Auteur(s): Par Jacques KLOPP avec le pôle politique de l'AFP - Paris (AFP)
Les Français ont commencé à voter dimanche pour élire leur prochain président et choisir, comme en 2017, entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen. Le premier est favori pour un deuxième mandat. Mais jamais l'extrême droite n'a paru si proche des portes du pouvoir.
Les bureaux de vote ont ouvert à 08h00 en métropole pour ce second tour de la présidentielle et fermeront à 19h00 voire 20h00 dans les grandes villes.
Avec les trois zones scolaires du pays en vacances scolaires, l'abstention pourrait être le grand arbitre du scrutin. Le taux de participation à midi donnera une première indication sur la mobilisation des 48,7 millions d'électeurs appelés aux urnes.
Marine Le Pen doit glisser son bulletin dans l'urne vers 11H00 dans son fief de Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais). Emmanuel Macron est, lui, attendu à la mi-journée au Touquet (Pas-de-Calais) où il s'est marié avec son épouse Brigitte en 2007 et où il votera comme d'habitude.
Sur place, de nombreux badauds l'attendaient déjà, dont Danielle Dumenil, 60 ans, venue exprès des Ardennes et qui "rêve depuis petite de rencontrer un président de la République, de gauche, de droite, d'extrême droite, je m'en fiche" parce qu'il "représente la France".
Dans la matinée, Edouard Philippe au Havre, les ex-candidates Anne Hidalgo (PS) à Paris et Valérie Pécresse (LR) à Vélizy-Villacoublay, dans les Yvelines, ont été parmi les premières personnalités politiques à se rendre dans l'isoloir.
Dans le XIXe arrondissement de Paris, une vingtaine de personnes patientaient devant les grilles d'un bureau de vote, avant même son ouverture. "Ca commence fort", glissait un assesseur.
Certains territoires d'outre-mer et Français de l'étranger ont voté dès samedi. A Saint-Pierre-et-Miquelon, la participation s'est établie à 57%, contre 54,96% lors du premier tour.
En Nouvelle-Calédonie, où l'abstention avait atteint un taux record au premier tour (66,65%), le second tour s'annonce sous les mêmes auspices.
A 17H00, la participation était de 34,87% contre 45,44% en 2017 à la même heure, selon des chiffres du haut-commissariat de la République.
Steeve Lauret, employé municipal à Nouméa, s'est dit "peu surpris" de cette faible mobilisation, rappelant que les indépendantistes avaient appelé à l'abstention.
A la Réunion, dans un quartier rural de Saint-Joseph (sud de l'île) Maria, fonctionnaire territoriale d'une cinquantaine d'années, a voté "parce que c'est un droit acquis de haute lutte" et elle ira "pique-niquer après".
Les Français sont devant un choix historique: reconduire le président sortant, ce qui n'a encore jamais été fait, hors cohabitation, depuis l'adoption du vote au suffrage universel direct en 1962.
Ou élire une femme, ce qui serait une première, et propulser ainsi l'extrême droite à l'Elysée pour une déflagration qui résonnerait bien au-delà des frontières hexagonales, comparable au Brexit britannique et à l'élection de Donald Trump aux Etats-Unis en 2016.
Une réélection d'Emmanuel Macron, 44 ans, représenterait la continuité, même si le président-candidat a promis de se renouveler en profondeur, assurant vouloir placer l'écologie au cœur de son second - et dernier - mandat.
Il doit s'exprimer devant ses partisans dimanche soir, à l'issue du scrutin, sur le Champs de Mars, au pied de la tour Eiffel.
L'arrivée de Marine Le Pen, 53 ans, aux commandes d'une puissance nucléaire, dotée d'un siège permanent au Conseil de sécurité de l'ONU, et force motrice de l'Union européenne serait un séisme, d'une magnitude d'autant plus élevée qu'elle s'inscrirait dans le contexte lourd d'une guerre aux portes de l'Europe.
Les derniers sondages publiés vendredi soir, avant l'entrée en vigueur de la période de réserve électorale, donnaient Emmanuel Macron favori, au-delà de la marge d'erreur. Mais très loin de son score de 2017 où, au bout d'une ascension météorique, il avait battu sa rivale par 66,1% des voix contre 33,9%.
- Front contre front - Les programmes des deux candidats proposent une vision radicalement différente sur l'Europe, l'économie, le pouvoir d'achat, les relations avec la Russie, les retraites, l'immigration, l'environnement...
Pour contrer son adversaire, Emmanuel Macron, arrivé en tête au premier tour (27,85%) avec plus de quatre points d'avance, a réactivé le "front républicain" qui semble toutefois avoir perdu de sa vigueur par rapport à 2017 et 2002.
La candidate du Rassemblement national, pour sa troisième tentative, a misé sur un autre front, le "Tout sauf Macron".
Dans l'entre-deux tours, les deux candidats ont courtisé l'électorat de Jean-Luc Mélenchon, arrivé troisième le 10 avril avec 21,95%.
La grande inconnue du scrutin reste l'abstention qui pourrait être plus forte qu'au premier tour (26,31%). Tout comme les bulletins blancs et nuls qui avaient atteint un nombre record en 2017, attestant du refus de millions de Français de choisir entre les deux finalistes.
Le record d'abstention pour un second tour date de 1969 avec 31,1%.
Les électeurs seront de nouveau appelés aux urnes les 12 et 19 juin pour les législatives où le nouveau président cherchera à obtenir la majorité nécessaire pour gouverner.
Un autre "troisième tour" se prépare dans la rue où risquent de converger, sur fond d'inflation galopante, tous les insatisfaits du scrutin présidentiel, sur les braises encore chaudes de la crise des "gilets jaunes".