12/12/2025 ssofidelis.substack.com  7min #298804

Et si la résistance palestinienne prenait fin ?

L'ambassadeur américain auprès des Nations unies, Michael Waltz, et l'ambassadeur adjoint britannique auprès des Nations unies, James Kariuki, votent sur une résolution présentée par les États-Unis au Conseil de sécurité des Nations unies à New York, aux États-Unis, le 17 novembre 2025. Crédit photo © Eduardo Munoz

Par  Ramzy Baroud, le 11 décembre 2025

Ce que l'histoire nous apprend sur le sort des Palestiniens.

Le "Conseil de paix" du président américain Donald Trump devrait être annoncé avant la fin de l'année. Cette nouvelle coïncide avec des informations de plus en plus nombreuses selon lesquelles l'administration américaine serait déterminée à faire avancer la phase 2 du cessez-le-feu à Gaza.

Cependant, de nombreuses questions cruciales restent sans réponse. Comment un conseil de gouvernement peut-il être imposé à Gaza alors que les Palestiniens sont unanimes dans leur rejet de toute nouvelle forme de mandat occidental sur leur existence ?

De plus, comment la "Force internationale de stabilisation" ( ISF) proposée par Trump pourrait-elle fonctionner à Gaza sans que sa mission soit parfaitement claire  ? Si l'ISF se contente de servir de ligne de défense israélienne, l'ensemble du projet s'effondrera avant même d'avoir commencé.

Ni les pays arabes ni les pays musulmans ne s'engageront sérieusement à soumettre les Palestiniens pour le compte d'Israël. Toute autre force participante sera inévitablement considérée comme une force d'occupation par les Palestiniens.

Le principal obstacle tient toutefois aux violations à répétition du cessez-le-feu par Israël, qui a  débuté en théorie le 10 octobre. Depuis, l'armée israélienne a  tué plus de 360 Palestiniens et blessé des centaines d'autres, tout en  rasant des milliers de bâtiments, comme le montrent des images satellites vérifiées par la BBC.

Pire encore, Israël a régulièrement bombardé des cibles situées au-delà de la "ligne jaune", une zone palestinienne où l'aide humanitaire est censée pouvoir circuler et où la population a théoriquement droit à une certaine normalité, malgré la destruction quasi totale de Gaza.

Israël espère pérenniser la phase initiale de l'accord. Cette intention s'illustre par la poursuite des bombardements, l'interdiction d'acheminer des vivres et de l'aide vitale, ainsi que par les accusations constantes et infondées selon lesquelles les Palestiniens violeraient le cessez-le-feu.

On s'attend à ce que le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu,  fasse du désarmement de Gaza le principal point d'achoppement, alors qu'il sait pertinemment que Gaza ne rendra pas les armes. Il l'a clairement déclaré à plusieurs reprises, notamment le 15 novembre,  déclarant que "le Hamas sera désarmé, de gré ou de force".

Que se passerait-il si Gaza acceptait de désarmer  ? Israël cesserait-il de l'agresser  ? Les perspectives de paix et de liberté pour les Palestiniens augmenteraient-elles de manière exponentielle  ? Pour répondre à cette question, penchons-nous rapidement sur trois expériences, dont deux enseignements historiques.

Des historiens palestiniens, mais aussi certains historiens israéliens, ont fait valoir que, lors de la Nakba, le nettoyage ethnique de la Palestine historique, Israël avait bien l' intention de dépeupler le pays, que les Palestiniens résistent ou non.

La mise en œuvre du  Plan Dalet, opération d'expulsion de la population palestinienne, n'était en rien liée à au mode ou à l'intensité de la résistance palestinienne à la violence des milices sionistes.

En réalité, ce plan d'expulsion s'appuyait sur le prétexte de la guerre, plutôt que sur la guerre comme riposte à la résistance palestinienne.

"Les Arabes devront partir, mais il nous faut une conjoncture favorable, comme une guerre",

a  écrit David Ben Gourion, leader sioniste et premier Premier ministre d'Israël.

Bien que certains mukhtars (chefs de village) aient cru que l'absence de résistance les épargnerait, ils se sont trompés. L'historien israélien Ilan Pappe  écrit :

"Alors que le plan Dalet prévoyait officiellement une possibilité de reddition pour les villages, les ordres sur le terrain n'ont épargné aucun village, quel qu'il soit".

Ce scénario s'est répété tout au long de l'histoire. En 1982, après un accord négocié par les États-Unis pour évacuer les forces palestiniennes de l'OLP du Liban, on  s'attendait à ce que leur départ dissuade l'armée israélienne d'attaquer les civils palestiniens.

En effet, le 21 août 1982, les factions de l'OLP ont progressivement  quitté le pays, privant les camps de protection et exposant leurs alliés libanais aux représailles. Cependant, la violence israélienne à Beyrouth-Ouest s'est intensifiée au lieu de s'apaiser, entraînant en septembre 1982 le  massacre de Sabra et Chatila qui a coûté la vie à près de 3 500 réfugiés palestiniens et civils libanais.

Toutes les promesses de Washington, les prétendues "garanties" et la rhétorique diplomatique de l'émissaire américain Philip Habib, envoyé spécial du président, se sont avérées vaines, car Israël a été complice de l'un des massacres les plus barbares de l'histoire.

Sans oublier la tragédie sans fin en Cisjordanie, qui, contrairement à Gaza, ne dispose pas d'infrastructures de résistance armée et est  administrée par l'Autorité palestinienne (AP), qui opère sous mandat israélo-américano-occidental.

Pourtant, même avant le génocide de Gaza, les troubles en Cisjordanie se sont intensifiés : des terres ont été confisquées, des communautés entières  déplacées, des camps de réfugiés rasés et des centaines d'habitants assassinés.

Entre le 7 octobre 2023 et la fin de l'année 2025, les rapports de l'ONU et des organisations de défense des droits humains  indiquent que l'armée israélienne et les colons ont assassiné plus de 1 000 Palestiniens en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est (dont plus de 200 enfants). Des milliers d'autres ont été blessés et les autorités israéliennes ont détruit ou confisqué des milliers de structures appartenant à des Palestiniens, entraînant le déplacement de populations entières. On estime par ailleurs qu'environ 10 000 Palestiniens de Cisjordanie ont été arrêtés entre octobre 2023 et août 2024.

Si le génocide perpétré par Israël à Gaza n'est motivé que par son intention supposée d'élimination des groupes armés, pourquoi continuer à attaquer la Cisjordanie ?

Ceux qui continuent d'adhérer au discours israélien sur Gaza doivent prendre en compte ces faits historiques et reconnaître deux réalités cruciales et pérennes. Premièrement, la violence d'Israël est fondamentalement motivée par ses ambitions  colonialistes, et non par les seules actions de résistance palestinienne. Deuxièmement, la résistance palestinienne est un impératif historique profondément enraciné : la lutte indéfectible du peuple autochtone pour se libérer d'une occupation étrangère.

Ce n'est qu'en renonçant au discours réductionniste qualifiant les guerres israéliennes de simples représailles de groupes armés que nous serons en mesure d'appréhender pleinement les événements en Palestine, les véritables motivations d'Israël et la légitimité de la lutte palestinienne.

Traduit par  Spirit of Free Speech

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