21/10/2020 actu.fr  5 min #180654

« Les gens qui ont droit au Rsa et à la Caf ne les réclament pas » : le Secours catholique veut accentuer « l'accès aux droits »

"Les gens qui ont droit au RSA et à la CAF ne les réclament pas" : le Secours catholique veut accentuer "l'accès aux droits"

Le rapport annuel du Secours catholique est sorti. En 2017, il a accueilli près de 1,5 million de personnes dans ces accueils. A Lille et Dunkerque (Nord), le niveau de vie baisse.

Par  Anne-Sophie Hourdeaux Publié le 10 Nov 18 à 11:54

A Coudun dans l'Oise : la maison de Denis Roquencourt est mal isolée et fait objet d'un aide d'Eco Habitat pour isoler et sécuriser la maison. (©Lionel Charrier)

Chaque année, le Secours catholique publie son rapport annuel. En 2017, l'association a rempli 86275 fiches dans ces accueils partout en France, ce qui correspond à 1 363 000 personnes. Son bilan : le niveau de vie baisse et les non-recours (pour les personnes ayant droit à des aides) sont légion.

Le rapport annuel du Secours catholique est particulièrement intéressant car il est unique en son genre.

Les travaux de l'INSEE ne prennent pas en compte les personnes à la rue et les étrangers sans statu. Nous oui », détaille Xavier Villette, délégué du Secours catholique pour la zone Nord-Lille, qui couvre les secteurs de Lille et Dunkerque.

Le profil des accueillis

Quel est le profil des personnes accueillies ? Des femmes (56,1%), dont 40% de mères isolées et 30% de femmes seules âgées.

Les étrangers forment 42% des personnes rencontrées, dont 56% n'ont pas de statut légal. Deux adultes sur 3 accueillis au Secours catholique sont chômeurs.

Vivre avec 399 euros par mois

Côté revenus, les chiffres sont éloquents pour le Nord. Le niveau de vie médian français est de 1692 euros par mois. Le niveau de vie pauvreté est de 1026 ; et de grande pauvreté de 684 euros.

Pour les personnes accueillies au Secours catholique, c'est 540 euros mensuels, avec une baisse de 6 euros par rapport à 2016. Pour les Hauts-de-France, c'est 489. Et pour la zone Lille-Dunkerque, c'est 399 euros, avec une baisse de 30 euros par rapport à 2016 ! «

Deux tiers des ménages accueillis au Secours catholique sont dans la grande pauvreté.

Avoir droit à des aides et ne pas les demander

Ce rapport tord le cou à un préjugé : les plus pauvres « profiteraient « du système. Or, le Secours catholique remarque que 25% de ceux qui auraient droit à une aide ne la perçoivent pas (contre 18 % en 2016) et qu'en plus, ils ne la réclament pas !

Les non-recours, c'est-à-dire le dépôt d'une nouvelle demande à la suite d'un refus du RSA, sont trop importants. « 60% des personnes ne forment pas de recours quand ils ont une réponse négative », détaille Xavier Villette. Pourquoi ? Le renvoi de guichet à guichet, l'accueil téléphonique par répondeur et la difficulté d'accès au guichet pour cause de transport sont les causes principales de ces non-recours.

Accueil Jean Rodhain (AJR), accueil de jour du Secours Catholique à Metz, à destination des hommes de plus de 25 ans en situation de précarité et de grande exclusion. L'AJR est l'un des rares centres d'accueil du Secours Catholique à proposer de la restauration : petit-déjeuner (8h30 - 10h) et déjeuner (11h30 - 13h). Préparés par des bénévoles, les repas sont préparés à l'aide de produits frais. D'autres services sont disponibles : douche, laverie et repassage, café. Des ateliers sont également proposés : peinture, cuisine, bibliothèque, jeux. Accueil Jean Rodhain - 9 rue de la Glacière 57000 Metz. Septembre 2016. (©Xavier Schwebel)

Le Secours catholique a aussi mené une enquête sociale, menée de janvier à avril 2018, avec 3300 participants, dont 438 pour les Hauts-de-France.

L'analyse révèle que l'accès à internet reste difficile pour les plus pauvres, mais que l'accueil dans les agences administratives est plutôt ressenti positivement.

Cette enquête révèle que les arrêts de prestation non compréhensibles sont importants, avec un taux de 33 % d'erreurs de l'administration !

Des solutions ?

Le Secours catholique ne fait pas que donner des chiffres. Il propose des solutions : créer 60000 logements très sociaux ; valoriser les formes de solidarités citoyenne (non pénalisation et trimestres de retraite) ; donner le droit de travailler aux étrangers sans statu ; automatisation des procédures (affecter de suite les droits et vérifier après pour ne pas paupériser encore davantage les gens) ; développer les recours ; accompagner l'accès à internet...

« Nous devons devenir des spécialistes du RSA et des allocations familiales, et former nos bénévoles. Nous sommes passés de petites aides d'urgence de quelques dizaines d'euros, qui ne servent pas les gens dans la durée, à un vrai accompagnement des gens dans leurs droits », souligne Xavier Villette.

Le cas de Virginie

Virginie, 49 ans, divorcée, 5 enfants dont encore 2 à charge, de La Gorgue (près de Merville dans le Nord), a témoigné de ce que lui a apporté le Secours catholique. « Je suis divorcée d'un mari alcoolique violent. J'étais hébergée chez quelqu'un de ma famille. J'ai découvert le secours catholique grâce à une amie. Je ne les remercierais jamais assez ! J'ai eu un logement. Je participe chaque semaine à un groupe convivial de 15 femmes. Puis mon garçon de 20 ans a développé une leucémie. C'est une maladie très onéreuse, certains médicaments ne sont pas remboursés. Il était hospitalisé à Lille, je faisais la route de La Gorgue tous les jours en transports, ce qui représente un certain budget. Le Secours catholique m'a aidé. Mon fils est décédé. On m'a aidée pour les funérailles. Aujourd'hui, après 2 AVC qui m'ont laissée paralysée, je marche à nouveau. On m'a refusé deux fois l'allocation handicap, mais je n'ai pas lâché. Je l'ai depuis un mois. j'ai une fille qui veut être assistante sociale, et une autre professeur de lettres ».

Le Secours catholique veut aussi se faire intermédiaire dans les rénovations énergétiques. « Il y a des aides mais les gens hésitent ou ne les connaissent pas. Nous accompagnons les démarches. Par exemple, un couple dans l'Oise a pu rénover son logement pour 23 000 euros, il a mis 120 euros de sa poche. Les enfants peuvent inviter leurs amis... » explique Xavier Villette.

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