Cent trois ans après la promulgation de la loi de séparation de l'Eglise et de l'Etat, peut-être est-il temps, pour la raison laïque , de démontrer sa fécondité par sa capacité d'approfondir les leçons d'une anthropologie critique que charriaient les mythes sacrés .
Une éclatante démonstration vient du reste d'en être apportée par la conversion miraculeuse de M. Nicolas Sarkozy à la science des arcanes politiques du ciel et de la terre. Voici le discours que le Président de la République a prononcé après que le génie de la France lui eut dit : " Je te montrerai tout ce que tu dois souffrir en mon nom". (Actes des Apôtres, 9, 16).
1 - De la conversion en politique
2 - Comment changer de cerveau ?
3 - Le nouveau réalisme
4 - Les falbalas des éléphants
5 - Ma confession est la vôtre
6 - Un aveugle agitant sa sonnette
7 - Une situation sans exemple dans le passé
8 - Comment entraîner des armées à combattre un ennemi imaginaire?
9 - Les vassaux sont des enfants
10 - Cinq menaces d'étranglement d'une civilisation
11 -Ultime appel
1 - De la conversion en politique
Françaises, Français, mes chers compatriotes,
L'Irlande a rejeté le traité de Lisbonne, le Président de la Pologne s'est fait tirer l'oreille pour signer le décret de légitimation du vote du Parlement qui l'avait largement approuvé et demain, la République tchèque refusera à son tour de l'entériner, parce qu'elle s'imagine encore bien à tort, que son adoption mettrait en danger l'asservissement politique et militaire de l'Europe au sceptre de l'étranger. L'heure est donc venue pour la France entière, mais aussi pour moi- même, d'ouvrir les yeux sur l'histoire véritable des peuples du Vieux Monde, l'heure est donc venue pour notre Continent d'écouter la voix des nations dont les millénaires ont forgé l'âme et la raison, l'heure est donc venue pour nous tous de prêter une oreille attentive aux leçons de ce fleuron des civilisations qu'on appelait l'Europe. Qu'enseigne le vote irlandais à tous les chefs d'Etat de nos démocraties ? Qu'il n'y a pas, qu'il n'a jamais existé et qu'il n'existera jamais d'autorité politique respectée sous la livrée d'un souverain venu d'ailleurs, qu'il n'y a pas, qu'il n'a jamais existé et qu'il n'existera jamais de pouvoir acceptable quand les citoyens se trouvent placés sous la férule de dirigeants sur la tête desquels étincelle le glaive de l'occupant.
Si les peuples écoutaient le tic tac d'une pendule, si le cadran des siècles indiquait les heures de servitude et de liberté des esprits et des cœurs, si l'intelligence des chefs d'Etat était appelée à s'illuminer sur les chemins de Damas où l'expérience de l'histoire les éclairerait sur la nature de leur vocation et de leur mission, alors je reconnais que j'étais demeuré un aveugle sur la scène internationale et que mon cerveau s'est embrasé du feu subit d'une conversion. Mais votre Président ne saurait, tel Saint Paul, demeurer frappé de cécité trois jours durant : au contraire, son devoir est de se réveiller et de mettre sans tarder ses yeux nouveaux au service de la France.
Jusqu'à présent, je croyais qu'il suffisait d'observer le monde pour bien le connaître. Maintenant je sais de quel œil je le regardais hier, maintenant, j'observe de l'extérieur les contours de ma propre effigie sur la rétine de mon globe oculaire d'autrefois. C'est cela une conversion : vos yeux s'ouvrent tout grands sur l'iris qui vous leurrait dans le passé. Mais le monde que vous découvrez est bien pire que le précédent. Vous ne vous laissez plus prendre au piège des séraphins et de leurs auréoles. Je voyais l'Amérique sous les traits d'un ange aux ailes de lumière. J'ai compris que le diable se cache sous le plumage d'azur de ses idéalités, j'ai compris que le diable s'agenouille sur le prie-Dieu des droits de l'homme, j'ai compris que le diable est un Tartuffe et que son temple s'appelle la démocratie, j'ai compris qu'il dépose la Liberté, l'Egalité et la Fraternité sur ses autels.
2 - Comment changer de cerveau ?
Croyez-moi, les convertis ont l'avantage de revenir de loin : pour redonner un avenir aux peuples que seule la réduction de leur maître d'outre-Atlantique au rang d'une puissance moyenne libèrera de leurs chaînes, il faudra que la génération née entre 1970 et 1990 comprenne l'inutilité de tenter de redresser quelque peu des échines accablées par l'âge. Les civilisations périssent quand elles ne lancent plus qu'une jeunesse sans audace dans l'arène du monde. Alors, il est trop tard de prendre la relève des élites vieillies sous le harnais, trop tard pour changer la vision du monde d'une nation, parce que l'histoire est un arbre sous l'écorce duquel la sève cesse de monter quand un printemps ne vient plus couronner son faîte chaque année. On ne change pas de cerveau à seulement modifier l'angle de prise de vue des caméras.
