29/10/2025 ssofidelis.substack.com  11min #294799

Hollywood, l'usine de l'Holocauste

Par  Nate Bear, le 28 octobre 2025

Je viens de passer une semaine avec mes parents, et tous les soirs, je choisissais un film que nous regardions ensemble.

Pour satisfaire les goûts de chacun et trouver le point de convergence dans le diagramme de Venn, j'ai dû restreindre considérablement le champ de mes recherches. Les sites de recommandation m'ont donc proposé des listes composées principalement de drames historiques et de thrillers. Ces listes étaient longues, mais le thème de l'Holocauste nazi était largement prédominant.

Un phénomène vraiment étonnant.

Et quand je parle d'Holocauste nazi, vous savez que je ne parle pas du massacre d'un demi-million de Roms et de Sintis européens, ni de leur résistance. Je ne parle pas non plus des 300 000 handicapés que les nazis ont gazés, affamés ou tués par injection létale, ni de leurs histoires de survie.

Je parle de la mort, de la survie, de l'héroïsme et de la résistance des Juifs européens.

Les grands studios ont produit un nombre impressionnant de films sur les Juifs pendant l'Holocauste ou sur ceux qui y ont survécu, et la diversité des histoires imaginées autour de ces protagonistes est absolument étonnante. Ils abordent tous les genres, des drames épiques aux thrillers palpitants, en passant par les comédies musicales et les comédies comme Jojo Rabbit.

On a vraiment l'impression qu'Hollywood a un quota décennal de films et de séries sur l'Holocauste à respecter. En épluchant la liste, on constate au moins une production cinématographique ou télévisuelle à gros budget sur l'Holocauste tous les ans ou tous les deux ans au cours des cinquante dernières années, les dernières en date étant The Zone of Interest et The Brutalist.

Ne vous méprenez pas. J'ai regardé et apprécié ma part de films sur l'Holocauste par le passé. Le garçon au pyjama rayé, Le Pianiste et Defiance, avec Daniel Craig sont les trois premiers qui me viennent immédiatement en tête. Je considérais ces films et les histoires narrées comme des nécessités culturelles. Mais ces deux dernières années, je ne peux plus regarder de films sur l'Holocauste sous le même angle, et en particulier sur les résistants ou les survivants juifs. Il est d'ailleurs peu probable que je regarde à nouveau un film sur le thème, surtout si l'histoire est centrée sur des personnages juifs. Car après deux ans de génocide commis par l'État juif, j'ai cessé de les voir comme des mises en garde, et je les perçois désormais comme de la propagande culturelle destinée à légitimer l'apartheid et le génocide israéliens. Si ces films avaient été perçus comme les avertissements qu'ils prétendent être sur les dangers de la déshumanisation d'un peuple, sur les fléaux idéologiques et les pratiques qui mènent à un holocauste, nous n'assisterions pas à un autre putain d'holocauste.

La mémoire de l'Holocauste, ancrée dans nos mémoires depuis l'enfance, véhiculée par le cinéma et la télévision, a été profanée et réduite en cendres. Je considère désormais notre sensibilisation à l'holocauste comme une manipulation, conçue non pas pour nous permettre d'en tirer les enseignements et d'éviter un autre drame, mais comme une tragédie instrumentalisée pour légitimer l'apartheid et le génocide sionistes.

L'industrie hollywoodienne de l'holocauste est une composante essentielle du soft power qui contribue à légitimer ces crimes contre l'humanité et renforce la suprématie juive. Le sionisme est l'expression géopolitique de cette suprématie et les sionistes, de leurs dirigeants à leurs adeptes, invoquent constamment l'holocauste pour justifier l'existence d'Israël. Les Juifs ont été victimes de l'Holocauste, d'où leur droit à une patrie où ils peuvent vivre en sécurité, selon cette logique. Chaque nouveau film hollywoodien "incontournable" qui dépeint les souffrances des Juifs sous le nazisme n'est donc, à ce titre, qu'un outil permettant au sionisme de justifier et de blanchir ses crimes. Chaque nouveau blockbuster mettant en scène un personnage juif malheureux, traumatisé ou héroïque constitue un nouvel argument en faveur du sionisme. La vérité est que dépeindre les Juifs comme des victimes perpétuelles ou des guerriers héroïques, selon le récit, contribue à créer un écran de fumée pour permettre à l'État juif d'appliquer sa solution finale contre les Palestiniens.

