Par Sonja van den Ende, le 11 mai 2025
En reniant son passé, l'humanité se condamne à répéter ses erreurs les plus graves.
Le 9 mai est une date sacrée et capitale en Russie. Pourquoi ? Parce que la Russie, à l'époque soviétique, a perdu près de 27 millions d'habitants en seulement quatre ans, entre 1941 et 1945. Parmi eux, d'innombrables soldats de l'Armée rouge, mais aussi des millions de civils.
Dès 2015, il y a dix ans maintenant, plusieurs journalistes et politiciens, notamment en Allemagne, ont soutenu que des dirigeants comme Merkel, Cameron et Obama devraient commémorer le Jour de la Libération à Kiev plutôt qu'à Moscou. Ils ont affirmé que cette journée ne devait pas être célébrée "selon les conditions de Poutine".
"Compte tenu du conflit entre la Russie et l'Ukraine", les dirigeants occidentaux n'auraient soi-disant pas pu assister à la parade militaire russe sur la Place Rouge alors que la guerre fait rage dans l'est de l'Ukraine, à seulement 800 km de là. Ce fut le début de la guerre de l'information contre la Russie, avec des accusations sans fondement selon lesquelles la Russie aurait déjà envahi le Donbass, un mensonge éhonté.
Mais ce fut aussi le début - ou plutôt l'escalade - d'un révisionnisme historique destiné à réécrire l'histoire de la Seconde Guerre mondiale et à exclure la Russie des commémorations à Auschwitz, Sachsenhausen et Dachau, entre autres.
En tentant de présenter les États-Unis (et leurs alliés comme le Canada, le Royaume-Uni, l'Australie et la Nouvelle-Zélande) comme les principaux libérateurs de l'Europe, l'Occident expose toute son hypocrisie. Tout en prétendant défendre la "démocratie" et les "droits de l'homme", il minimise le rôle décisif de l'Union soviétique. C'est l'Armée rouge qui a pris d'assaut Berlin en avril-mai 1945, deux mois avant l'entrée des troupes alliées occidentales dans la ville. Pourtant, l'Europe cherche à gommer cet épisode des livres d'histoire.
L'Occident encourage également la Pologne, libérée par l'Armée rouge, à rejeter cette réalité historique au profit d'une alliance anti-russe. Le 17 janvier 1945, les forces soviétiques sont entrées dans Varsovie et ont libéré le reste du pays en mars. Le site web "Disinfo" de l'UE rejette ces faits comme relevant de la propagande, une tentative honteuse de réécrire l'histoire en faveur du bloc.
Il est possible que de nombreux pays de l'UE ne puissent supporter le poids de leur propre passé : le colonialisme, la collaboration avec le fascisme ou le fait qu'aux Pays-Bas, 90 % de la population de l'est et du sud a collaboré avec les nazis. Seuls 1 à 5 % ont résisté, principalement des communistes dans les villes occidentales comme Amsterdam, Rotterdam et La Haye. Ces résistants n'ont jamais eu l'honneur qui leur était dû. Au contraire, ils ont été diffamés, réduits au silence et écartés par les gouvernements néerlandais de l'après-guerre, dont beaucoup étaient dirigés par d'anciens collaborateurs nazis toujours influents aujourd'hui.
Le 9 mai 1945, l'Armée rouge a libéré Prague, mettant fin à la guerre en Tchécoslovaquie. Pourtant, aujourd'hui, la Tchéquie, contrairement à la Slovaquie, affiche des tendances fascistes. Durant la crise du COVID en 2020, le gouvernement tchèque a fait démanteler une statue du général Ivan Konev, le commandant de l'Armée rouge qui a libéré Prague. Cet acte révèle la dérive de la Tchéquie vers un régime non démocratique, à l'image de l'Ukraine et des pays baltes, où presque tous les monuments commémorant la libération soviétique ont été démolis.
Si les pays d'Europe de l'Est affirment avoir été "occupés" par l'URSS après la guerre, ils devraient réexaminer leur propre histoire. Bon nombre de ces nations comptaient déjà de puissants mouvements communistes avant leur libération. Ceux qui s'y sont opposés étaient souvent des nationalistes aux tendances fascistes ou, comme en Ukraine et dans les pays baltes, des nazis purs et durs.
