06/12/2025 ssofidelis.substack.com  11min #298218

Menaces sur la vie de Marwan Barghouti, le leader palestinien emprisonné par Israël

Marwan Barghouti lors d'une audience au tribunal de Jérusalem occupée, le 25 janvier 2012 © Bernat Armangue / AP Photos 

Par Le Centre Palestinien D'Information, le 5 décembre 2025

Suivi de : 200 grands noms du monde des arts & des affaires réclament la libération du "Mandela palestinien"

Le service de presse Asra a lancé un avertissement sérieux concernant la menace réelle et croissante pesant sur la vie de Marwan Barghouti, un leader emprisonné âgé de 66 ans, dans un contexte d'attaques systématiques le visant lui et sa famille, dans le cadre d'une politique de représailles claire.

Une récente tactique de harcèlement a consisté à appeler la famille de Barghouti pour lui transmettre de fausses informations alarmantes sur son état de santé, une stratégie qui reflète la politique plus généralisée d'Israël axée sur les pressions et les représailles contre les familles des prisonniers.

Cette dernière violation s'ajoute, selon Asra, à l'isolement, à la torture, au refus des visites et aux menaces ouvertes proférées par le ministre israélien d'extrême droite Itamar Ben Gvir, qui révèlent une intention délibérée de mettre en danger la vie de Barghouti.

La situation de Barghouti et de tous les prisonniers est désormais entièrement sous la responsabilité de l'occupation israélienne, a déclaré le média, appelant les Nations unies, la Croix-Rouge et les organisations de défense des droits humains à intervenir d'urgence, à ouvrir une enquête indépendante et à mettre fin à l'escalade des crimes commis dans les prisons israéliennes.

Il ajoute que le silence de la communauté internationale donne carte blanche à l'occupation israélienne pour poursuivre ses exactions contre les détenus, et constitue un grave manquement à la protection de leur vie.

Le cas de Marwan Barghouti, un symbole des atrocités israéliennes

La Société des prisonniers palestiniens (PPS) tient également l'occupation israélienne directement responsable du sort de Marwan Barghouti et de tous les détenus. Elle déclare que les événements en cours s'apparentent à une campagne d'extermination à l'intérieur des prisons, symbolisant les atrocités généralisées commises par Israël contre les Palestiniens.

Dans une déclaration publiée vendredi, la PPS a exprimé sa vive inquiétude quant au sort de Marwan Barghouti, après un nouvel acte de torture psychologique commis contre sa famille, une pratique systématique d'Israël conçue pour briser tout espoir chez les détenus et leurs proches.

Ce matin, un individu se présentant comme un ancien détenu a appelé la famille de Marwan et lui a transmis de fausses informations alarmantes sur ce que ce dernier serait en train de subir. Selon la PPS, de telles pratiques font partie de la stratégie de terreur actuelle d'Israël contre les prisonniers et leurs familles, qu'elle qualifie de crimes organisés.

Mort lente et liquidation délibérée des prisonniers

Le PPS a réaffirmé que les menaces ouvertes, les violences physiques et les attaques dirigées contre Barghouti et d'autres figures de proue du mouvement des prisonniers constituent une politique délibérée de lente agonie et d'élimination.

Des milliers de détenus incarcérés dans les prisons israéliennes sont victimes d'abus incessants, notamment de torture, de privation de nourriture, d'isolement, d'agressions sexuelles et de refus de soins médicaux, autant de formes d'exécutions au ralenti.

Les autorités pénitentiaires continuent d'isoler plusieurs leaders dans des conditions éprouvantes et dégradantes, tout en les soumettant à des punitions collectives et à des violences constantes. Barghouti lui-même a été publiquement menacé dans une vidéo par le ministre extrémiste Ben Gvir, ce que le Club a qualifié d'incitation claire à tuer des prisonniers, en particulier alors qu'un projet de loi autorisant l'exécution de détenus est en cours d'examen.

Appel à une action internationale urgente

Le PPS a souligné que les crimes perpétrés en toute impunité contre les prisonniers entachent le bilan de la communauté internationale, qui continue de couvrir les politiques d'assassinat et de répression d'Israël.

L'ONG de défense des droits humains a également appelé à une intervention internationale immédiate et concrète pour protéger les détenus et traduire en justice les dirigeants israéliens pour leurs crimes.

