M.A.
AFP
Bruxelles a vraisemblablement Madrid dans le collimateur. Quelques jours après avoir épinglé l'Espagne pour le niveau "relativement élevé" de la corruption dans le pays ibérique, la Commission européenne revient à la charge et cible cette fois-ci la loi d'amnistie pour les séparatistes catalans. Pour un représentant de la CE, le texte juridique est la conséquence d'un "pacte politique" pour la réélection du Premier ministre socialiste, Pedro Sanchez, et pas un texte "d'intérêt général".
L'Espagne a définitivement adopté, en mai 2024, une loi d'amnistie visant les indépendantistes catalans impliqués dans la tentative de sécession de 2017. Cette mesure phare du gouvernement de gauche de Pedro Sánchez visait officiellement, à solder le lourd passif politique du référendum interdit et de la proclamation unilatérale d'indépendance, menées alors par Carles Puigdemont à la tête de la Catalogne. Cette amnistie, âprement négociée avec les partis séparatistes, a été votée au Congrès des députés, permettant ainsi l'annulation de poursuites et le retour potentiel de plusieurs exilés politiques.
Un "pacte politique"
Sauf Carles Puigdemont. En exil depuis 2017, il reste visé par un mandat d'arrêt espagnol. Les tribunaux ont estimé que les charges de détournement de fonds, qui lui sont reprochées, tombent dans les exceptions prévues par la loi d'amnistie. Le juge a explicitement considéré que Puigdemont a utilisé des fonds publics pour organiser le référendum illégal, ce qui, selon la loi, ne relève pas de l'amnistie lorsqu'il y a bénéfice personnel ou préjudice aux intérêts financiers de l'Union européenne. S'il a été amnistié pour la désobéissance, il reste poursuivi pour détournement de fonds. Il est aussi poursuivi, dans une autre procédure, pour terrorisme, un chef d'accusation qui doit encore être caractérisé par la justice.
Selon le gouvernement Sanchez, l'objectif affiché était de tourner la page de l'instabilité et des tensions, en misant sur la réconciliation nationale. Mais la droite espagnole a dénoncé ce qu'elle considère comme une atteinte à l'État de droit et une concession grave aux séparatistes pour des raisons politiques. Elle s'est farouchement opposée à la loi, exprimant sa colère à travers des manifestations, des discours au Parlement et le dépôt de recours devant les juridictions supérieures pour tenter de bloquer l'application de l'amnistie.
Vainement. Le mois dernier, la Cour constitutionnelle espagnole a validé la loi dans ses grandes lignes, jugeant le texte conforme à la Constitution. L'arrêt, prononcé à une majorité de six magistrats contre quatre, a rejeté l'essentiel du recours déposé par la droite. La plus haute instance judiciaire a ainsi estimé que l'amnistie était admissible dès lors qu'elle répondait à "une situation exceptionnelle" et poursuivait un "objectif légitime d'intérêt public".
Pas de quoi convaincre le représentant du service juridique de la Commission européenne, Carlos Urraca Caviedes. Mardi, devant la Cour de justice de l'UE (CJUE), il a déclaré que la loi d'amnistie pour les séparatistes catalans ne répondait pas "à un objectif d'intérêt général" mais "s'inscrit dans un accord politique visant à obtenir l'investiture du gouvernement espagnol". Il s'agit, selon lui, relayé par Euractiv, d'un "pacte politique".
Catalan, corruption, loi d'amnistie... Bruxelles croise le fer avec Madrid
La procédure actuellement en cours devant la CJUE a été engagée par la Cour des comptes espagnole et la Cour nationale supérieure. Son objectif est de savoir si le mouvement séparatiste catalan a porté atteinte aux intérêts financiers de l'UE, à travers notamment le cas Puigdemont, et si la loi d'amnistie satisfait essentiellement des objectifs politiques.
Pilar Alegria, porte-parole du gouvernement Sanchez, a répondu à Carlos Urraca Caviedes, rappelant que l'objectif de l'exécutif était de promouvoir l'unité et la réconciliation, et surtout que les décisions de la Cour constitutionnelle espagnole et de la Commission de Venise approuve le texte. Les tribunaux espagnols seront fixés d'ici à la fin de l'année et la décision de la CJUE sera contraignante.
Depuis deux mois, les relations entre l'Espagne et l'UE, notamment la CE, se compliquent, mais l'Espagne tient bon. La semaine dernière, la Commission a exprimé ses préoccupations face à la "perception croissante de la corruption" dans le pays. À cela s'ajoute l'échec espagnol à obtenir la reconnaissance du catalan, le basque et le galicien comme langues officielles de l'UE, une promesse politique non tenue qui suscite frustration à la fois à Madrid et en Catalogne, tandis que plusieurs États membres s'opposent à l'idée pour, officiellement, des raisons juridiques et budgétaires, mais surtout par crainte que cela déclenche un engrenage incontrôlable en Europe qui ne serait pas dans la mouvance de se que souhaite le World Economic Forum et ses valets au pouvoir, von der Leyen en tête.
Bruxelles agace de plus en plus, et le nombre de pays de la Communauté européenne irrités augmente de jour en jour.