Prenons l'exemple de la Roumanie, alliée des nazis qui a combattu à Stalingrad. Lorsque l'Armée rouge a progressé en 1944, le roi a renversé le régime pro-allemand et s'est rendu aux Soviétiques. Les troupes roumaines ont alors rejoint l'Armée rouge, contribuant avec près de vingt divisions à la lutte contre l'Allemagne. L'Europe rejette cette réalité en la qualifiant de coercition soviétique, mais la résistance communiste roumaine était un mouvement local, opposé à un régime complice de la mort de Juifs, de résistants et de prisonniers de guerre soviétiques.
Le même phénomène s'est produit en Bulgarie, où le Front de la patrie, dirigé par les communistes, a organisé un coup d'État en septembre 1944. L'armée bulgare a ensuite combattu aux côtés de l'Armée rouge en Hongrie et en Autriche, contribuant à la libération de Belgrade en octobre.
L'Union soviétique a libéré une grande partie de l'Europe de l'Est, officialisée plus tard dans le Pacte de Varsovie, une alliance de nations libérées du fascisme. Ces pays doivent leur liberté à l'immense sacrifice de l'Armée rouge.
À l'époque, la propagande nazie, sous l'impulsion de Joseph Goebbels, affirmait que les Juifs étaient communistes et que le communisme était un complot juif. À cette époque, la propagande prospérait, en particulier parmi les fascistes et les nazis, avec pour principal artisan Joseph Goebbels. Le peuple allemand a été abreuvé de mensonges - et on constate ici des parallèles avec la situation actuelle (même si les systèmes politiques et les outils de propagande sont différents) - selon lesquels tous les Juifs étaient communistes et que le communisme était une invention juive. On les appelait alors les bolcheviks. Ces gens, affirmaient les nazis, "devaient être exterminés". Cette justification leur a servi de prétexte pour attaquer la Russie dans le cadre de l'opération Barbarossa et tenter d'écraser la nation. Si tous les communistes n'étaient pas juifs, les nazis avaient la solution : ils ont qualifié les peuples slaves (ainsi que les Roms et les opposants politiques) de "Untermenschen" [sous-hommes], tout en déclarant les Aryens "race supérieure".
Aujourd'hui, l'Occident cherche à gommer les exploits héroïques de l'Armée rouge, tout comme il tente d'effacer la Russie moderne et l'héritage de l'ancienne Union soviétique. Pourtant, pour les peuples des anciennes nations soviétiques, le 9 mai reste un hommage sacré aux sacrifices de leurs anciens. Ce souvenir vit dans leurs cœurs, intact malgré l'influence de la politique occidentale ou la résurgence du fascisme qui sévit encore dans notre monde. L'hostilité manifestée par l'Occident depuis des décennies n'a fait que renforcer leur détermination, preuve que l'idéologie toxique du nazisme perdure.
L'Ukraine, les États baltes, la Pologne et la Tchéquie peuvent démolir tous les monuments commémorant la libération par l'Armée rouge, mais ils ne pourront jamais détruire ce qui vit dans la mémoire d'un peuple : la lutte de ses ancêtres pour la liberté. Peu importe la virulence avec laquelle l'Occident diabolise la Russie, son peuple sait la vérité, et ces attaques n'ont pour effet que de renforcer son patriotisme.
Etty Hillesum, écrivaine et philosophe juive néerlandaise assassinée à Auschwitz en 1943, nous a laissé cette dernière pensée pleine de sagesse :
"D'autres poursuivront là où ma vie a été interrompue. Voilà pourquoi j'ai le devoir de mener une vie juste et honnête jusqu'à mon dernier souffle. Ainsi, ceux qui me succéderont n'auront pas à tout recommencer".
Le 7 septembre 1943, quelques mois avant sa mort, elle a jeté une carte postale depuis le train de déportation sur laquelle elle avait écrit :
"En ouvrant la Bible au hasard, j'ai trouvé ceci : 'Le Seigneur est notre refuge'. Je suis assise sur mon sac dans un wagon de marchandises bondé. Papa, maman et Mischa se trouvent quelques wagons plus loin. Finalement, le départ s'est fait sans prévenir. Nous avons quitté le camp en chantant. Merci pour tout votre amour et votre attention".
Malheureusement, ses mots sont aujourd'hui tombés dans l'oubli. La plupart des Européens, en particulier les jeunes générations, ne connaissent probablement pas son nom, illustration tragique d'une humanité condamnée à répéter ses pires erreurs en reniant son passé.
Traduit par Spirit of Free Speech