Croyez-moi, une conversion n'est pas une tentative de guérison in extremis du nerf optique d'une classe d'âge infirme ou malade ; croyez-moi, les chemins de Damas de la politique ne réparent pas un globe oculaire usé par la longue myopie des ancêtres, croyez-moi, sans un cataclysme intérieur qui seul déclenche l'accouchement précipité d'une intelligence entièrement nouvelle, il n'y aura pas de seconde naissance de la raison politique de l'Europe, sans une conversion paulinienne des élites dirigeantes du Vieux Monde, l'occupation statutaire du territoire de ce Continent du Nord au Sud et de l'Est à l'Ouest passera quasiment inaperçue, parce qu'on ne naît pas une seconde fois pour s'être soumis à une thérapeutique : il y faut une régénération par la foudre. Notre civilisation de la raison n'a pas assimilé l'immense capital de la connaissance rationnelle de notre espèce dont deux millénaires de la vie religieuse de l'Occident ont accumulé le trésor politique.
Nous manquons d'une psychanalyse des révélations qui illuminent les intelligences, nous manquons d'une anthropologie des éclairements subits de l'entendement, nous manquons d'un regard sur le Rousseau du bois de Vincennes, sur le Bouddha de l'éveil, sur le Pascal de la " nuit de feu ", sur le Dante de la Divine comédie. Si l'Europe ne bénéficiait d'une révolution politique dont je ne suis qu'un pâle témoin, jamais la connaissance des secrets des prophètes ne viendra enrichir notre anthropologie politique. Alors la civilisation du Vieux Monde glissera doucement, insensiblement et sans douleur vers une accoutumance mortelle à sa vassalisation larvée, parce que les enfants anesthésiés dont les parents seront née entre 1970 et 1990 auront perdu jusqu'au souvenir de la vision du monde des peuples demeurés responsables de leur destin. Souvenez-vous de la prophétie de Nietzsche : "Amour, création, désir, étoile, qu'est-ce que cela, demande le dernier homme en clignant de l'œil."
3 - Le nouveau réalisme
Savez-vous que c'est le monde réel qui réapparaît sur les chemins de Damas de la politique ? Pour que ce miracle se produise, il faut que la seconde naissance de l'intelligence conduise à une vision entièrement nouvelle de l'avenir du monde. Laquelle ? Celle qui éclaire l'entendement naturel d'un chef d'Etat quand il lui apparaît soudainement et dans une clarté aveuglante que si l'Europe se changeait en une jambe de bois du pôle anglo-saxon, elle se trouverait réduite à " l'extrémité minuscule " d'un continent que Paul Valéry avait prophétisé au lendemain de la victoire des démocraties sur le nazisme en 1945. Par bonheur, le monde commence de tracer clairement ses contours : d'un côté, l'Amérique et l'Angleterre tentent de se bâtir une forteresse imprenable. A ses côtés, une Europe ligotée à titre constitutionnel et à perpétuité voudrait desserrer le quadrillage des bases américaines qui la condamnent à une lente et sûre asphyxie. Dans une telle configuration de la planète des maîtres et des vassaux, Londres jouera le rôle d'un cheval de Troie indispensable au contrôle du Vieux Monde par l'omnipotence américaine.
Vous devrez donc changer entièrement de vision du monde, changer entièrement de culture, changer entièrement de connaissance de l'histoire, changer entièrement de science du genre humain. Je ne suis pas seulement coupable de m'être livré à une tragique farce politique, je ne m'accuse pas seulement d'avoir fait semblant de jouer sur le théâtre réel du monde. Je suis en outre responsable de m'être entièrement trompé sur la nature et la définition mêmes de l'histoire et de la politique. Non, le monde n'a jamais été barré par des empires bienveillants ; non, le monde n'a jamais été piloté par des Etats épris de paix et de justice ; non, le monde n'a jamais été dirigé au milieu des récifs par de nobles sentiments; non, jamais un timonier inspiré par les saints évangiles n'a tenu le gouvernail du monde. Mais je n'étais pas encore éclairé sur les ressorts de la force et de la puissance des Etats ; et c'est de cette ignorance-là que je dois me repentir avec l'humilité du néophyte tout fraîchement initié à la science des nations et des hommes.
Je vais vous expliquer pourquoi le monde entier respire l'encens des offrandes du Diable sur les propitiatoires de la démocratie.
4 - Les falbalas des éléphants
En vérité, je n'étais pas le seul dormeur volontaire : comment se fait-il qu'un an avant les élections présidentielles, M. Dominique Strauss-Kahn se soit subitement réveillé pour avouer aux Français que s'ils prenaient le risque de traîner les pieds quelques mois encore, la vassalisation de l'Europe deviendrait irréversible et comment se fait-il qu'il ait non moins subitement cessé de le dire ? Comment se fait-il que j'aie gardé le silence à mon tour, alors que les aiguilles du temps de l'histoire égrenaient les heures de l'agonie politique du Vieux Monde ? Comment se fait-il que la vassalité de notre Continent demeure confusément acceptée, vaguement approuvée, discrètement encouragée, lâchement occultée ? Quelle crainte a-t-elle si longtemps conduit tous nos capitaines à la cécité volontaire? Nulle autre que celle de vous rappeler que le mur de Berlin est tombé il y a près de vingt ans, nulle d'autre que celle de vous rappeler que l'armée américaine compte toujours cent quatre-vingt dix-huit garnisons en Allemagne, cent trente-sept en Italie, mais que le réseau complet s'étend à cent cinquante six pays et comprend environ huit cents bases, ce qui représente huit cent quarante cinq mille installations couvrant cent cinquante mille hectares et occupant un personnel militaire d'environ un million cent cinquante mille personnes.
