06/06/2020 telex.ovh  12 min #175000

Vote final de la « loi haine »

Comment répondre à des propos vindicatifs

La loi contre les propos haineux (loi Avia, en France, 2020) est une attaque contre l'intelligence collective, qui sait très bien s'organiser pour réfréner la popularité des trolls qui sévissent sur le net, et dont on se doute d'ailleurs que ce sont des robots ou bien des gens qui sont comme des robots.

Plutôt que de l'interdire il faut éduquer les gens à savoir lutter contre cela en pratiquant la communication non-violente.

Il s'agit d'une approche de l'école de la non-violence qui est véritablement salvatrice et qui nous met à l'abri de la dictature de la véhémence.
C'est donc aussi, très clairement, un outil contre les dictatures en terme général.

Elle consiste à acquérir l'aptitude, non pas de dire "stop", mais de "faire stop", à la manière dont on fait un bon ménage de printemps en essayant de n'oublier aucune tâche.

Il s'agit de s'attarder à la violence. Conscient de l'effort que cela représente, cela doit être un choix conscient : "vais-je m'attarder à cela ?". En principe la plupart du temps sur internet, face à des gens qu'on ne connaît pas, on doit se dire que non. Même si c'est un spectacle déplorable.

Quand on est face à des gens qu'on connaît au on a autant de mal à le faire. On peut faire usage de l'humour ou de franchise, mais c'est souvent délicat. C'est sûrement pour cela que des nervis se rabattent sur des inconnus en les accablant de "lourdes vérités" dans le seul but de leur faire du mal.

C'est pour cela aussi qu'il est assez absurde de vouloir interdire la méchanceté, puisque l'interdiction est l'expression de la négation de quelque chose, et que la réalité n'est pas binaire. Au final cela ne fait qu'interdire les faits notables par l'usage de mots précis, les gros-mots, qui du coup pourraient tout aussi bien faire l'objet d'une amende automatique immédiate dès qu'on les utilise. C'est absurde.

Souvent l'usage de gros-mots est utilisé comme un indicateur de violence, ils sont interdits, bipés aux états-unis, et pour quel résultat ? Aucun. C'est parce que le problème ne sont pas les mots mais les idées, et la violence est d'autant plus puissante que les idées sont affolantes. Énormément de violence est distillée par des médias qui s'interdisent les gros-mots, se croyant ainsi à l'abri de toute critique.

Les gros-mots ne sont pas le problème, mais la violence oui. Mais cette violence ne peut être prouvée que par le ressenti, qui peut ne pas toujours être partagé. La violence peut être ciblée et taillée sur mesure pour provoquer de la douleur à une personne mais faire rire les autres.

De même, le policier qui détecte une violence verbale, puisque maintenant ça va être leur job, devra assumer devant un tribunal que le ressenti qui est le sien est partagé de façon unanime par l'intégralité des humains vivants sur Terre. Comme c'est impossible, plutôt que de remettre en cause la loi qui est stupide, il se contentera d'une vague majorité. Et comme c'est plus pratique de l'estimer mentalement, il se conformera au "politiquement correct". C'est pour cela que certains disent que la loi Avia est une loi qui force les gens à faire usage du PC.
Cela aurait pu être un gag trash et estomaquant dans Southpark, mais c'est maintenant notre triste dystopie.

Mais ce n'est même pas encore suffisant pour prétendre lutter contre la violence.
En réalité toute "lutte" est vaine, c'est la stratégie qu'il faut revoir. C'est une question de paradigme.

L'usage de "lourdes vérités" lui aussi, si on voulait la criminaliser, ne pourrait être décrite que par une définition qui, mine de rien, embringue la majorité des discussions, qui consistent à faire l'impasse sur les distinctions fines entre les différentes notions combinées de façon fallacieuse au sein d'un même discours. (elle est bien dite, cette définition).

