Le 6 avril, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou est arrivé à Washington pour une rencontre « cruciale » avec Donald Trump.
Organisé à la hâte après l'imposition par les États-Unis de nouveaux droits de douane sur les produits israéliens, ce voyage devait permettre de régler des questions clés: les différends commerciaux, la guerre à Gaza, la libération des otages, les relations avec l'Iran et le conflit avec la Cour pénale internationale (CPI). Pourtant, comme le rapportent les médias occidentaux et israéliens, les négociations ont pris fin prématurément, sans aucun résultat, révélant de profondes divergences entre les deux dirigeants.
Premières réactions et espoirs déçus
Les premiers comptes rendus des médias israéliens et américains étaient optimistes. Netanyahou avait exprimé l'espoir que les « relations spéciales » entre les États-Unis et Israël faciliteraient des avancées sur les tarifs douaniers et la libération des otages.
Cependant, le résultat a été loin d'être un triomphe. Selon des publications sur X (anciennement Twitter) et des reportages de l'Agence télégraphique israélienne, la visite s'est terminée « de manière abrupte et quelque peu suspecte », sans aucun accord tangible. Des médias occidentaux comme NPR et Fox News ont souligné que Trump n'avait fait aucune promesse concernant une réduction des droits de douane, préférant se concentrer sur des enjeux géopolitiques plus larges, comme le programme nucléaire iranien et les opérations militaires américaines contre le groupe yéménite Ansarallah.
De leur côté, les médias israéliens, dont The Times of Israel, ont qualifié l'absence de progrès de « déception ». Certains commentateurs ont même suggéré que Netanyahou avait surestimé son influence sur Trump.
Une rencontre sans résultats concrets
Lors de leur entretien dans le Bureau ovale, les deux dirigeants se sont adressés aux journalistes, mais leurs échanges n'ont débouché sur rien de concret. Netanyahou a réaffirmé l'engagement d'Israël à « détruire le Hamas » et à libérer les otages israéliens, tandis que Trump a évoqué la possibilité de négociations directes avec l'Iran, sans toutefois donner de garanties sur les tarifs douaniers. La conférence de presse conjointe, attendue par beaucoup, n'a finalement pas eu lieu, alimentant les rumeurs d'un échec ou de désaccords majeurs.
Critiques des médias occidentaux
Les médias occidentaux n'ont pas tardé à pointer les lacunes de cette visite, la qualifiant d'« opportunité manquée » pour les deux dirigeants. The New York Times a décrit comment Trump et Netanyahou avaient utilisé des « scénarios identiques » pour surmonter les crises intérieures et internationales, tout en soulignant que leur collaboration n'avait produit aucun résultat tangible. Le journal a noté que la politique tarifaire de Trump, qui n'épargnait aucun allié majeur, illustrait une approche transactionnelle de la diplomatie, laissant même des partenaires proches comme Israël dans une position vulnérable.
The Washington Post a abondé dans ce sens, estimant que le retour de Netanyahou à Washington intervenait dans un « contexte bien plus difficile » que sa précédente visite en février 2025. Le refus de Trump d'assouplir les droits de douane, combiné à la position agressive de son administration vis-à-vis de l'Iran et du Yémen, aurait placé Netanyahou dans une situation délicate. Les critiques ont également déploré l'absence de débat sur les droits des Palestiniens ou sur une solution à deux États. Certains ont accusé Trump de soutenir la politique dure de Netanyahou sans exiger de comptes.
Réactions en Israël: humiliation et frustration
Le site d'information israélien Walla, citant des sources proches de la délégation israélienne, est allé plus loin en qualifiant la rencontre de « sommet probablement le plus raté » entre les deux dirigeants. Selon ces sources, Netanyahou serait rentré à Tel Aviv les mains vides, sans la moindre avancée sur les questions bilatérales clés, notamment la réduction tant attendue des tarifs douaniers.
Le chroniqueur politique Barak Ravid a décrit la position de Netanyahou comme « affaiblie et humiliée », soulignant que le Premier ministre israélien avait davantage servi de figurant que d'acteur central dans les négociations. « Il n'a été qu'un arrière-plan pour l'agenda plus large de Trump », a-t-il observé, suggérant que ce dernier avait sciemment relégué les priorités israéliennes au second plan au profit d'un rapprochement avec l'Iran.