Sachez que les hommes politiques européens qui ne vous parlent jamais de cela vous tiennent pour des enfants en bas âge, sachez qu'ils tiennent toute la planète pour une nursery. Savez-vous que la flotte de guerre américaine ne se contente pas d'occuper Naples depuis soixante ans, mais que l'Amérique a purement et simplement annexé ce port à son territoire en vertu d'un traité extorqué à un pays vaincu ? Savez-vous que quatre cent quatre-vingts bombes atomiques américaines demeurent installées sur le seul territoire de l'Allemagne ? Savez-vous que, depuis la fin de la guerre froide, vos dirigeants feignent d'habiller en acteurs réels de l'histoire les Etats à la tête desquels ils ont été élus, mais que les peuples livrés à la gestion subalterne de leurs affaires intérieures n'ont plus de destin ? Savez-vous que vos dirigeants arborent un masque, savez-vous que ces fanfarons de votre souveraineté gesticulent sur la scène internationale sous la livrée de leur maître ? Les maharadjahs de l'Inde anglaise se dandinaient sur des éléphants caparaçonnés d'or. Les serviteurs ne changent jamais que leurs éléphants. Apprenez à observer les somptueux pachydermes sur lesquels vos dirigeants domestiqués se balancent.
5 - Ma confession est la vôtre
Je me décide à vous lancer la vérité à la tête, je me décide à vous faire l'aveu qu'il n'y aura pas d'Europe réelle aussi longtemps que vous n'aurez pas contraint les Etats-Unis à rembarquer leurs troupes, je me décide à vous informer que la guerre froide est terminée. Mais que vaudraient ces annonces si je ne vous proposais aucune explication de la paralysie politique de notre civilisation ? Car mon ignorance, je l'ai partagée non seulement avec toute ma génération, mais avec l'Europe d'après guerre, qui s'est trouvée naïvement ensorcelée par un mythe de la " Liberté " dont le vainqueur de 1945 apportait les armes et les sortilèges dans ses bagages. La civilisation de Copernic et de Freud, de Descartes et de Darwin, de Galilée et d'Einstein a subi un désastre intellectuel commandé par la fausse ubiquité d'un songe qui allait ruiner plusieurs siècles de la science politique de l'Europe rationnelle ; car sitôt que le sceptre de la vérité politique eut passé en d'autres mains, le Vieux Continent a découvert qu'il s'agissait d'un mythe parareligieux et qu'il armait désormais un autre glaive que le sien. Alors, une civilisation qui avait inventé la démocratie s'est trouvée dans le rôle de la victime d'un conquérant dont le tour était venu d'arborer le masque sacré des modernes. Comment retrouver la lucidité politique des Vieux Romains face aux successeurs des apôtres de la Croix dont l'emblème portait désormais l'effigie d'une déesse, celle de la Liberté ?
Ma seule excuse devant votre tribunal est le silence prudent de nos anthropologues, de nos historiens, de nos psychologues, de nos psychanalystes et de nos philosophes qui travaillaient trop secrètement et seulement dans l'ombre à réarmer l'Occident de la pensée, et qui ont failli à leur devoir d'informer les chefs d'Etat de leur temps de l'état d'avancement de leurs recherches. Je ne les mets pas en accusation ; je constate seulement que le mutisme concerté de nos savants a dépassé la discrétion attachée à ce genre de travaux et qu'à s'entourer de mystère, ils ont ressuscité le déphasage entre la culture de la classe politique d'une époque et l'état d'avancement des sciences dont le Moyen-Age avait illustré le drame. Les sciences humaines d'aujourd'hui se fondent sur une connaissance de l'évolution cérébrale de notre espèce qui leur permet d'interpréter l'enracinement tenace de notre cerveau dans une zoologie miraculée par le fantastique. Nous savons maintenant pourquoi notre encéphale n'a quitté les ténèbres animales que pour basculer dans les mondes terrifiés des religions.