Suivre les conversations entre des gens de bonne foi, volontaires, mais démunis contre de la violence gratuite qui les mène en bateau, chahuté d'un sujet à l'autre sans jamais revenir sur la moindre des affirmations qui sont proférées, est un spectacle désolant. La facilité avec laquelle on pourrait démonter n'importe quelle attaque frivole est désemparante. Pourtant on voit les gars se faire malmener, augmenter le nombre de ses publications en tournant en boucle sur le même thème et sur un ton empli de nervosité devant la nécessité d'essayer de passer entre les nombreuses attaques qui ont déjà été faites.

Le troll lui, n'a pas ce problème, puisqu'il ne remet en cause rien de ce qu'il dit, et virevolte d'un sujet à l'autre pour ériger autant de barrières psychologiques qu'il interdit à son interlocuteur de franchir. Il les érige à coup d'évidences conçues pour impliquer un "nous" ou un "tout le monde" au même titre qu'un "je". Il essaie par la persuasion de se positionner dans le camp du plus grand nombre, alors pourtant que ses propos sont franchement discutables.

Les techniques de persuasion sont des armes. Elles sont utilisées entre le verbe et le sujet, qu'on peut s'éreinter à vouloir définir correctement, sans arriver à atteindre la structure de l'assertion qui contient la violence. Et si on le fait, on "tu(e)", on s'adresse à la personnalité de la personne, qu'on essaie de mettre à jour. En faisant cela, le risque prit par l'innocent qui se défend est de jouer exactement le jeu qui lui a été inculqué par le troll, à savoir de cibler ses attaques et d'oublier qu'il s'exprime en public. Il va certainement s'attirer d'autres badauds qui, passant par là, vont promptement l'accuser de "violence sur le net".

En fait quand on y pense, la loi sur la violence sur internet, puisqu'elle exhibe son incapacité à instruire les codes de la non-violence, peut très bien être une manière de piéger des gens avec des trolls professionnels, qui eux sauront maîtriser l'art de l'attaque ciblée passant entre les mailles des mot-clefs accusateurs.
Un peu comme des antiradars posés à des endroits stratégiques. Mais bon je dis ça en passant.

*

J'ai un exemple en tête d'un énergumène sorti de nulle part s'en prenant à un pote que j'ai laissé dans la mouise pour qu'il apprenne.

Ce n'est pas une bonne chose d'"apprendre" à éviter les tirs aléatoires des trolls. Il faut savoir qu'ils testent plusieurs attaques basiques avant de réussir à les personnaliser de façon véritablement douloureuse. Ils procèdent comme les faux-diseurs de bonne aventure en remarquant des signes infimes qui leur indiquent qu'ils sont sur la bonne voie. Ils sont très perspicaces et entraînés à faire cela. Ils l'ont fait toute leur vie. Et le seul but du virus psychologique qui les électrocute mentalement, en instillant la douleur, est de se répandre. Le mécanisme de transmission du virus psychologique utilise l'intelligence de celui qui veut se défendre comme d'une source d'énergie pour s'ancrer dans la psychologie, et s'y développer, en mettant en œuvre des stratégies.

Il y a que la somme de ces stratégies, déguisées pour servir à se défendre, servent finalement à attaquer, et qu'elles finissent par remplacer d'autres stratégies de la communication, en produisant l'effet le plus notable, celui par lequel on détecte la présence du virus psychologique, la perte de créativité, et de joie de vivre.

Il faut dire que ces trolls sont vraiment austères et déprimants. Ils n'ont que des fatalités à dégainer. Leur but est d'accabler les gens qui les énervent, à savoir, en priorité, ceux qui sont les moins pourvus de ce psychovirus. Pour eux ce sont de faibles imbéciles qui ne doutent de rien, "car tout le monde sait" (points de suspension).
Pour eux, ils font acte de service rendu, en activant les défenses immunitaires chez les autres. Mais en fait ils veulent juste les dresser et les soumettre.

On peut aussi dire que cet accablement qui est le leur, leur lourdeur, les confusions qu'ils commettent sans le savoir ni sans laisser la moindre chance de s'y attarder, provient de la même manière d'une imposition passée de la violence, dont on pourra dire qu'elle n'a pas été digérée.

