05/04/2022 entelekheia.fr  10min #205564

La guerre de l'or de l'Otan aura bien lieu

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Il semble que l'on ait trouvé la cause de la véhémence russophobe du Royaume-Uni. Une raison en or


Par Jorge Vilches
Paru sur  Zerohedge sous le titre Unfinished Brexit Business: NATO's Internal Gold War et  Naked Capitalism sous le titre The Importance of Custody, or NATO's Internal Gold War
La Brexitologie s'est focalisée sur la pêche britannique, mais a totalement ignoré les gigantesques réserves d'or de l'UE censément encore sous la garde de la Banque d'Angleterre. Pour ajouter l'insulte à l'injure, le divorce « no deal » entre le Royaume-Uni et l'UE dans le domaine des services financiers est passé presque inaperçu non seulement sans le coup d'éclat du protocole d' « équivalence financière » toujours reporté à ce jour mais aussi sans un seul haussement de sourcils de la part des médias spécialisés et des Remainers. Maintenant, la crise ukrainienne, avec ses nouvelles exigences de paiement pour le pétrole et le gaz russes dont nous avons cruellement besoin se superposant à des affaires de Brexit essentielles mais inachevées va nécessairement évoluer vers une méchante guerre de l'or interne à l'OTAN.

Pour paraphraser James Carville, mais avec l'accent anglais, « C'est le fichu or, idiot ».

Rule Britannia

Comme l'énoncerait le Premier ministre britannique Boris Johnson, le rapatriement physique de l'or de l'UE supposément toujours conservé dans les coffres de Londres affecterait « puissamment » l'avenir de l'Europe, avec un impact politique très profond et à haute tension des deux côtés de la Manche. Dans ce scénario, le n°10 Downing Street négocierait facilement la mise à disposition des lingots d'or de l'UE, mais uniquement dans des conditions spécifiques de Brexit favorables au Royaume-Uni. En fait, cela pourrait s'avérer absolument nécessaire, et devrait aller bien au-delà de l'énorme valeur intrinsèque de l'or de l'UE censément encore conservé dans les coffres de la BoE. Je m'explique.

L'or de l'OTAN à Londres

Les nouvelles exigences de la Russie en matière de paiement en roubles ou en or pour tous ses biens et services entraîneront nécessairement une guerre de l'or majeure entre le Royaume-Uni et l'Union européenne, qui débouchera probablement sur le tout premier clash interne de l'OTAN. Après la Seconde Guerre mondiale, le but était de garder les lingots d'or de l'Europe à l'abri de l'ancienne Union Soviétique et de Joseph Staline, au cas où. Il y a plusieurs décennies, les États membres actuels de l'UE ont donc déposé la plupart de leur or dans la Banque d'Angleterre (BoE) à Londres.

Aujourd'hui, le Royaume-Uni peut faire de l'approbation des demandes de rapatriement de l'or de l'UE et d'autres questions liées à l'or un outil de négociation très convaincant pour de nombreuses affaires de Brexit très importantes et encore inachevées. Ainsi,

(a) Whitehall pourrait retarder indéfiniment la livraison d'or de l'UE, à moins que les questions en suspens du Brexit ne soient résolues en faveur du Royaume-Uni.

(b) Ou, tout simplement, la BoE ne rendrait jamais l'or de l'UE censé être conservé depuis des décennies, parce qu'il a été partiellement ou totalement vendu, prêté ou compromis, comme expliqué ci-dessous. L'ancien Premier ministre britannique James Gordon Brown est parfaitement au courant.

La mère de tous les conflits européens

Si l'on se fie à l'histoire, les hostilités exploseront dès que les États membres de l'UE, individuellement ou collectivement, exigeront, à juste titre, un audit fonctionnel détaillé de classe mondiale, totalement indépendant et encore inexistant, de l'or de l'UE censément toujours en « garde » à la BoE. Cela devrait prendre beaucoup de temps, ce qui constitue l'excuse parfaite pour retarder l'ensemble du processus - qui serait sous le contrôle exclusif de Londres, et non de Bruxelles. Ou bien des problèmes ingérables surgiront dès que les nations de l'UE exigeront le rapatriement immédiat d'au moins une partie de ces lingots « théoriques », ce qu'ils feront très probablement tous en même temps, compte tenu des circonstances. Ensuite, soit (1) une partie de l'or pourrait éventuellement être lentement restituée ici et là (bien qu'avec beaucoup de retard) mais seulement dans des conditions très vagues de Londres et en modifiant les règles en cours d'élaboration du Brexit à des niveaux inédits, soit (2) aucun or ne serait restitué, car il a été vendu ou compromis de différentes manières, comme expliqué ci-après. Et le Royaume-Uni ferait mieux de ne pas décider de payer la Russie avec une seule pièce d'or, car l'UE se demanderait à juste titre à qui cet or appartient.