Nos spécialistes de l'organe schizoïde qui couronne les évadés de la nuit auraient dû attirer l'attention des chefs d'Etat du monde entier sur un phénomène psychobiologique extraordinaire, celui de la métamorphose accélérée de la foi démocratique des modernes en un évangélisme expansionniste. Comment se fait-il que ce modèle reproduisait celui d'Athènes la guerrière ? Comment se fait-il que l'empire américain présentait l'extension de ses forces armées à la Georgie et à l'Ukraine comme l'expression de son apostolat de convertisseur du globe terrestre et que cette mythologie du salut ne provoquait ni la stupéfaction, ni le rire de la classe politique mondiale ? Comment se fait-il que cette sotériologie parvenait à s'étendre à la faveur d'un miracle de la foi démocratique comparable, par sa puissance et son universalité, à celui qui a précipité tout le Moyen-Age jusqu'à Jérusalem ? S'agissait-il vraiment de délivrer le tombeau d'un prophète pourtant réputé s'être évadé de son sépulcre un millénaire auparavant? Pour comprendre le prodige du prophétisme américain, il faut que la politologie européenne du XXIe siècle conquière une science réelle de l'encéphale de l'humanité ; car sitôt que le christianisme eut cessé de nourrir l'imagination religieuse de l'espèce bipolaire, la boîte osseuse des fils d'Adam s'est branchée sur un biphasage de type idéologique ; et le mythe bifide traditionnel que symbolisaient les autels s'est engouffré dans la politique au profit d'un Vatican d'outre-Atlantique devenu le cœur battant des croisades du XXIe siècle.
C'est pourquoi, je le répète, nos anthropologues révolutionnaires auraient dû informer l'Etat de ce que l'avance que leur politologie avait prise sur la connaissance antérieure du cerveau de l'humanité devenait comparable à celle des élites humanistes du XVIe siècle sur une classe dirigeante encore tout imprégnée de postulats bibliques du Moyen-Age. En vérité, depuis 1990, nos sciences humaines n'ont pas moins fait changer de paramètres et de configuration à la géopolitique du siècle dernier que Copernic et Galilée à l'astronomie de Ptolémée.
6 - Un aveugle agitant sa sonnette
Vous me direz que je n'avais pas besoin de connaître les travaux en laboratoire de nos anthropologues - ils ont découvert la scission atavique du cerveau simiohumain entre le réel et l'imaginaire - pour remarquer que l'OTAN n'avait plus d'adversaire militaire à combattre depuis la chute du mur de Berlin et que la perpétuation de la présence de l'armée américaine sur le sol européen demandait d'autres explications que stratégiques ; vous me direz qu'il demeurait du ressort d'une science politique vieille de plusieurs millénaires de s'interroger avec les moyens du bord sur les motivations réelles du protecteur de 1949. Pourquoi demeurait-il dans la place, alors que sa mission s'était pleinement et définitivement achevée avec la fin de la guerre froide ? Etait-ce par attendrissement ou par gentillesse ? Fallait-il y voir le signe d'une courtoisie qu'il aurait affinée en Europe depuis son arrivée, ou encore le souci de ne pas paraître contrevenir aux bons usages? Le vainqueur demeurait-il reconnaissant à ses ouailles de la chaleur de soixante ans de leur hospitalité, ou bien la politesse diplomatique était-elle entrée dans une stratégie des élans du cœur et de la gratitude fondée sur deux millénaires de paiement de notre rédemption ? Nous était-il demandé de nous agenouiller devant notre potence ou notre délivrance ?
En vérité, l'ambiguïté des politiques du salut dépassait de loin le champ d'investigation de Machiavel, parce que l'occupant faisait valoir le péril mondial fort nouveau dont il était l'inventeur, celui d'une guerre dite " des étoiles " sur lequel le mythe d'un terrorisme international né des cendres du World Trade Center du 11 septembre 2001 allait bientôt se greffer ou en prendre le relais. Or, ces atouts inédits du sacré exigeaient un examen entièrement nouveau du concept même de politique.
Ici encore, j'estime que nos anthropologues auraient dû alerter la classe politique européenne et mondiale de la nature de leurs découvertes. Car au XVIe siècle, les astronomes héliocentristes, mais chrétiens ne pouvaient se permettre d'aller tirer dévotement la sonnette du Saint-Siège afin de l'informer de ce que le cosmos avait changé de centre ; il était par trop périlleux d'expliquer à la curie que si le créateur avait mis sept jours entiers à fabriquer un grain de poussière, la Voie Lactée ne serait pas encore apparue. En revanche, les travaux de nos simianthropologues étaient déjà suffisamment avancés en 2001 pour que l'évangélisme démocratique qui allait servir de mythologie politique au nouvel empire du monde n'eût plus de secrets pour eux : ils savaient depuis longtemps que l'attentat du 11 septembre 2001 allait fournir à la sotériologie politique post-marxiste un matériau de nature à ressusciter la peur de l'an mil.
Si nos savants d'avant-garde, qui ne risquaient plus le bûcher, avaient eu l'audace de m'envoyer une délégation afin de m'informer des résultats de leurs derniers travaux, sans doute n'aurais-je pas attendu le rejet du traité de Lisbonne par l'Irlande pour découvrir que l'histoire n'obéit pas aux ressorts mécaniques mis en évidence par la politologie rationaliste du XIXe siècle et qu'un homme d'Etat d'aujourd'hui a grand besoin de connaître les secrets de l'encéphale dichotomisé entre le réel et le songe de notre espèce pour avancer les yeux ouverts sur une scène internationale en cours de décryptage. Si l'homme d'Etat d'aujourd'hui ne dispose pas des clés des mythologies religieuses auxquelles la planète sert de théâtre, il titube comme un aveugle agitant sa sonnette.
