© Manuel Balce Ceneta Source: AP
Le porte-parole du Pentagone, John Kirby, lors d'un briefing le 9 mars 2022 (image d'illustration).
11 juin 2022, 11:25
L'administration américaine a écrit avoir financé en Ukraine des dizaines de laboratoires au service d'un «programme de réduction des menaces biologiques». Moscou accuse Kiev d'avoir mené des recherches à visée militaire avec le soutien américain.
Dans une fiche d'information mise en ligne le 9 juin par le Pentagone - dont la rédaction initiale remonte au mois de mars -, l'administration américaine écrit avoir investi depuis 2005 «environ 200 millions de dollars en Ukraine» afin de soutenir le développement de «46 laboratoires, établissements de santé et sites de diagnostic» en lien avec la recherche sur les agents pathogènes et la surveillance biologique.
S'il est dans ce document souligné que les infrastructures en question ont été financées «pour la santé humaine et animale», dans le cadre d'un «programme de réduction des menaces biologiques», le développement de tels laboratoires s'inscrit dans une thématique au sujet de laquelle Moscou et Washington s'adressent mutuellement des accusations. Au cours de l'histoire, et particulièrement durant la guerre froide, les services de renseignement de chaque partie ont en effet développé des doutes sur le fait que l'autre entretienne des visées militaires dans le domaine.
Et la méfiance exprimée à ce sujet par les deux puissances a redoublé d'intensité depuis le début de l'opération militaire russe en Ukraine, dans le cadre de laquelle les allégations ont fusé dans chacun des camps.
Développement d'«armes biologiques» : des accusations réciproques
Dans la récente note d'information du Pentagone, l'administration américaine affirme par exemple que la Russie« propage quotidiennement de la désinformation» à ce sujet «en prétendant à tort que le soutien de la Défense américaine [en la matière] est utilisé pour développer des armes biologiques».
«Contrairement à la Russie, les Etats-Unis et l'Ukraine ne développent pas d'armes biologiques et sont en totale conformité avec la Convention sur les armes biologiques», assure encore le Pentagone.
Interpellés ces dernière semaines par la Russie, ainsi que par la Chine, sur leurs programmes biologiques en Ukraine, les Etats-Unis ont reconnu au mois de mars l'existence d'«installations de recherche biologique» mais affirment qu'ils n'ont pas de visées militaires. De son côté, Washington a accusé Moscou de vouloir mener une attaque chimique ou biologique en Ukraine.
«Il est évident que les Américains tentent de détourner l'attention. Ils parlent d'une menace éphémère d'utilisation d'armes chimiques par la Russie. Ce n'est rien d'autre qu'une tentative de détourner l'attention du scandale en cours», avait réagi fin mars à ce sujet le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov, estimant «peu probable qu'ils y parviennent». «De très nombreuses personnes dans le monde s'inquiètent de ce que les Américains faisaient, de ce que nous ne savons toujours pas et de ce qui aurait pu se produire à cause de ces recherches et de ce qui pourrait potentiellement se produire à l'avenir», avait-il poursuivi.
Les autorités russes ont ouvertement accusé l'Ukraine d'avoir mené des recherches biologiques à visée militaire avec le soutien des Etats-Unis. Le 3 mars, dans une interview télévisée, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov avait évoqué le sujet en ces termes : «Nous avons des données selon lesquelles le Pentagone est très préoccupé par le sort des installations chimiques et biologiques en Ukraine. Parce que le Pentagone a construit en Ukraine deux laboratoires militaires biologiques et y a travaillé sur le développement d'agents pathogènes à Kiev et à Odessa. Actuellement, ils ont peur de perdre le contrôle de ces laboratoires», avait-il déclaré. Et d'ajouter : «[Les Américains refusent] catégoriquement de créer un mécanisme de vérification dans le cadre de la convention sur l'interdiction des armes biologiques ... et ils construisent des sites militaires biologiques le long du périmètre de la Russie», avait-il en outre déploré.