07/09/2019 reseauinternational.net  6 min #161309

Contre le G7, arme de séduction massive pour imposer le capitalisme

G7 : Pris dans le tourbillon qu'il a créé

par Salman Rafi Sheikh.

Symbole de « l'hégémonie occidentale », le récent sommet du G7 a été en réalité un triste spectacle de l'Occident pris dans un tourbillon auto-créé. Ce tourbillon est en place depuis au moins le sommet de l'an dernier au Canada, lorsque le Président américain Trump est rentré chez lui au milieu du sommet et a refusé de signer le communiqué commun. En France, en 2019, le dirigeant français a inventé une solution à cette problématique en tuant la tradition de publier un communiqué commun, faisant ainsi du sommet du G7 de 2019 le seul sommet dans son histoire sans déclaration commune. L'absence de communiqué commun montre non seulement que l'Occident subit le tourbillon, mais aussi qu'il est incapable de le faire de concert. Même selon le Washington Post, la décision d'abandonner une déclaration commune était due principalement aux États-Unis, qui se sont éloignés du reste des dirigeants du G7 sur un certain nombre de questions, y compris la question importante du changement climatique.

Et même si Donald Trump était présent pendant le reste du sommet, les désaccords majeurs étaient assez évidents. Par exemple, comme dans le cas de la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine, la plupart des pays européens ont déclaré explicitement que cette guerre nuisait à leurs intérêts. Et si la plupart des Européens ont déclaré que les pratiques de la Chine étaient « inacceptables », ils n'étaient pas vraiment en faveur de suivre les États-Unis dans ses traces et de prendre des mesures unilatérales pour imposer leurs droits de douane. Le message était donc clair : les Européens ne se joindront pas aux États-Unis dans chaque aventure mondiale.

Les États-Unis ont peut-être compris l'ambiance, comme en témoigne la façon dont le Président américain, qui il y a quelques jours à peine qualifiait le dirigeant chinois « d'ennemi », a soudain découvert en lui un « grand dirigeant » et a déclaré qu'ils préparaient des pourparlers avec la Chine pour « mettre un terme à la guerre commerciale«. L'intention ici n'est pas seulement d'éviter une nouvelle escalade, mais aussi de rassurer les marchés qui ont été gravement ébranlés par les tentatives unilatérales américaines de réécrire les règles des affaires, une aventure à laquelle la plupart des alliés traditionnels des États-Unis s'opposent.

Une autre évolution qui montre que le sommet du G7 de 2019, symbole de « l'hégémonie occidentale », a surtout été l'occasion de récolter les fruits du tourbillon, est la situation extrêmement inhabituelle qui s'est produite lorsque le Président français a invité le Ministre iranien des Affaires Étrangères au sommet, montrant une fois encore que l'Europe continue de considérer les tensions entre les États-Unis et l'Iran dans une perspective qui ne laisse pas beaucoup de place aux aventures militaires et à la concertation.

Bien que l'invitation adressée au Ministre iranien des Affaires Étrangères ait reçu les bénédictions des États-Unis, le fait que Javad Zarif, qui n'avait été que récemment sanctionné par les États-Unis et ne pouvait pas se rendre en Europe, était toujours présent montre que même les alliés européens des États-Unis ne semblent guère se soucier des sanctions américaines inutiles et qu'ils continuent de rejeter les perspectives d'une escalade militaire dans le Golfe.

Le Président français a révélé « qu'une feuille de route a en quelque sorte été établie... » et que « dans les prochaines semaines, sur la base de nos discussions » (avec Trump et le Président iranien Hassan Rouhani), une rencontre pourrait avoir lieu entre les deux dirigeants, qui selon lui va « mener à une fin de l'escalade et à une solution appropriée (impasse) ».

Le Ministre iranien des Affaires Étrangères Javad Zarif

Un autre exemple de l'Occident pris dans son propre tourbillon créé est celui de parler de ramener la Russie dans le groupe. Bien que Trump et Macron aient tous deux plaidé en faveur de l'inclusion de la Russie lors de la réunion de l'année prochaine, qui aura lieu aux États-Unis, cela a également suscité des critiques tant au niveau international, notamment de la part du Royaume-Uni, du Canada et de l'Union Européenne, que des critiques internes du Président Trump. Mais certains développements indiquent que l'Occident s'efforce de faire réintégrer la Russie dans le groupe.

Selon le porte-parole du Kremlin, Dmitry Peskov, à la veille du sommet de Biarritz, le Président russe Vladimir Poutine s'était rendu en France le 19 août, où « la possibilité d'organiser un sommet au Format Normandie a été examinée de manière experte et très détaillée...«.

S'il semble y avoir un certain accord à ce sujet entre les États-Unis et leurs alliés européens, il n'en reste pas moins que la position française a été que le retour de la Russie au G8 et des « relations pleinement normalisées » avec l'Union Européenne « nécessitent une solution à la question ukrainienne«. Trump, d'autre part, pousse l'idée d'inviter Poutine, indépendamment de la « question ukrainienne », à assister au prochain sommet du G7 à Miami.

Ainsi, si l'Europe pousse les États-Unis à mettre fin à la guerre commerciale avec la Chine et à apaiser les tensions avec l'Iran, il semble que ce soient les États-Unis qui poussent l'Europe à normaliser ses relations avec la Russie et à l'accepter comme un partenaire égal dans le groupe. Pour citer Trump :

« Beaucoup de gens disent qu'avoir la Russie, qui est une puissance, les avoir à l'intérieur de la salle est mieux que de les avoir à l'extérieur de la salle... Mon inclination est de dire oui, ils devraient être dedans... Est-ce que je l'invite (Poutine) ? je l'inviterais certainement«.

Le sommet du G7 sans déclaration commune de 2019 a donc été, à bien des égards, une maison divisée, les États-Unis et l'Europe s'opposant l'un à l'autre pour des intérêts qui convergent et divergent dans une certaine mesure.

Dans le même temps, il est de plus en plus évident que l'Europe a de plus en plus commencé à occuper une position relativement indépendante vis-à-vis des États-Unis sur tous les grands problèmes auxquels le monde est confronté aujourd'hui : le changement climatique, l'Iran, la guerre commerciale avec la Chine et l'intégration russe au G7. Il est intéressant de noter que toutes ces questions sont pour la plupart le fait de l'Occident plutôt que le produit d'acteurs rebelles. Par conséquent, alors que l'Occident essaie de trouver des moyens de réparer les choses, il ne fait que récolter la tempête qu'il a lui-même semée.

Source :  G7: Caught in the Self-created Whirlwind

traduction  Réseau International

 reseauinternational.net

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