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 Lors de sa rencontre avec Zelensky, Trump a qualifié d'escalade les frappes en profondeur contre la Russie

Le roi des crampons

Zelensky à la Maison Blanche le vendredi 17 octobre 2025. (Capture d'écran d'une vidéo de la Maison Blanche.)

Par  Patrick Lawrence pour Consortium News, le 20 octobre 2025

Volodymyr Zelensky a sorti le grand jeu avant son dernier petit tour dans le Bureau ovale, vendredi dernier.

Le président ukrainien, désormais dépourvu de toute légitimité, est arrivé avec sa liste de systèmes de défense aérienne et d'armement souhaités, pour un montant total de 90 milliards de dollars, pour son nouveau rendez-vous avec le président Trump.

Oui messieurs dames, 90 milliards de dollars. À titre de comparaison, les États-Unis ont déjà versé 128 milliards de dollars à l'Ukraine depuis le début de l'intervention russe en février 2022, selon  un rapport du Council on Foreign Relations daté du 15 juillet 2025.

Misant sur la passion de Trump pour les affaires, Zelensky affirme que l'Ukraine achètera tous ces nouveaux équipements dans le cadre d'un "méga-accord". En voilà une ineptie ! Kiev est complètement fauché. Comment le régime ferait-il pour payer de telles sommes ?

Voulait-il dire que Kiev ferait un chèque à Washington sur les fonds que Washington lui a déjà envoyés ? Ou Zelensky suggère-t-il que l'OTAN, censée acheter des armes américaines pour les transmettre à l'Ukraine, financera sa liste d'emplettes ?

Ou bien Zelensky parlerait-il maintenant au nom de la branche européenne de l'OTAN ?

En fait, je ne vois qu'une possibilité : le régime Zelensky a l'intention de payer les nouveaux armements avec les milliards d'euros que les Européens s'apprêtent à envoyer à Kiev, c'est-à-dire les milliards qu'ils comptent prélever sur les avoirs gelés de la Russie. Mais cet argent est censé permettre à Kiev de continuer à s'approvisionner en crayons et en trombones pendant encore un certain temps.

Ces gens ne cessent de broder des histoires. De quoi broder à loisir.

Ces missiles longue portée, pouvant transporter une charge nucléaire, coûtent entre 2 et 2,5 millions de dollars pièce. D'après mes sources, Zelensky espérait que Trump les lui fournirait gratuitement. Preuve d'une confiance aveugle en sa capacité à obtenir les faveurs de Trump, Zelensky s'est tout d'abord rendu chez Raytheon, le fabricant des Tomahawk, avant sa réunion à la Maison Blanche.

Un escroc très culotté, il faut le lui reconnaître.

"Plus d'armes, moins de blabla", telle semble être la formule, en apparence astucieuse, mais ô combien stupide, du régime de Kiev, alors que Zelensky s'apprêtait à mendier une énième fois. Il faut frapper sans relâche les cibles russes. C'est la seule façon d'amener Moscou à accepter de négocier rapidement la fin de la guerre. C'est notre ultime option.

Finalement, le passage de Zelensky dans le Bureau ovale n'a pas suscité la même pagaille que lors de sa première rencontre avec Trump, en février. Mais c'était prévisible. Les responsables du protocole ont placé Vlod dos aux journalistes couvrant l'événement, un affront subtil, mais indéniable. Et lorsque Zelensky a briefé les médias après coup, il n'a pu le faire qu'à l'extérieur de la Maison Blanche.

Exit les Tomahawks

Zelensky à la Maison Blanche le vendredi 17 octobre 2025. (Capture d'écran d'une vidéo de la Maison Blanche.)

Pas de Tomahawks pour Volod, donc, du moins pas pour l'instant. Trump a été très clair avant, pendant et après sa rencontre avec le parasite ukrainien. Quant au reste de la liste de Zelensky, rien n'est très clair, mais je pense que Kiev obtiendra ce que les Européens achètent aux fabricants d'armes américains, et qu'elle acheminera ces armes vers le sud, de l'autre côté de la frontière polonaise.

C'est la veille de la visite de Zelensky à la Maison Blanche que les choses se sont décidées, lorsque Trump a reçu un appel de Vladimir Poutine et a passé plusieurs heures à discuter avec le président russe. Selon les observateurs, la décision de Trump concernant les Tomahawks figurait en bonne place dans l'ordre du jour.

Les commentaires de Trump a posteriori en témoignent.

"Le Tomahawk est une arme vicieuse, offensive et incroyablement destructrice", a-t-il déclaré immédiatement après l'appel. "Qui voudrait se faire tirer dessus avec des Tomahawks ?"

Avant son entretien avec Zelensky, il a ajouté :

"Espérons que nous pourrons mettre fin à la guerre sans avoir à nous préoccuper des Tomahawks".

On entend souvent dire que Donald Trump croit tout ce que lui dit son dernier interlocuteur. Ce qui semble être le cas, car Trump est un homme au jugement superficiel et sans aucune expérience de la gestion des affaires d'État.

