31/12/2025 reseauinternational.net  7min #300419

Bilan stratégique de fin 2025 et projections pour 2026

par Dr. Eloi Bandia Keita

À l'heure où s'achève l'année 2025 et où s'ouvre l'horizon de 2026, le monde se trouve à un moment charnière de son histoire contemporaine. Les dynamiques politiques, économiques, sociales, scientifiques et technologiques observées au cours de l'année écoulée confirment l'entrée de l'humanité dans une phase de recomposition profonde, marquée par l'incertitude, la complexité et le retour du rapport de force.

Ce bilan de fin d'année 2025 se veut un exercice de lucidité intellectuelle. Il vise à identifier les tendances lourdes de l'ordre mondial et à en tirer des projections stratégiques pour l'année 2026, en particulier pour l'Afrique et pour l'Alliance des États du Sahel.

Le multilatéralisme international poursuit son érosion, tandis que la loi du plus fort tend à supplanter le droit. Les crises géopolitiques, économiques et sociales s'imbriquent désormais dans une dynamique systémique.

Pour l'Afrique, l'enjeu est clair : dépasser la fragmentation, investir massivement dans le savoir, et construire des architectures politiques et économiques intégrées.

L'Alliance des États du Sahel représente une réponse stratégique majeure. L'année 2026 doit être celle de sa consolidation institutionnelle et de sa projection fédérale.

Le fédéralisme apparaît comme une nécessité historique, condition de la souveraineté, de la stabilité et du développement durable dans un monde multipolaire instable.

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2026 : L'heure de la lucidité mondiale

Analyse globale du monde contemporain et impératifs stratégiques pour l'Afrique et l'Alliance des États du Sahel

Introduction - Un monde entré dans l'ère de la discontinuité

L'année 2026 s'ouvre dans un contexte mondial caractérisé par une rupture profonde avec les équilibres hérités de la fin du XXe siècle. Les certitudes géopolitiques vacillent, les modèles économiques s'essoufflent, les sociétés se fragmentent, tandis que la science et la technologie progressent à un rythme que les structures politiques et éthiques peinent à suivre.

Nous ne sommes plus dans une simple phase de transition, mais dans une ère de discontinuité : discontinuité des normes internationales, des alliances, des chaînes de valeur, des récits dominants et même des repères cognitifs. Comprendre le monde en 2026 exige donc une analyse transversale, systémique et lucide, dépassant les lectures idéologiques ou conjoncturelles.

I. Situation politique et géopolitique mondiale : fragmentation et retour du rapport de force 1. L'affaiblissement du multilatéralisme

Les institutions internationales issues de l'après-Seconde Guerre mondiale montrent des signes évidents d'essoufflement. Le multilatéralisme normatif cède progressivement la place à un multilatéralisme sélectif, où les règles ne s'appliquent qu'aux plus faibles, tandis que les puissances dominantes s'en affranchissent lorsqu'elles entravent leurs intérêts stratégiques.

Cette asymétrie mine la légitimité de l'ordre international et alimente une défiance croissante des États du Sud global.

2. Un monde multipolaire instable

La multipolarité en gestation n'est ni équilibrée ni coopérative. Elle est concurrentielle, parfois conflictuelle, marquée par :

  • des guerres hybrides,
  • des sanctions économiques instrumentalisées,
  • la militarisation de l'information,
  • et la politisation des chaînes d'approvisionnement.

Le droit international est de plus en plus subordonné à la puissance.

II. Économie mondiale : fin de l'illusion néolibérale et retour de l'économie stratégique 1. Crises systémiques et vulnérabilité globale

Inflation persistante, endettement massif des États, fragilité des monnaies, tensions énergétiques et alimentaires : l'économie mondiale en 2026 est marquée par une instabilité structurelle.

Le mythe d'un marché autorégulateur est définitivement dissipé. Les États reviennent au centre de l'économie, non par idéologie, mais par nécessité.

2. Reconfiguration des chaînes de valeur

Les notions de souveraineté économique, souveraineté industrielle et sécurité des approvisionnements sont devenues centrales. Les pays incapables de produire, transformer ou stocker leurs ressources stratégiques se retrouvent exposés à une dépendance critique.