Certes, certains de ces films sont plus ouvertement pro-israéliens que d'autres (le thriller pro-Mossad de Spielberg, Munich, ou Golda, réalisé en 2023 par un Israélien avec Helen Mirren, qui a vécu dans un kibboutz, dans le rôle de la Première ministre israélienne Golda Meir). Certains réalisateurs et acteurs affichent également un soutien indéfectible à Israël (ce n'est qu'après quelques recherches que j'ai découvert que le réalisateur de Defiance, Edward Zwick, un sioniste convaincu, a soutenu qu'Israël peut commettre un génocide s'il le veut, vantant même son  "extraordinaire retenue" quand il n'en commet pas). Mais même lorsque l'approche sioniste n'est pas explicite, la croyance selon laquelle le génocide des Juifs justifie le sionisme, Israël et le traitement spécial accordé aux Juifs est toujours omniprésente. Même Jonathan Glazer, le réalisateur de Zone of Interest, largement considéré comme antisioniste pour avoir utilisé le terme "occupation" dans son  discours aux Oscars, a assimilé les attentats du 7 octobre au génocide de Gaza, affirmant que les deux sont la conséquence d'une "déshumanisation". Peut-on déshumaniser un occupant ? Ne sont-ils pas simplement des occupants qui peuvent et doivent partir ? S'ils ne partent pas, la violence n'est-elle pas alors une forme de résistance plutôt que de déshumanisation ?

La plupart des films cités sont plutôt récents, mais le rôle d'Hollywood dans le blanchiment du nettoyage ethnique et la glorification de la création d'Israël remonte à plusieurs décennies, comme le montre cet  article publié dans  Jewish Currents. L'auteur y cite notamment La Bataille des sables (1949), Le Jongleur (1953), Exodus (1960) et L'Ombre d'un géant (1966), avec John Wayne, qui racontent tous la "guerre d'indépendance" d'Israël sous un jour romantique. Les Palestiniens et les Arabes y sont dépeints comme brutaux et impulsifs, tandis que les colons juifs sont systématiquement présentés comme des êtres courageux et altruistes. Ces films sont les premiers exemples de soft power au service du sionisme, inversant complètement la réalité : des Juifs européens des colons violents, et les Arabes, des opposants refusant la dépossession et le vol de leurs terres ancestrales.

Au-delà de leurs films, de nombreuses stars hollywoodiennes sont et ont toujours été de virulents sionistes. Humphrey Bogart, Bette Davis, Vincent Price et Frank Sinatra ont notamment parrainé des événements et des collectes de fonds en faveur d'Israël. Sinatra était si engagé qu'il a aidé le groupe paramilitaire sioniste Haganah à faire passer clandestinement l'équivalent d'un million de dollars hors des États-Unis pour les embarquer sur un navire dans le port de New York. Cet argent a servi à acheter des mitrailleuses et des armes légères pour procéder au nettoyage ethnique de la Palestine.  Marlon Brando prenait régulièrement la parole lors d'événements de collecte de fonds pour l'Irgoun, un groupe sioniste considéré comme une organisation terroriste par les États-Unis et la Grande-Bretagne. Aujourd'hui, des acteurs comme Michael Douglas, Ashton Kutcher, Gerard Butler, Andy Garcia, Katharine McPhee, Sylvester Stallone et Arnold Schwarzenegger contribuent à collecter des fonds pour les Amis de l'armée israélienne (Friends of the IDF) lors de leur gala annuel à  Beverly Hills.

Une longue liste d'acteurs, dont le réalisateur de Jojo Rabbit, Taika Waititi, et l'acteur Mark Hamill, connu pour ses positions anti-Trump, ont  signé une lettre de soutien à Israël après le 7 octobre. Cette lettre occulte complètement l'histoire d'Israël en tant qu'État colonial violent.

Ce lobbying de l'élite hollywoodienne en faveur du sionisme génocidaire remonte à soixante-dix ans et ne devrait pas s'arrêter de sitôt. Une nouvelle série historique biblique intitulée House of David et diffusée sur Prime suggère qu'Israël, une colonie créée il y a 70 ans, se fonderait en réalité sur des origines anciennes. Réalisée par le sioniste chrétien Jon Erwin, elle est interprétée par l'actrice israélienne Ayelet Zurer, qui a fait ses débuts à Hollywood dans Munich, de Steven Spielberg. Un autre film dont vous entendrez bientôt parler est le premier réalisé par Scarlett Johansson, Eleanor the Great. Portant sur la vie de survivants juifs vieillissants, rescapés de l'Holocauste, aux États-Unis, il "aborde des thèmes tels que l'identité juive et le deuil". Bien sûr, Johansson, comme beaucoup d'autres Juifs à Hollywood, n'a pas signé  la lettre ouverte d'acteurs et de cinéastes hollywoodiens et internationaux s'engageant à boycotter l'industrie cinématographique israélienne.

