10/09/2025 dav8119.substack.com  8min #290000

Sur l'absurdisme

 Dav

La simplification administrative est la réponse à la demande créée par l'absurdisme administratif. Ceci est un exemple. Prenons ce point de départ.

Au pays de l'Absurdie, ce qui apparaît comme une simplification, est finalement une complication qui consiste à ajouter des algorithmes de traitement d'une information rendue inutilement complexe. On ne remet pas en cause la complexité, la redondance, et les contradiction ; on ne nettoie pas la poussière, on ne range pas les objets qui débordent des étagères. Non, on envoie un robot dans la pièce. Et il finira avec les autres, entassés dans le fond.

La croissance en complexité, qui est la nature de tout système, n'est objectivement réaliste et rationnelle que si cette complexification est logée dans le champ informatique, et non dans le champ physique. Les animaux n'ont pas de plus en plus de membres et de têtes avec l'évolution des espèces, contrairement aux usines qui ont de plus en plus de tuyaux et de tubes qui partent dans tous les sens.

Après la complexification physique, vient le moment de la simplification. Et pour procéder à cela, il ne s'agit pas de régresser à un stade antérieur, mais de commettre un progrès substantiel et qualitatif. Et ce progrès se situe dans la structure, une chose non-physique et immatérielle.

Si la complexification est physique, alors très vite la croissance en complexité se trouver freinée par elle-même. On en arrive au stade absurde où il faut détruire les anciennes évolutions pour pouvoir continuer la prochaine. Ceci ne peut être qu'une invitation à se poser la question de ce qui se passe au niveau structurel.

Cela peut paraît absurde dit comme cela, mais détruire les anciennes évolutions pour pouvoir faire exister les nouvelles est exactement et rien d'autre que la principale croyance systémique de ce monde aberrant. C'est une société du produit jetable et même les humains sont jetables. On condamne ce qui est "trop vieux" pour le remplacer par "mieux", le mieux étant seulement que cette chose soit neuve, mais surtout pas qu'elle soit plus intelligente ou plus efficace ou mieux pensée ou plus pratique ou moins chère ou encore moins plus fiable.

Il faudrait vraiment être stupide en Absurdie pour construire des objets fiables. Non les gens qui vivent en Absurdie ne sont pas stupides, ils sont les jouets d'une entéléchie. Ils consacrent tous leurs efforts et toute leur petite énergie ténue et hésitante, altérée par leur subconscient qui ne cesse de hurler au secours, dans une voie sans issue qui est commandée par la force des choses et la peur de ne pas avoir l'air normal. Ils sont obligés de faire ce qu'ils font et il y consacrent le maximum possible d'intelligence, qui évidemment n'a pas assez d'altitude pour voir le tableau d'ensemble de l'absurdité aberrante dans laquelle ils sont en train de s'enfoncer.

Oh on ne va pas revenir sur des sujets communs tels que l'obsolescence préméditée ou le fait que les entreprises ne sont rien d'autre que des sectes moralisatrices dont le but est de prendre le contrôle de la volonté des esclaves pourvu qu'ils soient assez "opène" pour trouver cela "sympa".

Les velléités de révoltes sont résolues dès le départ en signant le contrat de travail et tous les avantages qui vont avec. Sinon c'est la mort. Et ceux-là quand ils clament qu'il faut éradiquer les profiteurs qui vivent sans être embauchés, ne font que créer le décors de la menace qui plane sur eux-mêmes lorsqu'on refuse un esclavage. Mais voir au-delà des apparences et des fantômes après lesquels ils courent leur est, non pas impossible, mais interdit.

Pour que cet article ne soit pas qu'une tripotée de platitudes il faut aller au fond des choses et élucider les dénominateurs communs qui conduisent à l'enfermement dans un système de pensée qui se satisfait d'une explication superficielle pour justifier son fonctionnement et sa poursuite de buts abstraits et confus.

La posture de l'intelligence n'est pas une parade qui consiste à prendre la pose pour une sculpture en gonflant ses poumons pendants dix minutes jusqu'à devenir tout rouge. C'est ce qui est conféré par le recul historique sur les travaux qui ont été menés envers et contre tout dans but de rendre le monde meilleur, avec pour principal moteur le désir d'échapper à la souffrance.

La souffrance qu'engendre l'absurdité est censée accoucher d'une intelligence invisible et sourde, grouillante, indistincte, diffuse, et le plus souvent parfaitement subversive. Il s'agit de pénétrer les failles de la bêtise comme la bêtise a pénétré les failles de l'intelligence jusqu'à la pourrir complètement.

Nous sommes un peuple primitif parce que nous n'avons pas encore assimilé comment le doivent se juguler l'erreur et la réussite. Nous en sommes encore à fuir "le mal" et à chercher "le bien" sans même avoir été capables de les définir concrètement. Et ceux qui ne se prêtent pas à ce jeu sont là pour tout détruire, comme des forces entropiques. Tandis que ceux qui sont obsédés par ce jeu sont là pour servir de pions qu'on envoie à l'abattoir.

Le bien et le mal ne sont pas traités avec respect. On devrait jouir de nos erreurs et suspecter plus facilement l'intelligence là où elle jaillit. L'un ne va pas sans l'autre. Nier, refouler, fuir l'erreur c'est nier, refouler et fuir l'intelligence.

