08/03/2024 infomigrants.net  5min #244421

 France : le Congrès vote l'inscription de l'Ivg dans la Constitution, Macron y voit un «message universel»

Droits des femmes : pourquoi la France inscrit l'avortement dans la Constitution ?

L'IVG est légale en France depuis 1975. Crédit : Agathe Truchon-Bartes, Studio graphique FMM

La France  est devenue en mars le premier pays au monde à inscrire explicitement dans sa Constitution l'interruption volontaire de grossesse (IVG), aussi appelée avortement.

L'IVG, c'est quoi ?

C'est un droit qui permet aux femmes de mettre fin à un début de grossesse, si elles le souhaitent. Elles n'ont besoin de l'accord ni de leur mari, ni d'aucun homme de leur entourage. La pratique de l'avortement est réglementée. Vous ne pouvez pas avorter n'importe quand, ni n'importe comment.

Selon la loi, l'IVG peut être pratiquée jusqu'à la fin de la 14e semaine de grossesse, soit 16 semaines après le début des dernières règles. Elle est réalisée par des médecins professionnels (ou sages-femmes) dans une clinique, un centre de santé ou dans un hôpital.

Si vous décidez d'interrompre votre grossesse, aucun médecin ne peut vous en empêcher. S'ils refusent de la pratiquer, ils ont l'obligation de vous donner les coordonnées d'un autre praticien. Le délit d'entrave - c'est-à-dire vous empêcher d'avorter - est puni de deux ans de prison et 30 000 euros d'amende.

Pourquoi l'IVG est aujourd'hui inscrite dans la Constitution ?

Pour "sacraliser" la loi en quelque sorte, réaffirmer son caractère fondamental, et protéger les femmes. Pour interdire à l'avenir toute remise en cause de cette liberté.

Inscrire l'IVG dans la Constitution est donc une protection en cas de changement de régime politique en France. Si de futurs gouvernements - plus autoritaires - accèdent un jour au pouvoir et souhaitent supprimer le droit à l'avortement, ils devraient batailler juridiquement. Il faudrait que cette demande de suppression de l'IVG soit approuvée par référendum ou par 3/5e des membres du Parlement réunis en Congrès.

En résumé, il est beaucoup plus compliqué de remettre en cause un droit constitutionnel qu'une simple loi.

L'avortement, un long combat

 L'IVG a été légalisée en France en 1975, avec la loi Veil. Cette loi a été promulguée quatre ans après un appel choc via "le manifeste des 343 salopes" où 343 femmes françaises, dont les actrices célèbres Jeanne Moreau et Catherine Deneuve et les écrivaines Simone de Beauvoir, Marguerite Duras et Françoise Sagan, avaient révélé avoir avorté.

En France, le planning familial ou encore le Mouvement de libération des femmes (MLF) font partie de nombreux groupes féministes qui dans les années 1960 ont lutté pour l'égalité sociale (égalité de salaire, droit à un compte bancaire, droit à une éducation égale) et pour obtenir le droit des femmes à disposer de leurs corps comme elles l'entendent.

L'IVG pour les mineures

En France, les jeunes femmes de moins de 18 ans ont le droit de pratiquer l'IVG. Elles n'ont pas besoin de l'accord de leurs parents. Elles peuvent le faire en gardant le secret de l'intervention. En revanche, elles doivent être accompagnées dans cette démarche par une personne majeure de leur choix.

Un avortement, combien ça coûte ?

Pour toutes les femmes (majeures ou mineures), l'avortement et tous les actes associés (consultations, échographies, prises de sang...) sont pris en charge à 100 % par l'Assurance maladie. Il n'y a aucune avance de frais.

Pour les femmes en situation irrégulière, l'accès à l'IVG est également possible si vous bénéficiez de l'AME. Même sans aucune couverture maladie, une prise en charge dans les hôpitaux est possible sans avance de frais.

Depuis une ordonnance du 15 juin 2000 confirmée par la loi du 4 juillet 2001, l'accès à l'IVG n'est subordonné à aucune condition de séjour et de résidence. L'IVG est donc accessible à toutes les femmes, quelle que soit leur situation à l'égard du séjour et leur ancienneté de résidence en France.

L'IVG ailleurs en Europe, un droit fragile

Plusieurs pays européens autorisent l'IVG jusqu'à 12 semaines de grossesse sans conditions, comme au Luxembourg, en Finlande ou encore à Chypre. Jusqu'à 14 semaines, sans conditions, en Espagne et en France. Aux Pays-Bas, l'IVG est même accessible jusqu'à la 24e semaine de grossesse.

D'autres pays, en revanche, sont moins progressistes, comme l'Irlande, où l'avortement est légal jusqu'à 12 semaines de grossesse en cas de "risque pour la vie" ou de "grave danger pour la santé". En Italie, les autorités autorisent l'avortement jusqu'à 12 semaines de grossesse mais, en réalité, il est quasiment impossible d'y avoir accès.

Au Portugal ou en Suisse, le délai est de 10 semaines.

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En Allemagne, l'accès à l'IVG fait encore débat. Si l'avortement n'est pas pénalisé jusqu'à 12 semaines de grossesse, une consultation reste obligatoire dans un centre agréé avant d'interrompre sa grossesse. L'objectif de cet entretien est "d'inciter la femme à poursuivre sa grossesse", sauf exceptions (mise en danger de la vie de la mère, viol...). L'IVG n'est pas remboursée dans le pays. Jusqu'en 2022, un médecin qui donnait des informations sur l'IVG sur son site internet pouvait être passible de poursuites pénales.

À Malte, l'IVG a été interdite jusqu'en 2023. Dans ce pays catholique particulièrement conservateur, toute femme qui interrompait sa grossesse encourait une peine de 18 mois à 3 ans d'emprisonnement. Les médecins risquaient de leur côté 4 ans de prison et l'interdiction d'exercer. Depuis juin 2023, les femmes peuvent désormais avorter uniquement si leur vie est en danger et que le fœtus n'est pas viable. Une législation qui demeure extrêmement restrictive.

En Pologne aussi, la loi sur l'avortement est restrictive. Depuis 2021, elle interdit l'avortement en cas de grave malformation du fœtus, même mortelle. Ainsi, elle rend l'IVG quasiment illégal, excepté dans les cas de viol, d'inceste ou de danger pour la vie de la mère.

En Hongrie, un récent décret impose d'écouter battre le cœur du fœtus.

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