7 - Une situation sans exemple dans le passé
Le vote irlandais n'a pas été motivé pour des raisons marchandes, puisqu'aucun pays n'a autant bénéficié que l'île de saint Patrick des avantages économiques que présentait son entrée dans l'Union européenne. En revanche, un argument nouveau et qui allait enfin à l'essentiel a bondi avec l'intrépidité d'un taureau de Miura dans l'arène du réel, celui qui faisait valoir pour la première fois depuis le Général de Gaulle que l'Irlande pourrait se trouver entraînée dans une nouvelle guerre mondiale aux côtés des Etats du Vieux Monde que Washington aurait vassalisés sous le sceptre de l'OTAN. Pour la première fois également, le sûr instinct politique d'un vieux peuple mettait en évidence qu'à l'exception du territoire français, l'omnipotence des forces militaires de l'empire américain sur le sol européen vingt ans après la chute du mur de Berlin rendait stérile tout débat sérieux sur l'avenir politique du Vieux Monde. Feindre de faire de la politique sous le sceptre et le glaive de l'étranger a autant de sens que d'évoquer la politique des Gaulois libérés des armées d'Arioviste par Jules César, puis placés pour toujours sous la tutelle du puissant successeur de leur envahisseur précédent. Mais l'empire romain ne disposait pas d'une sotériologie para-religieuse en mesure de légitimer la puissance de ses armes dans la tête des vaincus: si les légions n'étaient pas demeurées l'arme au pied sur le sol de la Gaule " libérée ", il aurait été difficile de faire prendre des vessies pour des lanternes aux soldats de Vercingétorix.
C'est pourquoi la situation actuelle n'a pas d'exemple dans le passé. Si les classes dirigeantes moyennes de l'Europe d'aujourd'hui ne se trouvaient pas achetées en sous-main par Washington depuis 1989, les chefs d'Etat du Vieux Monde seraient en mesure de demander le plus simplement du monde à l'occupant de rembarquer ses troupes. Se trouverait-il contraint d'obtempérer avec le dépit dont il avait témoigné quarante ans auparavant ? Nullement : entre temps, il a pris soin de consolider son empire par la conclusion de traités vassalisateurs qu'il aimposés à ses " alliés ". A seulement m'entendre évoquer cette question, vous comprendrez à quel point les difficultés politiques que je dois tenter de résoudre exigent le secours des enseignements de la politologie française d'avant-garde dont j'ai fini par obtenir que les secrets m'en fussent livrés.
8 - Comment entraîner des armées à combattre un ennemi imaginaire ?
Le principal obstacle à vaincre pour seulement tenter de combattre la vassalisation implacable et déjà fort avancée de la civilisation occidentale n'est autre que l'existence même du régime démocratique, tellement ce mode de gouvernement ne saurait sécréter spontanément des élites suréminentes et d'une haute lucidité politique à l'échelle de la planète. La raison en est fort simple : il est difficile de conduire un peuple sur le chemin d'un savoir indispensable au salut des nations si l'éducation des masses consultées à l'école de leurs propres suffrages les rend nécessairement étrangères à la géopolitique. C'est pourquoi la leçon que le peuple irlandais adresse aux classes dirigeantes européennes est à décrypter à l'école de Paul sur le chemin de Damas. Qu'est-ce donc qui a alerté l'Irlande et l'a convaincue de mettre sa main en visière et de scruter l'horizon ?
Peut-être la fureur populaire commence-t-elle de bouillonner dans les profondeurs des nations quand leurs gouvernements attisent le feu de la révolte par le seul spectacle de leur léthargie. C'est ainsi que le courage politique de M. Zapatero a bien pu le conduire jusqu'à retirer les troupes espagnoles engagées sur les champs de bataille en Irak, mais comment aurait-il exigé de l'occupant qu'il évacuât sur l'heure ses garnisons du territoire des Cortès ? C'est ainsi que M. Prodi a bel et bien décidé de réduire les effectifs de l'armée italienne embarqués dans la même équipée, mais comment la classe politique de la péninsule ne l'aurait-elle pas contraint de renforcer puissamment la base militaire de Vicenza ? C'est ainsi que l'opposition allemande a bien pu révéler les graves négligences de l'occupant à entretenir les abris de ses bombes nucléaires entreprosées sur la terre des Germains, mais Mme Merkel n'en a pas moins déclaré que l'OTAN servait de bouclier face à un ennemi imaginaire et qu'il n'était pas question de liquider les vestiges de la guerre froide, mais, tout au contraire indiqué, de soutenir une dissuasion nucléaire inséparable à la crédibilité des armes classiques face à des armées de fantômes. Dans cet étouffoir des lucidités et des volontés, la rage monte des profondeurs du peuple, tandis que les gouvernements ne savent comment passer par-dessus sa tête sans courir le risque de le faire descendre dans la rue. Ce que le peuple irlandais a compris d'instinct, c'est que non seulement la ratification du traité de Lisbonne ne contrarierait en rien la domination politique de l'Amérique sur l'Europe, mais qu'une bureaucratie de type helvétique continuerait d'en augmenter le poids.
