13/08/2019 2 articles cadtm.org  5 min #160309

[Podcast] Virage à droite en Grèce

Kyriakos Mitsotakis, chef du parti néo-démocrate d'opposition grec, salue ses partisans alors qu'il quitte un bureau de vote après avoir voté lors des élections générales tenues à Athènes le 7 juillet 2019. Kyriakos Mitsotakis, chef du parti néo-démocrate d'opposition grec, salue ses partisans alors qu'il quitte un bureau de vote après avoir voté lors des élections générales tenues à Athènes le 7 juillet 2019 (Crédits : ARIS MESSINIS - AFP)

Ce samedi 10 août, Eva Betavatzi, membre du CADTM Belgique était l'invitée de l'émission Le Magazine du Weekend sur France Culture, présentée par Emilie Chaudet, au côté de Stathis Kouvelakis, philosophe et politologue, et Tiago Moreira Ramalho, doctorant en sciences politiques, pour discuter de la Grèce après Tsipras.

Virage à droite en Grèce / Face aux catastrophes naturelles : sommes-nous prêt·e·s ?

Kyriakos Mitsotakis, premier ministre grec entré en fonction il y a un peu plus d'un mois, se présente comme le « sauveur » de la classe moyenne en promettant une réduction d'impôts, la libéralisation de l'économie et la négociation d'une réduction des exigences des créanciers vis-à-vis de l'excédent budgétaire primaire de 3,5% que le précédent gouvernement avait promis d'atteindre lors du dernier accord sur la dette publique grecque, signé en 2018. Pourtant dès le début de son mandat, Mário Centeno, président de l'Eurogroupe, et Klaus Regling, directeur général du MES (Mécanisme européen de stabilité financière), avaient prévenu Mitsotakis qu'aucune exigence ne serait revue à la baisse et que la Grèce devait se tenir à l'accord signé. Les promesses du nouveau premier ministre grec ne sont donc pas prêtes d'être tenues. Mais la Grèce, qui connaît une crise économique et humanitaire depuis 10 ans, a vu nombre de ses dirigeants ne pas tenir leurs promesses.

Tsipras avait quant à lui promis de mettre fin au cercle infernal de l'austérité pour finalement capituler en juillet 2015 plongeant la Grèce et toute la gauche européenne dans une profonde déception. Mitsotakis lui se trouve dans une situation avantageuse puisqu'il n'a plus à discuter de la dette, ni des mémoranda. Les médias dominants et la plupart des partis politiques, en ceux compris Syriza, ont assez menti sur le dernier accord pour qu'il apparaisse comme une « victoire » alors qu'il n'est en réalité que l'étalement de la crise et la tutelle de la Grèce par l'UE sur de longues années. Le pays ne pourra donc pas échapper à l'austérité qui lui est imposée ni à la surveillance de ses créanciers si le dernier accord signé par Tsipras en 2018 est respecté. C'est ainsi que les électrices et électeurs, déçu·e·s des gouvernements successifs de droite ou dits de « gauche », ont revu leurs exigences à la baisse et sont allé·e·s aux urnes au début du mois de juillet sans grande conviction. Le fort taux d'abstention aux élections (42%) et les évolutions au sein du parti Syriza (la moitié des eurodéputé·e·s élu·e·s un peu plus tôt la même année viennent de partis de droite) en attestent.

La victoire de Nouvelle Démocratie ne présage rien de bon, au contraire. Mitsotakis veut instaurer un gouvernement autoritaire en concentrant des pouvoirs sur son poste (il a placé sous son contrôle personnel et par simple décret ERT (la radiotélévision publique grecque), l'Agence de Presse nationale et les services secrets du pays), en annonçant l'embauche de plus de 2000 policiers, en multipliant les attaques contre des squats de réfugié·e·s (à Exarcheia notamment), etc... L'asile universitaire, qui n'est autre que l'interdiction d'entrer sur les lieux universitaires par les forces de l'ordre sans l'accord du recteur, a été une des premières cibles du gouvernement Mitsotakis. Son annulation constitue un acte très fort pour celles et ceux qui se souviennent de l'attaque contre l'école polytechnique d'Athènes en 1973 par l'armée contre des étudiant·e·s, évènement extrêmement important puisqu'il a marqué le début de la fin de la dictature des colonels. Mitsotakis et son gouvernement de droite, dont certains membres hauts placés sont issus de l'extrême droite, ont déjà profité de la crise grecque pour toucher aux symboles les plus forts de la démocratie et porter atteinte au peu d'espace démocratique qui subsistait encore en Grèce.


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