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Des Gilets Jaunes à George Floyd : comment Israël a militarisé la police occidentale

La formation des forces de police américaines aux tactiques brutales de l'armée israélienne révélée

23 juin 2020
Par Philip Giraldi, ancien officier de la CIA*

Source :  The Unz Review, 9 juin 2020

Traduction :  lecridespeuples.fr

Le meurtre de l'homme noir George Floyd par le policier blanc de Minneapolis Derek Chauvin a entraîné le plus haut niveau de troubles nationaux aux États-Unis depuis les années 1960. Des dizaines de milliers de manifestants sont descendus dans les rues pour protester contre le racisme et la violence de la police. Comme ces événements surviennent également à un moment de pandémie de coronavirus et de chômage record, ils ont le potentiel de changer les États-Unis de manière fondamentale. Le problème principal est que beaucoup de gens à gauche, ainsi que certaines personnes à droite, voient la police américaine comme une sorte de « force d'occupation », des ennemis égoïstes du peuple plutôt que des protecteurs soucieux de la vie et des biens des contribuables.

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Il y a déjà des appels à  « dé-financer » la police dans une tentative de priver les forces locales de responsabilités et de ressources qui n'ont pas grand-chose à voir avec la police de proximité au vu des taux de criminalité réels, qui sont faibles à l'échelle nationale. Et le concept de communauté lui-même est examiné de près et est lui-même  « repensé » afin d'obliger les forces de police et les citoyens avec lesquels elles interagissent à travailler ensemble de manière plus coopérative pour le bien de tous.

L'histoire nous enseigne que des changements d'attitudes et de croyances apparemment ancrées se produisent régulièrement, bien que ce processus puisse être extrêmement lent. Pendant ce temps, certains esprits loufoques sur la gauche de l'échiquier politique encouragent également des plans plus radicaux. L'une des idées les plus amusantes a été publiée récemment par Alyssa Rosenberg dans le Washington Post. Rosenberg a soutenu qu'il est maintenant temps pour Hollywood et les médias de divertissement de s'impliquer en supprimant tous les films et séries télévisées qui  présentent la police sous un jour positif.

Rosenberg soutient ceci :

« Il y a quelque chose qu'Hollywood peut faire pour placer son argent à l'endroit où se trouvent ses publications sur les réseaux sociaux : arrêter immédiatement la production de séries et de films policiers et repenser les histoires qu'il raconte sur le maintien de l'ordre aux Etats-Unis. Depuis un siècle, Hollywood a  collaboré avec les services de police, racontant des histoires qui  innocentent les fusillades mortelles de la police et valorisent un  style policier de héros de film d'action sur le travail plus difficile et moins dramatique de l'établissement de relations avec  les communautés que les policiers sont censés servir et protéger... Le résultat est que le public est devenu accroc aux histoires qui décrivent les services de police comme plus efficaces qu'ils ne le sont en réalité ; le crime comme plus répandu qu'il ne l'est en réalité ; et le recours à la force par la police comme étant systématiquement justifié. Il y a toujours des écarts entre la réalité et la fiction, mais étant donné ce que le maintien de l'ordre en Amérique est devenu trop souvent, sa version hollywoodienne ressemble moins à de l'imagination qu'à de la complicité. »

Le propos de Rosenberg est fondé, mais les séries télévisées et les films sont de la fiction et la plupart des gens sont tout à fait capables de regarder une histoire divertissante et de ne pas en faire un substitut à la réalité. Et il n'y a rien de particulièrement répréhensible à croire que les flics devraient être de bons gars qui résolvent des crimes graves, ce qui est de fait ce que font de nombreux policiers. Au lieu de cela, elle appelle à représenter davantage les policiers comme des idiots qui ne font rien ou pas grand-chose, et qui passent la plupart de leur temps à dresser des contraventions et à écrire des rapports. Si elle avait vécu au dix-neuvième siècle, elle aurait sans doute été une anti-guerre libérale compulsive, si cela avait existé à l'époque. Elle aurait conseillé à Léon Tolstoï de surtout décrire les soldats russes de Guerre et paix pelant des pommes de terre, fumant et râlant plutôt que marchant héroïquement en colonnes pour affronter Napoléon à Austerlitz.