Ce genre de personne a tendance à se complaire dans la facilité en reproduisant avec une fausse conviction les opinions du premier venu, pourvu que ses jugements soient reconnus. Mais suggérer que Poutine manipule facilement Trump, comme le prétendent les médias mainstream et leurs lecteurs, relève de la mauvaise foi.

Ceux qui osent tenir de tels propos sont mis au ban, mais peu importe : Vladimir Poutine est un homme d'État accompli et le principal acteur de la crise ukrainienne à présenter des arguments crédibles en faveur d'un règlement durable, non seulement entre Moscou et Kiev, mais aussi entre la Russie et l'Occident.

La sécurité d'une nation ne peut être établie au détriment d'une autre : c'est un principe fondamental de toute bonne diplomatie, et l'argument clé de Moscou. C'est ce que Poutine et les membres de son cercle de sécurité nationale veulent dire quand ils insistent sur la nécessité de s'attaquer aux véritables causes du conflit.

Comme me l'a enseigné feu Stephen F. Cohen, il y a des années, la stratégie de la Russie envers l'Occident n'a rien à voir avec les sphères d'influence, ce concept anachronique du XIXè siècle. On parle ici de stratégies de sécurité, et pas une puissance au monde ne façonne sa politique étrangère sans objectif sécuritaire en tête.

Tomahawks et montée des tensions

Trump regarde la presse, méfiant, alors qu'il accueille Zelensky à la Maison Blanche, vendredi. (Capture d'écran de la vidéo de la Maison Blanche).

S'agissant des Tomahawks, Poutine a averti Trump, comme cela a été largement rapporté, qu'envoyer ces missiles à un régime aussi irresponsable que celui de Kiev nuirait fondamentalement à tout espoir de rétablissement des relations entre les États-Unis et la Russie, et reviendrait à intensifier la guerre.

Cette crainte est fondée, notamment parce que les Russes ne sauraient pas déterminer si un missile entrant est équipé ou non d'une ogive nucléaire. De plus, seuls les Américains peuvent les utiliser, car les Ukrainiens n'ont pas les compétences nécessaires.

Selon vous, Poutine a-t-il eu raison d'exhorter Trump à ne pas livrer de missiles Tomahawk à l'Ukraine, ou y a-t-il une lecture différente ?

À ce stade, lire la presse mainstream décrire l'attitude russe est franchement fastidieux. "Monotone" semble être le terme le plus approprié.

Le Washington Post affirme que la Russie manipule Trump "en lui faisant miroiter sans cesse l'espoir d'un accord de paix tout en intensifiant ses attaques". Et encore : "La Russie exclut tout cessez-le-feu afin que les combats puissent se poursuivre". Et encore : "Poutine a refusé toute concession".

Le New York Times : "La Russie rejette l'initiative diplomatique du président Trump". Et : "Le choix de Moscou de rejeter les négociations et d'intensifier ses attaques meurtrières".

Tout cela repose sur des mensonges, pas un seul mot n'est vrai. Toute cette rhétorique redondante sert uniquement à éviter toute mention de la véritable position de Moscou. Elle est trop pragmatique pour ça, trop favorable à une paix dans l'intérêt de tous.

Je n'aime pas les 90 milliards de dollars évoqués par Zelensky et sa garde rapprochée avant leur rencontre dans le Bureau ovale la semaine dernière. Sa démesure suggère que le régime de Zelensky et les Européens - ces derniers sont désormais son unique boussole, car ils partagent les mêmes illusions - ont l'intention d'entretenir indéfiniment le conflit avec la Russie, alors que l'Ukraine et ses parrains occidentaux ont déjà perdu la guerre depuis longtemps.

Appelons cela "une vie désespérée" !

Trump devrait maintenant rencontrer Poutine pour un autre sommet, dans deux semaines, cette fois à Budapest. Je ne vois pas ce qui pourrait en sortir de positif.

Pour moi, Trump a peut-être saisi la pertinence de la vision russe de la guerre et la manière de la résoudre à la mi-août, lors du sommet de l'Alaska. Mais on ne peut évidemment pas en être certain.

La triste réalité est que tout cela n'aura probablement aucune importance, car trop de groupes d'intérêt ont intérêt à ce que le conflit ukrainien se poursuive.

Et ce serait une excellente chose de se tromper, cette fois.

Traduit par  Spirit of Free Speech

* Patrick Lawrence, correspondant à l'étranger pendant de nombreuses années, principalement pour l'International Herald Tribune, est chroniqueur, essayiste, conférencier et auteur, dont le dernier ouvrage,  Journalists and Their Shadows, est disponible  chez Clarity Press ou  via Amazon. Parmi ses autres livres, citons  Time No Longer: Americans After the American Century. Son compte Twitter, @thefloutist, a été rétabli après avoir été censuré de manière permanente pendant des années.

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