18/11/2025 dedefensa.org  3min #296637

 La culture stratégique de la Grande-Bretagne en clair

Les réparateurs d'Empire

 Ouverture libre 

• Analyse décryptée avec brio par Elena Fritz d'une interview donnée à Bloomberg par l'ancien chef du MI6 britannique Richard Moore. • Une pensée néo-impériale très postmoderne mais 'very, very british'.

Céline disait, remisant Nietzsche au rôle sensationnaliste du croque-mort apocalyptique : « Dieu est en réparation ». Le MI6 nous dit, selon l'excellente Elena Fritz et sans qu'il n'y faille rien voir de célinien : "L'Empire est en cours de réparation". Le MI6 a beaucoup plus le sens des réalités et de l'organisation des travaux publics que Céline ou Dieu. Ce pourquoi, il s'est attelé à la tâche de "réparer" l'Empire par le biais de l'explication britannique de l'inexplicable guerre d'Ukraine...

« Note de PhG-Bis : "Inexplicable" par sa durée, par l'avancée victorieuse des Russes, par l'écroulement dans la corruption des derniers lambeaux de la légitimité ukrainienne, etc ?.... Par conséquent, "explication britannique" infiniment complexe, acrobatique et toute faite de haute voltige, enfin tout simplement inexplicable puisque classée 'Top Secret' dans les archives du MI6, et dévoilées par les traits d'un esprit habilement tortueux, celui exigé d'un chef du MI6. »

On ne sait si c'est à ce schéma-là que Jean Cocteau pensait lorsqu'il écrivit sa phrase fameuse : « Puisque ces mystères nous dépassent, feignons d'en être l'organisateur » ; ainsi songea le MI6, avant de passer à un Guy Debord inverti à l'anglaise, contemplant l'Ukraine et ses avatars.

Dans tous les cas, il s'agit bien d'une construction d'une pensée directement issue des cercles de réflexion du MI6 qui, manifestement, mène la danse en Ukraine pour la partie britannique. On imagine sans peine la jubilation de Starmer lorsqu'on lui révéla que la politique qu'il appliquait avec zèle correspondait à ce schéma exceptionnellement complexe et efficace de reconstruction de l'Empire.

Les Britanniques, depuis qu'ils ont tout perdu de leurs amitiés impériales, sont les utilisateurs habituels de cette sorte d'explications, et de leurs ambitions, et de leurs affirmations suprémacistes, et des victoires mystérieuses et sans nom dont ils accouchent. Après tout, l'actuel schéma ressemble un peu, dans l'esprit de la chose, à ce qu'ils manigancèrent en 1944, à propos des USA et avec quelle vista couronnée de tant de succès :

« En tentant d'exposer "l'essence d'une politique américaine" en 1944, un diplomate définit parfaitement cette attitude. La politique traditionnelle du Royaume-Uni de chercher à empêcher qu'une puissance exerçât une position dominante était écartée : "Notre but ne doit pas être de chercher à équilibrer notre puissance contre celle des États-Unis, mais d'utiliser la puissance américaine pour des objectifs que nous considérons comme bénéfiques." La politique britannique devrait être désormais considérée comme un moyen d' "orienter cette énorme péniche maladroite [les USA] vers le port qui convient." L'idée d'utiliser "la puissance américaine pour protéger le Commonwealth et l'Empire" avait beaucoup de charme en soi, en fonction de ce que l'on sait des attitudes de Roosevelt concernant l'Europe. Elle était également un parfait exemple de la façon dont les Britanniques parvenaient à se tromper eux-mêmes à propos de l'Amérique. » ( John Charmley, 'La Passion de Churchill')

Quoi qu'il en soit du succès du MI6, l'Allemande Elena Fritz, qui est souvent et justement citée, fait montre d'une grande capacité d'analyse et de décryptage dans la façon dont elle démêle l'écheveau de la pensée de l'ancien chef du MI6. (Original de l'article sur  le site 'Telegram' de l'auteure, traduction sur ' euro-synergies.hautetfort.com'.)

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