27/01/2022 basta.media  5 min #201219

Ces Français qui attendent « tout simplement » une politique humaine et digne vis-à-vis des exilés

Hexagone, c'est la nouvelle émission mensuelle proposée par basta!, Radio Parleur et Politis. En janvier, on vous emmène à Calais, voir la réalité de la situation des migrants, derrière la com' gouvernementale.

« A Calais, l'État organise la distribution d'eau, 38 robinets sont à la disposition des migrants » ; « A Calais, l'État organise le ravitaillement des migrants. En 2021, ce sont 1406 repas par jour qui ont été distribués » ; « A Calais, l'État a mis en place un accès à la vaccination pour les personnes migrantes »... Si l'on en croit la communication de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), qui dépend du ministère de l'Intérieur, presque tout serait mis en place par l'Etat à Calais et dans ses environs pour accueillir convenablement les exilés en attente de leur passage vers l'Angleterre. Un lieu pour que les migrants puissent récupérer leurs affaires « perdues » lors des évacuations a même été inauguré par la sous-préfète (lire  notre reportage). De quoi donc se plaignent les exilés et les associations qui leur portent assistance ?

Hexagone, une série de podcasts pour parler autrement de la campagne électorale.

« C'est indispensable de parler de ce qu'il se passe ici. Que les gens comprennent la réalité », nous explique Louise Druelle, élue municipale d'opposition (union de la gauche) à Calais. C'est pour raconter cette réalité que Radio Parleur, basta! et Politis ont déménagé, le temps d'une journée, le studio de leur nouvelle émission commune, Hexagone, dans le port le plus proche du littoral britannique. L'objectif : raconter cette réalité, bien différente de la belle communication gouvernementale, en donnant la parole à des Calaisiennes et actrices de la solidarité : Claire Millot, militante locale « historique », retraitée de l'Education nationale et secrétaire générale de l'association Salam, Charlotte Kwantes, coordinatrice nationale de l'association Utopia56, et Louise Druelle, artiste audiovisuelle et élue d'opposition à Calais.

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Elles nous décrivent les véritables conditions de survie des centaines d'exilés qui font, provisoirement, étape sur la Côte d'Opale, transits de froids dans ce no man's land juridique entre France et Royaume Uni, dormant dans des petits campements de fortune évacués tous les quatre matins par les forces de l'ordre, tentant à leur risques et périls de franchir malgré tout cette frontière. Elles nous décrivent la solidarité des Calaisiens et les entraves et harcèlement qu'ils subissent simplement parce qu'ils aident.

« Tout ceux qui sont là, sous des bâches ou à dormir dehors sous un morceau de tente, à Calais, c'est tous les jours qu'ils devraient accueillir les forces de l'ordre à coups de pierre. Parce que un jour sur deux on leur demande de déplacer leurs tentes... C'est une situation qui est totalement précaire, plus que précaire ! Et quand je raconte ça à des Français, qui ne connaissent pas la situation, je leur demande : "Combien de temps - toi - tu attendrais, avant de réagir à coups de pierre ? Deux jours ? Trois jours ?" Ils me disent : "Non.... Le jour même !" Mais les exilés, eux, ils ne doivent jamais réagir, jamais », tonne Claire Millot.

Cette situation perdure depuis plus de deux décennies, et ne cesse de s'aggraver avec la fermeture de camp de Sangatte en 2002 ! Elle épuise tout le monde : les exilés, les bénévoles, les militants associatifs, les forces de l'ordre, les élus... Et c'est pareil à la frontière franco-italienne, aux pieds des cols qui permettent de franchir les Alpes. Elle est d'autant plus insupportable que des solutions existent.

« On a des maisons d'accueil, des maisons d'habitats collectifs avec une dizaine de personnes. Tout ça, ça marche, ça fonctionne. Ça permet aux gens de pouvoir se poser quelque part, de pouvoir envisager un futur, d'apprendre une langue, un métier, une socialisation, de découvrir un territoire. Ce sont des modèles sur lesquels les municipalités doivent s'appuyer et il faut qu'on nous laisse la parole, créer du débat avec les associations qui font ce travail depuis très longtemps. Il n'y a pas grand chose à inventer, ça existe ! », plaide Charlotte Kwantes, d'Utopia 56.

Cet épuisement, ces drames, se perpétueront-ils encore pendant les cinq prochaines années du futur mandat présidentiel ? Quels candidats oseront proposer et mettre vraiment en place ces solutions dignes, sans s'aplatir devant les outrances racistes et inhumaines de l'extrême droite ? « Je pense que les candidats, même à gauche, sont très timorés et ont très peur d'une parole solidaire, alors que c'est attendu par une majorité de Français et de Calaisiens, estime Louise Druelle. Il y a énormément de fatalité et d'usure, et on aimerait bien qu'un candidat ait simplement une approche humaine. »

Avec : Louise Druelle, artiste audiovisuelle et élue d'opposition (union de la gauche) à Calais, Charlotte Kwantes, coordinatrice nationale à l'association  Utopia 56, Claire Millot, ancienne enseignante de Lettres à la retraite et secrétaire générale de  l'association Salam Nord Pas-de-Calais.

Production : Tristan Goldbronn et Ivan du Roy
Animation : Tristan Golbronn et Ivan du Roy
Chronique : Nadia Sweeny
Réalisation : Étienne Gratianette
Visuel de une : Valentina Camu et Nathalie Quiroga

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