15/10/2025 reseauinternational.net  18min #293456

Mont Athos

par Panagiotis Grigoriou

Mon voyage, à vrai dire mon pèlerinage au Mont Athos, fut une expérience authentique, au sens entier du terme.

Au Mont Athos, 2018.

En ce lointain 1988, je débarquais à bon port sur la légendaire presqu'île monastique, le «Jardin de la Sainte Vierge», d'après les habitués parmi ses nombreux pèlerins. Je projetais d'y effectuer un premier bref séjour de terrain, celui de l'ethnologue en herbe que j'étais, ou... que je croyais l'être. Il y a de cela 37 ans et j'avais alors 22 ans.

Rappelons que le Mont Athos est le haut lieu de la plus importante communauté monastique en ce territoire quasi-autonome du nord de la Grèce en Chalcidique, dans la région de la Macédoine hellénique. Il réunit vingt monastères et près de 1500 moines orthodoxes grecs et d'autres nationalités.

Cependant, en son sein et sur son territoire s'applique une législation distincte, dont notamment le fameux Ávaton, d'après une chrysobulle, autrement-dit, une règle rédigée vers 1045 par l'empereur byzantin Constantin IX le Monomaque, interdisant à toute femme d'y pénétrer. Ou plus précisément, l'interdiction faite «à toute créature femelle vertébrée domestique», à l'unique exception des chattes pour chasser les souris.

Ouranoúpolis, porte d'entrée du Mont Athos, 2018.

Ou sinon, comme on peut lire sur le site de l'UNESCO à son propos, «couvertes de magnifiques forêts de châtaigniers et d'autres types de forêt méditerranéenne, les pentes escarpées du Mont Athos sont jalonnées de vingt imposants monastères avec leurs dépendances. D'une superficie d'un peu plus de 33 000 hectares, le site couvre l'intégralité de l'étroite bande rocheuse de la plus orientale des trois péninsules de la Chalcidique qui pénètre dans la mer Égée, dans le nord de la Grèce».

J'avais prévu la rédaction d'un article sur le sujet, ceci en guise de préparation d'un long terrain d'enquête, dans le cadre de mon futur mémoire de Maîtrise au sein du Département d'Ethnologie à l'Université de Paris-X Nanterre. La force je dirais, de mon expérience... athonite, m'en ont définitivement dissuadé et cela pour cause.

D'abord, j'avais réalisé d'emblée qu'à mon humble niveau, le Sacré ne s'y prêtait guère à une telle paraphrase, sans quoi synonyme d'Hybris et d'ailleurs, j'avais déjà dévoré toutes ces pages remarquables du regretté Jacques Lacarrière, écrites près d'un demi-siècle auparavant, suite à son séjour au Mont Athos, publiées comme on sait à travers ses ouvrages.

Vers le Mont Athos, 2018.

Comme il est souligné par ailleurs, «les trois premières visites à Athos en 1950, 1952 et 1953 de cet agnostique déclaré ont fourni le sujet de son premier livre Mont Athos, montagne sainte, un album de textes et de photographies paru en 1954 chez Seghers. Les séjours dans ce lieu mystique l'ont également inspiré à écrire plusieurs livres de spiritualité».

Ainsi, toute répétition en la matière et de ma part me semblait alors bien vaine, voire superflue. Et j'avais raison.

Finalement, un an plus tard, je débarquais sur l'île de Lesbos pour enfin y effectuer le séjour d'enquête pressenti, car exigé dans le cadre de mon cursus et de cette expérience extraordinaire au sein d'une communauté de pêcheurs, je proposerai prochainement au lecteur francophone l'intégralité de mon carnet de notes, commenté et annoté, sous forme d'ouvrage disponible en librairie classique et électronique.

Le Diamonitírion, le laissez-passer pour visiter le Mont Athos, 2018.