Mon sentiment est parfois que "le virus", en tant que personne, cherche à se répandre en étant ancrée dans la personnalité de la personne, mais que d'une certaine manière l'âme de la personne, dans ce cas, ne fait que crier au secours. Elle cherche, à travers les cibles qu'elle se fixe (dont elle fait une fixette), s'il n'y a pas moyen de lui subtiliser quelque moyen d'endiguer la violence qui déferle dans son sang.

Le professionnalisme des trolls, qui le sont de naissance ou presque, est souvent tel que leur psychologie est recouverte d'artifices qui servent à dissimuler la haine constante qui est la leur.
(Là encore, la loi-haine ne préconise rien pour endiguer le déferlement de haine qui s'exprime chez les gens, mais ne s'attaque qu'aux symptômes, au risque de produire l'inverse de l'effet recherché officiellement, encore plus de rancœur et de haine.)

Le plus souvent ils n'auront pas la bêtise de se faire connaître à visage découvert mais plutôt de commencer par faire des compliments, s'insérer dans la discussion, voire volontairement diffuser des messages destinés à appâter les pigeons. Cela contribuera à déguiser et à donner du poids à la violence qu'ils s'apprêtent à faire tomber sur leurs prochaines victimes, puisqu'ils se seront fabriqué une image d'homme moderne, simple, aisé, intelligent, cultivé, etc.
Mais un vrai fils de pute ; ça c'est pas dans le profil en ligne.
Mais s'il était seulement violent tout le temps, on ne l'écouterait pas. La stratégie de la violence est de passer pour quelqu'un d'honorable et de reconnu par ses pairs, pour que son assènement soit encore plus violent. C'est pourquoi on parle parfois de violence d'état, parce qu'un état n'est surtout pas sensé produire la moindre violence.

D'ailleurs à ce sujet les critères du profil des utilisateurs devraient être confiés aux utilisateurs eux-mêmes, afin qu'au lieu de les dénoncer comme des dénonciateurs qu'on leur demande d'être, ils attribuent des tags, parfois avec des gros-mots, aux utilisateurs qu'ils percent à jour.
On peut se dire que dans la masse des gens, les nerveux seront minoritaires (du moins on l'espère) quand il s'agira de vouloir ridiculiser quelqu'un en public. Il s'agirait d'un tag qualificatif, exprimé par un simple smiley, mais spécifiquement dédié à un utilisateur. Ainsi on aurait immédiatement une idée de son vrai profil.
Je sais, encore une idée de site. Je vais m'en occuper ok, mais j'ai pas trop le temps.

Regardez celui-là, c'est un cas :

- J'ose espérer un deuxième degré
- Ah, maintenant vous me la jouez psychanalyste à mantras. Si vous voulez être à tout prix ouvert sur le monde pourquoi avez-vous une porte d'entrée dans votre maison qui se ferme à double tour ?

- L'humanité est d'une cruauté sans égale, la violence du monde est inouïe. Cela ne changera pas, autant s'y confronter et s'y adapter. C'est une des grandes qualités de l'homme l'adaptation, la sélection naturelle se fait comme ça également, le plus malin et le plus fort.

- Autant vous endurcir tout de suite parce que votre solution n'est qu'un rêve. Ce n'est pas que j'aime briser les rêves ou les espoirs mais, il faut bien que quelque-uns se sacrifient à le faire. Plus vous serez fort physiquement et psychologiquement plus vous aurez des chances.

- Arrêtez donc avec votre charabia universaliste saupoudré de valeurs pseudo-spirituelles, je ne marche pas. La seule chose universelle en ce bas monde c'est la connerie, rien d'autre.
- Je résume, vous êtes d'une crédulité effarante, vous ne savez pas hiérarchiser les menaces, vous êtes universaliste, votre spiritualité fast-food n'est là que pour vous conforter dans vos certitudes, vous ne faites que régurgiter ce qui a été dit par d'autres comme des mantras.