Cette succession de films et de séries télévisées sur l'Holocauste rappelle une réflexion de l'historien italien Enzo Traverso, qui a  déclaré l'année dernière que, dans les pays occidentaux, l'Holocauste est devenu une "religion laïque" qui, bien qu'elle ait peut-être présenté des aspects bénéfiques par le passé, a été "pervertie" par le soutien inconditionnel de l'Occident à Israël. Dans une critique similaire, quelqu'un dont j'ai oublié le nom a qualifié l'Holocauste de "liturgie laïque du souvenir" destinée à absoudre le libéralisme de ses péchés.

Les films et séries télévisées hollywoodiens sont des pièces maîtresses de l'Holocauste en tant que religion laïque ritualisée, une religion qui, parce qu'elle tend à prendre la forme de récits héroïques sur la défaite des nazis, n'encourage aucune remise en question de la part du public occidental : nous avons sauvé les Juifs, nous avons vaincu le mal, et nous sommes les gentils pour toujours. Hitler serait ainsi ce baume éternel, qui nous protège de toute accusation selon laquelle le libéralisme occidental serait autre chose qu'une idéologie vertueuse et héroïque.

La surreprésentation de l'Holocauste nazi à Hollywood, à l'inverse d'autres génocides et campagnes de mort massive, illustre une autre vérité fondamentale : Hitler est considéré comme un mal unique parce qu'il a réintroduit en Europe les outils, les méthodes et les stratégies du nettoyage ethnique et du colonialisme de peuplement. Les millions de personnes tuées par les nazis l'ont été en Europe par des Européens. Ce n'était pas censé se produire. Les Européens blancs étaient censés limiter leurs génocides et leur brutalité aux Africains, aux Asiatiques et aux Amérindiens. Les camps de concentration étaient réservés aux Indiens et aux populations autochtones. Mais dépeindre ces événements dans des films, dont beaucoup s'appuient sur des preuves documentaires extrêmement solides, notamment dans le cas des Britanniques en Inde et en Afrique, fait de nous les méchants. Il est plus commode de croire qu'il n'y a eu qu'un seul Européen blanc malfaisant dans toute l'histoire, qui aurait transgressé nos valeurs supposées, avant d'être immédiatement démasqué et vaincu, pour pouvoir passer à autre chose.

Peu importe qu'Hitler ait considéré la colonisation de l'Ouest américain et le génocide des Amérindiens comme  le modèle à suivre pour le  Lebensraum.

Peu importe qu'Israël soit un projet colonialiste ancré dans la tradition, l'esprit et l'histoire des projets colonialistes européens.

Peu importe que les camps de concentration aient fait partie intégrante des programmes de nettoyage ethnique menés par des héros européens mythiques  comme Winston Churchill.

Peu importe que des Européens comme Yitzhak Shamir, un Polonais et septième Premier ministre d'Israël, aient  proposé un accord à Hitler et Mussolini : nous vous aiderons à conquérir le Moyen-Orient en déclenchant une guerre contre les Britanniques, à condition que vous reconnaissiez un État juif en Palestine et que vous expulsiez les Juifs d'Europe.

Peu importe la Nakba.

Peu importe le génocide de Gaza.

Peu importe les autres génocides.

Peu importe la réalité.

De Scarlet Johansson à Sinatra, le sionisme est promu par Hollywood et imprègne la culture jusqu'à saturation.

Le complexe industriel hollywoodien de l'Holocauste n'est pas destiné à nous mettre en garde contre la barbarie, car celle-ci a prospéré à Gaza.

Il ne sert pas non plus à prévenir un autre holocauste, car l'histoire se répète.

Alors, la prochaine fois que vous regarderez un film sur l'Holocauste nazi, ses victimes ou ses survivants juifs, dites-vous qu'il ne s'agit probablement que de propagande sioniste.

Traduit par  Spirit of Free Speech

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