Cependant, j'ai conservé l'empreinte de ce bref séjour au Mont Athos, sous forme de carnet de notes que j'ai rédigé à chaud, jour par jour, notes en somme elliptiques et qui ne couvrent d'ailleurs guère tout le champ bien juvénile de mon expérience sur place.

Sauf que l'authenticité y est, de même que l'état d'esprit qui fut le mien en cette lointaine «Belle Époque», un esprit déjà ardemment critique envers une certaine phénoménologie du temps d'après qui est le nôtre, dont celle du tourisme de masse et du modernisme à tout crin, d'après en tout cas, ce que je croyais interpréter du haut de mes 22 ans !

Extraits de mon carnet de notes du Mont Athos. Août 1988.

Le lecteur trouvera ici l'essentiel de mon petit carnet de notes, rédigées naïvement, ici dans leur traduction en français pour les besoins de cet article, suivies si besoin par mon commentaire actuel. Et quant aux photographies qui accompagnent le texte, elles ont été réalisées par mon ami Manólis, lequel a visité ces hauts lieux de l'Orthodoxie en pèlerinage, très exactement trente années plus tard, en 2018. Je le remercie de tout cœur et autant naturellement de la part des lectrices et des lecteurs de ce blog.

Et pour commencer, dans une première inscription dans mon carnet personnel, j'annonçais déjà quelques mois auparavant, mon intention de me rendre au Mont Athos.

Au Mont Athos, 2018.

«Paris, 23 mai 1988» «Il y a une montagne en Europe, belle et Majestueuse, sous forme de presqu'île, faite pour le monachisme car préparée de la sorte par les Saints Hommes, désignés sur place par la Force, afin d'y accomplir la commune lutte des humains, y dégager l'inexplicable, y guérir et y nourrir l'esprit. Voilà où j'irai».

«Parlers ainsi anciens, idées alors byzantines sur Athos, entières et authentiques, bien loin des figures effarantes et effacées, en somme insensibles, s'agissant de ceux et d'ailleurs de celles qui nous entourent en cette ville du nord. Allons-y enfin, prenons le chemin qui mène jusqu'au Mont Athos, là où l'initiation demeure profonde et que la terre fleurit, rien que sous l'apprentissage mystique lors des laudes».

Au Mont Athos, 2018

«Ouranoúpolis, le 8 août 1988» «Ouranoúpolis, littéralement Ville du Ciel, cité Céleste ! Une bourgade étrange, mais envahie déjà par le tourisme. Mais bon sang, d'où descendent-ils tous ces barbares ? Ils sont arrivés en voiture, sauf que comme ils ne peuvent guère poursuivre à pied jusqu'au Mont Athos, ils restent en ce lieu, histoire de tout saloper, comme à leur habitude».

«Ouranoúpolis, c'est la porte d'entrée, le port d'embarquement à destination du Mont Athos. Sauf que pour s'y rendre, il faut déjà être un homme et ensuite, tout visiteur doit disposer du Diamonitírion, une autorisation spéciale émise par la Communauté des moines. C'est ainsi que de nombreux voyageurs Grecs comme étrangers, n'iront guère plus loin».

Inutile de dire qu'à l'aube déjà avancée du XXIe siècle, Ouranoúpolis, à l'instar de l'ensemble de la Chalcidique, subit les effets d'un tourisme de masse... plus que dévastateur.

Au Mont Athos, 2018

«Mon anabase vers le Mont Athos» «L'autocar des lignes régulières est parti de Thessalonique. Il est plein. L'itinéraire est différent de l'ordinaire, de même que sa destination finale. Les passagers ne sont pas ces touristes amorphes et ahurissants à la peau cramée au soleil, ni ces habituels vacanciers, ces Grecs des villes, au regard blasé et pour tout dire aculturés. À bord du car, je distingue enfin ces bouilles travaillées par le soleil et le vent, tous Grecs de notre Macédoine, dégourdis et alertes».

