ci\u003EHistoire de la r\u00e9volution russe\u003C\/i\u003E, \u003Ci\u003Etome 2\u003C\/i\u003E, p. 344.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh43\" id=\"nb43\"\u003E43\u003C\/a\u003E Cit\u00e9 dans Rabinowitch, \u003Ci\u003EThe Bolsheviks Come to Power\u003C\/i\u003E, p. 132.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh44\" id=\"nb44\"\u003E44\u003C\/a\u003E L\u00e9on Trotsky, \u003Ci\u003EMa vie\u003C\/i\u003E (\u00c9ditions Gallimard, 1953), p. 379.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh45\" id=\"nb45\"\u003E45\u003C\/a\u003E Trotsky, \u003Ci\u003EHistoire de la r\u00e9volution russe\u003C\/i\u003E, \u003Ci\u003Etome 2\u003C\/i\u003E, p. 297.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh46\" id=\"nb46\"\u003E46\u003C\/a\u003E Traduit de l'anglais, Leon Trotsky, \u003Ci\u003ELessons of October\u003C\/i\u003E (Oak Park, MI: Mehring Books, 2016) version ePub, Chapitre 6. (ISBN 978-1-893638-63-1).\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh47\" id=\"nb47\"\u003E47\u003C\/a\u003E Trotsky, \u003Ci\u003EHistoire de la r\u00e9volution russe\u003C\/i\u003E, \u003Ci\u003Etome 2\u003C\/i\u003E, p. 297.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh48\" id=\"nb48\"\u003E48\u003C\/a\u003E Ibid., p. 673.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh49\" id=\"nb49\"\u003E49\u003C\/a\u003E Traduit de l'anglais, Isaac Deutscher, \u003Ci\u003EThe Prophet Armed: Trotsky, 1879-1921\u003C\/i\u003E (New York: Verso Books, 2003), p. 237.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh50\" id=\"nb50\"\u003E50\u003C\/a\u003E Trotsky, \u003Ci\u003EHistoire de la r\u00e9volution russe\u003C\/i\u003E, \u003Ci\u003Etome 2\u003C\/i\u003E, p. 449.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh51\" id=\"nb51\"\u003E51\u003C\/a\u003E Traduit de l'anglais, John Quiggin, \"The February Revolution and Kerensky's Missed Opportunity,\" (\u003Ci\u003ENew York Times\u003C\/i\u003E, 6 mars, 2017).\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh52\" id=\"nb52\"\u003E52\u003C\/a\u003E Traduit de l'anglais, \"Why Korniloff Rebelled\" (\u003Ci\u003ENew York Times\u003C\/i\u003E, 12 septembre 1917).\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"#nh53\" id=\"nb53\"\u003E53\u003C\/a\u003E Traduit de l'anglais, Sean McMeekin, \"Was Lenin a German Agent?\" (\u003Ci\u003ENew York Times\u003C\/i\u003E, 19 juin 2017).\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"http:\/\/www.wsws.org\/fr\/articles\/2020\/02\/15\/comi-f15.html\"\u003Ewsws.org\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E","_links":{"parent_art":[{"title":"Des Journ\u00e9es de juillet au coup d'\u00c9tat de Kornilov : L'\u00c9tat et la R\u00e9volution de L\u00e9nine","url":"http:\/\/newsnet.fr\/apicom\/id:168996,json:1"}],"related_art":[{"title":"Des Journ\u00e9es de juillet au coup d'\u00c9tat de Kornilov : L'\u00c9tat et la R\u00e9volution de L\u00e9nine","url":"http:\/\/newsnet.fr\/apicom\/id:168996,json:1"}]}}}