Cette motion fait suite à une large mobilisation du mouvement pour le climat Extinction Rebellion, qui a mené une série d'actions de blocages à Londres en avril. Le Royaume-Uni s'était jusque-là engagé à réduire ses émissions de gaz à effet de serre d'au moins 80 % d'ici à 2050, par rapport aux niveaux de 1990. La motion appelle à relever l'objectif, en visant la neutralité carbone avant 2050, c'est à dire à ne pas émettre davantage de gaz à effet de serre que le pays ne peut en absorber via les écosystèmes (forêts, sols...) ou certains procédés industriels très controversés tels que la capture et le stockage de carbone.
Cette motion a été saluée par de nombreux militants écologistes. Elle demeure cependant non contraignante juridiquement. Le jour même de son adoption, la Haute Cour d'Angleterre a ainsi rejeté une série de recours judiciaires contre la construction d'une troisième piste à l'aéroport d'Heathrow, le plus fréquenté d'Europe. Le projet, qui représente un investissement de 14 milliards de livres (16 milliards d'euros), a été approuvé l'an dernier par cette même Chambre des communes...
Des motions qui poussent les villes à des actions concrètes
En dépit de ces contradictions, des centaines de communes se sont déjà déclarées en « état d'urgence climatique » ces derniers mois. Depuis l'automne dernier, le mouvement a gagné plus d'une centaine de villes au Québec qui ont signé une déclaration citoyenne universelle d'urgence climatique. La stratégie préconisée par les auteurs de la déclaration est de « cibler les municipalités qui pourront à leur tour exercer une pression politique sur les instances supérieures ». D'autres provinces comme l'Ontario s'associent progressivement à la démarche. « Cette campagne suscite une prise de conscience, une nouvelle direction pour toute l'administration municipale qui aura des répercussions, petites ou grandes, dans tous les départements, confie un chercheur à Radio Canada. Ceux qui décident de la façon de construire un pont ou un égout pluvial devront le faire en pensant à la situation climatique. »
Bien avant le Parlement britannique, une douzaine de villes à travers le Royaume-Uni comme Bristol, Manchester, Londres et Edinburgh, s'étaient également déclarés en « état d'urgence climatique », visant pour la plupart la neutralité carbone d'ici 2030. En décembre dernier, le maire de Londres, Sadiq Khan, a notamment réclamé des fonds au gouvernement britannique pour « rénover des centaines de milliers de maisons et de bureaux, décarboner le réseau national, installer des systèmes de chauffage à faible émission de carbone, et opérer la bascule vers les véhicules électriques ». Une première commune belge, Koekelberg, dans la banlieue bruxelloise (20 000 habitants) et dirigée par une écologiste, vient de rejoindre le mouvement, et précise l'avoir fait en vue d'élaborer un plan climat et de dégager des moyens financiers dans le cadre d'un plan d'isolation.
Le Parlement français pourrait-il s'inscrire dans cette voie ? La résolution proposée par la France insoumise invite à mettre en œuvre un « principe de règle verte au sommet de la hiérarchie des normes », qui « impose de ne pas prélever sur la nature plus de ressources renouvelables que ce qu'elle peut reconstituer en un an, ni produire plus de déchets que ce qu'elle peut supporter ». Le groupe demande également d'atteindre avant 2050 l'objectif de neutralité carbone et de 100 % d'énergies renouvelables, couplés à une réduction drastique des émissions de gaz à effet de serre. De son côté, le ministre de la transition écologique et solidaire, François de Rugy, refuse de laisser dire que l'État français n'agit pas pour le climat. Dans une lettre de dix pages publiée le 15 février dernier, le ministre a défendu le volontarisme du gouvernement en faveur du climat, n'hésitant pas à passer sous silence les aspects les moins reluisants ( notre précédent article).
Sophie Chapelle
Photo de Une : Marche pour le climat à Lyon, 16 mars 2019 / © 𝕏 Simon Cavalier
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