«Ils sont alors paysans, soldats, popes et parmi eux, il y a ces jolies femmes du coin, malignes et qui comme de nombreux autres locaux à l'âge mûr, ils regagnent de la sorte tous, leurs villages. Et ces bourgades comme elles sont si nombreuses, les arrêts marqués par l'autocar sont décidément autant incessants. Dépassant la localité d'Arnaía, nous traversons une forêt extraordinaire, en descendant comme on dit jusqu'au troisième pied de la Péninsule de la Chalcidique, celui du Mont Athos».

Au Mont Athos, 2018

«Nous traversons Ierissós, lieu où Xerxès le roi des Perses, avait tenté sa chance, s'hasardant à y percer un canal mais en vain, puis, nous atteignons enfin Ouranoúpolis. Ces toponymes sont de toute évidence célestes quand on les prononce et pourtant, leur pesanteur historique demeure en même temps immense. On contemple la mer des deux côtés en descendant et au fond déjà, on distingue clairement le Mont Athos».

«Le débarquement» «Je descends de l'autocar à Ouranoúpolis vers 17h30. Le voyage depuis Thessalonique aura duré trois heures. Ma première question : Quand part-il le bateau à destination de Dáfni, l'embarcadère du Mont Athos. Réponse : Soit à 7h30 soit à 11h30 du matin, donc la décision est prise, je passe la nuit à Ouranoúpolis. Deuxième question : Servez-vous de la moussaka ? Oui ! Grand succès, bon appétit !»

Au Mont Athos, 2018.

«Le restaurant est presque vide. À cette heure-ci, ils sont tous en train de digérer, en attendant d'avoir faim plus tard dans la soirée. Cependant trois barbares, c'est-à-dire trois Allemands, une fille et deux garçons âgées de 16 à 18 ans, occupent la table située juste devant la mienne. Ils réclament de la viande gyros, grillée à la verticale et découpée en lamelles, puis des frites».

«Ils beuglent fort et ils ricanent dans leur langue. Le serveur, un jeune Grec de leur âge se donne de la peine à leur parler dans leur langue barbare que manifestement il maîtrise partiellement. Eux, ils arrivent à se faire comprendre sauf qu'ils se moquent ostensiblement du jeune serveur».

«Comme le serveur ne leur rend pas la petite monnaie, l'Allemand barbare, enfant de pure souche d'idiots, saisi un billet de cent drachmes, le roule à la manière d'une cigarette et le met dans sa bouche entre ses lèvres, tout en réclamant du feu au serveur. Ce dernier n'obtempère pas, il fixe alors l'Allemand de son regard farouche, tout en retenant sa colère sans prononcer un seul mot. Le jeune Allemand insiste, réclamant alors son briquet au serveur. Le Grec leur tourne sitôt le dos et il s'en va. La bande de salopards alors quitte l'établissement ; qu'ils aillent au diable !»

Au Mont Athos, 2018.

«Par la suite, j'ai recherché une chambre à louer, tout le monde me dit que c'est la saison touristique en ce moment et pourtant, j'ai facilement repéré une chambre, d'ailleurs disposant d'un lit double pour 2000 drachmes pour ma nuit à Ouranoúpolis».

«9 août 1988» «J'ai pris le bateau qui part vers midi. Il est rempli, à son bord de nombreux moines et autant de laïques, tous hommes du peuple et bien peu d'étrangers. Les passagers sont à moitié vieux et à moitié jeunes. Ces jeunes laïques des classes populaires ont les visages bien blêmes, on dirait même byzantins, ils sont tous issus des communautés des Grecs d'Asie Mineure et du Pont Euxin, leurs ancêtres ont été chassés de Turquie en 1922».

Au Mont Athos, 2018.

«Hommes à vrai dire marqués par les éléments et dont la destinée n'a été transférée dignement et avec justesse sur du papier, qu'à travers les textes de l'écrivain Yórgos Ioánnou».

