01/02/2023 basta.media  6min #223382

 Manifestation à Paris à l'appel des Patriotes : «On a mille raisons de se mobiliser» (Video)

Face à la réforme des retraites, le retour de la « joie militante » pour faire des manifestations une fête

Déguisements, jeux de mots, slogans inventifs, musiques ou maquillages : les grandes manifestations contre le recul de l'âge de départ à la retraite voient refleurir la joie de se retrouver et de se faire entendre. Notre reportage en images.

Mobilisation massive

Environ deux millions de personnes ont manifesté dans toute la France ce 31 janvier contre l'allongement de l'âge de départ à la retraite.

© Yann Lévy

Environ deux millions de personnes ont manifesté dans toute la France ce 31 janvier, lors de cette deuxième grande journée de mobilisation contre la réforme des retraites portée par Élisabeth Borne et Emmanuel Macron. Deux millions si l'on retient la moyenne entre les chiffres du ministère de l'Intérieur (1,3 million) et ceux de la CGT (2,8 millions). L'écart entre ces deux sources est le plus fort à Paris, où les organisations syndicales annoncent un demi-million de manifestants et manifestantes, contre seulement 87 000 comptabilisés par la préfecture.

Près de 300 manifestations et rassemblements se sont tenus sur l'ensemble du territoire, avec de très fortes participations dans plusieurs villes moyennes. C'est la plus grosse mobilisation sociale sur les retraites depuis trente ans, y compris lors des grandes et longues grèves de novembre-décembre 1995. Le nombre de grévistes a été important dans l'Éducation nationale, les transports en commun, le secteur de l'énergie, chez les dockers ( voir le détail sur le site Rapports de force). Plusieurs dizaines de lycées ont par ailleurs connu des actions de blocages.

Comment installer le mouvement dans la durée, voir même l'intensifier, sans épuiser manifestants et grévistes ? Telle est la question qui se pose désormais aux animateurs de la contestation sociale. Rendre les cortèges revendicatifs plus festifs, en faire des moments où l'on se rencontre et l'on s'amuse, est peut-être l'un des moyens pour continuer à attirer les foules.

Des collectifs, des artistes, des grévistes ou des citoyens imaginatifs tentent déjà de rompre avec le risque de défilés syndicaux routiniers, et parfois un peu tristes. Et avec la crainte d'une répression débridée et aveugle qui planait sur les participants aux manifestations depuis le mouvement contre la loi Travail puis le celui des Gilets jaunes.

Le photographe Yann Lévy était dans la manifestation parisienne du 31 juillet pour saisir des instants de cette « joie militante » (1).

Zombies
Grimées en zombies pour dénoncer le recul de l'âge de départ à la retraite,  le collectif des Rosies s'est créé en 2019 lors de la précédente tentative de remise en cause du système de retraites par répartition pour dénoncer ses conséquences négatives pour les femmes, déjà maltraitées par le système actuel. Et organise des ateliers de maquillage en plein air.

©Yann Lévy

Bourgeois
Un manifestant s'est déguisé en caricature de bourgeois pour dénoncer les milliardaires et revendiquer qu'ils soient mis à contribution pour le financement des retraites. Pour l'ONG Oxfam,  une taxation du patrimoine des 42 milliardaires français - dont la fortune cumulée atteint 544 milliards d'euros - à hauteur de 2 % suffirait à combler le déficit attendu du système des retraites (12 milliards d'euros en 2027 selon le Conseil d'orientation des retraites).

©Yann Lévy

Inégalités de genre
Les femmes, particulièrement affectées par le projet de réforme de retraite, étaient très nombreuses dans le cortège parisien. Actuellement, une femme perçoit une pension inférieure en moyenne de 30 % à 40 % à celle des hommes. Cette inégalité de genre perdure depuis toutes les précédentes réformes des retraites.

©Yann Lévy

Born to be...
« Un mouvement massif ça donne la pêche aux gens », pense John, qui est postier. « La manifestation, c'est une façon de s'organiser, l'occasion de se rencontrer, d'échanger, de discuter. On se rend compte que si on est nombreux, des choses sont possibles, que l'on peut inverser le rapport de force avec le patronat. Ce n'est pas que la réforme des retraites : l'inflation, les salaires trop bas, on en a marre. » Admirez le jeu de mots. Sa revendication est claire.

©Yann Lévy

Batucada
Emma travaille dans l'Éducation nationale. « Je fais partie d'une batucada. Je joue souvent en manifestation. Je ne sais pas si la musique correspond à ce genre de manifestation où on est là pour revendiquer. Mais créer une ambiance festive, ça aide à se rassembler, faire bloc et se solidariser. »

©Yann Lévy

Cool
« Je viens avec mon fils, le côté joyeux comme aujourd'hui c'est cool, ça ressemble à une grosse fête pour lui », raconte Damien, qui est artiste. « C'est important de pouvoir l'emmener et qu'il découvre ce qu'est manifester, ce que signifie nous faire entendre. » Avec la réforme, les nouvelles générations ne seront pas à la fête. Elles devront travailler jusqu'à 64 ans pour percevoir une pension complète, et cotiser pendant 43 ans ans minimum (donc commencer à travailler à 21 ans pour prendre sa retraite sans baisse de pension).

©Yann Lévy

Margaret Macron
Emmanuel Macron mixé avec Margaret Tatcher, fossoyeuse de l'industrie, des services publics et des mouvements sociaux britanniques dans les années 1980. Le Royaume-Uni est actuellement confronté à une très forte inflation qui pénalise les salariés et les familles modestes. Le pays connaît également un mouvement social de grande ampleur, avec une grève massive ce 1er février.

©Yann Lévy

Yann Lévy (photos) avec Ivan du Roy (texte) et titre emprunté à  Juliette Rousseau

Notes

(1) Du nom du  livre de notre consœur Juliette Rousseau.

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