27/03/2023 basta.media  4 min #226177

Sainte-Soline : affrontements lors de la manifestation contre le projet de «bassine agricole»

Sainte-Soline : « Ils nous attendaient à la bassine, en mode forteresse »

200 blessés dont plusieurs grièvement, deux personnes entre la vie et la mort : la répression policière de la manifestation contre les mégabassines a été très dure ce week-end à Sainte-Soline. Beaucoup en sont traumatisés.

Sacha, 27 ans, est arrivé vendredi soir, en voiture, avec quelques ami.es à Sainte-Soline, dans les Deux-Sèvres, pour participer à la manifestation contre les mégabassines.

« Le premier épisode de mobilisation a eu lieu le soir même, quand on a appris que la quarantaine de tracteurs acheminés par la Confédération paysanne étaient bloqués, mais ils ont finalement pu arriver. Le lendemain, on est partis vers 11 h du campement, à pied et à travers champs, en direction de la bassine. On a marché environ six kilomètres sans voir un seul policier. Ils nous attendaient tous à la bassine, en mode forteresse. Le dispositif était vraiment impressionnant, de type militaire.

On a essayé d'encercler le site du chantier et ils nous ont tout de suite tiré dessus. Des grenades tombaient toutes les deux secondes. Comme on ne pouvait pas entourer la bassine, on s'est donc polarisé au même endroit pour essayer d'y accéder, mais la confrontation a été ultraviolente. En moins d'une heure, on a eu plus de 200 blessé·es, dont plusieurs grièvement, avec un pronostic vital engagé pour l'un d'entre eux. J'étais au talkie-walkie et on n'arrêtait pas d'entendre : "Ils sont où les médics, ils sont où ?" Et on les voyait tous, à terre, en train de soigner les gens. »

« On n'était pas du tout préparés à ça »

« Les gens sont venus à cette manifestation en sachant qu'il y aurait des confrontations, mais sans se douter qu'ils pourraient être en danger de mort. On n'était pas du tout préparés à ça. Quand j'entends que le gouvernement ose chiffrer les blessés à sept, je trouve que c'est cynique, parce qu'il ne parle là que des blessés qui ont été hospitalisés. Et l'évacuation de celui dont le pronostic vital est engagé a été bloquée par les forces de l'ordre. Ils ont pris le cortège à rebours et balancé des lacrymos sur des plaies ouvertes, ce qui fait très mal.

Manifestation à Sainte-Soline

« Le GIEC serait-il éco-terroriste ? » dit la pancarte.

DR

Au-delà de toutes ces blessures, cela a été un moment traumatisant pour tout le monde. On est tous en état de choc. On a vu des gens aguerris, de la période Zad de Notre-dame-des-Landes, s'effondrer en larmes. Cette violence, c'est vraiment inédit. On a passé un cap dans la militarisation des forces de l'ordre. On parle de la répression d'un très gros rassemblement de plusieurs dizaines de milliers de personnes, tout ça pour protéger un trou de 16 mètres de profondeur.

Mais le soutien médical et psychologique assuré par l'organisation de la manifestation était extraordinaire. Quand on voit tout ce qui a été mis en place pour que l'on puisse prendre soin les un·es des autres, comment peut-on nous traiter de terribles hordes violentes ? »

De retour en Bretagne, Sacha et ses ami·es réfléchissent à l'instauration de groupes de paroles et à des supervisions avec des psychologues, pour prendre en charge au plus vite les traumas qu'ils ont ramenés avec elles et eux de Sainte-Soline.

« Dès qu'on a approché, ils ont commencé à lancer des grenades »

Michel Besnard, du Collectif de soutien aux victimes de pesticides de l'Ouest, est lui aussi arrivé à Sainte-Soline le vendredi soir, pour assister à des tables rondes, avec des invités du monder entier, et pour échanger à propos de la question de l'eau et du colonialisme, entre autres.

« Le samedi matin, de bonne heure, nous sommes partis à travers champs, en direction de la bassine. C'était joyeux, festif, on discutait, il y avait de la musique. Dès qu'on est arrivés près du site, on a vu que les policiers étaient très nombreux.

Les camions ceinturaient toute la bassine, ils étaient à touche-touche. Il y avait des canons à eau. Et pour la première fois, ces quads, avec deux gardes mobiles dessus. Dès qu'on a approché la bassine, ils ont commencé à lancer des grenades. C'était une forteresse, avec 3000 gardes mobiles pour bloquer l'accès à un tas de terre. Le but, manifestement, c'était que personne ne rentre, quel qu'en soit le prix.

Quand j'entends certains médias parler de 6000 manifestants, dont 1500 personnes de l'ultragauche, je me dis qu'on a là des journalistes hors-sol. On était beaucoup plus nombreux. En plus, ils ne parlent que des violences, jamais du fond. Ils n'expliquent pas pourquoi on est là.

On s'est tenus loin des affrontements, mais je n'ai jamais été aussi près des grenades. Le bruit était assourdissant, et certaines éclataient en l'air. C'est très dangereux, on peut recevoir des éclats. Je comprends que certains aient eu peur.

Il y a un tel refus de prendre en compte les arguments avancés, y compris par les scientifiques, contre ces projets de mégabassines, et pour le partage de l'eau que l'on ne peut qu'aboutir à des affrontements. »

Photo : ©Les soulèvements de la terre

Recueilli par Nolwenn Weiler

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samy 2023-03-28 #13126

comment c'était tout calculé lol la préfète l'avait annoncé la veille jpp