L'opacité de la BoE

Les marchés de l'or et de l'argent de Londres ont toujours été plus qu' « opaques », sans aucune déclaration significative des transactions ou des positions. Aucune donnée n'a jamais été proposée sur les banques commerciales détenant des comptes à la BoE, ni sur l'identification technique précise des propriétaires des dépôts d'or, sans parler de ceux qui appartiennent à des pays membres de l'UE. Comme le Venezuela ne le sait que trop bien - et les États membres de l'UE pourraient être les prochains -, la question de savoir qui peut ou non être reconnu comme un ayant droit valable de tout ce qui est conservé dans la Threadneedle Street [adresse du siège social de la BoE dans la City de Londres, NdT] est un sujet ouvert laissé à l'entière discrétion des maîtres de la City, et non des politiciens européens. Il en va de même pour les énormes engagements en or et en argent non alloués des dénommées « banques de lingots » ou pour toute autre donnée pertinente.

La (mauvaise) expérience allemande

Récemment, l'Allemagne a dû attendre 5 longues années pour rapatrier de force et dans la douleur une partie seulement de son or, et n'a jamais récupéré aucun des lingots d'or déposés à l'origine, [elle a pu récupérer des lingots, mais pas ceux qu'elle avait déposés, NdT] ce qui explique clairement ce retard.

Ainsi, pendant que l'UE meurt de froid et que son économie ralentit, les nombreuses questions en suspens sont les suivantes :

(a) la BoE possède-t-elle encore tous les lingots d'or de l'UE ou bien ont-ils été vendus ou prêtés, comme l'affirment de nombreux experts ?

(b) la BoE a-t-elle la volonté et la capacité de restituer immédiatement l'or de l'UE qui lui reste à ses propriétaires légitimes, s'il y en a ?

(c) qui sont les propriétaires légitimes de l'or de la BoE, après des décennies de remaniement des frontières politiques en Europe ?

(d) la Cour de justice européenne déterminerait-elle les propriétaires de l'or ou le pouvoir judiciaire britannique ou la BoE ? Sur quelle base, exactement ?

(e) la BoE a-t-elle prêté, échangé, réhypothéqué, loué, utilisé ou grevé ces lingots, qui sont maintenant liés à de nombreux autres bénéficiaires légitimes présumés, également en ligne avec des dépôts de lingots « synthétiques fractionnés et non alloués » impropres à l'usage selon les « Systèmes numériques de tarification des produits dérivés » par lesquels personne ne peut savoir qui possède quoi et où ?

Ceci n'est pas une blague.

Les transactions d'aujourd'hui en « or papier » sur les produits dérivés constituent un véritable système de Ponzi pur et dur, qui se fonde sur plusieurs fois le lingot d'or réel qui se trouve théoriquement derrière, probablement dans un rapport de 100 à 1 ou plus, comme le sait trop bien la Square Mile [la City, NdT] de Londres. Bien sûr, la BCE, le FMI et la BIS prétendront tous qu'il s'agit de « leur » or, non ?

L'économiste britannique Peter Warburton avait tout à fait raison lorsqu'il décrivait que les banques centrales occidentales utilisaient des produits dérivés pour contrôler les prix des matières premières et protéger les monnaies nationales contre la reconnaissance par le public de la dévaluation des devises. L'essai de Warburton « The Debasement of World Currency : It Is Inflation But Not as We Know It » est publié sur le site  gata.org

Mais quelle que soit la façon dont les choses se dérouleront, l' « or continental », qui est maintenant peut-être encore conservé dans des coffres à Londres, déclenchera nécessairement un conflit existentiel interne à l'OTAN en des termes très clairs (et désespérés). Car les pays devront faire face à une absence des paramètres d'audit indispensables et à des enregistrements des numéros de série des lingots d'or toujours manquants, qui affectent la propriété et le statut revendiqués de chaque destinataire (supposé légitime), ainsi qu'à des préoccupations sur la qualité et la pureté des lingots d'or, des frais de garde en souffrance, le transport et l'assurance, etc.

En passant, lorsque les choses se gâteront (et cela arrivera, croyez-moi), en vertu de leur « relation spéciale », la Réserve fédérale américaine se rangera du côté de la BoE, parce qu'elle se trouve exactement dans la même situation concernant les lingots d'or physiques qu'elle devrait théoriquement conserver pour des tiers, y compris des pays souverains. Dans le droit fil de l'exceptionnalisme anglo-saxon, les réserves d'or de la Fed n'ont jamais été auditées non plus - comme elles auraient dû l'être - et les commentateurs spécialisés du monde entier sont convaincus que ces lingots ne sont pas non plus entièrement disponibles. En outre, les États-Unis se réjouiraient de tout nouveau problème supplémentaire pour l'UE, car c'était là le but de leurs provocations envers la Russie dans cette guerre inutile.

Jorge Vilches - fier d'avoir été présenté à plusieurs reprises comme « la quintessence du chroniqueur indépendant » - est un ancien collaborateur d'opinion pour le Wall Street Journal - New York et d'autres médias financiers. Il a étudié la finance en profondeur au cours des 20 dernières années.

Traduction et note de présentation Corinne Autey-Roussel
Photo Steve Bidmead / Pixabay

Références de l'auteur :

(#1)  gata.org (#2)https://www.counterpunch.org/2015/11/25/too-big-for-fed-have-central-banks-lost-control/ (#3)  goldmoney.com

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(#21)  gata.org (#22)  blogs.wsj.com (#22)https://www.goldmoney.com/research/goldmoney-insights/hyperinflation-is-here

(#23) thectsnews.com

(#24)  reaction.life

(#25)  gata.org

 entelekheia.fr