«Ces jeunes qui portent d'ailleurs la moustache ou la barbe, discutent entre eux, s'exprimant avec passion sur tant de sujets, de ceux que l'esprit des vacanciers au-delà d'Ouranoúpolis, n'imagine même pas. Ils se remémorent la lutte des Iconolâtres contre les Iconoclastes, ils évoquent les incursions des Slaves dans l'espace hellénisé durant le temps de Byzance et ils finissent par faire la chronique de l'héritage du monachisme antique».

Rappelons au sujet des icônes, que l'intervalle dite iconoclaste de l'Empire byzantin ou querelle des images, est cette période qui s'étend de 726 à 843 pendant laquelle, les empereurs byzantins iconoclastes interdisent le culte des icônes représentant le Christ ou les Saints et ordonnent la destruction systématique des images.

Pèlerin... gourmand. Mont Athos, 2018.

«À mes côtés, deux autres jeunes, Fótis et Antónis sont du voyage et nous devenons en quelque sorte déjà amis. Tous deux, ils ont été d'abord formés à l'École des sous-officiers de l'Armée de Terre à Trikala en Thessalie et actuellement, ils poursuivent leur instruction militaire à l'École des Officiers à Athènes, ils en sont à leur troisième année. Ils figurent parmi ces jeunes Grecs au cœur grand et à aux sentiments purs, propres aux enfants du peuple».

«D'ailleurs Fótis est croyant fidèle et profond de l'Orthodoxie, cœur et âme comme on dit. Ainsi, c'est en leur compagnie que je pénètre le dedans, expression consacrée afin de désigner l'entrée au Mont Athos, en quittant l'extérieur et son bas monde».

«Pour ce qui est des démarches administratives, les choses se passent un peu à l'envers, car bien que les garde-côtes aient conservé ma pièce d'identité, je ne débarque pas à Dáfni pour ensuite me rendre à Karyés, le chef-lieu administratif du Mont Athos afin de me procurer mon laisser-passer, le fameux Diamonitírion, mais nous descendons en amont au monastère de Xenofóndos situé en bord de mer, où les moines nous acceptent même sans le fameux laisser-passer».

Au Mont Athos, 2018.

«Cette expression, se diriger vers l'intérieur, bien que à premier abord elle semble simpliste, elle indique en réalité tout le chemin de la médiation à accomplir. Ici au Mont Athos, le pèlerin visiteur se trouve resserrée et en même temps il devient un assiégé libre, rien que par la volonté de Dieu. En réalité, il est d'abord assiégé par le monde de l'extérieur, ce monde des autres, de l'hybris, du rythme effréné et de l'existence superficielle».

«En entrant, nous avons été conduits à l'Archondaríki, la salle de bienvenue où le moine Archondáris, l'hospitalier chargé de l'accueil des hôtes telle une figure de la Bible à la soutane usée, nous a offert en guise de bienvenue du loukoum... byzantin, ainsi que de l'eau, que l'on dirait alors déjà bénite. Après une certaine attente fort agréable, nous avons été conviés au repas. Notre nourriture, c'est un plat de ratatouille servi froid mais au goût extraordinaire, que nous mangeons dans des assiettes en fer. De même que la feta et le pain, dont le goût n'a rien de commun avec ce que l'on grignote alors en dehors».

Modernité automobile. Au Mont Athos, 2018.

«Ce pain laisse au palet un léger arrière-gout aigre, car c'est un pain fait maison, lequel se conserve durant plusieurs jours. Fótis, a sorti de son sac du café, il l'a offert à Archondáris, puis il a lavé la vaisselle, ne voulant guère fatiguer notre moine, car manifestement ce dernier était déjà assez fatigué. Nous avons été conduits dans nos cellules aux fenêtres donnant directement sur la mer, par une vue imprenable et découvrant un paysage splendide, qu'alors en somme il est impossible à décrire».

