22/06/2020 reseauinternational.net  4 min #175758

Pourquoi les francophones du Canada se connaissent-ils si peu ?

par Charles Durand.

Les défis auxquels font face les francophones du Canada pourraient-ils créer un élan de solidarité entre eux ?

Et avant tout, pourquoi les communautés francophones se connaissent-elles si peu ?


Peut-on noter une coïncidence avec l'offensive mondialiste ?

Peut-être mais je n'en suis pas sûr.

Le mépris des Canadiens anglais pour les Canadiens français n'est pas nouveau. Tout le problème découle du fait que les Canadiens anglais ont toujours considéré leurs contreparties francophones comme des inférieurs qui dépendaient d'eux pour maintenir leur niveau de vie. Cela est vrai depuis la conquête. Il faut lire les trois volumes du « Livre noir du Canada anglais » de Normand Lester pour se rendre compte de cette situation dont de Gaulle était d'ailleurs parfaitement au courant lors de son voyage au Québec et son exclamation « Vive le Québec libre ! » en est bien la preuve. De Gaulle savait alors qu'il n'avait jamais vécu au Canada et il suscita à cette occasion l'incompréhension totale des hauts fonctionnaires de son gouvernement qui ne connaissaient rien de nos cousins d'Amérique du nord et de leur condition depuis la conquête.

Dans le contexte actuel, les contraintes budgétaires consécutives à une crise sont bien sûr un excellent prétexte pour réduire les budgets des services en français au niveau provincial sachant que les services en français au Canada n'intéressent que les francophones. Toutefois, cela n'a pas toujours été le cas. Il fut un temps, à l'époque de Trudeau père (Pierre Elliot), où beaucoup de Canadiens anglais s'imaginèrent que la connaissance du français allait devenir indispensable pour postuler à n'importe quelle fonction au sein du gouvernement fédéral. Beaucoup de ces gens-là envoyèrent leurs enfants dans les écoles francophones mais, globalement, leur sentiment de supériorité anglophone constitua un obstacle à leur intégration au sein de ces écoles avec des camarades francophones qui, en présence de ces enfants anglophones, rebasculaient à l'anglais pour communiquer avec eux. Cela ne servait donc à rien.

Voilà pourquoi je pense que les problèmes linguistiques canadiens sont dissociés de l'offensive mondialiste actuelle. Cette offensive mondialiste ne pourrait marquer aucun point si, entre autres, sur leur territoire, les décideurs francophones n'avaient pas un esprit façonné par l'anglo-américain et contaminé par les idéologies propres au monde anglophone. Lorsque j'écoute la radio BFM (pardon, « BFM radio »), j'entends des gens qui parsèment leur discours de mots anglais non traduits. Il ne s'agit pas d'anglicismes mais, comme je viens de le dire, de mots anglais NON TRADUITS car, pour eux, leur activité est inspirée directement de méthodes étatsuniennes et la langue anglaise est la seule capable d'exprimer la modernité. Quand j'entends parler la plupart de ceux qui sont invités par cette radio, je n'ai plus l'impression d'avoir affaire à des Français mais à des infirmes qui ne savent plus puiser dans les ressources de leur propre langue pour exprimer la réalité du monde. Pour ces gens-là, le financier, l'homme d'affaires, le « manager » américain, comme ils disent, est nécessairement d'une essence supérieure à tel point que des compagnies industrielles censées être françaises ont maintenant incorporé dans leur administration des gestionnaires étatsuniens ! Allez donc consulter la composition de l'équipe dirigeante de SANOFI, par exemple, et devinez dans quelle langue se déroulent les conseils d'administration !

La France a aujourd'hui 67 millions d'habitants et nous ne pourrions pas trouver au sein de nos écoles et de nos fleurons industriels les pointures qu'il nous faudrait pour faire tourner une société, trouver des débouchés ou innover ?!

Au début du XXe siècle, la France était ex-aequo sur le podium des grands innovateurs scientifiques. On ne compte plus les inventions et découvertes faites par nos compatriotes de cette époque qui s'adressaient au monde dans leur langue. L'adoption de l'anglais par les Français pour « mieux communiquer » dans les disciplines scientifiques coïncide en fait avec notre déclin sur la scène internationale dans tous les domaines. Des géants du début du XXe siècle, on ne trouve maintenant plus que des nains, des politiciens vaguement ridicules, des entrepreneurs qui ne font que singer les Étatsuniens, des enseignants qui ignorent les contributions considérables que notre pays a apporté au monde... Comment peut-on s'étonner dans un tel contexte que notre véritable élite veuille partir vers d'autres cieux plutôt que de rester dans un pays qui n'arrête pas de se dénigrer dans son histoire et ses réalisations ?

source :  comite-valmy.org

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