Contexte et bivalence. Toute chose n'est valable que dans un contexte, et dès qu'on change celui-ci, on change la valeur de ce qui est évalué. Ceci est la règle numéro 1, si on veut commencer quelque part. Tout chose n'est valable que si elle est appropriée. Ainsi toute chose doit être évaluée et sous-pesée en faisant des études et des recherches, en étant ouverts et observateurs. Il ne s'agit pas, comme le font les politiciens démentiels, de croire qu'on a raison sur tout du premier coup sans avoir besoin de réfléchir à rien. De se fier à son instinct.

L'instinct lui-même a une plage de validité qui est contextualisée par une vraie et authentique réflexion. Se fier à l'instinct sans faire d'effort et sans connaître la souffrance fait croire qu'on a longuement réfléchi et souffert. Et le peuple, robotique et émotionnel, voit immédiatement activée son humanité et son besoin de soigner la pauvre personne qui se met à exsuder ses intuitions. Les politiciens se servent de l'humanité pour la tromper, la trahir, et la détruire. Et tout cela pour ne pas avoir besoin de réfléchir.

La mauvaise estimation de la bivalence des choses est la règle numéro 2 si vous voulez. Toute chose est son contraire, et tout contraire évoque la chose qu'elle prend en référence. L'une est réduite à l'autre ou bien l'autre prétend être la première. C'est correct de faire cela parce que toute chose a la valeur de son contraire, mais c'est incorrect de le faire sans conscience. Car, combiné à la règle numéro 1, une chose correcte devient incorrecte si elle n'est pas utilisée dans le bon cadre.

La conscience est un cadre de réalisation des choses. Ce qui est fait volontairement est beau et subtile, porteur de bénéfices, profitable. La même chose qui est faite en y étant forcé est la pire des douleurs qu'un humain puisse subir. Cela lui ôte l'envie de bien faire et même l'aptitude à bien faire les choses. Cela détruit son humanité. Et on n'hésite jamais à forcer les gens à dire ou ne pas dire ce que les autres ne veulent pas entendre, et à faire ou ne pas faire ce qui est vital et profitable pour tous.

De là vient la règle numéro 3, elle aussi imbriquée aux précédentes, qui est la mesure de toutes choses. Un des caractères visibles de l'absurdité est la disproportion et la mauvaise évaluation des tendances antagoniques dont résultent les comportement et les choix. Il est évident qu'en effaçant "le mal" de sa conscience (avec raison puisque "le mal" n'existe pas, mais avec erreur si on croit qu'il existe), la balance à peser la raison est complètement déséquilibrée.

Le plus souvent c'est d'ailleurs après-coup qu'on peut évaluer correctement les disproportions qui sont à l'origine des décisions absurdes. Car après une décision les motivations subconscientes ne font qu'émerger à la surface et prendre des proportions qui les rendent visibles. C'est comme une flèche lancée à peu près n'importe où et dont on félicite la vigueur musclée au moment du tir sans savoir vers quoi elle est lancée ou ce qu'elle va toucher.

Les problèmes de disproportions sont d'ordre psychologiques, il s'agit avant tout de dénigrer, effacer, "canceller", nier, refouler, tout ce qui contrarie une intuition qui, sans cela, serait brillante. C'est le produit d'une volonté de tricherie. C'est un sujet complexe car cela fait intervenir des notions de cécité mentale, et c'est bien là le creux du sujet de l'absurdité. En modifiant arbitrairement la valeur des choses on s'empêche d'évaluer correctement la réalité. Et réciproquement une défaillance du rapport à la réalité efface les paradoxes qui questionnent les intuitons vaillantes et surgissantes. C'est la quatrième règle.

Il y a des règles de base de l'éthique qui permettent sans le savoir et sans trop en avoir conscience d'éviter les pièges classiques de la stupidité. Ce sont des règles qu'on donne à des enfants en attendant qu'ils murissent assez pour en comprendre la valeur. C'est ainsi que sont forgées les religions pré-scientifiques. Parmi ces règles de base il y a le fait d'être une personne affirmée qui a ses limites et de refuser d'entrer dans la pavillon des autres êtres sans leur consentement. C'est la règle de la réciprocité, sur laquelle se fonde la règle de non-ingérence. L'observation attentive de la réalité en lieu et place de sa transformation découle de la règle de non-ingérence. La recherche de l'utilité découle logiquement de l'observation attentive de la réalité, étant donné que l'univers est logique et qu'il suit lui-même des règles strictes, des lois physiques, et qu'elles ordonnent, régissent, conditionnent, et contextualisent l'action des humains, qui doivent être en harmonie avec ces lois.

Avec ces préceptes de base, sachant qu'on est loin d'avoir tout vu, on peut déjà établir les problèmes de rivalité entre le court terme et le les grandes échelles. Il n'y a jamais d'opposition franche entre deux concepts qui sont composés de sous-concepts. Il y a une jugulation, une dialectique qui conduit le passage d'une chose à une autre, qui semble être contradictoire avec la première et qui pourtant vient la compléter. Il s'agit d'une règle de la composition, qui nécessite à son tour de nombreux discernements. La réalité est une chose complexe qu'il faut savoir aborder avec des règles simples et concrètes. Et non pas une chose simple qu'il suffit d'aborder avec des règles abstraites et confuses. Du moins pas si on veut veiller au bien de tous, et par cet entremise, à son propre bien.

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