Traduit par  Spirit of Free Speech

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Marwan Barghouti lors d'une audience au tribunal de Jérusalem occupée, le 25 janvier 2012 © Bernat Armangue / AP Photos

200 grands noms du monde des arts & des affaires réclament la libération du "Mandela palestinien"

Par  Juan Cole, le 3 décembre 2025

Ann Arbor -  Patrick Wintour, du  Guardian , rapporte qu'environ 200 personnalités éminentes du monde littéraire, culturel et politique ont signé une lettre ouverte réclamant la libération de l'activiste palestinien Marwan Barghouti, emprisonné en Israël. Barghouti, 66 ans, est largement considéré comme l'une des rares personnalités capables d'unir les Palestiniens et de les mener vers la création d'un État. Israël l'emprisonne depuis 23 ans à l'issue d'un procès que la plupart des observateurs jugent pour le moins extrêmement contestable. Israël semble se préparer à une vague d'exécutions de prisonniers palestiniens, dont certains sont détenus sans inculpation ni procès pour une durée indéterminée.

La liste des signataires, qui comprend de nombreuses célébrités, compte Margaret Atwood, connue pour son roman "La Servante écarlate", Mark Ruffalo, alias l'Incroyable Hulk, Philip Pullman, auteur de "À la croisée des mondes", Paul Simon, Benedict Cumberbatch, alias Dr Strange, Sting, l'artiste chinois Ai Weiwei (lui-même arrêté et détenu sans inculpation 81 jours), l'auteur Stephen Fry, l'entrepreneur milliardaire Richard Bramson, et d'autres écrivains et personnalités culturelles de premier plan.

Certains comparent cette campagne à celle qui a permis de libérer Nelson Mandela des prisons de l'Afrique du Sud de l'apartheid à la fin des années 1980, et qui a présagé la fin de l'apartheid lui-même.

Le leadership palestinien bat de l'aile, notamment sous l'influence d'Israël et des États-Unis. Les peuples occupés sont souvent divisés et gouvernés par des occupants étrangers qui les corrompent, les espionnent et les manipulent. Ils font de tout leader indigène qui réussit un collaborateur ou un terroriste. Ils nuisent à l'économie locale et favorisent ainsi l'échec d'une société à long terme. Les accords d'Oslo de 1993 ont réduit l'Organisation de libération de la Palestine à un instrument de contrôle des Palestiniens, pour prévenir toute révolte contre leur occupation brutale. En conséquence, l'OLP est aujourd'hui largement méprisée. Par ailleurs, le refus d'Israël d'autoriser la tenue d'élections depuis 2006 a transformé les dirigeants de l'Autorité palestinienne en une gérontocratie gangrenée par la corruption.

Le Hamas a été financé par les Israéliens puis confiné dans un grand camp de concentration à ciel ouvert, devenant ainsi une gouvernance plus hostile que complaisante jusqu'aux attaques du 7 octobre 2023, actant la fin de toute négociation israélo-américaine avec des représentants de ce gouvernement élu., actant la stratégie d'Israël d'affaiblissement et de division dans les rangs des dirigeants palestiniens.

Barghouti n'a jamais été mêlé à la corruption et à la collaboration qui entachent désormais la réputation de l'OLP, car, bien qu'il soit membre du Fatah, il a été emprisonné pendant cette période troublée.

 Né en 1959 dans le hameau de Kober, dans le gouvernorat de Ramallah, il est issu d'une famille de la classe moyenne. Son épouse, Nadwa, est avocate et militante pour les droits des femmes.

Adolescent, il a rejoint le Parti communiste et participé à des manifestations pacifiques. Comme l'a montré l'historien Joel Beinin dans son ouvrage  Was the Red Flag Flying There? Marxist Politics and the Arab-Israeli Conflict in Eqypt and Israel 1948-1965, il a rejoint le Parti communiste à l'adolescence et a participé à des manifestations pacifiques., le Parti communiste était l'un des rares mouvements politiques en Israël et en Palestine à compter à la fois des membres israéliens et palestiniens, la doctrine marxiste rejetant le chauvinisme nationaliste.

Cependant, il estimait que le problème israélo-palestinien ne pouvait pas être résolu en poussant la chansonnette autour d'un feu de camp, et il a rejoint le Fatah, le groupe dominant au sein de l'OLP, dirigé par Yasser Arafat. En 1978, les Israéliens ont arrêté Barghouti, alors âgé de 19 ans, uniquement pour son appartenance à l'OLP. Il a été emprisonné quatre ans, et a terminé ses études secondaires à la Prince Hassan High School de Bir Zeit en suivant des cours par correspondance depuis la prison.

