29/03/2024 infomigrants.net  5 min #245773

Depuis le début de l'année, plus de 1 000 migrants débarquent à Gavdos « contre zéro » en 2023 à la même époque

Un gilet de sauvetage dans la mer Égée. Crédit : Picture alliance

Serait-ce la nouvelle "Lampedusa grecque" ? Gavdos, minuscule île au sud de la Crète, est actuellement débordée par l'afflux de migrants. Depuis le début de l'année, elle est devenue un nouveau point d'entrée en Europe pour les migrants partis des côtes libyennes, plus précisément de la ville de Tobrouk, distante de 180 km.

Selon les données fournies par l'Agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR), 1 186 Égyptiens, Pakistanais et Bangladais sont arrivés en trois mois sur la micro-île. Quatre-vingt-onze exilés ont débarqué mercredi 13 mars sur le petit territoire. Le week-end d'avant, ce sont 280 personnes qui sont arrivées, selon des médias locaux.

Des chiffres démesurés pour un territoire de 30 km2 qui ne compte que 70 habitants, dont seulement deux familles avec quatre enfants. "Les autres sont tous des personnes âgées vivant pour la plupart seules", explique sa maire, Lilian Stefanaki, contactée par The Guardian.

Au total, 860 migrants ont atteint Gavdos en 2023

À la même époque, l'année dernière, "aucune arrivée" n'avait été enregistrée sur cette petite île paradisiaque. En revanche, sur l'ensemble de l'année 2023, ils étaient 860 à avoir atteint Gavdos via la mer, selon le HCR.

Ce "micro-monde", comme le décrit le journaliste du Guardian, ne compte qu'une école, une boulangerie et deux supérettes. Aucune structure d'accueil pour les migrants n'y existe. "Cette absence de centre pose évidemment de grands défis pour l'île", commente Stella Nanou, porte-parole du HCR en Grèce jointe par InfoMigrants.


Gavdos se trouve à environ 180 km des côtes libyennes. Crédit : Google maps

Des défis que la maire de Gavdos peine à relever. Depuis le week-end du 9 mars, des bateaux arrivent presque quotidiennement, a-t-elle déclaré à Reuters. "C'est un gros fardeau pour nous. Nous sommes une petite île, nous n'avons ni provisions ni magasins. La nourriture est un gros problème. Nos finances sont limitées".

"Quand le temps est mauvais, les transferts sont impossibles"

Le HCR assure prendre le problème à bras-le-corps. "Nous sommes en contact avec les autorités grecques centrales et locales. Nous fournissons en ce moment des articles non alimentaires, notamment des couvertures, des sacs de couchage et des kits d'hygiène en vue de répondre aux besoins fondamentaux initiaux", précise Stella Nanou.

La plupart des nouveaux arrivants sont transférés rapidement vers la Crète puis vers le continent. "Ils sont hébergés au port de Réthymnon, au port d'Héraklion, dans un centre d'accueil et dans le port de La Canée", précise Stella Nanou. "Mais quand le temps est trop mauvais et que les transferts de Gavdos sont impossibles, les personnes doivent rester dormir sur l'île". Où exactement ? Difficile de savoir. Selon les informations de Reuters, ils s'abriteraient dans un bâtiment abandonné.

Sur l'île, seul un policier est en poste permanent. Il est chargé de veiller à la sécurité et au bien-être des habitants. Efsevios Daskalakis n'en revient toujours pas de voir arriver autant de monde. "C'est incroyable [...] Ce sont pour la plupart des jeunes hommes, ils arrivent sur des bateaux transportant quatre fois la capacité maximale après plus d'un jour et demi de mer", a-t-il déclaré au Guardian.


En 2022, un bateau transportant 483 migrants arrive en Crète. Crédit : Picture alliance

"Sous pression de flux migratoires au sud de la Crète"

Sans surprise, face à ce nouvel afflux, les autorités grecques sont fébriles. Historiquement, les bateaux quittant la Libye se rendaient généralement en Italie. Athènes redoute donc d'être face à une nouvelle route migratoire reliant Tobrouk à Gavdos.

A lire aussi
 Grèce : près de 100 migrants partis de Libye débarquent sur l'îlot de Gavdos

Le 28 janvier, un bateau transportant 74 migrants, dont 20 enfants, a échoué sur la plage de Trypiti, au sud de l'île. Le 20 janvier, 149 personnes ont été secourues au large de Gavdos. Un navire marchand danois, le Maersk Brownsville, avait aidé à localiser les migrants et à les récupérer, les ramenant au port de Kali Limeni.

Tous ces exilés viennent de Tobrouk, cette ville frontalière avec l'Égypte. "Nous sommes sous la pression de flux migratoires au sud de la Crète", a récemment reconnu Sofia Voultepsi, secrétaire d'État au ministère des Migrations.

De plus en plus d'Égyptiens fuient la crise économique de leur pays et rejoignent la Libye voisine, à Tobrouk, dans l'espoir de rejoindre par la mer les côtes européennes.  L'UE a d'ailleurs signé le 17 mars un partenariat de 7,4 milliards d'euros avec Le Caire. L'argent - qui permettra au pays de se relever - servira aussi sur un volet migratoire. Bruxelles veut ainsi agir sur "la protection des frontières, en particulier la frontière sud [de l'Egypte]", qui touche la bande de Gaza et le Soudan, a expliqué un haut responsable européen à des journalistes au Caire. Et ainsi freiner d'éventuelles arrivées massives de Soudanais et de Gazaouis vers l'UE.

 infomigrants.net

 Commenter