Je l'ai moi-même démontré, hélas, quand j'ai proposé que M. Tony Blair fût élu à la Présidence du spectre politique qui naîtrait fatalement de ce traité informe. Je m'accuse d'avoir feint de doter d'une charpente et de paraître muscler la constitution illusoire négociée avant moi par M. Giscard d'Estaing. En vérité, le caractère ectoplasmique de tout cela était si bien garanti que l'Angleterre avait approuvé cette gesticulation ridicule en se frottant les mains de satisfaction, puisque la subordination des armées européennes au commandement exclusif de l'Amérique même en temps de paix ne se trouvait plus dissimulée, mais dûment inscrite dans les constitutions des Etats membres de l'Union, ce qui vassalisait enfin l'Europe à titre statutaire et à jamais sur la scène internationale. Il se trouve seulement qu'un pays assujetti à l'étranger par les dispositions de sa loi organique n'a pas le rang d'un Etat aux yeux du droit international public. Dès lors, comment contenir indéfiniment la révolte des peuples bernés au vu et au su du monde entier par des dirigeants indignes de leur fonction?
9 - Les vassaux sont des enfants
Sur quels chemins s'engager ? Je n'en vois qu'un, celui d'expliquer aux nations que la conquête de leur souveraineté passe par leurs retrouvailles avec leur maturité politique d'autrefois. Sans la responsabilité de l'âge adulte, qui, par définition, ne trouve de secours qu'en elle-même, la liberté n'est jamais qu'un vain mot. Les peuples vassalisés sont sécurisés pour être retournés au berceau. Quelle protection digne des esclaves, n'est-il pas vrai, de se flanquer d'un tuteur de l'enfance retrouvée! L'OTAN sert de bouclier à des Etats qui se font de leur débilité même le gîte secret de leur identité politique décapitée.
Reprenons le harnais : je suis atterré quand j'entends les dirigeants des peuples européens placés sous le joug doux-amer de l'OTAN soutenir avec l'assurance et la tranquillité d'esprit des nations tombées dans l'asservissement intérieur sans seulement s'en douter que la remise de leur destin entre les mains d'une puissance étrangère leur permet de faire des économies et que l'alourdissement de leurs dépenses militaires ferait inutilement double emploi de s'ajouter aux forces de défense de leur souverain.
Je ne renierai pas mon langage d'autrefois, je le dirai comme je le pense : le terme même de " défense " n'est pas seulement inapproprié, il est entièrement stérile quand il ne dissuade qu'une ombre d'ennemi. Mais puisque nous vivons dans un monde des fantasmagories de la piété politique des démocraties, supposons que les casques des armées du Démon pointent à l'horizon comme les moutons dans la poussière aux yeux de don Quichotte et qu'il faille piquer des deux les flancs de Rossinante pour combattre leur toison, il n'en est pas moins démontré depuis Cervantès que les légions du Mal n'étincellent qu'aux yeux des illuminés de la Liberté. Ma tâche de rescapé de la bataille de Lépante est donc de tenter de délivrer l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne des romans de chevalerie qui leur ont tourné la tête et de les faire rentrer dans l'histoire réelle de ce bas monde - car si ces trois peuples reconquéraient leur autonomie politique et psychique, leur fierté retrouvée deviendrait contagieuse et provoquerait un puissant rassemblement de tout le Vieux Monde autour de Paris, de Berlin, de Rome et de Madrid.
Quelle chance le Vieux Monde a-t-il de sortir de l'étau ? Une seule voie lui demeure ouverte, celle de lier étroitement la Russie à son avenir, non seulement afin de s'assurer une autonomie énergétique planétaire et inattaquable, mais afin de conquérir une étendue territoriale dont la puissance économique demeurera ascensionnelle pour un siècle entier et réduira le pôle anglo-saxon au rang d'un Titan condamné à un lent enlisement face à la montée irrépressible de la Chine, de l'Inde et de l'Amérique du Sud.
Nous ne disposons d'aucun autre chemin que de celui-là, pour échapper à une mise en tutelle inexorable, tellement un Vieux Continent accolé à l'aventure anglo-saxonne ne serait jamais que la mouche du coche d'une planète conduite par d'autres maîtres. La vocation politique suréminente de l'Europe est de démontrer sa capacité de guider l'ascension du futur pôle industriel mondial qui marginalisera l'aigle à deux têtes de Washington et de Londres.
10 - Cinq menaces d'étranglement d'une civilisation
Je mets les Européens en garde contre cinq étouffements de leur avenir qui les ont d'ores et déjà pris à la gorge.
