Les grandes organisations de presse ont alerté Jean Castex sur la multiplication d'actions législatives contribuant selon elles à sanctionner les médias dans leur libre exercice. Elles dénoncent «de bien mauvais signaux».
Les principales organisations d'éditeurs de presse françaises ont adressé ce 24 novembre un courrier commun au Premier ministre Jean Castex pour exprimer leur inquiétude face à «la multiplication d'actions législatives sanctionnant la presse», et défendre la loi de 1881 qui consacre la liberté d'informer.
Dans un communiqué publié ce 24 novembre, ces organismes, l'Alliance de la presse (qui représente la presse quotidienne nationale et régionale, ainsi que les hebdomadaires régionaux), le SEPM (presse magazine), le SPIIL (sites d'info) et le FNPS (presse spécialisée) ont annoncé cette démarche.
Cette initiative s'ajoute à la mobilisation grandissante des syndicats de journalistes et des rédactions de nombreux médias contre la proposition de loi Sécurité globale et son très controversé article 24, qui vise à pénaliser la diffusion malveillante d'images de policiers et de gendarmes.
Pour les organisations d'éditeurs de presse, «le caractère vague et potentiellement très large de l'incrimination ainsi créée aurait des effets délétères sur le travail journalistique et éditorial».
Ce sont là de bien mauvais signaux qui sont envoyés non seulement aux médias d'information, mais à l'opinion tout entière
Ils s'inquiètent en outre de propos tenus notamment ces dernières semaines, dont ceux du ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin laissant entendre que les journalistes devaient s'accréditer pour couvrir les manifestations, ou ceux du ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti sur une possible révision de la loi de 1881 sur la liberté de la presse pour mieux lutter contre la haine en ligne.
«Quelle que soit la part de maladresse involontaire dans les écrits et les propos des dernières semaines, ce sont là de bien mauvais signaux qui sont envoyés non seulement aux médias d'information, mais à l'opinion tout entière, précisément au moment où les valeurs de liberté et de tolérance sont mises en cause», estiment les éditeurs de presse.
«Il est, à nos yeux, irresponsable de laisser entendre que la liberté de la presse et les textes qui la protègent seraient vecteurs d'incitation à la haine, ni de délits quelconques, ni encore qu'ils entraveraient le bon fonctionnement de la justice», réaffirment les signataires du courrier.
Jean Castex annonce qu'il saisira le Conseil constitutionnel lui-même
Alors que le vote solennel par l'Assemblée nationale de la proposition de loi Sécurité globale est prévu ce 24 novembre, le Premier ministre Jean Castex a par ailleurs fait savoir qu'il saisirait lui-même le Conseil constitutionnel à propos du fameux article 24, mais a d'ores et déjà tenu à afficher son soutien à un «excellent texte». Et de préciser : «Je ne doute pas que les débats parlementaires qui vont encore se poursuivre permettront de l'améliorer davantage et de clarifier ce qui mérite encore de l'être», avant de renvoyer les critiques à des «procès d'intention».
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