«Par la suite, nous avons fait la sieste de l'après-midi avant notre première initiation au sein du monastère. Lorsque l'on croise un moine, on ne dit pas bonjour, seulement on dit bénissez-nous et lui il répond : Le Seigneur. Cependant, j'ai remarqué que tous les moines ne répondent pas de la sorte. Certains demeurent apathiques et muets, s'agit-il de leur devoir spirituel ?»

Au Mont Athos, 2018.

«À 18h30, heure du dehors et du monde, dite heure cosmique, c'est le moment des vêpres. La messe se déroule en deux temps, d'abord au sein du narthex qui précède l'entrée, puis dans sa partie principale, sous le dôme. On sent que le sentiment religieux, la foi, y sont vraiment de la partie. Des hommes grands mesurant près de deux mètres, se plient alors en quatre, prosternés devant les icones porteuses de miracles. Cette messe authentiquement byzantine est à elle seule une expérience».

Notons qu'au Mont Athos, les heures, le temps comme on dit, n'est pas le même qu'au reste de la Grèce. En d'autres termes, minuit en temps byzantin correspond à l'heure du coucher du soleil, plus simplement, à notre après-midi. En ce temps byzantin donc, les horloges doivent au coucher du soleil et cela à tout moment de l'année, indiquer minuit très exactement.

Au Mont Athos, 2018.

À partir de ce moment, la première heure de la nuit commence à compter, puis la deuxième et ainsi de suite. Cette pratique est commune aux 19 monastères du Mont Athos à l'exception du monastère d'Ibéron, lequel utilise le système horaire Chaldéen, où l'heure est réglée en fonction du lever du soleil, de sorte que la première heure du jour commence au lever du soleil.

«Les Saints Protecteurs du monastère Xenofóndos sont Saint Georges, Saint Dimitri et la Sainte Marie. L'icône miraculeuse de Saint Georges se trouvait aux dires des moines, à Constantinople, ceci du temps des Iconoclastes. Ces derniers, ont alors voulu la brûler. Par miracle cependant, l'icône ne prenait pas feu. Ainsi un soldat a planté sa lance dans le cou de Saint Geórgios au milieu de l'icône et voilà le deuxième miracle, il y a eu du sang qui jaillissait de la plaie».

Visiteurs et pèlerins. Mont Athos, 2018.

«Terrorisés, les soldats ont abandonné l'icône et un homme vraiment pieux, l'a prise pour la larguer dans la mer du côté du Bosphore en disant : Et maintenant mon Seigneur, l'Icone est entre Tes mains. Et l'Icône de Saint Georges a échoué, émergeant de la mer ici justement, devant le monastère et aussitôt une source d'eau thérapeutique y a été en même temps découverte. Oui, j'ai vu cette eau».

«Et quant à l'autre icône, celle de la Sainte Vierge l'Odigítria, celle qui montre la voie, elle se trouvait jusqu'en 1930 au monastère de Vatopédi, sauf qu'elle venue toute seule jusqu'ici, dans ce monastère de Xenofóndos, sauf que les moines de Vatopédi ont considéré que l'icône avait été volée, ils l'ont ainsi récupérée pour vraiment la stabiliser dans leur église».

Au Mont Athos, 2018.

«Seulement, l'icône est revenue à Xenofóndos et ainsi tous les moines ont réalisé qu'il s'agissait de la volonté divine de la Sainte Vierge. Un moine nous a même raconté, qu'il y a quelques années, un Protestant s'en est moqué devant l'icône en disant : Alors qu'elle fasse autant pour moi son miracle et à l'instant, cet homme est devenu muet».

«Voilà donc qu'est venu le moment pour moi, celui du temps enfin byzantin».

«11 août 1988» «Chemin de terre du Mont Athos, chemin céleste sur terre. Entre le monastère roumain et celui de Megístis Lávras».

Au Mont Athos, 2018.

«15 août 1988» «Aujourd'hui, d'après le calendrier cosmique, c'est le jour de ma fête».