La strangulation culturelle
La première strangulation résulte de l'assujettissement continu et insidieux du Vieux Monde aux modes de penser, de vivre et de chanter du Nouveau Monde, tellement l'usage s'en est si bien établi qu'il paraît installé dans les mœurs et aller de soi. Je constate, néanmoins que la chanson française commence de retrouver les couleurs de notre langue. Un peuple dont l'organe vocal reproduit la voix d'une autre nation est appelé à perdre les vocalises de son âme. Frédéric II avait fini par redonner à son pays la fierté de son identité linguistique face aux disciples de Voltaire; aujourd'hui, le franco-allemand est un idiome de naufragés dans lequel vous pêcherez encore quelques mots germaniques isolés et flottants à la dérive, mais ces îles flottantes se font rares et il vous faut les chercher à la loupe. Puisse la France demeurer un acteur en chair et en os de la langue française, puisse son exemple aider les fils de Siegfried à conjurer l'engloutissement du vocabulaire de Goethe et de Schiller.
La strangulation messianique
La seconde strangulation est liée à la première : quand la presse, la radio et la télévision présentent l'effigie d'un candidat à la Maison Blanche comme celle du sauveur dont la planète entière serait en gésine, il faut que vous sachiez que tout homme d'Etat se sent nécessairement et exclusivement appelé à défendre la puissance, la grandeur et les intérêts politiques et économiques de la nation dont il est devenu le porte-drapeau et que M. Obama ne manquera pas aux devoirs impérieusement attachés à sa charge. L'Europe est en voie d'infantilisation politique accélérée du seul fait qu'elle attend des signes avant-coureurs des grâces qu'un bienfaiteur intronisé par le ciel de la démocratie mondiale voudra bien lui accorder. Mais la liberté ne se demande pas, on ne l'arrache jamais que par la force des mains du maître qui la tient enchaînée à son trône. Les civilisations meurent de l'avoir oublié. En 1450, les habitants de Constantinople assiégée par les Turcs se sont joyeusement rassemblés sur la place centrale de la seconde capitale de la chrétienté : ils voulaient se trouver aux premières loges pour assister au spectacle promis par l'Eglise de l'arrivée de l'armée des anges. L'Europe se trouve d'ores et déjà devant l'Amérique dans l'attente d'un ange de la démocratie.
La gaminerie des vaincus
La troisième strangulation de l'Europe lui fait s'imaginer que les gestionnaires des vassaux seraient des hommes politiques. Vichy gérait un temps vide. Les Gaulois vaincus ne s'étaient-ils pas enhardis à adresser des condoléances ironiques à Néron, qui pleurait sa mère à chaudes larmes parce qu'il avait dû se résigner, la mort dans l'âme, à la faire assassiner sans art et sans finesse par un centurion en raison de l'échec de son naufrage en haute mer, qu'il avait pourtant mis au point avec un grand art de la mécanique. Mais la malheureuse avait échappé au naufrage et regagné la rive à la brasse. Quand les Européens lancent force piques et banderilles à l'Amérique, mais n'osent la remercier ironiquement pour les services rendus depuis 1945, ils ne ressuscitent même pas les Gaulois qui remplaçaient par des plaisanteries de gamins le courage qu'ils avaient égaré en chemin.
La strangulation atomique
La quatrième strangulation de l'Europe politique illustre l'étroite conjonction qui s'impose désormais entre la réflexion sur le politique et la pesée de l'encéphale onirique de l'espèce simiohumaine. Le XXIe siècle est en attente d'une compréhension anthropologique de la nature de la bombe atomique. Comme le Général de Gaulle l'avait compris le premier, l'arme nucléaire n'est pas un canon titanesque, mais une foudre copiée sur l'apocalypse et dont la puissance de dissuasion n'est pas guerrière, mais biblique. Le Vatican a su s'en servir au XIè siècle en frappant Henri IV d'Allemagne et son armée d'une excommunication majeure dont la sottise avait conduit l'empereur à Canossa parce que ses soldats terrorisés par l'enfer avaient rompu les rangs. Mais si, dès le XIè siècle, il avait existé plusieurs " dieux uniques " armés de l'arme de la pulvérisation furibarde de leurs créatures, leurs mythologies confondues se seraient paralysées réciproquement.
Telle est la situation actuelle des peseurs avertis du cerveau simiohumain. Faudra-t-il expliquer aux masses que, depuis 1945, aucun Etat dûment armé du pouvoir mécanique d'exterminer un adversaire encore sans défense n'a osé user de son omnipotence provisoire ? Aujourd'hui, un quarteron de dieux uniques se gardera bien de se faire sauter la cervelle. En revanche, l'arme nucléaire a remplacé et supplanté l'excommunication majeure dans l'ordre du prestige théo-politique. Henri IV n'avait pas de balance à peser la stupidité de son siècle. Fabriquons la balance à peser celle de notre temps.