Voir  Aux Etats-Unis, une explosion des violences policières face à la colère populaire, les journalistes ciblés

Un problème qui a fait surface à plusieurs endroits est la militarisation de la police, qui est devenu une réalité du « maintien de l'ordre public » et de la « lutte contre le terrorisme » depuis le 11 septembre. La police reçoit désormais des équipements militaires excédentaires, notamment des voitures blindées, des gilets pare-balles et des armes automatiques. On se demande, par exemple, ce que mon comté semi-rural ici en Virginie a bien pu faire de son véhicule blindé, dont, si je me souviens bien, le service du shérif local ne voulait même pas. Les policiers ordinaires sont également de plus en plus formés aux tactiques antiterroristes, y compris le déploiement croissant d'équipes SWAT (forces d'intervention d'élite) pour effectuer des actions qui ne sont pas nécessairement conflictuelles, notamment pour exécuter des mandats d'arrêt ou de perquisition et percevoir des amendes pour des livres empruntés à la bibliothèque. Le résultat est que  de nombreux civils innocents de toutes races ont été tués.

La militarisation des services de police américains a été en quelque sorte institutionnalisée par le biais de programmes mis en place par le gouvernement fédéral et les États pour s'entraîner avec la police israélienne, une relation de mentorat établie par Michael Chertoff lorsqu'il était secrétaire à la Sécurité intérieure. Les programmes de formation conjoints dispensés en Israël sont utilisés pour endoctriner les forces de police américaines et sont difficiles à comprendre en ce qui concerne les services de police du quotidien, car les Israéliens sont totalement ignorants lorsqu'il s'agit de mener des enquêtes ou de protéger tous les citoyens de leur pays. Les policiers israéliens sont à l'avant-garde de la violence de l'État contre les Palestiniens et servent de protecteurs aux colons lourdement armés qui détruisent les moyens de subsistance des Arabes afin de pouvoir voler leurs terres. La police israélienne est également assez douée pour utiliser la « chaise palestinienne » pour la torture et  tirer sur des adolescents arabes dans le dos. Elle a également inventé le Skunk, un spray chimique à l'odeur pestilentielle initialement utilisé contre les manifestants arabes, et a été la première grande force de police à utiliser régulièrement des balles en caoutchouc (LBD), qui peuvent tuer ou mutiler.

En fait, il a été suggéré que certains policiers américains pourraient bien s'être approprié les méthodes peu conventionnelles des Israéliens. La Géorgie a connu une recrudescence de fusillades impliquant des officiers de police, près de la moitié des victimes étant  désarmées ou abattues par derrière. Tout au long de cette transformation, l'État a continué de poursuivre un « programme d'échange » de police avec Israël, géré par l'Université d'État de Géorgie.

Les « programmes d'échange » de la police ont commencé il y a vingt-sept ans, en 1992, et sont financés par des subventions du département américain de la Justice ainsi que des gouvernements des États et des administrations locales. Selon certaines sources, « les forces de l'ordre [d'un certain nombre] d'États américains  ont participé au programme, y compris celles du Tennessee, de l'Alabama, de l'Arizona, de l'Arkansas, de la Californie, de la Floride, de la Géorgie, de l'Indiana, de la Caroline du Nord, du Kansas, du Kentucky, de la Louisiane, du Michigan, du Mississippi, du Nevada, du New Jersey, de New York, du Dakota du Nord, de l'Ohio, de l'Oklahoma, de Pennsylvanie, de Caroline du Sud, du Texas, de l'Utah, de Virginie, de l'Etat de Washington, de la ville de Washington D.C. et de la Virginie-Occidentale. » Dans certains États et juridictions locales, le programme d'échange avec Israël est géré par la Ligue anti-diffamation [équivalent du CRIF], qui parraine également des séminaires de propagande aux États-Unis sur les pratiques israéliennes de « contre-terrorisme » [En France, Castaner vient d'annoncer  la participation de la LICRA à la formation de la police].

Cependant, certains États et villes, préoccupés par leur lien avec les forces de police militarisées d'Israël et leur occupation brutale des terres palestiniennes, commencent à  se retirer du programme de formation. Récemment, la police de l'État du Vermont, le département de police de Northampton, dans le Massachusetts et la  police de la ville de Durham en Caroline du Nord ont annulé leur formation prévue en Israël.

Une inquiétude particulière a été exprimée au sujet du mode de police israélien manichéen du « nous contre eux » où les 20% des citoyens du pays qui sont arabes sont considérés comme un ennemi tandis que les colons qui s'attaquent aux Palestiniens sont automatiquement protégés par la police, uniquement parce qu'ils sont Juifs. La police sélective se basant sur la race ou l'origine ethnique pourrait être un autre cadeau d'Israël que les policiers américains en visite ramènent chez eux avec eux. En Israël, la force meurtrière est fréquemment utilisée avec le principe de « tirer pour tuer » dans tout incident impliquant des Arabes et des Juifs, même en l'absence de menace sérieuse.

Voir  L'armée israélienne abat un Palestinien autiste

Une technique favorite utilisée par la police israélienne pour maîtriser un Arabe est []...

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