Le président haïtien, Jovenel Moïse, a été assassiné dans la nuit du 6 au 7 juillet après que sa résidence privée dans laquelle il se trouvait a été prise d'assaut par «un groupe d'individus non identifiés, dont certains parlaient en espagnol», selon le Premier ministre sortant Claude Joseph.
«Vers une heure du matin, dans la nuit du mardi 6 au mercredi 7 juillet 2021, un groupe d'individus non identifiés, dont certains parlaient en espagnol ont attaqué la résidence privée du Président de la République et ainsi blessé mortellement le chef de l'Etat», a fait valoir Claude Joseph dans un communiqué.
Communiqué du Premier ministre sortant Claude Joseph.
Dans ce document, il a condamné un «acte odieux, inhumain et barbare» et appelé «la population au calme». «La situation sécuritaire du pays est sous contrôle de la Police Nationale d'Haïti et des Forces Armées d'Haïti», a-t-il ajouté, concluant : «Toutes les mesures sont prises afin de garantir la continuité de l'Etat et protéger la Nation. La démocratie et la République vaincront.»
Le 5 juillet, le président Jovenel Moïse avait nommé Ariel Henry au poste de Premier ministre pour succéder à Claude Joseph.
Un président confronté à une vague de contestation
Porté au pouvoir lors de l'élection de 2016 (après l'annulation de l'élection de 2015), Jovenel Moïse se trouvait face à une contestation sociale de grande ampleur, les manifestants dénonçant principalement le référendum constitutionnel proposé par le président (qui doit se tenir le 26 septembre après avoir été repoussé à deux reprises), doublée d'une crise politique majeure.
En effet, ce pays des Caraïbes, le plus pauvre du continent américain, est confronté à d'importantes violences, notamment de la part de gangs, et le président Jovenel Moïse était accusé par certains d'inaction face à la crise.
De plus, à partir de février 2019, s'organisent des manifestations visant à lui faire quitter le pouvoir, et le poussent à changer de Premier ministre en nommant Jean-Michel Lapin en mars 2019 à ce poste par intérim après une motion de censure votée contre son prédécesseur Jean-Henry Céant.
N'ayant pas réussi à juguler la crise, Jovenel Moïse change de nouveau de Premier ministre début mars 2020 en nommant Joseph Jouthe.
Mais le 7 février 2021, le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire haïtien reconnait la fin du mandat de président de Jovenel Moïse - en se basant sur la date des élections annulées en 2015 pour des fraudes - alors que lui et ses partisans considèrent que son mandat n'a débuté que le 7 février 2017, date à laquelle il a prêté serment. Pour ces derniers, son mandat devait donc s'achever le 7 février 2022, le président haïtien étant élu pour une durée de cinq ans.
Le pays s'enfonce alors encore un peu plus dans la crise et le 8 février la police disperse une manifestation de l'opposition. Une autre manifestation provoque également des heurts entre policiers et contestataires le 28 mars. En réaction, Jovenel Moïse renvoie son Premier ministre Joseph Jouthe et le remplace par Claude Joseph, qui devient le sixième Premier ministre de Jovenel Moïse depuis son entrée en fonction. Il ne tiendra que deux mois et 23 jours avant d'être remplacé par Ariel Henry.
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