L'Alliance de l'Atlantique nord songe au plus grand déploiement de forces armées dans les pays européens depuis les années 1980. Les nouvelles unités seront dotées d'armements complexes et d'une autonomie dans la prise de décisions.
Les effectifs doubleront, alors que les nouvelles unités recevront des armements plus complexes et une plus grande autonomie d'action, rapporte le quotidien espagnol El Pais.
Cette démarche a été évoquée le 25 juin, au siège de l'Otan à Bruxelles. Les pays de l'Alliance ont l'intention de mettre à jour la section « Positions de défense et de dissuasion » mentionnant, entre autres, l'arsenal d'armements et les forces à disposition de l'Otan pour réagir aux menaces potentielles à la sécurité.
Ce document, officieusement baptisé Concept de Madrid, « enterre » de facto les liens entre l'Alliance et la Russie, stipule l'article. Sa version précédente affirmait que « la Russie ne représente pas une menace », alors que la coopération de l'Otan avec Moscou y était « stratégiquement importante ». Tandis que dans la nouvelle rédaction la Russie est désignée comme une menace directe à la sécurité, indiquent les sources d'El Pais.
Certains membres de l'Otan insistent sur le passage de la « présence actuelle de l'organisation à l'Est composée de groupes de combat au niveau de brigade ». Si à l'heure actuelle de tels groupes incluent entre 1.000 et 1.600 militaires, le passage au niveau de brigade ferait au moins doubler ce nombre.
Si cela arrivait, cette opération deviendrait le plus grand déploiement de l'Otan en Europe depuis ces 30 dernières années, depuis la fin de la guerre froide. Dans les pays membres de l'Alliance les plus proches de la Russie, les autorités exigent également de créer des divisions sous le commandement de généraux où les effectifs pourraient atteindre 15.000 hommes.
Moins de 10.000 militaires de l'Otan se trouvaient en Europe de l'Est, outre les forces nationales, avant la guerre en Ukraine. Cependant, après l'invasion russe, l'Alliance a décidé de déployer un bataillon supplémentaire en Bulgarie, en Hongrie, en Roumanie et en Slovaquie.
Le changement du concept stratégique de l'Otan a été annoncé plus tôt par le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg, qualifiant le document en élaboration de préparation « à une époque de rivalité stratégique et de menaces grandissantes pour la sécurité ». L'objectif principal de l'Alliance consiste à empêcher une attaque contre l'Estonie ou tout autre membre de l'organisation, avait-il déclaré.
Tout en précisant que même si la crise ukrainienne serait certainement réglée par les négociations, l'Otan continuera d'accorder un soutien militaire et économique à l'Ukraine pour assurer sa position la plus forte possible dans ce processus.
En avril, Jens Stoltenberg avait déjà parlé d'un décuplement du contingent dans les pays d'Europe de l'Est par rapport à quelques mois avant l'invasion russe de l'Ukraine. Il précisait que l'Alliance traversait une période de « transformation fondamentale » et de « redémarrage » qui tient compte des conséquences de la guerre à long terme.
Jaroslaw Kaczynski, vice-premier ministre polonais et président du Comité pour la sécurité nationale et la défense, affirmait également que la présence de 75.000 soldats de l'Otan est nécessaire à la frontière russe, alors que la Pologne pourrait déployer sur son territoire l'arme nucléaire américaine.
Comme l'écrivait le New York Times, les pays de l'Otan ne soutiennent pas l'Ukraine seulement avec des fournitures d'armes et d'aide humanitaire: sur le territoire de ce pays travaille un réseau de forces spéciales et d'espions qui aident secrètement l'armée ukrainienne. Leur mission consiste à faire du renseignement et à former les militaires ukrainiens ainsi qu'à gérer les livraisons d'armes.
Alexandre Lemoine
La source originale de cet article est Observateur continental
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