© Souleymane Ag Anara Source: AFP
Vue aérienne de la ville de Kidal, au Mali, le 27 septembre 2020 (photo d'illustration).
«Aujourd'hui, nos forces armées et de sécurité se sont emparées de Kidal», a annoncé le colonel Assimi Goïta, président du Comité national pour le salut du peuple malien, dans un message lu au cours d'un flash spécial à la télévision. Un haut responsable du Cadre stratégique permanent (CSP), alliance de groupes rebelles armés, a paru reconnaître la perte de Kidal.
«Nous continuons notre lutte pour l'honneur et la dignité de notre peuple avec plus de détermination. C'est la fin d'un épisode, mais le feuilleton vient juste de commencer», a-t-il déclaré sous le couvert de l'anonymat. L'armée est «peut-être arrivée à Kidal, mais personne ne les voit. Il n'y a pas eu de combats. Ils bombardent seulement avec des drones et des avions de chasse», a-t-il assuré.
L'étendue du contrôle exercé sur place par l'armée n'est pas claire. Les autorités n'ont pas diffusé d'image. La collecte et la vérification de l'information sont compliquées par l'impossibilité d'accéder au terrain. Les rebelles séparatistes ont fait couper le 10 novembre le réseau de téléphone alors que l'armée progressait vers la ville.
La prise de Kidal est un succès symbolique significatif pour les militaires au pouvoir au Mali depuis 2020. Le pays reste confronté depuis 2012 à la propagation djihadiste et à une crise sécuritaire et politique profonde. Elle parachève une offensive terrestre et aérienne lancée en fin de semaine passée.
Kidal, une ville symbolique et stratégique
Kidal, foyer historique des insurrections indépendantistes et carrefour sur la route de l'Algérie situé à plus de 1 500 km et 24 heures de route de la capitale Bamako, s'est vidée d'une grande partie de ses quelques dizaines de milliers d'habitants, indiquent des messages postés sur les réseaux sociaux.
Deux officiers ont indiqué à l'AFP sous le couvert de l'anonymat que les rebelles avaient quitté la ville quand les soldats y sont entrés. Un autre officier a déclaré que l'armée contrôlait en particulier la piste aérienne et le camp récemment évacué par la mission de l'ONU.
L'armée et l'Etat maliens n'avaient quasiment pas repris pied à Kidal depuis mai 2014. Les forces maliennes en avaient alors été chassées quand une visite du Premier ministre de l'époque, Moussa Mara, avait donné lieu à des affrontements avec les rebelles touaregs, qui avaient causé de lourdes pertes dans les rangs de l'armée.
Les rebelles, qui s'étaient soulevés deux ans plus tôt en même temps que les salafistes, avaient accepté un cessez-le-feu avec le gouvernement quelques jours plus tard. Ils assuraient la sécurité et faisaient régner l'ordre à Kidal depuis lors. Les djihadistes, eux, ont continué à combattre l'Etat malien et toute présence étrangère. Ils ont étendu leurs agissements au centre du Mali et aux pays voisins.
Les séparatistes ont repris les hostilités en août. Le retrait de la mission de l'ONU (Minusma), poussée vers la sortie par les militaires, a déclenché une course au contrôle du territoire entre les acteurs armés du nord (armée, séparatistes, djihadistes).
«Notre mission n'est pas achevée»
Le pouvoir malien a signifié de longue date sa détermination à reprendre Kidal. L'insoumission de Kidal et de sa région, où l'armée avait subi d'humiliantes défaites entre 2012 et 2014, était un motif ancien d'irritation à Bamako, y compris pour les militaires désormais au pouvoir qui ont fait de la restauration de la souveraineté territoriale leur mantra. En décrochant de Kidal le 31 octobre, la Minusma a créé un appel d'air.
Une importante colonne militaire stationnée depuis début octobre à Anéfis, à environ 110 kilomètres au sud, s'est mise en branle en fin de semaine passée en direction de Kidal. Elle a subi en route les attaques des rebelles. Aucun bilan humain et matériel n'a pu être établi de sources indépendantes. Goïta a parlé de «lourdes pertes» infligées à l'ennemi. «Notre mission n'est pas achevée. Je rappelle qu'elle consiste à recouvrer et à sécuriser l'intégrité du territoire», a-t-il déclaré.
Le chef de la diplomatie malienne, Abdoulaye Diop, a parlé sur les réseaux sociaux d'«avancée considérable» qui «démontre la pertinence des choix stratégiques opérés par le Mali». Le Collectif pour la défense des militaires, un des groupes les plus actifs en soutien aux militaires, a appelé à se rassembler ce 14 novembre à Bamako pour remercier les «colonels libérateurs».