Après sa libération en 1982, alors qu'il avait 23 ans, il a intégré l'université de Bir Zeit, où il a obtenu une licence en histoire et en sciences politiques, puis a obtenu une maîtrise en relations internationales dans cette même université. Au cours des années 1980, il s'est investi activement dans la politique universitaire et a été élu président du conseil étudiant.

En 1987, les Israéliens l'ont  expulsé vers la Jordanie, ce qui constitue un crime de guerre, car la quatrième Convention de Genève de 1949 interdit à une puissance occupante de déplacer des membres d'une population occupée. Il a vécu en exil forcé jusqu'en 1993, date à laquelle Israël a signé les accords d'Oslo avec l'OLP, qui a alors reconnu Israël, mettant ainsi fin au conflit entre les deux parties.

De retour sur sa terre natale, il a obtenu un poste d'enseignant sur le campus principal d'Abu Dis de l'université Al-Quds, à Jérusalem. Barghouti était connu pour ses bons rapports avec les Israéliens dans les années 1990. Il est ensuite devenu secrétaire général du Fatah en Cisjordanie, puis a été élu au Parlement palestinien créé après les accords d'Oslo. Il a fondé le groupe paramilitaire laïc Tanzim pour lutter contre la montée en puissance des militants fondamentalistes du Hamas. Il était considéré comme l'un des jeunes espoirs de la politique palestinienne sur lequel comptaient d'anciens dirigeants comme Yasser Arafat. Il critiquait toutefois la corruption endémique au sein de l'Autorité palestinienne.

Pendant la deuxième Intifada, les relations entre Israéliens et Palestiniens se sont à nouveau envenimées. En 2002, Barghouti a écrit un éditorial pour le Washington Post intitulé "Si vous cherchez la sécurité, mettez fin à l'occupation". Il y déclarait :

"Au cours des 15 derniers mois, Israël a tué plus de 900 civils palestiniens, dont 25 % avaient moins de 18 ans",

ajoutant

"Je ne suis ni un terroriste, ni un pacifiste, juste un homme ordinaire issu du peuple palestinien. Je défends le droit à la légitime défense en l'absence de tout soutien extérieur. Un principe qui pourrait bien me coûter la vie".

Par la suite, une faction militante du Fatah a mené des attaques en Israël, tuant des dizaines d'Israéliens, et les autorités israéliennes ont accusé Barghouti d'être impliqué, sans toutefois présenter la moindre preuve de cette allégation. En 2004, il a été condamné à cinq peines de prison à perpétuité.

Je condamne fermement le terrorisme consistant à attaquer des civils à des fins politiques. Mais dans le monde réel, ceux qui recourent à ces méthodes parviennent toutefois quelquefois à revenir sur la scène politique. Menahem Begin, qui se vantait d'avoir mitraillé des femmes et des enfants palestiniens innocents à Deir Yassin en 1948, est devenu Premier ministre d'Israël et a reçu le Nobel de la paix. Ahmed al-Shara, ancien chef d'une branche d'Al-Qaïda emprisonné par les Marines américains en Irak et a commis bien plus d'actes terroristes que Begin, était récemment l'invité d'honneur de la Maison Blanche de Trump. Nelson Mandela lui-même a commis des actes de violence politique dans sa jeunesse, pour lesquels il a été emprisonné ; il n'était pas pacifiste. Une fois libéré, il est devenu président de l'Afrique du Sud et a appelé à la réconciliation.

Il a obtenu en prison un doctorat en sciences politiques en 2010 et s'est fait connaître pour avoir plaidé en faveur de la retenue et contre la violence auprès de l'opinion publique palestinienne.

Son conseil aux Israéliens en 2002, qui n'a malheureusement pas été suivi, reste d'actualité :"Si vous cherchez la sécurité, mettez fin à l'occupation". Si Barghouti pouvait apporter sa contribution, Israël pourrait peut-être se sauver des pulsions autodestructrices qui le mènent à sa perte.

Traduit par  Spirit of Free Speech

*  Juan Cole est le fondateur et rédacteur en chef d'Informed Comment. Il est professeur d'histoire à l'université du Michigan, où il occupe la chaire Richard P. Mitchell. Il est l'auteur, entre autres ouvrages, de  Muhammad: Prophet of Peace amid the Clash of Empires et  The Rubaiyat of Omar Khayyam. Suivez-le sur Twitter  @jricole ou sur la  page Facebook d'Informed Comment.

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