III. Situation sociale : fractures, identités et quête de sens

Partout sur la planète, les sociétés sont traversées par des tensions profondes :

  • creusement des inégalités,
  • crise de confiance envers les élites,
  • montée des radicalités,
  • fatigue démocratique.

La question sociale n'est plus seulement économique ; elle est existentielle. Les populations réclament du sens, de la dignité et de la reconnaissance, au-delà des indicateurs macroéconomiques.

IV. Science, technologie et savoir : progrès rapide, gouvernance lente 1. Accélération technologique

L'intelligence artificielle, la biotechnologie, la robotique, la science des données et les technologies quantiques redessinent profondément les rapports de production, de connaissance et de pouvoir.

Cependant, cette accélération n'est pas accompagnée d'une gouvernance mondiale adéquate. Le risque n'est pas technologique en soi, mais politique, éthique et éducatif.

2. La bataille du savoir

En 2026, la véritable ligne de fracture mondiale oppose :

  • les sociétés qui investissent dans l'éducation, la recherche et la pensée critique,
  • à celles qui consomment la technologie sans la comprendre ni la maîtriser.

Le savoir devient le premier facteur de souveraineté.

V. L'Afrique face à l'histoire : entre risque de marginalisation et opportunité stratégique 1. Un continent au carrefour

L'Afrique concentre à la fois :

  • la plus forte croissance démographique mondiale,
  • des ressources naturelles stratégiques,
  • et un déficit structurel de transformation locale.

Sans stratégie claire, le continent risque de rester un espace de prédation plutôt qu'un acteur de la reconfiguration mondiale.

2. Le piège de la fragmentation

La division politique, monétaire, sécuritaire et institutionnelle affaiblit structurellement les États africains face aux blocs constitués.

Aucun pays africain isolé ne peut peser durablement dans le monde de 2026.

VI. L'Alliance des États du Sahel (AES) : une nécessité historique

L'émergence de l'Alliance des États du Sahel constitue l'un des événements géopolitiques les plus significatifs de l'Afrique contemporaine. Elle n'est pas une posture, mais une réponse rationnelle à un environnement hostile.

Pourquoi le fédéralisme est incontournable

Le fédéralisme n'est pas une idéologie ; c'est une architecture fonctionnelle permettant :

  • la mutualisation de la sécurité,
  • la cohérence diplomatique,
  • l'intégration économique,
  • la masse critique scientifique et industrielle.

VII. Stratégies et plans d'action concrets pour l'AES 1. Axe politique et institutionnel
  • Mise en place d'institutions fédérales progressives
  • Parlement fédéral consultatif évolutif
  • Harmonisation juridique minimale

2. Axe sécuritaire
  • Commandement militaire fédéral
  • Doctrine de défense commune
  • Industrie de défense régionale

3. Axe économique
  • Marché intérieur intégré
  • Banque fédérale d'investissement
  • Politique industrielle commune

4. Axe scientifique et académique
  • Universités fédérales d'excellence
  • Fonds commun de recherche
  • Souveraineté numérique et données

5. Axe social et culturel
  • Programmes éducatifs communs
  • Mobilité intra-AES
  • Politique linguistique et culturelle intégrée

Conclusion - 2026, l'année du choix

L'année 2026 ne sera pas jugée à l'aune des discours, mais à celle des décisions structurantes. Le monde est entré dans une phase où la naïveté stratégique se paie au prix fort.

Pour l'Afrique, et pour l'AES en particulier, le choix est clair : s'unir ou subir. Le fédéralisme n'est pas une option de confort, mais une condition de survie politique, économique et civilisationnelle.

Le temps des analyses est désormais indissociable du temps de l'action.

Vœux de nouvel an 2026

À l'aube de l'année 2026, j'adresse aux lectrices et lecteurs du site Réseau International mes vœux les plus profonds de paix intérieure, de lucidité intellectuelle et d'espérance.

Que cette nouvelle année soit celle du discernement, du dialogue entre les peuples et de la réconciliation entre le progrès scientifique et l'exigence éthique.

Puissions-nous, collectivement, choisir la connaissance plutôt que la peur, la coopération plutôt que la domination, et l'intelligence humaine au service de l'humanité.

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