Notons que le prénom masculin d'origine grecque qui est le mien, Panagiótis, qui signifie «tout saint» ou «très saint», fait référence à la Vierge Marie, appelée Panagía en Grèce. Le 15 août, est l'un des moments calendaires les plus importants en Grèce.

La journée est dédiée à la Dormition de la Vierge Marie, la Panagia. Il s'agit en effet, d'un événement central dans la tradition orthodoxe grecque et c'est la deuxième grande fête dans le ressenti populaire grec, la première étant la Pâque et la troisième, Noël.

Au Mont Athos, 2018.

«En ce jour, notre Empereur à nous tous, à savoir Chrístos Sartzetákis, le président de la République, prononce ses discours ardents et d'abord de circonstance. La Grèce subit le déplacement de sa population de la foule estivale si l'on croit la radio, car la radio est notre seul moyen de communication avec le monde extérieur, celui de la Péninsule de l'Hellade».

«Monastère Grigoríou, martyre et Saint, nous y avons dégusté le mets simple byzantin et nous nous préparons pour notre exode demain, notre sortie du Mont Athos. Sans condition. Les moines dialoguent avec nous afin de fixer les limites de nos péchés, ainsi que celles de notre glorieuse foi. Puisque nous allons être dessaisis du rythme byzantin dans notre temps, eh bien, sortons de l'Athos, nous tous, alors ses humbles pèlerins».

Au Mont Athos, 2018.

Je n'ai plus jamais visité le Mont Athos, en tout cas pour l'instant. J'ai toutefois gardé le souvenir intact de ce voyage initiatique, les odeurs de la Sainte Montagne, le goût du pain, ainsi que la spiritualité des moines, de certains d'entre eux en tout cas. Et naturellement, la quasi présence des chats des lieux, chattes femelles comprises il faut préciser.

Et quant à Ouranoúpolis, elle est aujourd'hui une cité balnéaire très prisée des touristes, en plus des pèlerins qui désormais visitent par milliers la communauté monastique du Mont Athos dont le port de Dáfni, qui se trouve toujours à moins de deux heures de navigation par bateau.

Au Mont Athos, 2018.

Mes amis qui s'y rendent régulièrement, rapportent que ladite «modernisation» a gagné le Mont Athos et que de nombreuses routes ont été tracées en trente ans, depuis mon pèlerinage. Puis, un véritable service de navettes routières y assure la liaison entre les monastères. D'ailleurs, pour s'y rendre, il faut réserver sa place et faire établir la délivrance de son laisser passer près de trois mois auparavant.

Enfin, il faut prendre contact avec les moines de chacun des monastères que l'on veut visiter, car on ne peut y séjourner qu'une nuit au sein de chaque monastère et le nombre de cellules disponibles se réduisent souvent à moins de cinq pèlerins par jour. Il y a 30 ans, je me suis présenté sur place et la délivrance de mon laisser passer fut alors immédiate.

Au Mont Athos, 2018.

Internet fait partie désormais de l'univers monastique, l'Union européenne subventionne les rénovations sur place et les rares puristes subsistants dans l'Orthodoxie grecque, estiment que cela conduit tout droit à la «rénovation» même des règles canoniques, ainsi qu'à sa géopolitique y afférente.

C'est-à-dire, inféodée au Patriarcat Orthodoxe prétendument Œcuménique de Constantinople, lui-même satellisé comme on sait entre autres par l'OTAN, allant même dans un certain futur indéterminé jusqu'à la suppression partielle ou totale de la règle du légendaire Ávaton.

En tout cas et comme me le dit l'ami Manólis, les chats de la Sainte Montagne sont toujours à leur place, car telle est leur mission semble-t-il, entre prière et méditation. Dieu merci !

Chats... en mission. Mont Athos, 2018.

source :  Greek City

Photo de couverture : Au Mont Athos, 2018

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