France-Soir
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Colossal, start-up américaine valorisée à plus de dix milliards de dollars, entend ramener à la vie mammouths, dodos et autres espèces disparues. L'idée séduit les investisseurs et enflamme la presse, mais du côté des scientifiques, l'emballement tourne vite à la grimace. Sans surprise, derrière les annonces clinquantes se cache en fait un bricolage génétique sans fondement sérieux.
On parle d'une sorte de Jurassic Park bientôt coté en bourse... Fondée en 2021 par le généticien George Church et le milliardaire Ben Lamm, Colossal affirme pouvoir faire renaître cinq espèces d'ici à 2028. Pour y parvenir, la société insère des fragments d'ADN ancien dans le génome d'animaux actuels, créant des hybrides qui ressemblent vaguement aux originaux. En mars, elle présentait des « souris laineuses », censées préfigurer le retour du mammouth. Pour beaucoup, cela suffit à faire croire que c'est possible. D'autant que le projet est bien vendu ; il n'y a qu'à faire un tour sur le site Internet pour voir que la communication est cruciale.
Mais pour Régis Debruyne, paléogénéticien au Muséum national d'histoire naturelle, cette démarche est scientifiquement bancale : « Un mammouth, ce n'est pas juste un éléphant avec des poils. [...] On ne sait pas comment fonctionne 99 % du génome. » Auprès de Reporterre, il dénonce « l'apothéose du n'importe quoi » après la naissance de trois prétendus loups terribles, qui ne seraient que des loups gris modifiés.
Plus grave encore, les implications éthiques sont à peine abordées : les animaux créés vivent en captivité, sans pouvoir survivre dans la nature. Leur réintroduction pourrait perturber des écosystèmes entiers, voire diffuser des gènes artificiels dans la faune. « C'est dommage de lever autant de fonds pour un projet utopique plutôt que pour la sauvegarde d'espèces menacées », regrette Laurence Raineau, sociologue à la Sorbonne. Pour autant, cela n'efface pas l'enthousiasme d'Elon Musk et l'aval de la Maison Blanche...