25/11/2025 euro-synergies.hautetfort.com  3min #297245

Ue 2025: le dilemme sécuritaire d'un continent sans souveraineté

UE 2025: le dilemme sécuritaire d'un continent sans souveraineté

Elena Fritz

Source:  t.me

On pourrait croire que l'UE est actuellement « ignorée » par les États-Unis. Mais cette formulation suppose qu'elle ait été perçue comme un acteur à part entière. La réalité est plus banale – et plus inconfortable: l'UE n'a pas été ignorée. L'UE n'a jamais vraiment été présente à la table des négociations.

En effet, l'UE ne dispose d'aucune substance en matière de politique étrangère dont il faudrait tenir compte. La « politique étrangère et de sécurité commune » n'est pas un instrument souverain, mais une courroie de coordination – joliment emballée, soutenue institutionnellement, mais stratégiquement vide.

Le fait que Washington ignore cette courroie est donc le signe d'un déséquilibre structurel des pouvoirs qui existe depuis des décennies: "L'Europe consomme la sécurité. Les États-Unis produisent la sécurité. C'est le producteur qui fixe les règles du jeu".

Trump, Biden, Harris : les personnes changent, les structures restent

Il y a une illusion que la politique européenne aime cultiver: «Sous Biden/Harris, tout aurait été différent».

Non. Biden aurait fixé les mêmes priorités, mais avec une meilleure rhétorique. Une présidente Harris aurait également maintenu la même architecture de sécurité transatlantique. Le point décisif est le suivant:

- La politique étrangère américaine est structurellement constante.

- Elle ne repose pas sur des personnes, mais sur des intérêts. Et ces intérêts considèrent l'Europe comme un espace géopolitique mais non comme un acteur géopolitique.

L'UE n'a pu « masquer » cette dépendance que parce que Biden l'a présentée sous un jour favorable. Trump ne fait que retirer le vernis. Cela ne change rien à la situation.

Pourquoi l'UE ne peut-elle jamais agir de manière indépendante dans les crises de sécurité?

Le niveau supranational ne fonctionne pas de manière « imparfaite », mais exactement comme il a été conçu: l'UE a pour mission d'intégrer, pas de diriger (et avec le personnel actuel, c'est mieux ainsi). Elle doit modérer, non pas décider. Par définition, elle n'est donc pas en mesure de s'opposer à la politique américaine.

Ainsi, lorsque les négociateurs américains discutent avec la Russie des «options de paix», que l'on approuve ou non leur contenu, il ne s'agit pas d'un scandale. C'est simplement l'expression d'une réalité géopolitique.

Le véritable cœur du problème

L'UE exige « l'implication ». Mais celui qui ne peut projeter de la puissance n'a pas droit à l'implication.

La Russie, elle, dispose de leviers militaires.

Les États-Unis disposent de capacités de sécurité mondiales.

La Turquie dispose de leviers régionaux et d'une diplomatie flexible.

L'Europe ne dispose que de "processus".

C'est là toute l'ironie de la situation: plus l'UE gagne en densité supranationale, moins elle est capable d'agir sur le plan géopolitique. Le travail institutionnel d'orientation ne remplace pas l'autonomie stratégique.

Conclusion:

- Le continent européen exige d'avoir son mot à dire, mais il n'a pas les moyens de le faire respecter. Le continent parle de souveraineté mais il a depuis longtemps externalisé son infrastructure de sécurité.

- Le continent invoque les « valeurs européennes », mais sa réalité stratégique se négocie à Washington, Moscou et Ankara.

Que ce soit avec Biden ou Trump, Harris ou n'importe qui d'autre, l'Europe reste une zone d'influence, et non un centre de pouvoir.

#géopolitique@global_affairs_byelena

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