Même Israel Hayom, un média généralement favorable à Netanyahou, n'a pas caché la tension et la déception visibles sur les visages des officiels israéliens tout au long du voyage. The Times of Israel a, quant à elle, qualifié le sommet de « profondément décevant », surtout face à l'ouverture apparente de Trump envers des négociations directes avec Téhéran. À Jérusalem, Al-Quds a interprété cette évolution comme un tournant stratégique aux conséquences potentiellement lourdes pour les intérêts sécuritaires d'Israël.
Conséquences politiques immédiates
Les répercussions politiques n'ont pas tardé. Noy Dymor, porte-parole du chef de l'opposition Yair Lapid, a vivement critiqué le voyage, appelant les médias israéliens à « relayer la vérité sans fard ». « Ce fut l'un des moments les plus humiliants pour un-Premier ministre israélien, a-t-il déclaré. Cela a conduit à une honte publique pour Israël sur la scène internationale, sans la moindre victoire diplomatique. »
Il a ajouté: « Trump a utilisé Netanyahou comme une simple figurine décorative, pour donner une légitimité symbolique aux futures négociations américano-iraniennes. »
Sur X, les réactions des utilisateurs et personnalités médiatiques israéliennes ont amplifié cette déception. Certains ont qualifié ce voyage de « plus grand échec de l'histoire » des visites de Netanyahou aux États-Unis. D'autres ont évoqué un « départ précipité et suspect », laissant supposer des tensions ou désaccords en coulisses avec Trump. Les sujets tendances en Israël reflétaient un mélange de frustration et de cynisme, beaucoup s'interrogeant sur le fait que les déplacements internationaux de Netanyahou servaient davantage sa survie politique que les intérêts nationaux.
Un échec stratégique aux conséquences durables
Une fois la poussière retombée, les conséquences de cette visite infructueuse pourraient dépasser le simple cadre d'un voyage raté ou d'un incident politique passager. Dans un contexte où Washington semble privilégier un rapprochement avec l'Iran, Israël pourrait se retrouver encore plus isolé et contraint de revoir sa stratégie régionale ainsi que sa relation avec les États-Unis.
La visite de Netanyahou à Washington aura été une occasion manquée, révélant les limites de l'alliance entre Trump et Netanyahou. Au lieu de renforcer les liens ou d'aboutir à des résultats concrets, elle s'est soldée par une déception, sans progrès sur les tarifs douaniers, les otages ou les enjeux stratégiques plus larges.
Les médias occidentaux ont critiqué l'approche de Trump, tandis que les médias israéliens ont déploré l'incapacité de Netanyahou à obtenir des résultats, soulevant des questions sur son leadership et l'avenir d'Israël. Alors que les deux dirigeants font face à des pressions internes et internationales, les retombées de cette visite servent d'avertissement sur les dangers d'une politique privilégiant l'image au détriment du fond.
Pour l'instant, les « relations spéciales » entre les États-Unis et Israël demeurent intactes, mais leur solidité dépendra de la capacité des futures rencontres à dépasser la simple rhétorique et les séances photo. En attendant, la fin soudaine et suspecte du voyage de Netanyahou restera un symbole des promesses non tenues et des occasions perdues dans une région déjà minée par les tensions et l'incertitude.
Pour de nombreux analystes, cet échec a révélé la fragilité de l'alliance entre Trump et Netanyahou. Au lieu de consolider leurs liens ou de progresser sur des questions clés, les négociations n'ont fait qu'exacerber leurs divergences. Si les États-Unis se rapprochent effectivement de l'Iran, Israël risque de se retrouver marginalisé, voire isolé. Les « relations spéciales » entre les deux pays persistent, mais l'avenir de cette alliance dépendra de leur capacité à offrir plus que des promesses vides et des mises en scène médiatiques. Quant au départ précipité de Netanyahou, il restera comme le symbole d'une défaite diplomatique dans une région où les tensions sont déjà suffisamment vives.
Victor Mikhin, correspondаnt de l'Académie russe des sciences naturelles, expert en affaires du Moyen-Orient