*

La communication non-violente consiste à faire l'effort d'aller entrer dans la tête des gens, comme dans une vieille maison sans lumière avec des toiles d'araignées, dans le but d'y toucher son cœur. Ce n'est pas une chose qu'on a naturellement envie de faire avec le premier énergumène venu, mais si c'est le cas, tant mieux.

La CNV est utilisée de préférence entre des personnes qui se connaissent bien et qui ont peut-être perdu l'aptitude à communiquer, parler, échanger, de façon calme et pondérée, en posant des questions délicates afin de mieux cerner quelle est l'émotion ressentie au fond, à travers ce qui veut être dit, et qui le plus souvent est dit maladroitement, et surtout, de façon violente.

Il ne faut pas écouter la violence.

Cette phrase méritait tout un paragraphe parce que c'est cela, la réponse officielle à la loi dictatoriale contre la liberté d'expression. Il ne faut pas écouter la violence.
En principe la liberté d'expression sert à exprimer ses émotions, qui sont humaines et légitimes. Ces émotions peuvent être négatives, et dans ce cas elles constituent un appel au secours, ou en tous cas à être résolues. Si quelqu'un est violent c'est qu'il a mal, et donc qu'on peut l'aider. Voterait-on une loi pour interdire un appel à l'aide ?

Parfois même le seul fait de dire les choses à voix haute peut suffire à prendre du recul sur ses assertions. Franchement, combien n'ont pas déjà revu des propos datant d'une ancienne époque, dont on se dit qu'on a bien évolué depuis.

Et non content de refuser ou d'incriminer les propos négativistes, la communication non-violente consiste à leur permettre de s'exprimer avec la meilleure efficacité possible. Pour cela, au lieu de s'offusquer, il faut chercher à comprendre ce qui veut être dit à travers ce qui est dit.
En terme général il est toujours requit de demander aux gens, spontanément, d'exprimer toutes les critiques qu'ils ont à faire à propos de telle situation ou de telle personne. Même si, quand c'est à propos d'une personne, on sait par avance que ce n'est qu'un déguisement pour un sujet plus profond.

Justement, il s'agira de déterrer ce sujet plus profond qui est une source de tracasserie.
Il faut s'en approcher avec des questions douces et ciblées, qui demandent des réponses précises.

La plupart du temps les gens à l'esprit enchevêtré de court-circuits ont tendance à faire passer une appréciation pour un constat. C'est vrai que c'est un constat pour eux, mais pas au sens strict du terme, en fait ce n'est qu'une appréciation. Il faut donc leur demander ce que "cela" leur fait ressentir. Ils constatent (par exemple) qu'ils sont en colère, et du même coup on a dissocié la cause et l'effet, pour mieux examiner la pensée.

Très souvent aussi, quand on demande, toujours sur un ton pacifique, "quelle est ton sentiment", la personne ne répond pas à la question et bifurque sur divers exemples qui stimulent la même réaction ; un peu comme chez un docteur où on énonce des symptômes divers, que le médecin devra raccommoder en un diagnostique qui les expliquera tous.

Donc il faut reposer la question et se montrer ferme sur ce qu'on demande, mais toujours dans l'esprit de vouloir mieux comprendre.

Et systématiquement, dès que ce but est atteint, il faut remercier la personne pour avoir bien voulu communiquer une émotion ressentie avec des mots qu'on puisse comprendre ; car ainsi on peut mieux se rapprocher d'elle.

À ce stade on n'a encore aucune explication sur ce qui se passe dans sa tête, mais d'une certaine manière on lui tient la main.

Une fois que ceci est fait, c'est là la magie de la communication non-violente, alors qu'on croit qu'il s'agit de savoir résoudre des conflits, en fait il s'agit seulement de savoir faire accoucher concrètement les douleurs qui sont les siennes, et de les exprimer efficacement. Car une fois que ceci est fait, le travail de la résolution de conflit ne prend plus qu'une seconde.

 telex.ovh

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