Sachez que la France de la raison a conquis une lucidité transanimale qui permet à sa diplomatie du sacré simiohumain de comprendre les enjeux anthropologiques de l'arme nucléaire iranienne : elle sait que l'Etat juif dispose depuis longtemps de l'arme atomique dont il fait semblant de se trouver menacé par l'Iran de demain, elle sait que la peur d'une apocalypse illusoire ressortit à une feinte parathéologique destinée à masquer le véritable enjeu anthropologique, celui de conserver l'hégémonie qu'exercent, pour l'instant, les gestionnaires d'une apocalypse irréalisable par nature. La France usera de son avance cérébrale, donc du développement de sa simianthropologie pour imposer au Moyen Orient les solutions cartésiennes, donc de bon sens qu'appelle sa civilisation du "Connais-toi" de demain.
La strangulation du "Connais-toi"
La cinquième strangulation de l'Europe réside dans son refus pur et simple de se poser sérieusement la question de la nature de l'histoire simiohumaine. Pourquoi remplacer la pesée devenue nécessaire du cerveau de l'espèce par des considérations généralissimes et précautionneuses sur les " valeurs " séraphiques de la démocratie ? Certes, la politique est aussi une arme civilisatrice. Mais l'heure est passée où des peuples barbares exterminaient des civilisations supérieures.
La découverte de l'arme de l'apocalypse nous a fait comprendre à la fois que nous ne sommes pas sortis du Moyen-Age et que le moment est venu de nous en évader à l'aide d'une science entièrement nouvelle de l'encéphale simiohumain. Il faut savoir qu'à peine le chimpanzé vocalisé avait-il fait quelques pas hors de la zoologie que le sacré a bondi sur lui comme un fauve et l'a précipité dans la geôle de la Terreur. C'est dire que sans le secours d'une connaissance rationnelle de l'animal épouvanté par ses souterrains, nous deviendrions les otages hébétés des Grégoire VII de l'excommunication majeure du IIIe millénaire.
C'est pourquoi la politique repose désormais sur la capacité des chefs d'Etat de scanner une espèce casquée de ses délires et qui cache ses armes de guerre sous le pieux apparat de ses agenouillements devant sa propre folie. L'homme d'Etat moderne doit donc apprendre à naviguer entre les dévotions et les prosternements des nouveaux apôtres de leur fausse sainteté, car ils dissimulent désormais leurs armes sous l'habillage des Tartuffes de la démocratie. Si votre Président ne portait pas de regard sur l'encéphale des nouveaux empires des cieux qui se sont fait de la religion de la Liberté leur nouvel enfer et leur nouvelle auréole, il serait inapte à répondre à la vocation à laquelle vous l'avez destiné.
11 - Ultime appel
Je lance à l'Europe entière un appel à prendre ses responsabilités morales et politiques face aux futurs témoins de son destin. Le quart de siècle qui se sera écoulé entre la chute du mur de Berlin et le rembarquement des troupes américaines demeurera une tache ineffaçable sur les tablettes de la mémoire du Vieux Continent. Comment, se demanderont les générations à venir, une civilisation fière d'avoir fondé la politique sur la citoyenneté a-t-elle pu, sans autre contrainte que celle de sa vassalisation intérieure, soumettre ses armes et ses drapeaux au sceptre de l'étranger, comment les classes dirigeantes d'une civilisation vieille de vingt-cinq siècle ont-elles pu demeurer honteusement muettes et les yeux clos devant tant d'années d'une servitude lâchement consentie ? Mais dans le même temps, les futurs historiens du génie européen diront que cette longue humiliation aura permis à l'humanité de descendre dans les profondeurs d'un nouveau "Connais-toi" et de resurgir de son tombeau à la lumière d'une intelligence régénérée par l'ordalie de la mort.
Françaises, Français, apprenez que les vraies conversions sont celles de l'intelligence et que les chemins de Damas de la raison sont ceux de la logique cartésienne. Puisse ma conversion au bon sens politique faire de moi un guide modeste, mais méritant de la France. Dans une démocratie mondiale devenue la maison d'Orgon de la planète, je voudrais jouer au bénéfice de la nation le rôle du prince ennemi des faux dévots de Molière.
Dans cet esprit, je lance un solennel appel à l'Allemagne. Je lui dis qu'il n'y a pas de chef d'Etat qui se sache et se veuille dans le rôle du traître à sa nation, mais seulement des hommes à courte vue et qui se trompent de bonne foi sur le long terme. Même Laval ne trahissait pas délibérément la France quand il souhaitait publiquement la victoire de l'Allemagne sur Staline. Moi-même, j'étais plein de bonne volonté. Jamais je n'ai cru trahir la France ; je me suis seulement et lourdement trompé sur l'avenir de la planète, sur l'avenir des puissances montantes, sur l'avenir véritable de l'Europe. Mais les bons sentiments ne font pas les vrais chefs d'Etat. Ce n'est pas à l'empire dominant d'aujourd'hui que l'Europe devra de renaître, mais aux puissances grosses du monde de demain. Je demande à l'Allemagne, à l'Italie, à l'Espagne, à la Hollande, à la Belgique, à la Pologne de sortir de l'OTAN, parce que quarante deux ans après le Général de Gaulle, l'heure des retrouvailles de l'Europe avec sa souveraineté a sonné au beffroi du IIIè millénaire.
14 juillet 2008
Manuel De Diéguez
pagesperso-orange.fr